médaille de chevalier de la Légion d'honneur de 1802-1814

création : 28 octobre 2018 - dernière modification : 8 octobre 2020

 

médaille de chevalier de la Légion d'honneur de 1852-1870

 

* * *
*

 
le père :
le fils :
 
 

Gally-Passebosc
Pierre Gally-Passebosc
François Eugène Oscar Gally-Passebosc
Généalogie Gally-Passebosc
Les sources

 

*
* * *

* * * * * * * * * *

Dans le vieux village de Pompey se trouve la rue Gally-Passebosc, mais qui était cette personne ? En réalité il s'agit de deux hommes, le père et le fils, mais le destin tragique du dernier est certainement la conclusion de cette reconnaissance.

 

la rue Gally-Passebosc à Pompey

La rue béquille rebaptisée rue Gally-Passebosc.
(Carte postale - Collection Jean-Luc GOURET)

 

La famille Gally-Passebosc est originaire de Citou dans l'Aude, c'est une longue lignée de meunier qui possédait un moulin dans le Minervois.(1)

 

* * * * * * * * * *

 

Le père Pierre Gally-Passebosc

 

Il est né le 14 novembre 1787 à Citou. Il n'est pas tenté par la meunerie, il entre dans l'armée le 8 février 1807 en qualité de fusilier grenadier au régiment de fusiliers grenadiers et fait la campagne de Prusse et de Pologne. En 1808 il participe à la campagne d'Espagne où il est blessé par un coup de feu le 27 juin.
Le 11 avril 1809 il passe au 1er régiment de conscrits grenadiers qui devient le 3ème régiment de tirailleurs et fait la campagne d'Autriche.
En 1813 il est des campagnes d'Espagne et de Saxe. Le 6 avril 1813 il est nommé chevalier de la Légion d'honneur, n° 34763. Le 22 mai 1813, participant à la bataille de Bautzen en Prusse, il est blessé d'un coup de « bombe » à la jambe droite. En 1814 il fait la campagne de France.
Le 30 juin 1814 il passe au 12ème régiment de ligne mais il est congédié le même jour. Le 22 mai 1815 il est rappelé et entre au 4ème régiment de grenadiers. En 1815 il fait la campagne de Belgique et deux jours avant la bataille de Waterloo il est blessé d'une balle à la cuisse droite à la bataille de Fleurus, située à 30 kilomètres plus au sud du lieu de la bataille décisive.
Le 21 novembre 1815 il passe, en qualité de sergent, au 6ème régiment d'infanterie de la Garde Royale.(2)

La suite de sa carrière militaire le fait s'arrêter à Nancy. Il est capitaine au 65ème régiment d'infanterie de ligne. Il y rencontre Eugénie Joséphine Nicole Adélaïde Méget qui est rentière et demeure à Pompey. Elle est née à Maestrich aux Pays-Bas en 1811. Son père, né en 1777 à Neufchâteau (Vosges), était chef de bataillon dans l'armée Française, il périt noyé dans la rivière Bobr lors de la campagne d'Allemagne en 1813.
Selon les actes d'état-civil, Pierre demeure au n°20 de la rue Stanislas. Un petit mystère se pose tout de même et qui méritera une étude plus approfondie, en effet les registres de recensements annuels de la ville de Nancy ne contiennent pas de Pierre Gally-Passebosc à cette adresse.(3)

Puis vient le grand jour de fête, Pierre et Eugénie convolent en juste noce le 23 septembre 1835 à Pompey. Nous ne serons pas surpris en découvrant que les témoins du marié sont des militaires, le colonel Joseph Vincent le Chevalier d'Arnaud et le lieutenant colonel Joseph Marc Antoine Siméon tous deux du 65ème régiment d'infanterie de ligne, le premier commandeur de la Légion d'honneur et officier de l'ordre de Léopold (belge), le second officier de la Légion d'honneur. Le maire de Pompey, François Didier Maguin ainsi que Joseph Nicolas Cabocel, de la même commune, sont également témoins.
Le couple réside à Nancy, toujours au n° 20.
Le 15 juin 1836 la famille s'agrandit avec la naissance de François Eugène Oscar. Les deux témoins de cette déclaration de naissance sont encore un fois militaires, l’un est chef de bataillon au 65ème régiment de ligne, officier de la Légion d’honneur et chevalier de Saint-Louis, le second est capitaine d’habillement au même régiment.

Ils s'établissent enfin à Pompey, mais la santé de la maman est fragile, elle y décède quelques mois plus tard le 12 février 1837.

Pierre élève donc seul son fils et avec, à n'en pas douter, une discipline toute militaire. En 1842 il achète une vigne à Pompey. En 1845 alors qu'il est en retraite de l'armée, ainsi que les années suivantes, il fait beaucoup d'autres acquisitions dont une maison qui se situe rue Haute et plus d'un hectare de vignes (Voir plus ).(4)

Acquisitions de Pierre GALLY-PASSEBOSC à Pompey

Portion du territoire de Pompey
En rouge figurent les différentes acquisitions de Pierre Gally-Passebosc

 

Suite aux élections du 12 juillet 1846, Pierre entre au conseil municipal de Pompey. Il est réélu conseiller aux élections du 11 août 1848, et avec 6 voix sur 10 au second tour il est élu adjoint du maire Didier-François Maguin.(5)
La même année il met en location une ferme, dont il est propriétaire, sise à Tarquimpol près de Dieuze. Elle est composée d'une maison d'habitation et d'exploitation, de 29 hectares 55 ares de terres, 6 hectares de prés et 75 ares de jardins et chènevières.(6)

Il décède à son domicile à 14 heures trente à Pompey le samedi 4 avril 1857, il a 69 ans. Le décès est déclaré par un de ses amis, le capitaine en retraite Jean Pierre Diéderichs domicilié également à Pompey, ainsi que son neveu Romain Espallac, fabriquant de broderie et demeurant à Nancy.

Son fils unique François étant militaire également et ne demeurant plus à Pompey, tous ses biens seront vendus en 1859.

haut de page

* * * * * * * * * *

 

Le fils François Eugène Oscar Gally-Passebosc

 

Il est né à 11 heures du matin le vendredi 15 juin 1836, à Nancy au domicile de ses parents sis au n°20 de la rue Stanislas.

Ils demeurent quelques temps dans ce logement pour enfin venir s'établir à Pompey où décède malheureusement sa mère l'année suivante.

Il fréquente les bancs de l'école de Pompey. Les deux salles de classe, filles et garçons, se trouvent alors dans la maison commune située rue de Nancy. Fait du hasard ? la rue perpendiculaire, presque en face de cette bâtisse portera justement le nom de Gally-Passebosc, en mémoire de cet écolier devenu héros de la nation. Puis il poursuit ses études à Nancy.
Le 9 novembre 1854 il entre à l'école de Saint-Cyr dans la 38ème promotion, la promotion Crimée, matricule 7384. Il y est très mal noté : "Mauvaise conduite, tenue négligée, d'une légèreté qui lui nuit beaucoup ..." et pourtant plus tard on écrira "Magnifique soldat dont l'âge mûr démentit si curieusement les notes accordées par ses premiers chefs ..." . Le 1er octobre 1856 il sort 402ème sur 416 de cette école(7), il est alors sous-lieutenant d'infanterie de marine.
Le 1er janvier 1857 il entre au 2ème régiment d'infanterie de marine, il est promu lieutenant le 19 septembre 1859 et capitaine le 27 décembre 1862.

carte du Annam

Le 1er janvier 1863 il est à la 33ème compagnie du 3ème régiment d'infanterie de marine.
Il est envoyé en Cochinchine. L'Annam est occupé par les français. Début 1863, l'amiral de la Grandière, arrivé à Saïgon le 28 mars 1863, prend officiellement les fonctions de gouverneur et de commandant en chef le 1er mai. Le roi Tu-Duc, par les voies officielles et l'envoi de ses émissaires à Paris, rediscute longuement les accords de paix et réussi à récupérer la quasi totalité de son territoire. Cela n'est pas suffisant pour les annamites, des rassemblements séditieux se forment entraînant des arrestations et des exécutions, cependant plusieurs poches de rébellions subsistent. Ils construisent des fortins dans les plaines. Les militaires français des troupes de marine, après plusieurs batailles, les détruisent.
En 1866 une nouvelle révolte a lieu dans la plaine des Joncs, le colonel H. de Poyen nous raconte la suite: « Elle eu lieu cette fois dans la plaine des Joncs, que les Annamites considéraient comme cliquer pour un supplément d'information . Au centre de cette vaste plaine, sur un plateau sablonneux, élevé par exception à 1 ou 2 mètres au-dessus des eaux, s'élevait le village de Tap-Muoy avec une forte citadelle où résidait le chef des bandes insoumises, Thien-Ho. Trois voies de communication, ayant en moyenne plus de 50 centimètres de profondeur d'eau et de vase, servaient de routes pour relier Tap-Muoy à l'intérieur du pays. Ces trois routes étaient couvertes, chacune, par plusieurs forts palissadés et armés de pierriers. Les rebelles réfugiés dans ce repaire exerçaient des déprédations continuelles ; c'est pour y mettre un terme que l'amiral de la Grandière décida d'envoyer une expédition contre ces pillards. Trois petites colonnes distinctes furent organisées pour marcher sur Tap-Muoy par les trois routes que nous avons

signalées et commencèrent leur mouvement dans la matinée du 14 avril 1866. La colonne de droite, dite du Vaïco, commandée par le capitaine d'infanterie de marine Gally-Passebosc, comprenait 30 hommes d'infanterie de marine, 30 hommes de la compagnie indigène, 45 miliciens annamites et 25 marins de la Fusée, au total 130 hommes ; la colonne du centre, dite d’Apply, commandée par le chef de bataillon d’infanterie de marine Derôme, comprenait 43 hommes d’infanterie de marine et 82 miliciens, au total 125 hommes ; la colonne de gauche, dite de Can-Lo, commandée par le capitaine d'infanterie de marine Boubé, comprenait 28 hommes d’infanterie de marine, 33 hommes de la compagnie indigène, 60 miliciens et 4 marins dont un quartier-maître, qui servaient un obusier de montagne, au total 125 hommes. On voit que les trois colonnes étaient d'égale force et que l’artillerie de la marine n’y était pas représentée. Le 15 avril chacune des trois colonnes enlève les forts les plus avancés qu’elle rencontre sur sa route et l’ennemi se trouve refoulé dans les trois forts de Ob-Viep, Dong-Tien et Dong-Ta, les plus rapprochés de Thap-Muoy et qui en formaient d'ailleurs les plus fortes défenses.
....La marche en avant fut continuée le 16 ; toutefois la colonne de gauche ayant trouvé une route impraticable dut s’arrêter et maintenir sa position ; les deux autres colonnes purent avancer avec les plus grandes difficultés, au bivouac les hommes étaient dans l'eau - presque jusqu'à la ceinture -. La colonne du centre arriva dans l'après-midi devant le fort de Dong-Tien, défendu par 250 Annamites et 40 pierriers. Le quan qui marchait en tête avec les 82 miliciens tenta de l’enlever sans attendre le détachement français, mais une grêle de mitraille atteignit en peu de temps le tiers de ses hommes et il fut contraint de se replier. L'attaque fut renouvelée le 17 avec toute la troupe.
....A ce même moment, la colonne de droite arrivait devant le fort de Dong-Ta, défendu par 300 Annamites sous les ordres directs de Tien-Ho et muni de 45 petites pièces. Il était 10 heures 30 du matin et la chaleur était déjà accablante ; néanmoins le capitaine Gally-Passebosc, entendant le canon de Dong-Tien aux prises avec la colonne du centre, fait entourer le fort de trois côtés et ordonne l’attaque immédiate ; sur deux côtés l’eau est si profonde qu'on est obligé de faire pendre les gibernes au cou des soldats. La résistance est énergique, nos troupes s’avancent à découvert à 30 mètres des remparts malgré la vivacité du feu que les Annamites dirigent surtout sur les officiers et sur les soldats européens ; pendant qu'elles soutiennent ce feu avec une remarquable ténacité, les hommes de la compagnie indigène, sous l’impulsion du sous-lieutenant Rouquette, escaladent le fort par le bastion de droite. Dès lors l’ennemi, qui a déjà d’ailleurs subi de grandes pertes, ne songe plus qu’à fuir et s'échappe dans diverses directions, à travers les marais où il est impossible de le poursuivre. Ce hardi coup de main détermina l’évacuation de Dong-Tien et de Thap-Muoy, et ces deux forts furent détruits et brûlés le lendemain 18 avril, le premier par le commandant Derôme, le second par le capitaine Gally.
....Le 19, le but de l’expédition étant complètement atteint, ces deux colonnes rebroussèrent chemin ; la colonne de gauche, informée de ces résultats, se mit à son tour en route le 21. Nous avons eu, pendant cette affaire de quatre jours, 8 morts et 39 blessés. Le fort de Ob-Viep, que la colonne de gauche n’avait pu atteindre, fut à son tour détruit le 25 par une colonne de miliciens envoyée spécialement à cet effet ; c'était le dernier rempart des rebelles de la plaine des Joncs.
....Ce succès était surtout important, parce qu'il démontrait que les repaires les plus retirés de la Cochinchine n’étaient pas à l’abri de nos coups; il dut frapper profondément les hauts dignitaires de la cour de Hué, car le grand ministre Phan-Than-Giang, qui était alors en tournée d'inspection dans la province de Vinh-Long, crut devoir venir féliciter le Gouverneur de la Cochinchine au sujet de cette victoire. »(8)
A la suite de ces événements François Gally-Passebosc est promu chef de bataillon le 23 juin 1866.

- haut de page

Deux ans plus tard Le journal de La Meurthe et des Vosges du dimanche 19 janvier 1868 nous informe :

..- M. le chef de bataillon Gally-Passebosc, du 4° d'infanterie de marine, est parti avant-hier au soir, de Toulon, par le train express, afin d'aller s'embarquer à Marseille sur le paquebot à vapeur le Saïd, qui a dû appareiller pour Alexandrie, hier à deux heures de l'après-midi.
..Cet officier va remplir une très belle mission ; il est envoyé dans la mer Rouge pour suivre les opérations de l'armée anglaise en Abyssinie, en ayant le titre de commissaire militaire du gouvernement français attaché à l'état-major général du commandant en chef des troupes britanniques.
..Le commandant Gally-Passebosc est accompagné de deux soldats qu'il a choisis parmi les plus braves et les plus intelligents de son régiment.
..L'Abyssinie est un pays neuf où l'on peut être exposé à des surprises de tous genres, mais il est très douteux qu'il advienne jamais dans ces contrées peu connues un fait aussi extraordinaire que celui qui arriva au commandant Passebosc dans une expédition au haut Sénégal.
..Pendant que la colonne de cet officier était à la poursuite d'une tribu de nègres maraudeurs, elle fut littéralement enveloppée par des épais nuages d'abeilles, et il y en avait une si prodigieuse quantité, qu'on se trouva plongé dans la plus profonde obscurité ; il fallut mettre le feu aux herbes, et incendier plusieurs lieues de pays pour se sortir de ce guêpier, dont on se débarrassa en emportant des marques cuisantes.
..Le caractère entreprenant et aventureux de ce jeune officier supérieur, qui possède en même temps un talent remarquable pour les études topographiques, le désignait en quelque sorte au choix de S. Exc. M. l'amiral-ministre de la marine.

Il est nommé chevalier de la Légion d'honneur par décret du 30 décembre 1868.(2)

Au 1er janvier 1869 il est au 4ème régiment d'infanterie de marine à Toulon.
Il combat en France pendant la guerre franco-prussienne de 1870.
Il est promu lieutenant-colonel le 24 janvier 1871.

 

portrait du colonel Gally-Passebosc

Portrait du colonel Gally-Passebosc paru dans Le Courrier Illustré de la Nouvelle-Calédonie


Le 1er janvier 1872 il est au 3ème régiment d'infanterie de marine à Rochefort.
Le 1er janvier 1874, il est hors-cadre au Sénégal et commandant d'un bataillon de tirailleurs sénégalais.
Le 1er janvier 1875, il prend ses fonctions au 1er régiment d'infanterie de marine à Cherbourg.
Par un décret du 19 juin 1875 il devient le plus jeune colonel de sa génération.(7)

 

carte de la Nouvelle-Calédonie

source : gallica.bnf.fr

 

Un décret du 22 juin 1875 le nomme, à compter du 1er janvier 1876, commandant militaire à la Nouvelle-Calédonie, colonie française depuis 1853.
Il s'intéresse aux mœurs des locaux et apprend leur langue.
Voici ce qu'en disait Henri Rivière : « c'est un colonel de quarante ans à peine, resté sous-lieutenant par la gaieté de l'esprit et la vivacité des allures. Il est très grand, avec un front bombé .aux .sourcils fuyant

légèrement en arrière, ce qui est l'indice d'une ironie prompte et facile, l'œil clair, une moustache noire qu'il tortille par la pointe en ses instants de réflexion, le menton résolu, asseyant bien le visage. Cette verve prime-sautière et légère se concentre à ses heures. Le colonel est un érudit et un studieux. Sa lampe veille souvent la nuit. Il a refait ses humanité pendant ses loisirs de campagne, et, en soldat aventureux qu'il est, il annote Montluc. Ce caractère gai et hardi a naturellement l'insouciance du danger. Il ne croit pas à celui qui se cache perfidement dans l'ombre et, tout à ses instincts de bravoure téméraire, va droit à celui qu'il recherche et qui l'attire en plein soleil ».(9)
Il s'oppose au directeur du bagne qui, tout en manifestant une rigueur excessive envers les détenus, intervient sans état d'âme dans la délimitation et la distribution des propriétés, il parvient à le faire remplacer.

Au début de l'année 1877 il pense à ses vieux jours. Il correspond avec le conseil municipal de Pompey afin d'obtenir une concession perpétuelle dans le cimetière de cette commune. Dans sa séance du 10 mai 1877, le conseil lui concède la place demandée qui aura une surface de deux mètres carrés, suivant le tarif fixé par la délibération du 12 avril 1848.(10)

Par un décret du 27 avril 1878, sa période de séjour réglementaire à la Nouvelle-Calédonie va se terminer et il sera remplacé par Alexandre Frédéric Outré, colonel au 3ème régiment d'infanterie de marine.(11)


Le colonel François Gally-Passebosc

Le Colonel Gally-Passebosc
CH. LEMIRE -- Nouvelle-Calédonie(7)

Mais depuis le début de l'année, certaines tribus canaques se révoltent contre les européens. Le 4 avril 1878 il est en route vers Boulouparis où avaient eu lieu de nombreux massacres. Le colonel arrive sur la commune de La Foa, dans la plaine de Naïna. Un éclaireur lui signale la présence des insurgés. En avril 1880, Le journal de La Meurthe et des Vosges reprend dans ses colonnes la page consacrée aux derniers instants du colonel Gally-Passebosc que le capitaine de vaisseau Rivière publie dans son livre Souvenirs. de. la Nouvelle-Calédonie :
........« - Le colonel voulait voir si l'ennemi n'avait pas coupé le télégraphe. On s'engagea dans un chemin étroit serpentant au milieu d'une végétation touffue d'arbustes et de lianes, et si étroit que Gladiateur, le cheval du colonel, en tenait la largeur. Le télégraphe était coupé, on s'arrêta pour le réparer.
..Le colonel avait armé comme éclaireurs quelques libérés concessionnaires qui montaient bien à cheval et connaissaient la brousse.
..Ces hommes étaient en avant. Tout à coup, l'un d'eux, très intelligent et très hardi, Châtenet, accourut et annonça les canaques.
..Les soldats se levèrent précipitamment. Le colonel cria :
..- En avant !
..- Mais, à peine avait-il crié et fait un pas, que deux coups de feu retentirent. Ils étaient tirés de si près qu'on vit la fumée sortir du buisson. Quelques-uns prétendent même avoir aperçu le fusil.
..-Bien touché ! fit alors, d'une voix forte, le colonel.
..- C'était quand même, la parole du soldat pour le succès. Gueitte, qui était tout près, s'y méprit, ainsi qu'à l'accent.
..- Ah ! dit-il mon colonel, vous les avez bien touchés.
..- Non, mon pauvre Gueitte, c'est moi qui suis bien touché.

Le colonel Gally-Passebosc touché par des coups de feu

Le colonel Gally-Passebosc touché par des coups de feu.
Gravure de J. Férat(9)


..La voix subitement s'était affaiblie. Cependant le colonel descendit seul de cheval. Il resta un instant debout, porta les mains à ses flancs, et s'affaissa sur le sol. Le capitaine Boulle, en ce moment, faisait tirer au juger, dans la brousse. Plusieurs décharges se succédèrent. Les Canalas s'en étaient accroupis de crainte. On en lança quelques-uns dans les buissons, on tenta d'y pénétrer soi-même. Ce fut inutile, on ne découvrit aucun Canaque.
..Alors, avec des branches d'arbres et du feuillage, on fit un brancard et on y plaça le blessé. Il souffrait tant qu'il dit à Boulle :
..- Laissez-moi mourir là, mon ami, je souffre trop. Et vous, marchez sur Bouloupari.
..Le capitaine feignit de ne pas entendre. Le colonel, c'est le drapeau, c'est l'âme, c'est le père du régiment. On ne l'abandonne pas, pour que les sauvages le mutilent et se fassent des trophées de son cadavre. On l'emporta donc, on le porta plutôt, doucement, à petits pas. De cinq minutes en cinq minutes, on s'arrêtait. Il ne se plaignait plus que par l'expression de souffrance de son visage. On refit ainsi dix kilomètres.
..Ils arrivèrent à la ferme de la Fouwari. On le coucha et le docteur Duliscouet lui prodigua, mais sans espérance de le sauver, ses soins les meilleurs et les plus dévoués(9) », car le colonel avait reçu deux coups de feu, l'un a percé la cuisse, l'autre a traversé le ventre de part en part.

Henri Rivière poursuit le récit : « L'après-midi et la soirée de la veille s'étaient écoulés pour lui dans d'horribles souffrances, et, quand il avait quelque répit, c’était la tristesse qui le prenait. C’est qu’il se sentait mourir, tout vivant, en pleine possession de son passé et de l’avenir, si cet avenir n’eût dû lui échapper. Ce colonel de quarante ans avait derrière lui une belle carrière, et tant de jours heureux d’activité et de gloire eussent été devant lui, qu’il entrevoyait encore dans sa pensée! La mort violente qui n’est pas immédiate a cette amertume. Il est trop tôt pour ceux qui partent, jusqu’à ce que les prenne une sérénité haute ou qu’ils se résignent. Ce moment vint pour le colonel. Il fit part à Duliscouet de ses dernières volontés, serra la main de ceux qui l'entouraient. L’agonie commença ensuite, très douce. Le cerveau ne percevait plus la souffrance, n’avait plus qu’une vie automatique. Des souvenirs incohérents, des images anciennes le sollicitaient, s’en détachaient par la parole ou flottaient devant ses yeux, qui s’animaient. Mais le tout était souriant, presque gai. Le colonel prononça le nom d’un officier qui était souvent son commensal, dont il s’amusait, lui fît bon accueil. Deux fois aussi il dit : «En avant!» comme il avait fait dans la journée. A deux heures du matin, il rendait le dernier soupir.

Nous entrâmes dans la ferme par la porte à deux battants, à barreaux de bois et peinte en vert, qui donne sur la route. De chaque côté, il y a des massifs de cactus, de bananiers et d’eucalyptus, où des volières habitées de cagous et de poules cochinchinoises s’abritent des rayons du soleil. Au delà d’un troisième massif en triangle avec les premiers, qui force le chemin d’entrée à se bifurquer pour se reprendre en une allée sablée jusqu’à l’habitation, il y a une jolie fontaine dont l’eau tombe dans une vasque de pierre. Le capitaine Boulle avait fait mettre les troupes sous les armes en face de la maison du directeur.
Cette maison, très simple, est un rectangle long, à murs en torchis et blanchis à la chaux, à toit de chaume, avec une véranda ou plutôt un auvent, également en chaume, qui en fait le tour, soutenu par de légers poteaux qui s’appuient au sol. Elle a trois portes à deux battants, à panneaux pleins, peintes en vert, qui s’ouvrent sur la véranda. C’est la façade. Au fond des pièces, à l’opposé, sont les fenêtres.
Dans l’appartement du milieu était le corps du colonel. On l’avait placé sur le lit où il était mort, étroitement cousu dans un drap. Le visage à angles aigus, les membres rigides, se dessinaient sous la toile. Ainsi étendu, les bras au corps, les jambes réunies, il me parut très grand. On le mit dans sa bière en présence des officiers, puis le cercueil fut déposé dans le break, qui partit avec un détachement pour Teremba. Le colonel, à son départ, fut salué par les troupes. Le lendemain, il était enterré à Teremba, au pied du mât de pavillon. Le drapeau qu’il avait servi et aimé flottait sur lui. »

 

la bière du colonel Galy-Passebosc

gravure de J. Férat(9)

 

..- On nous écrit de Pompey, le 2 août 1878 :
..Hier, à 10 heures du matin, un service funèbre a été célébré dans l'église de Pompey en mémoire du colonel Gally-Passebosc.
..Les habitants de cette commune ont tenu à rendre ce dernier et patriotique hommage à leur sympathique concitoyen dont la brillante carrière a été si tragiquement et si prématurément tranchée.
..Des militaires de toutes les armes, des amis et d'anciens condisciples du colonel, venus des environs, s'étaient joints à la population de Pompey pour assister à cette touchante cérémonie.
(Le journal de la Meurthe et des Vosges du samedi 3 août 1878)

 

..L'administration de Nouvelle-Calédonie va faire élever à la Foa, à l'endroit où fut tué le colonel Gally-Passboc (de Pompey), un monument pour remplacer la colonne en bois qui y avait été édifiée. Ce monument se composerait d'une colonne tronquée, en marbre, montée sur un piédestal en maçonnerie.
(Le journal de la Meurthe et des Vosges du samedi 27 juin 1885)

 

Monument de La Foa à la mémoire du colonel Gally-Passebosc

photographie : - - (Nouvelle-Calédonie)
(cliquer pour agrandir l'image)

La caserne militaire de Nouméa a pris le nom de caserne Gally-Passebosc.

Entre 1899 et 1901, la rue Béquille, dans le vieux village de Pompey, est rebaptisée rue Gally-Passebosc.

haut de page

 

* * * * * * * * * *

Généalogie

Gally-Passebosc (12)

généalogie de la famille de THIBALLIER

(Déplacez la souris sur l'image pour survoler l'arbre généalogique.)

* * * * * * * * * *

haut de page

Sources :

(1) https://www.midilibre.fr/2012/04/25/hommage-au-colonel-gally-passebosc
(2) Archives nationales (France) - base Leonore
(3) Archives municipales de Nancy
(4) Archives départementales de Meurthe-et-Moselle à Nancy
(5) Archives communales de Pompey - cote 1 D 4
(6) www.kiosque-lorrain.fr - L'ESPÉRANCE, COURRIER DE NANCY du mardi 6 juillet 1852
(7) archives de la Saint-Cyrienne - https://www.saint-cyr.org
(8) Notice sur l'artillerie de la marine en Cochinchine par le colonel H. DE POYEN, imprimerie nationale
.... 1863 - Gallica
(9) Souvenirs de la Nouvelle-Calédonie par Henri Rivière
....... 293 pages, édition Calmann Lévy, 1881 - Gallica
(10) Archives communales de Pompey - cote 1 D 10
(11) Journal Les Antilles du 1er juin 1878 - Gallica
(12) Les informations généalogiques proviennent pour partie de geneanet.org-arbre de Yvette PERIMON

http://ecole.nav.traditions.free.fr/infanterie1856.htm

haut de page

Blason de Pompey permettant le retour à la page d'accueil