Charles Antoine CLAUSSE

 

Norroy-les-Pont-à-Mousson

Carte postale de Norroy-les-Pont-à-Mousson
(Collection ©Jean-Luc GOURET)

Charles Antoine Clausse est né dans le département de Meurthe-et-Moselle, le 29 novembre 1886, rue de l'abreuvoir à Norroy-lès-Pont-à-Mousson (voir sa généalogie) de Alexandre Auguste CLAUSSE et de Françoise Charlotte SIBILLE.
Alors qu'il n'a que quatre ans, son père décède le 24 octobre 1890 à Norroy. Sa mère Françoise se remarie avec Emile VUATHIER, propriétaire viticole à Norroy. Ils vont tous travailler dans les vignes.

En 1903 Charles Antoine entre comme commis (il est commissionné le 14 juin 1912 à cette Compagnie) à la Compagnie des chemins de fer de l'Est.

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Charles Antoine militaire
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Le 26 novembre 1912, il épouse Marie Camille ROBIN à Brin-sur-Seille, village natale de la mariée.

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Marie Camille et Charles Antoine.
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En 1914 ils habitent Pont-à-Mousson au n°63 de la rue Ney. Depuis leur fenêtre ils peuvent observer les combats du Bois-le-Prêtre.

En 1921, le recensement de Pont-à-Mousson nous apprend que Charles, sa femme et ses deux enfants, demeure route de Procheville. Il occupe un poste d'employé au chemin de fer de l'Est.

 

 

 

Entre fin 1921 et début 1922, Charles est nommé chef de canton dans le secteur ferroviaire de Pompey. Ils habitent rue de Metz à Pompey au n° 29 dit maison de Saint-Euchaire.

Il participe à la vie communale en faisant partie du conseil municipal. En mai 1941 il est reconduit dans ses fonctions de conseiller.

 

La maison saint-Euchaire
(collection ©Munier&Clausse)

maison de Saint-Euchaire

 

Alexandre CLAUSSE

Alexandre CLAUSSE

Ils auront 4 enfants :
Alexandre (1914), Yvonne (1920), Jean (1923) et Suzanne (1924)

(collection ©Munier&Clausse)

la famille CLAUSSE

Charles Antoine Clausse et Marie Camille
Yvonne, Suzanne et Jean

 

Le 11 octobre 1943, ils quittent la maison de Saint-Euchaire qu'ils occupaient depuis près de 22 ans, pour emménager au 2ème étage du n°67 de la rue de Metz à Pompey.

Il y décède à l'âge de 63 ans le 25 janvier 1949.

(collection ©Munier&Clausse)

l'appartement du 67 rue de Metz à Pompey

 

A l'aide de feuilles de récupération, Charles Antoine a rédigé un journal d'août 1939 à mars 1947, où jour après jour il témoigne des moments douloureux de cette période afin de montrer à son fils Alexandre, à son retour de guerre, ce qu'il s'est passé à Pompey durant son absence.

70 ans après, les membres de sa famille ont souhaité lui rendre hommage en diffusant son témoignage, utile aux générations futures pour mieux connaître cette période troublée et douloureuse de notre histoire et afin d'en perpétuer la mémoire.
Merci à:
Sa belle-fille Marie-Louise Henry,
Ses petits-enfants Noëlle, Hélène, Elisabeth et Marie-Danièle Munier, Colette, Jacques, Patrick et Marie-Claude Laurent,
Ses arrière-petits-enfants Brigitte et Jean-Yves Clausse et leur mère Claudine Rouyer,
Son arrière-petit-neveu François Iung.

 

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CALENDRIER

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- 1939 -

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AOUT 1939

 

Le 24 août 1939,
à 6h00, mobilisation des échelons 2, 3 et 4 (Alexandre avait le n° 3) le 26 août à 15h00 échelons 1, 5 et 6.

1ère page du journal de Charles Antoine CLAUSSE

 


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SEPTEMBRE 1939


Le 1er septembre 1939,
à 13h00, bruits de la Pologne attaquée à 3h00 et de mobilisation générale pour le lendemain en France.
A 16h00, affichage de la mobilisation générale, le premier jour est le 2 septembre à 0h00, un samedi.

Le 3 septembre 1939,
vers 15h00, bruit que l'Angleterre se déclare en état de guerre avec l'Allemagne et que la France attend encore quelques heures.
J'ai été à Norroy le 3 après-midi ; le village est plein de réfugiés venus du côté de Saint-Avold et il en passait encore hier dans des wagons couverts ou tombereaux, c'est bien triste.
A 13h00, l’on me dit que le premier communiqué signale que nous avons avancé et qu’il y a déjà un soldat de Pompey blessé (ce n’était pas vrai).
Je crois que l'Italie va faire comme en 1914, abandonner son alliée l'Allemagne. Tout le monde a espoir qu'elle ne marchera pas contre nous mais la plupart des pays proclament leur neutralité. Presque tout le monde est occupé à la construction d'abris ; il y en a qui font des trous dans leurs jardins. Comme en 1914, il court des bruits incroyables, par exemple la prise de Sarrebruck, la destruction de Strasbourg, de grands combats d'avions au-dessus de Morhange (20 avions boches descendus et 7 français).

Le 4 septembre 1939,
on dit que l'Angleterre s'est prononcée pour la guerre la veille à 11h00 et la France à 17h00 et c'est officiel dans la soirée. Bruit de torpillage de l'Athénia avec 1400 victimes ; le 4 la nouvelle est confirmée mais presque pas de victimes.

Le 5 septembre 1939,
vers 23h45, j'entends un coup de canon, c'est le premier pour moi cette fois-ci, et un peu après, le 6, les sirènes et le canon, première alerte qui se termine vers 3h00. Nous n’avons pas été bombardés et je n’ai entendu qu’un seul avion.
Les journaux du 5 publient les deux premiers communiqués datés du 4 septembre. Comme en 1914-18, il y en aura 2 par jour.

Le 7 septembre 1939,
au matin, on raconte que les Sociaux Démocrates allemands s'agitent, qu'ils vont descendre Hitler ; je crois qu'il n'y a pas un mot de vrai dans tout cela car les combats ne doivent pas être commencés à part sur mer car les Anglais font la chasse aux navires allemands et leur aviation a attaqué Wilhelmshaven un port de guerre le 4 en touchant deux navires de guerre mais en subissant quelques pertes. Les journaux du 5 disaient cela officiellement et leur aviation est en train de jeter des millions de tracts sur l'Allemagne (ce n'était pas vrai non plus).
A 16h00, j'ai la certitude que pas un coup de fusil n'avait été tiré 48 heures avant et probablement pas encore à cette même heure. le soir vers 21h00, alerte à la sirène ; j'entends un avion mais pas un coup de canon. C'est probablement un avion français ou anglais. Fin de l'alerte environ 1/4 d'heure après. Nous avons été chez Monsieur Colmerauer ; la première fois nous étions restés chez nous.

Le 8 septembre 1939,
calme, mais les Polonais reculent. Cracovie et Posen sont prises.

Le 9 septembre 1939,
à 16h15, j'entends très bien un coup de canon ou une explosion de mine. Vers 21h00 une courte alerte et rien. Vers 23h45, nouvelle alerte et rien, elle se termine le 10 à 1h00 ; nous sommes restés chez nous.
Les communiqués disent qu'une division française s'est emparée de la forêt de Warndt vers Forbach.
Alexandre nous écrit des 3 et 4 mais contrairement à ce qu'on disait, le canon français a tonné presque aussitôt la déclaration de guerre, le 3 vers 17h30 et il écrit au son du canon le 4 avec un moral excellent.

Le 11 septembre 1939,
à 3h1/2, alerte ; fin à 4h00, rien et nous sommes restés chez nous.

Le 12 septembre 1939,
les Polonais semblent résister devant Varsovie ; espérons qu'ils tiendront. l’on dit que les Anglais commencent à arriver.

Le 13 septembre 1939,
les Français sont aux avancées de Sarrebruck, il paraît qu'il y a déjà des Anglais en ligne.
Nous venons de faire un abri près de chez nous.

Les 14 et 15 septembre 1939,
rien à signaler mais les trains de troupes se dirigeant sur Metz n'arrêtent pas de passer. Pour la première fois le communiqué dit que nous avons fait des prisonniers.

Le 16 septembre 1939,
la pluie sans arrêt.
La conduite de la Russie intrigue tout le monde. On se demande si elle ne va pas attaquer la Pologne qui est envahie de plus en plus ; cependant Varsovie n'est pas prise.

Le 17 septembre 1939,
j'apprends à 9h00 que les Russes ont attaqué les Polonais à 4h00 et envahiraient la Pologne, c'est le coup de grâce pour la Pologne mais j'ai confiance, elle ressuscitera après la guerre car nous aurons la victoire. Vers 16h30 courte alerte et rien.

Le 18 septembre 1939,
rien à signaler si ce n'est un temps exécrable ; d'après une lettre d'Alexandre du 12 courant je suppose qu’il est en première ligne devant Sarrebruck à l'heure actuelle.

Les 19 et 20 septembre 1939,
le temps se remet un peu.
les Polonais bien que pris entre les Russes et les Allemands résistent encore. le porte-avions anglais Courageous est coulé, il y a environ 600 victimes.

Le 21 septembre 1939,
fort brouillard ; le temps est presque froid le matin, ainsi que le 22.
Le Président du Conseil de Roumanie, Monsieur Calinesco est assassiné le 21.

Les 23 et 24 septembre 1939,
calme ;
les Russes avancent en Pologne. Ils se sont partagés ce pays avec les Allemands ; Varsovie tient encore.
Une lettre d'Alexandre du 19 nous dit qu'il vient au repos pour 3 jours aux casernes de Barst. Il n'a pas encore quitté la ligne Maginot.

 

Le 25 septembre 1939,
courte alerte à 10h45 et rien. Le 26 septembre, rien. Le 27, courte alerte vers 13h50 et rien.

Le 28 septembre 1939,
calme,
mais il paraît que Varsovie massacrée par l'artillerie et l'aviation allemande a demandé un Armistice de 24 heures la veille et c’est confirmé.

Le 29 septembre 1939 vers 11h00,
alerte à Paris et en Angleterre. A midi, Varsovie capitule avec les honneurs de la guerre.

Le 30 septembre 1939,
rien à signaler.


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OCTOBRE 1939

 

Le 1er octobre 1939,
vers 1h00, courte alerte et rien.

Le 2 octobre 1939,
rien à signaler
si ce n’est qu’un nouveau gouvernement Polonais s'est constitué en France le 30 septembre. L'ancien étant interné en Roumanie.

Du 3 au 9 octobre 1939,
rien à signaler.
La dernière lettre d'Alexandre du 1er, nous apprend qu'il est toujours à Barst.
La Russie vient de signer des pactes avec l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ; tout à son avantage. Elle essaie d'en faire autant avec la Finlande.

 

Les 10, 11 et 12 octobre 1939,
rien à signaler mais le 12 la pluie toute la journée et le soir du 12 en rentrant de Faulx où je travaillais, j'ai l’agréable surprise de voir chez moi un sous-lieutenant du train qui nous apportait une lettre et de bonnes nouvelles d'Alexandre du 11.

 

Le 13 octobre 1939,
les Anglais coulent 3 sous-marins allemands.

Le 14 octobre 1939,
la Moselle déborde.
Le cuirassé anglais Royal-Oak est coulé par un sous-marin avec 810 victimes à 1h30 au port Scapa Flow.

 

Le 15 octobre 1939,
pluie toute la journée

Le 16 octobre 1939,
beau temps et calme.

 

Le 17 octobre 1939,
pluie presque toute la journée, le 18 aussi la guerre semble seulement commencer.
Les Allemands voyant leurs propositions de paix par l'intermédiaire des neutres repoussées, ont attaqué avec leur aviation la flotte anglaise au mouillage dans le Firth of Forth et à Scapa Flow les 16 et 17. Il y a eu quelques dégâts et victimes des deux côtés. Le 16 au matin, ils ont déclenché une attaque sur 6 km à notre aile gauche et le soir une autre sur 30 Km à l'Est de la Sarre. Nous nous sommes repliés sur notre ligne de résistance.

Le 18 octobre 1939,
vers 14h30, étant près de Faulx, j'entendais très bien la canonnade et en rentrant le soir, j'apprenais qu'un nommé Munch de Pompey avait été tué les jours précédents sur le front du Génie (il n'est pas de Pompey mais de Frouard).

Le 19 octobre 1939,
un pacte militaire Anglo-franco-turc est signé ; il comprend toutefois certaines réserves notamment envers la Russie. les pays scandinaves font bloc avec la Finlande pour empêcher ce pays d'être sous la domination de la Russie.

Le 20 octobre 1939,
toujours la pluie.

Le 21 octobre 1939,
le temps semble se remettre au beau. La Moselle commence à baisser. De 10h20 à 10h40, alerte. Quelques obus sont tirés vers Pompey sur un ou des avions que nous ne voyons pas.

Les 22, 23, 24 octobre 1939,
toujours rien à signaler si ce n'est que le temps s'est remis à la pluie ; c'est désolant. les 25 et 26 également. 27 et 28 aussi, et le 28, des wagons passent couverts de neige. Dans la nuit du 27 au 28, alerte aux environs et quelques obus de D.C.A. mais pas d'alerte à Pompey.

Le 29 octobre 1939,
toujours la pluie.

Le 30 octobre 1939,
le temps semble se remettre au beau ; forte gelée le matin. Alerte à 12h30, 14h00, 15h00, nombreux obus tirés, un de ces avions a été abattu à Vaubigny près de Neufchâteau.

Le 31 octobre 1939,
plusieurs alertes aux environs, pas à Pompey.


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NOVEMBRE 1939


Le 1er novembre 1939 (Toussaint),
nous travaillons la matinée, beau temps et rien à signaler.

Le 2 novembre 1939,
de nouveau la pluie vers 14h00 et temps brumeux.

Les 3 et 4 novembre 1939,
toujours la pluie.
Les États-Unis viennent de lever l'embargo sur les armes ; de cette façon, nous aurons tout ce que nous voudrons chez eux, naturellement en payant.

Le 5 novembre 1939,
temps assez beau.

Le 6 novembre 1939,
beau temps aussi à 13h45 la D.C.A. se fait entendre mais de nouveau la pluie à 16h30.
Dans la journée 9 avions français ont livré bataille à 27 Allemands sur le front d'Alsace ; pas de perte chez nous mais 9 ennemis abattus.

Le 7 novembre 1939,
beau temps, vers 10h00 tir contre avion vers Pont-à-Mousson.

Le 8 novembre 1939,
très beau temps. Aussi à 10h10 tir contre avions. Vers 10h50 Jean observe un combat entre deux avions au-dessus de Dieulouard ; l'un semble tomber en flammes. Il me montre la fumée dans le ciel un peu après. A 13h00, nouveau tir ainsi qu'à 14h00.

Le 9 novembre 1939 au réveil,
la pluie, la sirène de l'usine n'ira plus que pour les avions de bombardement.

Le 10 novembre 1939,
beau temps, aussi à partir de 10h00 tir contre avions dans les environs presque toute la journée et même dans le début de la nuit.

Les 11, 12, 13 novembre 1939,
nous travaillons ; rien à signaler, temps couvert.

Le 14 novembre 1939,
quelques coups de canon à 15h00 vers Liverdun.

Les 15 et 16 novembre 1939,
temps pluvieux ;
Les négociations sont rompues entre la Finlande et la Russie. les offres de paix de la Belgique et de la Hollande sont rejetées par les pays en guerre, l'Allemagne ne voulant pas rendre ce qu’elle a pris.

Le 17 novembre 1939,
toujours la pluie.

Le 18 novembre 1939,
assez beau temps et rien à signaler ici,
mais les avions boches ont patrouillé sur toute la France même près de Bayonne et sur l'Angleterre.

La nuit du 18 au 19 novembre 1939,
forte tempête et temps pluvieux.

Les 19 et 20 novembre 1939,
temps pluvieux, malgré cela quelques coups de canon vers Nancy à 11h45. Les premiers trains de permissionnaires sont mis en marche dans la nuit du 20 au 21.

Le 21 novembre 1939, vers 10h50,
nombreux obus vers Faulx sur trois avions allemands ; l'un semble descendre vite, peut-être a t-il été touché. Il paraît qu'il a été descendu par un avion français ; en tout cas le communiqué parle d'un abattu dans nos lignes, il paraît que c'est à Delme.

Le 22 novembre 1939,
le temps se met à la gelée -3° le matin et très belle journée. Vers 8H00 et 10h00, forte canonnade au-dessus de Pompey ; les éclats tombent en gare près de nous. A 11h45 au-dessus de nous, bref combat d'avions. Un Français attaqué par 2 boches est touché mais a probablement pu atterrir vers Nancy. Il laissait derrière lui un nuage de fumée et a disparu derrière le fort de Frouard. le pilote légèrement brûlé a atterri près d'Houdemont.

Le 23 novembre 1939,
à 1h30, tir de la D.C.A. -4° le matin, à 8h25 tir contre avion.

Le 24 novembre 1939,
-3° à 11h00 quelques coups de canon.

Le 25 novembre 1939,
une légère couche de neige au réveil et 0°, temps couvert.
Le torpilleur français Sirocco a coulé 2 sous-marins en 3 jours, de nombreux navires alliés et neutres sont coulés par des mines allemandes semées sur les côtes anglaises.

Le dimanche 26 novembre 1939,
de nouveau la pluie toute la journée.

Le 27 novembre 1939,
temps pluvieux.


Le 28 novembre 1939,
assez beau temps et R.A.S.

Le 29 novembre 1939,
encore la pluie ; ce jour à midi, nous avons la visite du cuisinier d'Alexandre et de Monsieur l'Abbé lieutenant Ragage.
Pour répondre à la guerre des mines, les alliés décrètent le blocus sur toutes les exportations allemandes à partir du 4 décembre. Jusqu’à présent, seules les importations étaient saisies.

Le 30 novembre 1939,
temps pluvieux.
la Russie sans déclaration de guerre attaque en Finlande vers 8h00 du matin et essaie d'y installer un gouvernement communiste mais les Finlandais malgré la disproportion des forces résistent courageusement.


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DECEMBRE 1939

 

Les 1, 2 et 3 décembre 1939,
rien à signaler ici. Le 4 encore la pluie, le 5 également.

Le 6 décembre 1939,
temps couvert, rien à signaler par ici.
La Finlande se défend énergiquement et demande la convocation de la Société des Nations. Celle-ci se réunira à Genève le 11 décembre.

Le 7 décembre 1939,
légère gelée. Vers 9h00, tir de la D.C.A.

Le 8 décembre 1939,
le matin temps couvert malgré cela vers 7h30 quelques coups de canon.

Le 9 décembre 1939,
temps pluvieux.

Le 10 décembre 1939,
la pluie toute la journée ;
les Finlandais résistent héroïquement.

Le 11 décembre 1939,
encore la pluie.
La S.D.N. a signifié à la Russie d'arrêter les hostilités avec la Finlande mais elle s'y est refusée le 12 ; aussi le 14 la S.N.D. a voté l'exclusion de la Russie de la Société des Nations.

Les 12 et 13 décembre 1939,
temps froid et R.A.S.

Les 14 et 15 décembre 1939,
temps froid et rien à signaler ici.

Le 16 décembre 1939,
légère gelée et rien à signaler.

Le 17 décembre 1939,
légère couche de neige et -3° au réveil.

Le 18 décembre 1939,
également légère couche de neige et -3° au réveil, et pluie glaciale à la nuit.
Le cuirassé corsaire allemand, Admiral Graf Von Spee attaqué le 13 par trois croiseurs légers anglais s'était réfugié à Montevideo ; avarié, il n'a plus osé affronter les Anglo-français qui le guettaient et s'est fait couler au large le 17 vers 20h00.

Le 19 décembre 1939,
léger verglas au réveil.

Le 20 décembre 1939,
-3° et assez belle journée.
Le navire boche Columbus de 32.000 tonnes, arraisonné par un croiseur anglais est envoyé par le fond ; les avions boches ont attaqué à la bombe et à la mitrailleuse dans la mer du Nord de nombreux bateaux de pêche et en ont coulé plusieurs et fait quelques victimes. Le Sirocco a coulé son troisième sous-marin. L'équipage du Graf Von Spee a été interné et son commandant s’est suicidé dans sa chambre à Buenos-Aires.

Le 21 décembre 1939,
-3° et belle journée ; vu trois avions de nationalité inconnue.

Le 22 décembre 1939,
-9° et belle journée. A 14h00, quelques rafales de mitrailleuses très haut dans le ciel et à 17h15, trois coups de canon vers Custines.

Le 23 décembre 1939,
-7° et brouillard toute la journée.

Les 24, 25, 26 décembre 1939,
-5° et givre, le 25 Noël un lundi ; nous avons repos.
Les Finlandais résistent victorieusement.
lettre d'Alexandre
Le 27 décembre 1939,
-2° et assez belle journée.

Le 28 décembre 1939,
-2° et forte chute de neige (12 cm).

Le 29 décembre 1939,
-7°.

Le 30 décembre 1939,
-22°, très forte gelée.

Le 31 décembre 1939,
-7° et comme dit le communiqué, rien à signaler.


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- 1940 -

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JANVIER 1940

Le 1er janvier 1940,
un lundi, -6° et repos.

Le 2 janvier 1940,
-11°, le 3 janvier -15°, le 4 janvier -5° et verglas.

Le 5 janvier 1940,
-3° et verglas, le 6 janvier -5°, le 7 janvier -3° et rien à signaler
si ce n'est que les Finlandais résistent victorieusement sur toutes les frontières. Des secours et des volontaires commencent à leur arriver.

Le 8 janvier 1940,
le dégel mais temps froid.

Le 9 janvier 1940,
Alexandre arrive à 1h30 du matin pour sa première permission ; température 0 degré.

Le 10 janvier 1940,
-10° au réveil, assez belle journée ; vers 11h00 quelques obus au-dessus de nous.

Le 11 janvier 1940,
-12° ; vers 8h00 quelques rafales de la D.C.A.

Le 12 janvier 1940,
-10° ; vers 8h30 de nouveau la D.C.A.

Le 13 janvier 1940,
-11° ; vers 9h00 quelques coups de canon.

Le 14 janvier 1940,
-5°

Le 15 janvier 1940,
-3° ; vers midi bruit que la Belgique est attaquée ; ce n’est pas vrai mais cependant il se passe quelque chose d'anormal, les permissions sont suspendues.

Alexandre et Marie Louise CLAUSSE
Alexandre CLAUSSE et sa femme
Marie Louise

Le 16 janvier 1940,
-6° ; le 17 janvier, -10° et neige par tempête ; malgré cela à 8h00 quelques coups de canon.

Le 18 janvier 1940,
-16° et neige ; vers 8h00 quelques obus sans les voir.

Le 19 janvier 1940,
-18° et belle journée mais très froide.

Le 20 janvier 1940,
-16° ; vers 9h00 Alexandre nous quitte pour rejoindre son régiment le 82ème R.M.I.F. à Barst (Moselle). Beaucoup de prises d'eau gelées.

Le 21 janvier 1940,
-8° et neige.

Le 22 janvier 1940,
-10° et neige et R.A.S.

Le 23 janvier 1940,
-20° ; les permissions doivent être rétablies (elles y étaient).

Le 24 janvier 1940,
-7°.

Le 25 janvier 1940,
-12° et assez belle journée ; vers 12h30, quelques obus contre un avion ;
les troupes Allemandes remplaçant les Russes bordent la frontière de Roumanie.

Le 26 janvier 1940,
-13° et givre.

Le 27 janvier 1940,
-2° et neige au réveil ; dégel dans la journée.

Le 28 janvier 1940,
-7° ; gel brusque, c'est un dimanche et je suis obligé de travailler toute la journée les aiguilles étant prises dans la glace.

Le 29 janvier 1940,
-6° ; le 30 janvier, -4° et neige ; le 31 janvier -4° et verglas.


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FEVRIER 1940


Le 1er février 1940,
0° et dégel.

Le 2 février 1940,
+2°, dégel.

Le 3 février 1940,
-2° le matin et léger dégel dans la journée.

Le 4 février 1940,
-1° et verglas et dégel le soir.

Le 5 février 1940,
+1°, dégel ; +11° à midi et assez belle journée.

Les 6, 7 et 8 février 1940,
continuation du dégel.
Les Finlandais résistent victorieusement à de violentes attaques des Russes.

Le 9 février 1940,
beau temps ; le 10 de nouveau la gelée -2°.

Le 11 février 1940,
-8°. Le 12 février, -4° et neige. Le 13 février, -12° et neige ; vers 11h00 quelques coups de canon.

Le 14 février 1940,
-17° et un peu de neige. Ce jour j'ai la première phalange, du majeur droit, gelée.

Le 15 février 1940,
-10° et neige.

Le 16 février 1940,
-6° ;
bien que les Russes aient pris quelques positions de la ligne Mannerheim, leur offensive semble enrayée.

Le 17 février 1940,
-5° et forte chute de neige, environ 15 cm.

Le 18 février 1940,
-5°.

Le 19 février 1940,
au réveil +1°et le dégel rapide +8° dans la journée.
La Norvège n'ayant pas appliquée les règles de la neutralité, les Anglais prennent à l'abordage le vaisseau Allemand Altmark dans les eaux norvégiennes le 16 et délivrent environ 300 prisonniers Anglais.

Le 20 février 1940,
R.A.S.

Le 21 février 1940,
belle journée ; dans la soirée, le bruit court (ce n'était pas vrai) que Londres a été bombardée, c'est probablement un faux bruit ; vers 19h00 quelques coups de canon ainsi qu'à 21h30.

Le 22 février 1940,
vers 10h00 tir contre avions.

Du 23 au 26 février 1940,
R.A.S.

Dans la nuit du 26 au 27 février 1940 et la matinée du 27,
la D.C.A. s'est fait entendre à plusieurs reprises.
Les Finlandais résistent avec acharnement dans l'isthme de Carélie mais malgré leur héroïsme, Viborg semble menacée.

Le 28 février 1940,
rien à signaler. Le 29 février vers 6h00, tir contre avion, à 14h00 idem.


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MARS 1940


Le 1er mars 1940,
R.A.S.

Le 2 mars 1940,
vers 6h00, tir contre avion.

Le 3 mars 1940,
vers 14h00, tir contre avion.
Les Finlandais semblent avoir évacué Viborg où les Russes ont du entrer le 2.

Le 4 mars 1940,
vers 3h00 tir contre avion.

Le 5 mars 1940,
R.A.S.

Le 6 mars 1940,
le communiqué finlandais dit que le drapeau flotte toujours à Viborg ; les Russes n'ont entré que dans une partie de la ville.

Le 7 mars 1940,
R.A.S.

Le 8 mars 1940,
les journaux disent que sous la pression de l'Allemagne par l'intermédiaire de la Suède, des pourparlers de paix sont engagés entre la Russie et la Finlande.

Le 9 mars 1940,
à 6h00, tir contre avion ainsi que de 20h00 à 21h00 où de nombreuses batteries de D.C.A. se font entendre ; pour la première fois une mitrailleuse pas loin de chez nous tire quelques rafales. C’était intéressant de voir toutes les lueurs des départs et l'éclatement des obus dans le ciel.

Le 10 mars 1940,
rien à signaler
mais Viborg tient toujours.

Le 11 mars 1940,
Von Ribbentrop est reçu par notre Saint-Père le pape ;
vers 21h00 de nouveau la D.C.A. entre en action assez fortement.

Le 12 mars 1940,
les pourparlers continuent entre Russes et Finlandais ; la guerre continue cependant avec acharnement. Viborg tient toujours, il se pourrait que France et Angleterre envoient des troupes au secours des Finlandais en plus des approvisionnements fournis jusqu'à présent. les Russes annoncent la prise de Viborg.

Le 13 mars 1940,
au matin, on apprend que la paix a été signée à Moscou la veille entre Russes et Finlandais ; c'est une grosse déception pour nous cependant, il ne faut pas critiquer les Finlandais, malgré leur héroïsme ils ont succombé sous le nombre et cependant ils ne sont pas battus. Les hostilités ont cessé le 13 à 11h00 ; jusqu'à la dernière minute les Finlandais ont résisté et contre-attaqué victorieusement. L'on se battait encore dans les faubourgs de Viborg. La Finlande cède une certaine partie de son territoire dont Viborg mais conserve son indépendance.

Le 14 mars 1940,
on a les détails de la paix Russo-finlandaise. La Finlande est en deuil, cela à cause de la trahison de la Suède et de la Norvège qui se sont opposées, par peur des boches, au passage des troupes alliées.

Le 15 mars 1940,
rien à signaler.

Le 16 mars 1940,
canonnade de 5h00 à 6h00.

Le 17 mars 1940,
vers 2h00 quelques coups de canon ;
ce jour à la suite de bombardement de l'aviation boche à Scapa Flow, il y a eu les premières victimes civiles, un tué et quelques blessés.

Les 18, 19, 20 mars 1940,
R.A.S.

Le 19 mars 1940,
Alexandre est arrivé pour sa deuxième permission de 10 jours.

Les 21 et 22 mars 1940,
rien à signaler.

Le 23 mars 1940,
canonnade à 1h00 et de 20h00 à 21h00, cette dernière très forte.

Le 24 mars 1940 (Pâques),
canonnade à 2h00, 4h00 et 20h30.

Le 25 mars 1940,
canonnade de 1h00 à 2h00 et pour la première fois depuis septembre 1939, la sirène se fait entendre ; à 11h00 de nouveau le canon.

Les 26, 27 et 28 mars 1940,
rien à signaler.

Le 29 mars 1940,
à 9h00 tir de la D.C.A.

Le 30 mars 1940,
Alexandre repart à Barst.

Le 31 mars 1940,
vers 21h00 de nouveau la canonnade.

Alexandre en "Poilu"

 

 


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* * *

AVRIL 1940


Le 1er avril 1940,
R.A.S.

Le 2 avril 1940,
canonnade à 4h00, 10h00 et 12h15 ; à 16h00 une quinzaine d'avions boches lâchant des traînées de fumée sont passés très haut.

Les 3 et 4 avril 1940,
R.A.S.

Le communiqué du 5 avril 1940,
signale que pour la première fois une troupe française a été attaquée à la bombe et à la mitrailleuse par des avions.

Le 6 avril 1940,
R.A.S.

Le 7 avril 1940,
canonnade de 21h00 à 22h00.

Le 8 avril 1940,
à 4h00, canonnade ;
les boches continuant à se servir des eaux territoriales Norvégiennes, les Franco-Anglais barrent ces eaux par des champs de mines. Malgré les protestations, cette mesure énergique est un rude coup pour le commerce allemand et elle sera sans doute grosse de conséquences.

Le 9 avril 1940,
à 12h45, Jean nous apporte la nouvelle que le Danemark et la Norvège sont envahis par les Boches. Il parait que la Norvège résiste et nous appelle à son secours ; nous irons sûrement.
Le Cardinal Verdier [ndlr :archevêque de Paris] est mort. Les journaux du soir confirment ces nouvelles.

Les journaux du 10 avril 1940,
donnent des détails. A 5h00 le 9, l'Allemagne a sommé le Danemark et la Norvège de se soumettre à elle. Le Danemark a eu la lâcheté d'accepter ; à 6h00, il était envahi sans un coup de fusil. La Norvège a eu le courage de résister malgré ses faibles forces. Les Boches ont débarqué dans plusieurs endroits et les Norvégiens résistent ; les alliés ne tarderont pas à arriver à leur secours. A 13h00, l'on dit qu'une grande bataille navale est engagée à notre avantage ; un cuirassé boche serait coulé.

Le 11 avril 1940,
les nouvelles de Norvège sont très contradictoires, ce qu'il y a de sûr, c'est que les Boches occupent Narvik, Trondheim Bergen et Oslo la capitale et d’autres endroits. Les Boches avouent la perte des croiseurs Blücher et Karlsruhe de 10.000 et 6.000 tonnes, coulés devant Oslo par les Norvégiens et les Anglais qui ont coulé d'assez nombreux navires boches de guerre et de commerce depuis Narvik jusqu'au Cattégat, annoncent la perte des deux contre-torpilleurs Hunter et Hardy devant Narvik. la guerre semble entrer dans une phase active ; celle du minerai de Suède et Norvège est commencée. La T.S.F. annonce que les Anglais commencent à débarquer en Norvège, il y a beaucoup de chance que les Boches n'occuperont pas longtemps ce pays ; nous parviendrons à les déloger.

Le 12 avril 1940,
tir contre avion vers 3h00, 5h00, 10h00.

Le 13 avril 1940,
bonnes nouvelles de Norvège. les Anglais ont débarqué près de Narvik et de Bergen et ont fait leur jonction avec les Norvégiens qui se défendent courageusement Il se confirme que le grand croiseur Boche Gneisenau a été coulé le 9 devant Oslo par les Norvégiens (ce n’était pas vrai); son pareil, le Scharnhorst, avait été touché le 8 par les Anglais devant Narvik mais s'était échappé. Il parait qu'une douzaine de soldats Danois qui avaient résisté lors de l'invasion ont été tués.
A 21h00, tir contre avion.

Le 14 avril 1940,
on apprend que les Anglais ont coulé 7 torpilleurs Boches dans le port de Narvik la veille ; ils ont eu seulement 3 de leurs bateaux légèrement endommagés.

Les 15, 16, 17 et 18 avril 1940,
rien à signaler par ici ni sur la ligne Maginot.
les nouvelles de Norvège sont toujours rares et contradictoires.

Le 19 avril 1940,
à 11h00 tir contre avion et j'apprends la mort du cousin Charles Rosan.
Première confirmation officielle du débarquement anglais à Narvik qui est en partie prise.
A 15h00, nouveau tir contre avion.

Le 20 avril 1940,
à midi forte canonnade ainsi que plusieurs fois dans l'après-midi.

Dans la nuit du 20 au 21 avril 1940,
de 20h30 à 4h00, le canon n’a pas cessé de tonner même quelques rafales de mitrailleuses.
Les communiqués du 20 parus le 21 dans les journaux, annoncent le débarquement des Français en Norvège.

Le 22 avril 1940,
à 1h00 vive canonnade ainsi qu'à partir de 20h30 jusqu'à environ 4h00.

Le 23 avril 1940,
également canonnade de 20h30 à 21h00.

Le 24 avril 1940,
vers 15h00, quelques coups de canon.
Les Anglais ont pris contact avec l'ennemi dans le sud de la Norvège et au nord de Trondheim.

Les 25, 26, 27 et 28 avril 1940,
rien à signaler par ici.
En Norvège les combats se développent. les Allemands débarqués à Oslo veulent faire leur jonction. avec ceux débarqués à Trondheim. Les alliés s'efforcent d'empêcher cette jonction. Le principal port de débarquement allié semble être Namsos à 160 km au nord de Trondheim ; cette ville semble avoir été presque détruite par incendie à la suite de bombardements aériens. Les journaux parlent des Chasseurs Alpins qui sont débarqués à Namsos mais on ne dit pas que les Français combattent actuellement là-bas ; en tout cas ça ne tardera pas. Il est vrai que les communiqués disent les alliés ce qui doit dire, les Anglais, Français et Norvégiens.
Alexandre vient de quitter Bartz pour aller au village voisin de Cappel.
lettre d'Alexandre

cliquez pour lire le courrier d'Alexandre Le 29 avril 1940,
R.A.S.

Le 30 avril 1940,
à 22h00 vive canonnade.
Pour la première fois on parle des Français qui combattent en Norvège et qui tiennent solidement Odda ; ils ont dû débarquer à Andalsnes, Molde ou Alesund au sud de Trondheim.


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* * *

MAI 1940


Le 1er mai 1940,
rien à signaler.

Le 2 mai 1940,
jour de l'Ascension ; tout le monde travaille.

Le 3 mai 1940,
on apprend que les Boches d'Oslo ont fait leur jonction avec ceux de Trondheim, les alliés ont été obligés de se rembarquer d'Andalsnes.

Le 4 mai 1940,
on apprend que les alliés se sont également rembarqués à Namsos, nous n'allons donc tenir que le Nord de la Norvège mais sûrement solidement Narvik où les Boches tiennent encore.

Le 5 mai 1940,
R.A.S.

Le 6 mai 1940,
nous voyons passer ici allant vers Metz le premier train de troupes anglaises, ce sont des Hindous. A 21h30 et 22h00 légère canonnade.

Le 7 mai 1940,
canonnade à midi, à 21h30 et 22h00 et 23h00.
Les journaux signalent la perte en mer du Nord d'un destroyer anglais, d'un polonais et du français Bison ; tous trois coulés par des avions, à part un patrouilleur il semble que c'est le premier navire de guerre français coulé.

Le 8 mai 1940,
à 16h30 un combat aérien au-dessus de nous ; l'on aperçoit 3 avions mais pas d'avion descendu. Vers 22h00 quelques coups de canon.

Le 9 mai 1940,
à 21h40 canonnade.

Le 10 mai 1940,
à partir de 1h00 le canon tonne, à 4h20 une violente canonnade nous réveille. On entend plusieurs sifflements d'obus ou de bombes ; à 4h30 la sirène, nous nous levons. Le jour commence, le temps est couvert et on entend des avions mais on ne les voit pas ; le canon n'arrête pas, on voit les éclatements et les mitrailleuses s'en mêlent. A 5h25 la sirène de fin d'alerte mais le canon recommence. Vers 6h15 il semble y avoir des combats aériens, les mitrailleuses crépitent dans le ciel. J'apprends que nous avons été bombardés ; je vais me rendre compte car il y a tellement de faux bruit. C'était vrai. Six bombes sont tombées au quartier Jeuyeté dans environ 200 m. Quatre dans les cours et jardins, on voit les trous d'environ 0,40m de diamètre et d'une grande profondeur ; une cinquième sur le coin d'une
lettre d'Alexandre cliquez pour lire le courrier d'Alexandre
maison qui a été assez abîmée. C'est la seule bombe, que j'ai vu, elle semble cassée et a une légère enveloppe de métal qui est bourrée d'un produit chimique. Elle est restée légèrement enterrée. La sixième est tombée au n° 16 rue de Jeuyeté sur la maison de Monsieur Roodt, garde à l'usine. Celui-ci a été gravement blessé dans son lit par les débris de la maison qui semble pourtant intacte de l'extérieur. Donc, ces six bombes ne semblent pas avoir éclatées, il y en a peut-être d'autres. Il parait que Nancy, Metz et Blénod ont été bombardés ; une femme serait tuée à Nancy où des voies auraient été coupées en gare. A Blénod un officier serait tué. A 7h30, on me dit que la Belgique et la Hollande sont attaquées. Il parait qu'un avion Boche avec 5 hommes a été descendu vers Toul ce matin. A 10h30 mes permissions sont supprimées. Il se confirme que la Hollande, la Belgique et le Luxembourg sont attaqués.
C'est une bonne nouvelle pour nous, deux armées et une marine de plus avec nous et le resserrement du blocus.
A 13h00 on dit qu'il y a de nombreuses villes bombardées en France, Belgique et même en Suisse ; il y a de nombreuses victimes dont une vingtaine de tués à Nancy.
A 14h30 le canon, à 15h00 la sirène d'alerte, à 15h25 canon, 15h35 mitrailleuse à terre, à 16h15 fin de l'alerte.
A 16h30, j'entends à la radio un ordre du jour du Général en Chef Gamelin et la confirmation de l'attaque ce matin de la Hollande, la Belgique et le Luxembourg. Les troupes résistent victorieusement et les alliés se portent à leur secours. Il y a de nombreuses victimes à Bruxelles.
A 17h15 encore le canon ; la journée a été belle et chaude, cependant ciel nuageux.
Les journaux du soir parlent de l'attaque qui s'est produite à partir de 3 heures des trois pays neutres sans déclaration de guerre. Cependant, les Boches avaient demandé l'autorisation de passer avec leurs troupes mais naturellement, on avait refusé.

La nuit du 10 au 11 mai 1940,
calme à Pompey, cependant le canon au loin. A 4h50 alerte par les sirènes, 5h45 le canon. A 5h55 voyant 3 avions Boches au-dessus de nous, nous allons à l'abri, un avion Boche disparaît ; les 2 autres sont attaqués par 2 Français sortant des nuages. 6h15, toujours le canon.

Le 11 mai 1940,
à 6h40 de nombreux avions boches sont au-dessus de nous à grande hauteur ; on les voit de temps en temps entre les nuages. Toutes les batteries tirent, nous n'avons rien reçu ; à 7h55, fin de l'alerte.
Les journaux signalent que 70 avions Boches ont été descendus en Hollande, 44 en France et plusieurs en Belgique. De violents combats se déroulent; au Luxembourg les Français sont déjà aux prises avec les Boches. En Angleterre,
Cliquez pour ouvrir la lettre d'Alexandre
Monsieur Chamberlain a démissionné ; il est remplacé par Monsieur Winston Churchill. On cite les nombreuses villes bombardées ; il y a des victimes. La Suisse mobilise. En France, Messieurs Marin et Ybarnégaray sont nommés ministres d'état.
Il paraît que 3 bombes sont tombées ce matin dans les bois de Pompey. A 10h00 alerte et rien. le canon à midi et 13h00 ; la sirène à 14h50, le canon à 15h45. Belle Journée avec quelques nuages. A 16h15 fin de l'alerte ; à 17h10 et 17h40 encore le canon.

Nuit du 11 au 12 mai 1940,
calme ici.

Le 12 mai 1940,
jour de la Pentecôte ; à 5h20 la sirène à Nancy et à la mairie. Nous nous levons ; le canon à 6h40 et alors la sirène à l'usine, fin de l'alerte à 7h00. A 9h30, le canon pendant la messe pour la première communion mais pas de panique. A 12h20, sirène à Nancy, à 14h10 à Pompey, à 14h25 fin de l'alerte. A 15h20 la sirène partout et à 15h30 le canon très fort sur Nancy. A 16h35 canon vers Saizerais où il y a un camp d'aviation anglais. A 17h10, nombreux avions Boches au-dessus de nous et violente canonnade. A 19h30 fin de l'alerte ; elle a duré 4h10.
Les journaux du soir signalent en France 148 tués et 337 blessés civils pour les bombardements des 10 et 11 mai. Des villes éloignées comme Lyon, Clermont-Ferrand, Châteauroux ont été bombardées.
La journée du 12 a été belle.
Les Boches ont atterri en Hollande avec de nombreux avions chargés de troupes et ont lâché beaucoup de parachutistes ; tout cela a été exterminé. Les Boches sont entrés à Maastricht et s'efforcent de franchir la Meuse ; ils ont pris Arnhem à droite du Rhin.

Nuit du 12 au 13 mai 1940,
calme.

Le 13 mai 1940,
à 5h50 la sirène à Nancy, à 5h55 le canon sur des avions venant de l'ouest et la sirène à l'usine. A 7h00, toujours le canon. C'est le lundi de la Pentecôte, mais tout le monde travaille. 7h45 le canon, 8h30 fin de l'alerte. 9h00 canonnade contre avion mais depuis Custines, est on entend très bien le canon du front, même sourdement depuis Pompey. A 12h45 sirène et canon en même temps. 14h15 canon, 16h45 canon contre un avion volant très haut et laissant une traînée blanche derrière lui. 17h25, fin de l'alerte qui a duré 4h40. A 17h45, nouvelle alerte et canon aussitôt, 19h30 fin de cette alerte. La journée a été belle mais fraîche le matin, seulement +1°.
Les troupes Franco-Anglaises arrivent avec les Hollando-belges, la grande bataille, probablement plus grande que celle de la Marne de 1914 est engagée. Nous avons tous espoir que les alliés la gagneront.

La nuit du 13 au 14 mai 1940,
a été calme ici, mais comme d'habitude maintenant, le réveil par la sirène de Nancy à 5h15 et aussitôt quelques coups de canon. Le temps est brumeux et frais ; il fait seulement.+1°. A 7h25, fin de l'alerte. A 9h30, il fait un beau soleil. J'apprends que l'on suspend toutes les expéditions commerciales, seules les expéditions pour l'armée sont autorisées. Aussi quelques coups de canon à 9h50. A 11h20 la sirène, à 12h30 fin de l'alerte et pour une fois pas de coups de canon.
La grande bataille est en cours de la mer du Nord à la Moselle, avec des opérations secondaires de la Moselle au Rhin. En Belgique 1500 à 2000 tanks se sont heurtés en un combat fantastique. Les journaux disent que les Français ont affirmé leur supériorité. A 13h00 ont dit que les Allemands arrivent sur la Meuse devant Liège, Namur et Sedan. Je crois que c'est là que nous les attendons. J'espère qu'ils ne franchiront pas la Meuse et qu'ils vont être bien reçus. Ils seraient également devant Longwy.
A 13h25, alerte et fin à 15h45. A 16h25, alerte et fin à 17h15. Alerte à 18h45, le canon aussitôt, fin vers 19h30; belle journée.

Nuit du 14 au 15 mai 1940,
calme.

Le 15 mai 1940,
le réveil à 5h05 par le canon ; toutes les sirènes à 5h10, le temps est beau et clair +5°. A 7h30, fin de cette alerte.
A 7h15 le bruit a couru que la Hollande avait capitulé. Je n’ose y croire, c'est encore comme en Finlande et en Norvège, probablement que les Boches ont installé un gouvernement de traîtres pourvu que l'armée Hollandaise ne le suive pas. Le gouvernement Hollandais s'était réfugié en Angleterre, ainsi que la reine Wilhelmine.
A 8h20, nouvelle alerte et fin à 9h00.
A 10h20, violente canonnade vers Nancy et aussitôt toutes les sirènes, le canon tonne vers Toul également. Il semble qu'un seul Boche passe au-dessus de nous ; à midi, fin de l'alerte.
A 11h30 en lisant l'Eclair de l'Est, je vois que c’est en partie vrai pour la Hollande ; l'armée du Nord étant encerclée et Rotterdam aux mains de l'ennemi, le général en chef a donné l'ordre aux troupes de cette partie du pays de se rendre. En tout cas le gouvernement Hollandais déclare que la guerre continue. les boches bordent la Meuse de Liège à Sedan et essaient de la franchir.
A 12h35 alerte, fin à 13h30.
A 15h55, quelques coups de canon. J'étais chez nous pour me rafraîchir quand tout à coup des explosions vers l'usine ; nous étions bombardés. Le bureau de Jean disparaissait dans la fumée ; quelle inquiétude ; mais presque aussitôt j'ai revu le bureau. La famille s'est sauvée à l'abri et moi j’ai été faire la tournée. Une bombe est tombée dans les jardins de Pierrot et Clément au 345.080 à une quinzaine de mètres de la voie l ; le trou avait 8m00 de diamètre et 3m50 de profondeur, les sirènes n'ont retenti qu'après le bombardement. Une autre bombe est tombée vers les grands bureaux, une autre vers le 1.600 de Pompey-Nomeny. Jean a quitté son bureau à la première explosion pour aller à l’abri. Comme il passait sous les estacades, il a été renversé par une bombe tombant au maximum à 100 m, il n'a pas eu de mal mais il y a eu plusieurs blessés légers. Fin de l'alerte à 17h10.
Nouvelle alerte à 17h45, fin à 18h10. Alerte à 18h45, fin à 19h35. Cette fois les bombes ont explosé, il y a des dégâts notamment de nombreux carreaux cassés. 21h35, alerte, 21h55 l’usine rallume, le canon aussitôt, à 22h35 fin ; nous allons nous coucher. A minuit la sirène, on se lève, Marie, Jean, Yvonne et Suzanne sont très courageux.

Le 16 mai 1940,
à 0h20, fin de l'alerte; on se recouche. 1h00 la sirène, on se lève et on attend. A 1h25 des explosions ou des coups de canon, la sirène à l'usine, on se sauve à l'abri. A 1h50, l'usine rallume, on sort de l'abri. A 2h00 fin de l'alerte. Il se peut qu'il y ait eu des bombes du côté de Pont-à-Mousson. Nous nous couchons ; nous entendons un avion passer à 2h30, nous pensons que c'est un français car le canon ne tonne pas. Tout à coup un sifflement, des explosions, nous nous sauvons à l'abri moitié habillé. Jean tombe dans l'escalier, nous croyons que la maison allait tomber, la bombe n'était pas loin de chez nous. A 3h30 on rallume et à 3h35, fin de l'alerte.
Je vais faire une tournée pour voir si les voies n'ont rien; on me dit en gare que 4 hommes ont été tués à l'usine. Un avion passe, nouvelle alerte vers 3h50, à 4h30 je rentre chez nous. A 4h35, fin de cette alerte. Voilà une nuit bien mouvementée,
nous allons peut-être nous reposer un peu mais hélas, à 5h15 les sirènes partout, à 5h45 fin de cette nouvelle alerte. 5h55, le canon et les sirènes, ensuite à 7h00 la fin. J'apprends en gare que les Boches demandent un armistice de 2 heures pour enterrer les morts, nous refusons.
8h25, 9h25, alertes et pas de fin d'alerte. 10h20 alerte et fin à 11h00. A 11h45, 12h30 les sirènes d'alerte. A 12h50 le canon vers Nancy et toutes les sirènes, à 13h30 fin. A 14h20 alerte.
La journée est belle mais très mouvementée. Vers 15h00 le ciel devient nuageux, les nuages bas. A 15h10, la sirène, 16h00 également, 16h25 un avion passe, on ne le voit pas ; en même temps, le canon et la sirène.
Vers 18h30 aussi un avion et la sirène, vers 19h00 toujours la sirène. On est en état d'alerte continuellement, on entend la sirène d'alerte à tout instant mais celle de fin d'alerte ne se fait plus entendre. On prend ses repas sur le qui vive, on se met à table, un peu après la sirène, on se sauve; au bout de quelques minutes si on entend rien, on vient terminer le repas et quelque fois, ça recommence.
De nouveau l'alerte à 20h25, pour une fois la fin d'alerte à 20h35. Encore la sirène à 20h50 mais pas de fin d'alerte. la famille est dans l'abri pensant y passer la nuit ; on n'entend rien. Aussi, comme on n’est pas trop à son aise et qu'il fait assez froid, on quitte l'abri et on va se coucher. Il fait un clair de lune magnifique. A 19h00, plantant des pommes de terre dans le champ, j'entendais très bien la canonnade sur le front. C'était un roulement continu comme en 1914-1918.

Le 17 mai 1940,
à 5h00, le réveil en sirène ; le temps est couvert, il fait froid. Il y a 2 degrés en dessous de zéro. 5h10 encore la sirène. 5h20, on entend un moteur au-dessus de nous. 5h40 encore un avion, 5h45 le canon tout près. A 5h55 le canon tonne partout, un avion passe, on l'entend bien mais on ne voit rien. 6h35, toujours la sirène d'alerte. 7h00 le canon et un avion passe, on le voit très haut dans une éclaircie.
A 8h30 la sirène à l'usine, presque aussitôt un avion boche venant du côté de Marbache à basse altitude passe au-dessus de l’usine, fusils, mitrailleuses, canon, tout tire ; il disparaît vers l'Est. Mes hommes disent que c'est lui qui a tiré à la mitrailleuse sur les ouvriers de l'usine. A 9h15 et 11h20 toujours la sirène. A 12h10 à Nancy sirène de fin d’alerte mais à 12h12 le canon et de nouveau la sirène d’alerte à Nancy, à 12h20 la sirène à Pompey, à 12h25 un avion passe très bas près, de nous ; la sirène redouble, à 12h40 fin de l'alerte par la sirène de Nancy. A 13h30 alerte ici ; les nuages sont bas, on entend un avion au-dessus de nous.
La grande bataille continue. Il semble que Liège est abandonnée mais les forts tiennent toujours. Il semble que le front va se fixer en Belgique, de Namur en couvrant Bruxelles et Anvers jusqu'à la Meuse en Hollande, et de Namur en France sur les rives de la Meuse.
Cependant, les Boches ont passé la Meuse en plusieurs endroits entre Sedan et Namur, et ont établi des têtes de pont assez profondes. Nous nous efforçons de les réduire. Il semblerait que les ponts de la Meuse n'ont pas tous sauté.

A 14h55 alerte, à 19h45 alerte, à 20h15 fin d'alerte. L'après-midi a été un peu pluvieux aussi on pense être tranquille la nuit et on va coucher de bonne heure. En effet la nuit a été calme.

Le 18 mai 1940,
à 5h25 j'entends un avion. Je pense que c'est un Français car il n'y a pas eu d'alerte aussi je ne dis rien mais presque aussitôt le canon ; j'appelle tout le monde et la famille se sauve à l'abri, alors les sirènes partout. Le temps est couvert, il fait bon +5°. A 5h50 fin d'alerte. 6h15 et 6h45 nouvelles alertes. Le temps s'éclaircit bien qu'il reste nuageux.
A 8h45 le canon vers Pont-à-Mousson et les sirènes aussitôt. 8h55, un avion passe, sirène de Pont-à-Mousson à Nancy. A 9h40 alerte, canon et avions, 9h45 sirène, 10h40 sirène, 11h30 fin de l'alerte. A 11h50 nouvelle alerte, fin à 12h00. A 12h05 sirène et canon, 12h35 sirène, un avion passe très bas, violente canonnade. 13h00, 13h40 alerte. 13h45 avion et canon.
On a enterré hier à Pompey les 4 tués du 16 mai ; aujourd'hui également à Pompey, Monsieur Roodt, blessé le 10 mai est mort de ses blessures, et à Custines un ouvrier blessé le 16 mai avec les 4 tués de Pompey.
L'usine ne sonne plus les fins d'alerte, quand l'ennemi approche, la sirène d'alarme, dès qu'il s'éloigne on frappe sur des gongs et on reprend le travail.
La situation est sérieuse, le Général Gamelin a lancé un ordre du jour rappelant celui de Joffre à la Marne en 1914; il faut vaincre ou mourir.
Le communiqué du 17 au soir dit que l'on se bat dans les régions d'Avesnes et de Vervins, et à l'ouest de Bruxelles. Le gouvernement Belge s'est installé à Ostende ; il semble donc que Bruxelles est abandonnée mais nous avons confiance.

A 14h35 la sirène d'alerte, à 16h15 et 17h20 alerte, à 17h50 alerte et fin d'alerte à 18h35. A 19h30 alerte et à 20h05 la fin. Il a fait une belle journée. Nous faisons une bonne nuit.

Le 19 mai 1940,
mais pour un dimanche un coup de canon nous réveille à 3h45 et aussitôt la sirène ; on s'habille précipitamment et on va à l'abri. Ne voyant rien on va se recoucher. On commence à se dévêtir et aussitôt à 4h25, la sirène, on se sauve de nouveau à l'abri.
Le temps est un peu couvert. Il fait frais -1°, fin de cette alerte à 4h45. On retourne se coucher. De nouveau, alerte à 5h15 et fin à 6h00, alerte à 7h55, aussitôt un avion passe et il est bien canonné, fin à 8h40. A 9h05 alerte, avion et canon ; le temps est beau. A 10h20 la fin. A 11h25 alerte, un avion et le canon, à 11h45 fin d'alerte. 11h55, 11h35, 12h55 alerte ; nous faisons un dîner bien mouvementé. Vers 15h00 fin d'alerte. A 16h35 la sirène, à 18h05 un coup de canon et la sirène; fin vers 19h00.
Les Allemands avançant toujours et se trouvant dans la région de Guise, nous nous replions en abandonnant Bruxelles et Anvers ; les forts de Namur et de Liège tiennent toujours. C'est la masse des chars et des avions qui a permis cette avance.
Nous faisons une bonne nuit.

Le 20 mai 1940,
comme d'habitude, à 3h30 la sirène nous réveille et naturellement on s'habille à la hâte ; le jour commence à poindre, le temps est nuageux et il fait +1°. A 3h55 le canon mais on ne voit rien. A 4h15 fin d'alerte. A 4h30 nouvelle alerte et fin à 5h35. A 8h10 le canon et la sirène après, un avion et à 8h20 encore la sirène. A 10h35 le canon, la sirène aussitôt et fin de l'alerte à 11h30. Alerte à 12h10 fin à 12h40; alerte à 13h05 et le canon.
La bataille se poursuit vers Saint-Quentin et Landrecies. Ostende est bombardée par artillerie, Maubeuge doit être pris. Le Général Weygand reprend le commandement en Chef des armées.
A 14h10 la sirène, un avion passe, vive canonnade ; fin à 14h40. A 15h30 encore la sirène, fin de l'alerte à 15.h45. De nouveau l'alerte à 16h00 et fin à 16h20. La journée a été belle.

Le 21 mai 1940,
à minuit 05, la sirène d'alerte et aussitôt le canon, on s'habille à la hâte. Il fait un superbe clair de lune ; à minuit 35 nous nous recouchons et la fin d'alerte à minuit 40. De nouveau le sommeil interrompu par la sirène à 4h20 et le canon vers Nancy ; on se lève à nouveau et on se recouche à 4h45.
Le temps est couvert et frais, il fait 0 degré. A 6h00 encore la sirène d'alerte, fin à 7h30. A 9h45, nouvelle alerte et fin à 10h00. A 13h10 le canon et la sirène. A 16h35 l'alerte. Il faut dire que nous entendons toutes les sirènes d'alerte de Nancy à la mairie de Pompey, et surtout celle de l'usine mais celle-ci n'annonçant plus les fins d'alerte qu'à coups de gongs, nous n'entendons quelquefois pas la fin d'alerte. Il a fait très chaud ce 21 mai et la soirée a été tranquille.
Mais le soir de bien mauvaises nouvelles circulent, les Allemands sont à Amiens et à Arras. Il y en a qui disent que Gamelin a été fusillé ; d'autres qu'il est devenu fou, que tout un état major a été fusillé. Mais malgré tout la situation est très grave et cependant nous avons confiance. Les Allemands semblent vouloir atteindre la mer à l'embouchure de la Somme pour couper nos armées en deux ; il faut à tout prix empêcher cela.
Je pense que le Général Weygand y arrivera. S'il n'y arrive pas, ce sera peut-être eux qui seront coupés à leur tour.

A 21h35 de nouveau la sirène, vive canonnade vers Nancy et Toul. A 22h10 encore la sirène et fin à 22h25. A 22h30 une violente canonnade suivie de la sirène, d'un avion et même de la mitrailleuse ; fin de cette alerte à 22h50. A 23h30, canonnade, avion, sirène, fin à 23h45.

Le 22 mai 1940,
à 0h50 la sirène mais le canon tonnait avant ; à 1h00 fin. A 1h45 la sirène et le canon et fin d'alerte à 2h00. Voilà un début de nuit bien mouvementé. Nous nous sommes levés cinq fois. Enfin, contrairement aux jours précédents, nous avons eu un réveil normal.
A 6h00, nous nous sommes levés, le temps est doux et très nuageux et, à 7h50 comme c'est la mode ; la sirène d'alerte et la fin d'alerte à 8h30. A 12h45, le canon et la sirène ; à 13h00 fin d'alerte. A 16h55, quelques coups de canon vers Nancy et pas d'alerte.
Monsieur Reynaud a fait un très beau discours le 21 et a dit toute la vérité. La situation est grave. L'avance Allemande en France est due à l'armée Corap (la 9ème armée) mal entraînée et mal encadrée. Cette armée devait défendre la Meuse de Namur à Sedan, elle s'est laissée surprendre et n'a pas fait sauter les ponts de la Meuse. Les responsables seront punis. le soir, on dit qu’Arras est repris.
A 21h00, la pluie ; aussi on pense faire une bonne nuit. Mais hélas !

Le 23 mai 1940,
à 0h15 la sirène nous réveille brusquement et alors le saut en bas du lit et le refuge dans l'abri après s'être habillé à la hâte. Au bout de quelques minutes, n'entendant rien tout près, nous nous recouchons. Cependant quelques coups de canon ont été tirés assez loin.
A 1h35, encore la sirène, nouveau départ dans l'abri. A 4h30 encore la sirène ; cependant il pleut, aussi après quelques minutes dans l'abri, nous nous recouchons. Nous n'avons pas entendu les fins d'alerte sans doute à cause du temps pluvieux. A 9h40 alerte et fin à 9h50. A 16h45 alerte ainsi qu'à 17h05.
La journée a été assez belle. Des patrouilles Boches sont arrivées à Abbeville. Les sapeurs du Génie ont mis à jour les chambres à mines du pont de Custines. Si nous avions fait comme cela plutôt, les Boches n'auraient pas franchi la Meuse, on voit que Weygand est là.
La journée a donc été assez calme mais à 20h45 de nouveau l'alerte ainsi qu'à 21h00, heure à laquelle passe un avion tous feux allumés mais très bas. Ce doit être un Français mais il a du être pris pour un Allemand. A 23h10 alerte.

Le 24 mai 1940,
à 0h45 le canon vers Toul. A 1h10 alerte et canon assez loin et à 1h20 le canon tout près.
Nous commençons à nous fatiguer de cette vie, aussi la famille est restée au lit au cours de ces diverses alertes, moi seul me suis levé chaque fois pour écouter si on entendait des avions de façon à donner l'alarme. N'ayant pas entendu d'avions, je me recouchais quelques minutes après l'alerte ou la canonnade.
A 9h00, alerte.
Une carte d'Alexandre du 16 mai nous laisse entrevoir qu'il a été bombardé.
Les Français ont repris Amiens mais les Boches seraient à Boulogne ou dans les environs.
A 16h35, j'entends un avion venant de l'Ouest, à grande hauteur. Aussitôt, la D.C.A. tire et la sirène se fait entendre. A 16h45, fin de cette alerte.
La journée a été très chaude.
Pour une fois, nous avons bien dormi, la nuit du 24 au 25 mai a été très calme mais pas besoin de réveil-matin.

Le 25 mai 1940,
à 5h10 la sirène nous réveille; on entend aussitôt le canon vers Nancy. A 5h20 fin d'alerte. le temps est brumeux. A 5h45, nouvelle alerte, 5h55 le canon vers Nancy et à 6h00 fin d'alerte. A 7h55, l'alerte et à 8h10 la fin. Dans le même moment, on entend le canon tout près et à 8h12, un avion était haut au-dessus de nous et les éclats tombaient tout près. A 8h23, la fin d'alerte. A 9h05, nous apercevons un avion très haut et laissant une traînée derrière lui ; aussitôt le canon et la sirène. Les artilleurs de Custines l'encadrent très bien, cependant il disparaît vers l'Ouest. A 9h15 fin d'alerte. L'usine donne à nouveau les fins d'alerte, aussi nous l'entendons bien.
Alerte de 10h45 à 11h05.
Les éléments Allemands ont atteint la Manche entre l'embouchure de la Somme et Boulogne que les Français tiennent toujours. Les armées alliées sont donc coupées en deux mais probablement pas pour longtemps. Nous tenons Arras et Amiens et entre ces deux villes, il y a une cinquantaine de kilomètres. Les Boches s'engouffrent dans cette souricière dont j'espère que la porte ne tardera pas à se refermer.
L'armée du Nord se bat avec acharnement depuis Arras jusqu'à la région de Cambrai-Valenciennes. l'armée du Sud borde le Sud de la Somme et de l'Aisne et rejoint la ligne Maginot à Montmédy.

A 14h55 le canon vers Pont-à-Mousson, aussitôt les sirènes. 15h05 fin. Alerte de 16h00 à 16h40. A 19h40 alerte et fin presque aussitôt.
La journée a été très chaude.
A 22h40 alerte et fin à 22h50. A part moi qui ai guetté, la famille est restée au lit.

Le 26 mai 1940,
le réveil habituel à 5h05. A 5h10 le canon sur un avion qui passe vers Frouard allant à l'ouest ; à 5h35 fin.
Le temps est nuageux.
Alerte de 5h55 à 6h05. A 10h30 alerte, nous n'avons pas entendu la fin.
La journée a été chaude et vers 18h00, il y a eu une légère pluie.
Les journaux disent que la grande bataille des Flandres est engagée depuis cinq jours.
Nous faisons une bonne nuit.

Le 27 mai 1940,
la sirène nous réveille à 5h35, un peu après le canon et un moteur au-dessus de nous mais on ne voit rien car le temps est très nuageux ; fin de cette alerte à 5h45. Cependant, on entend le canon vers Nancy aussitôt, mais ici plus rien.
Le communiqué dit que les Boches sont entrés à Boulogne après de violents combats dans les rues.
La journée a été assez belle avec quelques gouttes d'eau.

Nuit calme du 27 au 28 mai 1940.

Le 28 mai 1940,
à 5h30 nous entendons le canon vers Pont-à-Mousson, quelques instants après la sirène et une violente canonnade au-dessus de nous. On entend plusieurs avions qui se dirigent vers Toul; on entend de nombreux éclats tomber tout près (hier soir, j'ai ramassé une fusée de 75 dans le jardin). A 5h50 fin de l'alerte.
Le temps est beau mais un peu nuageux. Vers 9h00 quelques gouttes d'eau.
A 9h40 on me dit que le roi des Belges a donné l'ordre à son armée de capituler. Que va devenir notre armée du Nord car les Franco-Anglais se battent vers Arras, Cambrai et Valenciennes et sont coupés de l'armée du Sud. Va t-elle se replier sur Calais et Dunkerque ou essayer de percer vers Amiens? l'avenir nous le dira. La situation devient très grave mais malgré tout, j'ai confiance. Je pense que nous pourrons tenir de l'embouchure de la Somme à la Suisse.

A 10h30, j'apprends par Marcel que mon neveu René est disparu depuis le 15 mai ; ce jour-là, patrouillant au-dessus de l'ennemi 2 avions dont le sien ne sont pas rentrés à leur base. J'ose espérer qu'il n'est que prisonnier, il a peut-être été obligé d'atterrir ou s'est jeté en parachute. A 14h30, une forte averse à la suite d'un coup de tonnerre. A 15h25 les sirènes d'alerte, un peu après forte canonnade sur trois avions allant vers l'Ouest. A 15h45 fin d'alerte.
A 17h45, on me dit que l'armée Belge continue la lutte. Est-ce vrai ? les journaux du soir disent que le roi Léopold III a mis bas les armes à 4h00 du matin contre l'avis unanime de son gouvernement et sans prévenir le commandement allié. C'est une capitulation sans précédent dans l'histoire (c'est le texte d'un discours de Monsieur Reynaud).
Vers 20h00, le bruit court que le gouvernement Belge a déposé le roi félon et que la Belgique continue la lutte. La statue d'Albert 1er à Paris a été voilée.

La nuit a été très calme.

René MUNIER avec son épouse Paulette ANTOINE,  et leur fille Anne.

René MUNIER, son épouse Paulette ANTOINE et leur fille Anne.
www.munier-pilote-1940.fr

Le 29 mai 1940,
nous nous sommes levés comme en temps de paix. Le temps était très couvert.
A 6h15 on ne sait si l'armée Belge qui combattait continue la lutte, ou si c'est seulement les éléments qui se trouvent en France, mais, c'est sûr que le gouvernement Belge continue la guerre. A 7h.30, j'ai la confirmation que l'armée Belge de campagne a suivi le roi dans sa trahison. L'attitude de l'Italie donne de l'inquiétude, c'est du reste comme cela depuis le début de la guerre mais on se demande si elle ne va pas profiter des circonstances actuelles pour faire comme la Russie en Pologne, c'est-à-dire nous poignarder dans le dos ; mais alors gare à elle et surtout à ses colonies surtout l'Abyssinie.
Vers 10h00, Marcel me dit que René est disparu entre Charleville et Sedan.
A midi, on entend un avion rôder dans les nuages alors la sirène se fait entendre. A 12h25 fin d'alerte. A 17h55, un combat entre 3 avions à basse altitude ; les mitrailleuses crépitent, on en voit deux se croiser en se mitraillant. Ils disparaissent tous les trois derrière la côte de Custines.
La journée a été assez belle.

La nuit a été calme mais le 30 nous avons le réveil un peu trop tôt ; en effet la sirène nous réveille à 3h40 et la fin d'alerte à 3h50. Nouvelle alerte de 4h55 à 5h00 et cependant le temps est très couvert.
Après la défection du roi des Belges, les armées alliées du Nord sous le commandement du Général Blanchard se replient sur Dunkerque en faisant des prodiges de valeur pour échapper à l'étreinte des Allemands. Hier soir noustenions encore dans Calais. Nous avons enfin repris Narvik.
Le temps est resté couvert toute la journée et il s'est rafraîchi. Nuit très calme.
Pas de réveil mouvementé.

a

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Le 31 mai 1940,
à 5h30 le temps est très couvert. Vers 10h30 une légère pluie. A 13h05 la sirène ; à 13h10 quelques coups de canon, à 13h15 fin d'alerte. Nouvelle alerte de 13h55 à 14h00. A 14h55 forte averse avec de la grêle.
Les Français de l'armée Prioux et les Anglais de lord Gort continuent à se replier sur Dunkerque en bon ordre. Ils sont protégés par les eaux qui ont été lâchées à Nieuport et Gravelines.
a

 

 


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* * *

JUIN 1940


Le 1er juin 1940,
la sirène nous réveille à 2h40 ; le temps est clair, fin de l'alerte à 2h45. Nouvelle alerte de 4h04 à 4h15. A 10h40, un avion rôde dans les nuages, il est canonné. Alerte de 11h15 à 11h50. Alerte de 16h00 à 16h02.
La journée a été assez belle.

Nous reculons toujours sur Dunkerque en livrant de rudes combats. D'après les bruits qui courent, l'Italie doit nous attaquer mardi 4 courant. Il parait que quelques unités Belges continuent la lutte avec nous et rembarquent à Dunkerque avec les alliés.
Nous faisons une bonne nuit.

Le 2 juin 1940,
belle journée et pas la moindre alerte.
Refusant de suivre le triste Léopold III, les 2 corps d'armée Belge des généraux de Crahe et Desfontaines continuent la lutte.
Bonne nuit du 2 au 3.
L'évacuation à Dunkerque de l'Armée du Nord se poursuit.

Le 3 juin 1940,
à 14h35, quelques coups de canon. A 19h50 le canon, la sirène d'alerte et la fin d'alerte presque aussitôt.
Belle journée et bonne nuit.

Le 4 juin 1940,

lettre d'Alexandre cliquez pour lire le courrier d'Alexandre

à 6h30, le canon ; plusieurs avions passent au-dessus de nous, la sirène et fin d'alerte à 6h45. Alerte de 7h45 à 8h00. A 16h00, avions et sirène et fin d'alerte presque aussitôt.
La journée a été très chaude.
Hier après-midi, les avions boches ont jeté plus de 1000 bombes sur Paris et les environs. Ils avaient également bombardé Lyon, Marseille, etc., les jours précédents ; il y a de nombreuses victimes.

Le 5 juin 1940,
à 1h05 la sirène nous réveille, nous nous levons tous vu les récents bombardements mais à 1h10 la fin d'alerte. Nous nous recouchons et la nuit s'achève dans le calme. A 7h20 le canon et la sirène et fin d'alerte à 7h30. Vers 10h00 nous entendons 3 explosions du côté de Nancy, cela nous intrigue (c'était
des bombes du 10 Mai que nous faisions sauter). A 12h25 alerte et canon, fin à 12h10.
La bataille des Flandres est terminée. Après une retraite héroïque, les alliés ont parvenu à ré-embarquer à Dunkerque.
Ils étaient encore plus de 300.000 ; la plupart ont débarqué en Angleterre. A cause de la trahison de Léopold l'offensive que je prévoyais sur Arras n'a pu avoir lieu et sans l'héroïsme des alliés, l'armée du Nord n'aurait pas pu rembarquer et aurait été obligée de capituler. Les dernières troupes ont rembarqué hier sous le feu des mitrailleuses. Les victimes du bombardement de Paris et environs sont de 254 tués et 652 blessés.

A 15h10 on voit passer 15 avions Boches venant de l'ouest ; ils sont canonnés et aussitôt les sirènes, fin d'alerte à 15h20.
Journée très brûlante, les légumes commencent à sécher.
A 17h20 la sirène, le canon un avion très bas ; à 17h30 fin d'alerte. A 19h10 canon : sirène et fin d'alerte aussitôt. A 22h40 alerte et fin à 22h50.

Le 6 juin 1940,
à 1h10 le canon. Nous avons le réveil à 4h15 par la sirène et aussitôt le canon, fin d'alerte à 4h30.
Il fait beau.
A 5h35 le canon vers Toul. La famille recommence à rester au lit, cependant moi et Marie faisons le guet quelques minutes et Jean est allé à l'abri à 4h15. Alerte de 7h10 à 7h20, de 9h20 à 9h25 avec canonnade. Alerte de 10h25 à 10h30.
Hier à 4h00 les Allemands après une violente canonnade sont partis à l'assaut sur un front de 200 Km de la Manche à l'Aisne. J'ai bon espoir que ce coup ci, ils ne nous enfonceront pas . Peut-être nous ferons t-il un peu reculer et ce sera tout.
André partant au régiment vient de nous faire ses adieux.
Journée brûlante.
La nuit à 23h05 la sirène nous réveille ; une violente canonnade sévit loin, on ne voit que les lueurs vers Nancy. Des avions passent, fin à 23h50.

Le 7 juin 1940,
à minuit nouvelle alerte, violente canonnade et quelques bruits de moteur. A 0h25 fin. Encore alerte de 2h35 à 2h45. Vu la bataille en cours, nous nous sommes levés chaque fois mais nous ne sommes pas allés à l'abri ; nous observions la canonnade sur le pas de la porte.

lettre d'Alexandre cliquez pour lire le courrier d'Alexandre
A 6h10 sirène et canon et fin à 6h15. En arrivant à la gare, j'apprends que Pont-Saint-Vincent a été bombardé. A 8h20, canon, avions et sirènes ; fin d'alerte à 8h30.
La journée a été belle.
Alerte de 23h15 à 23h40, de 23h50 à 0h20.

Le 8 juin 1940,
de 0h30 à 0h50 alerte et de 0h55 à 1h00. Au cours de ces 4 alertes il y a eu chaque fois passage d'avions, sirène et canonnade dans toutes les directions. La nuit était assez belle. Nous nous recouchons à la fin de chaque alerte et à peine au lit, nous nous levions à nouveau et nous allions à l'abri. De nouveau l'alerte à 6h15, on entend un moteur. Fin d'alerte presque aussitôt.
J'apprends que Pont-Saint-Vincent et Neuves-Maisons ont encore été bombardés.
A 7h05 alerte, avion et canonnade à 7h20, fin à 7h30. Vers 10h00, j'apprends que 5 bombes sont tombées dans la côte au Sud de la gare de Custines. Ces bombes nous étaient certainement destinées, nous avions subi notre 4ème bombardement sans nous en douter.
C'est à la 3ème alerte de la nuit à 0h30, un avion venait de l'Est très vite et assez bas ; nous avions vu de grosses flammes, aussitôt un sifflement que nous avions pris pour une sirène sur l'avion puis nous avions entendu les explosions mais nous avions cru que c'était la batterie de Custines qui tirait. L'avion passa au-dessus de nous et disparut vers l'Ouest.
Journée très chaude.
Alerte de 23h05 à 23h20 avec canon vers Nancy et deux lumières fixes dans le ciel, une rouge et une blanche. Cela nous a intrigués.

Le 9 juin 1940,
à 1h05 alerte, un avion passe très bas. C'est peut-être un Français car on ne tire pas, fin à 1h20. La nuit s'achève dans le calme après nous être relevés à ces deux alertes. A 9h10 canon et sirène, fin d'alerte à 9h20. Alerte de 12h30 à 12h35. A 15h00 canon et sirène, fin à 15h10.
A 17h15, un avion, la sirène et la canonnade, fin à 17h30. A 17h50 alerte et fin aussitôt. A 18h00 un avion, le canon et la sirène et fin à 18h05.
La journée a été d'une chaleur exceptionnelle.
André partant au régiment est passé dans le train vers 20h00.
La grande bataille de France continue, nous reculons en contenant l'ennemi.
A 22h20, alerte, canon, avions. Fin à 22h40. A 23h35, canon, sirène; fin à 23h50.

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Le 10 juin 1940,
à minuit, alerte, canonnade vers Nancy. Fin 0h05. Alerte de 2h10 à 2h20. A 4h15 alerte et fin aussitôt. A 5h45, canon, sirène et fin à 5h50. Pour une belle nuit, elle a été bien mouvementée. Nous nous sommes levés à chaque alerte.
Une carte d'Alexandre du 3 juin nous laisse entrevoir qu'il est en toute première ligne mais toujours dans sa casemate de Cappel.
A 8h20 canon et sirène. 8h30 fin. A 9h50 avions, canon et sirène. Fin à 10h00 - A 10h15 canon et sirène, fin à 10h20. A 11h25, canon, avions, sirène, fin à 11H40. Alerte de 16h10 à 16h35. A 17h55 un avion fortement canonné parait, il ne va pas vite, observe bien Pompey et les environs. Devant son insistance la sirène sonne à 18h00, le canon continue. A 18h05 attaqué par plusieurs avions alliés, il est descendu vers l'Est à la grande joie de la population. Fin de l'alerte à 18h10.
La journée a été belle.
A 20h00, Jean m’apprend que l'Italie a déclaré à 16h20 la guerre aux alliés, elle doit nous attaquer à minuit. C'est une trahison encore plus grande que celle des Russes et de Léopold mais malgré tout, nous avons confiance dans la victoire.
Alerte de 23h15 à 23h25.

Le 11 juin 1940,
alerte de 3h25 à 3h35. le canon a tonné vers Nancy et Toul. Nous nous sommes levés à ces deux alertes.
Alertes de 5h20 à 5h25, de 6h45 à 6h50 et de 6h55 à 7h00.
L'avion d'hier est tombé vers Mazerulles. Il y avait deux Boches tués et deux blessés.
Le fils Cuny est tué. Ce doit être le premier de Pompey.
A 7h15 un avion fortement canonné passe, alerte et fin à 7h28. Alerte de 7h30 à
7h35.
Nous avons évacué Narvik.
Le fils Déon est prisonnier.
A 12h50, canon et sirène, fin à 12h55.
La grande bataille de France continue. Les Boches ont atteint le 9 juin la Seine à Rouen et l'ont même franchie mais ils ont dû la repasser. Ils ont aussi franchi l'Aisne, les mêmes noms qu'en 1914 reparaissent, l'Oise, l'Ourcq., Soissons, Fismes, Noyon, etc . Les alliés ont quitté la Norvège où les hostilités ont cessé le 9. Cependant, le roi et le gouvernement se sont réfugiés en Angleterre. Tous les Italiens de France de 17 à 60 ans doivent se mettre à notre disposition sous peine d'être internés.
A 14h05, alerte et canonnade, fin à 14h15.
Journée chaude et orageuse.
Nous faisons une bonne nuit.

Mais le 12 juin 1940,
nous avons le réveil par la sirène à 4h00. le temps est pluvieux et très couvert. Quelques coups de canon vers Toul et fin d'alerte à 4h05.
A 7h00, on dit que les Italiens ont bombardé l'île de Malte.
A 13h00 et 18h00 fortes averses.
Nous nous replions au Sud de la Marne mais tenons Reims et Paris.
Nous faisons une bonne nuit.

Le 13 juin 1940,
au réveil le temps est à la pluie.
Les Allemands ont passé la Seine entre Rouen et Vernon et la Marne près de Château-Thierry. Nous nous replions sur les avancées de Paris et de Reims.
Les Italiens ne nous ont pas encore attaqués mais les Anglais ont bombardé les colonies d'Abyssinie et de Tripolitaine et une quarantaine de navires Italiens ont disparu dans les ports neutres ou se sont sabordés ou ont été capturés les italiens ont fait sauter le pont de Vintimille. C’est bizarre. Ont-ils peur de nous ?

A 9h25, sirène, un avion dans les nuages, canonnade, fin à 9h30. A 11h55, sirène, avions dans les nuages, canonnade, fin à 12h20. A 13h50, sirène, canons, avions, fin à 14h05. A 14h55, canon, avions, sirène et légère averse, fin à 15h10. Le temps s'éclaircit. A 15h40, alerte, A 15h55 avions, canons et mitrailleuses. Quelques bombes tombent près de la Poste. C'est le 5ème bombardement, pas de victimes. A 16h10 encore avions et canonnade. A l6h30 fin de cette alerte. A 16h45, sirène, canon et avions, fin à 17h15. A 17h25, alerte.
A 17h28 une trentaine d'avions surgissent de l’Ouest, canonnade, mitrailleuses à terre et en l'air. A 17h30 les bombes commencent à tomber sur Pompey et les environs. Il y en a plusieurs au quartier Jeuyeté ; une tombe près de l'abri de Jean. Il semble qu'il y ait peu de dégâts et seulement quelques blessés. C'est notre 6ème bombardement ; à 18h00 fin d'alerte. A 18h55 sirène et canon, fin à 19h15. Alerte de 19h50 à 19h55. A 20h20, sirène, canons, avion et fin à 20h30.

Le 14 juin 1940,
à 0h45 alerte et canon, à 0h55 fin. A 2h25 sirène et fin d'alerte à 2h27.
La nuit est assez belle.
Nous nous sommes levés à ces deux alertes et la nuit s'est achevée sans incident. (Vers 7h00 Alexandre était tué).
Vers 8h00 de mauvaises nouvelles circulent. Des soldats entassés dans des wagons tombereaux passent allant vers Nancy. Sur la route je vois des voitures chargées de mobilier, on parle d'évacuation dans les environs. On raconte que Reynaud a parlé à 23h00 en disant qu'il n'y avait plus d'espoir et cependant, moi j'ai confiance.
A 10h00, j'apprends que les affectés spéciaux jusqu'à la classe 1910 repartent et que l'usine de Pompey ferme.
A 10h30 on me dit que l'ennemi est à Dun-sur-Meuse ; à 11h00 qu'il est près de Briey ; à 11h00 qu'il est à Saint-Dizier c'est-à-dire sur nos derrières. Les trains d'évacuation n'arrêtent pas, ce sont ceux de Dun, Verdun, Baroncourt, Lérouville, Conflans, principalement les cheminots des dépôts. La troupe passe toujours et la D.C.A. de Custines s'en va, on dirait qu’on nous abandonne. Nous avons eu alerte de 8h00 à 8h15, de 8h30 à 8h45, de 9h00 à 9h20, de 9h30 à 9h45; de 10h10 à 10h20, de 10h30 à 10h35 et puis plus rien. On entend de temps en temps les avions Boches mais on ne tire plus dessus.
Vers 15h00 le temps se met un peu à la pluie.
A 14h00 et 14h40, j'ai entendu vers Metz 2 grosses explosions. L’exode des réfugiés n'arrête pas sur les routes et les cheminots par les trains.
Dans la soirée le temps est assez beau, vers 19h00 des Hindous traversent Pompey à pied, c'est réconfortant de voir les mobilisés partir. Ils ont tous espoir. A 21h00 je vais en gare; l'exode continue et se continuera sûrement la nuit. la gare charge son matériel pour être prête à évacuer. On me laisse entendre que c'est proche. Que va devenir la France ? Dieu seul le sait. j'ai confiance.
A 23h00, Marcel passe se rendant à Dijon par la route. Toute la nuit l'exode continue. C'est la 3ème armée qui se déplace vers le Sud en l’Ouest mais nous tenons la ligne Maginot depuis Thionville.
Néanmoins à 6h00 le 15, nous préparons nos valises pour toute la famille et nous les portons à la gare dans un wagon où nous prendrons place au dernier moment. Les batteries de D.C.A. se sont fait sauter sur place.
Il parait que les Allemands sont entrés à Paris hier. les avions boches nous survolent, le temps est assez beau et une batterie de DCA les canonne. Metz est considérée comme ville libre.
L'usine est fermée. Ce n'est que civils dans les trains et sur les routes.
A 10h00 on dit que les États-Unis ont déclaré la guerre à l'Allemagne, et la Russie à l'Italie. Cela nous réconforte. Un peu après on ajoute l'Espagne, aussi je n'y crois plus guère. On ajoute encore la Turquie et le Portugal, si seulement c'était vrai.
Les trains restent des heures entières devant chez nous et on fait la causette avec les soldats. Quand partirons-nous ? On n'en sait rien, il est 15h00. Il n'y aurait rien d'extraordinaire que nous restions ici. Si seulement je disais vrai car je crois que nous tenons solidement la rive droite de la Moselle depuis Thionville mais la rive gauche semble abandonnée, alors ils pourraient venir jusqu'à Pompey mais pas à Custines.
Un train militaire est devant chez nous de 13h00 à 18h00. A 17h45 trois avions nous mitraillent en piqué. Les balles sifflent autour de moi, je me blottis contre une baraque. En même temps les bombes éclatent mais elles tombent à l'usine et à l'entrée de Frouard sur un café où il y a beaucoup de victimes dont plusieurs tués. C'est le 7ème bombardement. Nous prenons notre dernier repas chez nous et vers 21h00 nous allons nous installer dans notre wagon couvert à la gare. Nous pensions partir dans la nuit, mais hélas, nous la passons dans le wagon à Pompey.

Le 16 juin 1940,
temps brumeux. A 4h00 je vais au PM et je reviens. A 4h30 passe un avion, mais plus de sirène. A 5h00, nous retournons chez nous. Un train de réfugiés est arrêté ; le jardin, les cabinets, l'abri, le puits, la maison quand je l’ouvre, tout est envahi. Nous distribuons de l'eau à profusion après avoir fait notre toilette et nous repartons. On me dit que la tante Lucie est dans le 4ème train derrière (ce n'était pas vrai). Quand partirons-nous ? Peut-être le soir et on ne sait rien de ce qui se passe. Pas de journaux, pas de T.S.F., même pas de pain.
Les trains sont tous en détresse faute d'eau ; les réservoirs sont vides depuis hier. Sachant qu'il y a de l'eau à Custines 70, j'y vais 3 fois avec 1 ou 2 machines. Nous vidons le réservoir et j'ai encore le bonheur de voir Marie-Louise, Jean-Marie et d'emmener Yvonne et Suzanne. De cette façon les trains peuvent repartir.
Je vais faire un dernier tour à la maison. Le jardin est en train d’être dévasté par des voleurs et à 11h22, nous partons de Pompey. C'est le dernier train chez nous, nous partons sur Mirecourt pensant aller à Angers.
Ce matin et les jours précédents, on aurait dit la retraite de Russie. Les soldats, un par un ou par 2 ou 3, sans fusil, avec leur masque, leur bidon et leur musette, suivaient les routes ; on peut croire qu'ils se cachaient des avions. Maintenant, c'est les gares qui sont vides. Nancy malgré les trains de civils et de soldats qui l'encombre semble abandonnée. Nous quittons Nancy à 15h00 (le 16 était un dimanche).
................................................................carte du trajet parcouru en train cliquez pour faire apparaître la carte du trajet effectué
On me dit à Nancy à 13h40 que les Boches sont à Langres. J'avais prévu qu'ils pouvaient nous barrer la route. Je ne m'étais malheureusement pas trompé.
cliquez pour lire le courrier d'Alexandre Pont-Saint-Vincent arrêt de 15h35 à 15h55. A 16h30 nous étions à l'arrêt à l'entrée de la gare de Xeuilley. 8 avions nous survolent à assez basse altitude. Ils nous repèrent mais sont canonnés. Ils reviennent, nous mitraillent à 16h35 ; nous sommes bombardés, c'est le 8ème bombardement. Les bombes sifflent, notre wagon semble un jouet mais néanmoins, nous échappons à la mort. Nous étions restés blottis dans notre wagon. Nous ouvrons les portes, les wagons voisins sont en feu et on voit la foule se précipiter. Une bombe était tombée sur le 5ème wagon après le nôtre et les deux wagons voisins avaient pris feu également. Nous dégageons une douzaine de morts et de nombreux blessés. Des corps commençaient à flamber, nous éteignons l'incendie le plus vite possible. La voie n'a rien, après avoir manœuvré nous repartons à 17h45. Tous les morts et blessés sont de Marbache ou Belleville, je les connais presque tous.
Vers 22h00 nous quittons Mirecourt et restons en panne en gare de Dompaire faute d'eau.
Vers 4h00 le 17, de graves rumeurs circulent. Vers 7h00 c'est la panique. On semble nous donner l’ordre de nous disperser dans la région ou de rejoindre nos domiciles par nos propres moyens. Quel malheur d'en arriver là, on aurait du nous laisser chez nous. Enfin, nous prenons une décision, nous allons à Ville-sur-Illon. Nous y arrivons vers 10h00. Nous sommes très bien reçus.

Nous apprenons que Monsieur le Maréchal Pétain est Président du Conseil et le Général Weygand ministre de la guerre. A 14h30 on dit qu'à 15h00 il y aura offre de paix.
J'écris au crayon n'ayant plus d'encre.
15h00 voilà la pluie. Pendant que j'écrivais encore un maudit avion est venu nous survoler assez brusquement.
A 18h00 on dit que Pétain et Weygand vont partir pour Berlin.
Le soir passe un brillant régiment d'Artillerie coloniale du 155 long, les hommes et les chevaux font bon effet. la ligne de Nancy à Mirecourt a été bombardée un peu partout on ne voyait que des trous de bombes le long de la voie, même des animaux qui n'étaient pas enterrés. Ici, j'ai vu encore cinq trous de bombes avant le village. Nous faisons une bonne nuit dans la paille. Nous nous levons vers 7h00 ; un peu après on entend la DCA vers le nord et il fait beau.

C'est aujourd'hui le mardi 18 juin 1940,
le plus ennuyeux et le manque de nouvelles, pas de journaux depuis le 14, rien que des cancans plus ou moins vrai, on voit les Boches partout, pas de lettres, plus rien ne marche, ni trains, ni postes, la dernière lettre d'Alexandre est du 5.
Vers 8h30, je pars à Dompaire avec une charrette chercher mes derniers bagages. En arrivant je constate que notre train et mon outillage ont été pillés. C'est navrant de voir cela, c'est comme les troupes que l'on rencontre. Il y en a qui vont au Nord, la plupart vont au Sud sans espoir de passer. Ils parlent de canons et de chevaux abandonnés, en tout cas j'ai vu un caisson et d'assez nombreux harnachements abandonnés.
Vers 10h00, Epinal où les environs semblaient violemment bombardés.
Je suis rentré vers 13h00 à Ville-sur-Illon. Plusieurs avions se sont montrés dans la journée qui a été très chaude.
Dans la soirée du 18 juin de fortes explosions vers Epinal, d'énormes colonnes de fumée montent vers le ciel. On dit que c'est du pétrole à Darnieulles qui est détruit.

La nuit du 18 au 19 juin 1940,
j'entends le canon, c'est sûrement le canon du front s'il y en a encore un par ici. Vers 5h00 nous chuchotons que les Allemands doivent être là, je me lève, c’est le 19, il faut beau mais pas d'Allemands. Encore des Français isolés ou par groupes et sans armes, c'est navrant, il n'y a plus d'espoir.

Le 19 Juin 1940,
ce mercredi à 8h22 arrivent devant nous à Ville-sur-Illon les premières troupes motorisées Allemandes. Elles viennent du côté de Darney et semblent se diriger sur Epinal ou Mirecourt. Il fait beau, pas un coup de fusil n'est tiré, des soldats Français sans armes croisent les soldats Allemands. Le défilé des motorisés continuent toute la journée.
Vers 17h00 arrivent une longue file de prisonniers Français et Belges, ils viennent de Mirecourt ou d'Épinal. les Allemands sont corrects avec nous. Vers 18h00 le défilé des prisonniers est terminé.
La nuit le canon au loin.

Le 20 juin 1940,
nous nous levons à 7h00, un groupe de soldats Français était devant chez nous attendant d'être emmené, il n'était pas gardé. Nancy a du être occupé mardi par des troupes venant de chez nous.
A 12h45 arrive une longue file de prisonniers venant du côté d'Épinal et allant vers Darney. Ceux d'hier allaient vers Xertigny et étaient quelques milliers, mais aujourd'hui, ils sont au moins six mille, le triste défilé se termine à 13h45. La population distribue à profusion de l'eau, du vin, du sucre, du pain, etc. Aujourd'hui j'ai reconnu un homme des environs, c'était Hubert de Marbache. Hier, deux hommes m'avaient reconnu dont Wéber de Pompey. les prisonniers sont la plupart sans casque, ils ont la plupart un calot, d'autres un béret ou la coiffe d'un casque.
de 17h20 à 17h45, nouveau défilé de prisonniers, encore quelques Belges.
Dans la soirée le canon tonne vers Epinal. On dit que les Allemands sont sur la Loire, au Creusot, à Besançon (etc.).

Le 21 juin 1940,
nous nous levons à 7h00, la nuit a été calme et il fait beau, rien dans les rues à part le monde qui va à la messe ou au travail et les personnes qui retournent chez elles, notamment les affectés spéciaux.
A 8h30 je vais à Dompaire, je croise de 8h30 à 8h50 un long convoi de prisonniers Belges et Français, il y a de nombreux Sénégalais et le 294 d'infanterie.
On me dit à la Kommandantur que nous pouvons repartir chez nous. Je rentre à Ville. Vers 13h00 passe des prisonniers en camions et un pièce française, je crois de 155, la culasse enlevée et l'affût coupé en deux. C'est probablement une batterie prisonnière.
Dans la soirée on annonce que toutes les portes devront être ouvertes le lendemain et les armes remises à la Mairie. Vers 20h00 les Allemands en auto nous crient que la paix est signée depuis 15h00.
Impossible malgré nos démarches de rentrer chez nous en voiture.

Le 22 juin 1940,
au réveil temps couvert. A 7h40 je quitte seul Ville-sur-Illon pour rentrer à Pompey à pied par la route Mirecourt-Nancy, soit environ 77 km. Je traverse Mirecourt à 10h45 où Madame Maxel me voyant, me paie une bonne bouteille dans un café. A 11h35 à Poussay, j'aperçois la côte de Sion. A 12h05 un orage me fait arrêter quelques instant. A 12h30 j'entre en Meurthe-et-Moselle. A 13h00 j'arrive à Diarville où j'avais décidé de dîner. Je m'installe sur la place mais la pluie survenant, je demande l'hospitalité dans une grange. C'est un postier en retraite. Je suis bien reçu, on me paie à dîner.
Je repars à 14h50 ; à 15h45 à la croisée du chemin qui mène à Sion, je vois les premières traces de la bataille. 4 ou 5 voitures allemandes et un canon sont démolis, une est au milieu de la route ; les phares sont encore allumés. Dans le fossé côté Sion, couvert d'une couverture est un soldat allemand tué ; plus loin au carrefour Épinal, Neufchâteau, un bois de petits sapins a été brûlé. J'arrive à l'entrée de Ceintrey à 18h10, défense d'entrer au village, on me fait comprendre qu'il faut passer la nuit dans un pré avec beaucoup de monde.
Je m'apprêtais à manger quand à 18h50 on nous autorise à partir. J'entre à Ceintrey où je vois Jacquinet, Lombard et Colson et leurs familles qui m'offrent à passer la nuit avec eux. J'accepte et couche dans une grange. Nous partons à 6h00 comme une caravane. J'accepte de traîner un vélo jusqu'à Pompey, je ne pouvais guère refuser. Nous déjeunons à 8h00 à la sortie de Richardménil. Là, on nous dit qu'il faut passer par les turbines de Messein. le pont de Flavigny était en partie détruit. A Messein, il y en un aussi de sauté et deux autos allemandes ont sauté sur des mines sur l'écluse avant Flavigny. J'ai vu une tombe allemande au bord de la route et on nous dit que l'on s'est battu fortement entre Richardménil et Saint-Nicolas ; c'est pour cela que l'on nous détourne, ce qui allonge notre chemin de 2 ou 3 kilomètres.
Nous traversons Nancy, je dis bonjour en passant chez Monsieur Suttor et à midi, nous dînons sur la route à la sortie du pont Biais de Maxéville. A 14h50, nous arrivons devant le café de la lune. J'aperçois que chez nous la porte est fermée, nous nous rafraîchissons à la Lune et nous nous séparons. Je rentre chez nous vers 15h15, la maison est fermée, l'écurie aussi, mais dehors et dans le wagon quel taudis. Des chevaux ont campé, ils ont démoli la clôture, mangé tout le foin que j'avais rentré (au moins 2000) et piétiné tout ; heureusement qu'ils ont respecté le jardin. J'entre à la maison et j'ai le bonheur de constater que nous n'avons pas été pillé, même le bon vin est de reste à la cave et les lapins à l'écurie. Nous pouvons être reconnaissant aux familles Lanéque et Buremont dont la présence à certainement empêché le pillage.
Quel triste spectacle le long des routes, le désastre de l'Armée Française est complet. La retraite de Russie, Waterloo et Sedan ne sont pas à comparer vu le nombre d'hommes et de matériel. Ce n'est que canons, fusils, mitrailleuses, équipements, harnachement, prisonniers, etc. .
A Mirecourt je vois un fils Paul de Dieulouard qui est prisonnier. Où peut-être notre pauvre Alexandre ? J'ai bel à regarder, je ne le vois pas. Enfin 2 lettres à lui des 11 et 12 juin nous attendaient chez nous. Le plus navrant que j'ai vu c'est d'empêcher de donner à boire de l'eau aux pauvres nègres. Un a été tué à Ville-sur-Illon et 3 à Dompaire.
Les ponts de Frouard et Pompey, étaient sautés mais comme les autres, ils avaient été rapidement réparés et nous avons passé dessus. Quant au pont du chemin de fer du K344.000 quand passerons-nous dessus ? Il parait qu'ils ont sauté le lundi 17 et que les Français ont résisté à Frouard où de nombreux civils ont été arrêtés comme otages, mais libérés grâce aux supplications de Monsieur le Curé Bernecker.

Le 24 juin 1940,
j'ai fait une bonne nuit car j'étais fatigué, à 7h00, je reprends mes occupations. Il fait beau, je fais un tour en ville. Comme hier soir, la ville est pleine de monde. On ne parle que des pillages effectués par la populace, même par des personnes qui se disaient honnêtes, c'est navrant. Les réfugiés continuent à rentrer. A 14h00, passent les Belleville, Thomardel, Maire, Stutter, etc. . A 14h15 je pars à Custines. Je vois Clément qui me dit avoir vu le 82 R.I.F. passer à Magnières mais il n'a pas eu de nouvelles d'Alexandre. Je passe la Moselle en bateau, le pont ayant sauté le 17 et Custines avait été occupé le 18.
Jean-Marie, Marie-Louise et M. et Mme Henry sont en bonne santé.
A l'aller j'avais pris la route ; je rentre à 18h30 par la voie. L'avenue de la Moselle a été toute abîmée par la destruction du pont, Frouard également et aussi par la bataille car les Français ont résisté à l'entrée du pont.
Le soir le temps se met à la pluie. Monsieur le Curé Gauche à Custines me confirme que l'armistice a bien été signé. Il a déjà la T.S.F. mais ici encore pas de lumières, pas de nouvelles. Nous ignorons complètement ce qui se passe.

Le 25 juin 1940,
le temps est pluvieux. Je pensais aller rechercher la famille à Ville-sur-Illon avec Monsieur Zanetta mais hier soir ordre de rendre toutes les armes à la Mairie et toutes les autos, camions et motos pour 19h00 et d'avancer l'heure de 1h00. Aussi mes plans sont dérangés et en plus, il faut maintenant des passeports. A 14h00 je fais une démarche à la Mairie pour activer le retour de la famille.
En passant chez Mme Hector elle me dit que les ponts des Chemins de fer et du canal ont sauté le 17 juin à 8h00 et le pont de la route à 6h00 le 18 et que les Français ont résisté jusqu’à 8h00 le 18 à l'entrée du pont et à Frouard.
Il parait que chez la sœur à Marie-Louise il s'est passé quelque chose. On a du piller et faire des horreurs.

Le 26 juin 1940,
le temps est couvert et pluvieux. Je vois passer Marcel qui va à Nancy à la farine avec des chevaux. Toujours pas de nouvelles.

Le 27 juin 1940,
le temps est assez beau, mais que de cancans. Nous sommes toujours sans nouvelles. On me dit que la flotte française continue la lutte ; je le souhaite, mais est-ce vrai ? On dit que la Russie, la Turquie et, même la Hongrie ont déclaré la guerre à l'Allemagne. Je n'y crois guère. On me dit même que 1900 avions ont bombardé l'Angleterre et que 30 seulement sont rentrés, quelle absurdité. En tout cas j’espère que l'Allemagne n'aura pas l'Angleterre. Dans la soirée nous avons à nouveau l'électricité et alors j'entends que l'Angleterre continue la lutte. J’en suis content, elle nous tirera peut-être de notre triste situation et alors j'ai la confirmation que nous sommes en armistice avec l'Allemagne et l'Italie, c'est une peu glorieuse victoire pour notre sœur latine.
Je suis toujours seul. Lundi, c'était le manque d'autos, mardi, c'était la réquisition, hier c'était les passeports, aujourd'hui c'est le manque d'essence qui m'empêche d'aller à Ville-sur-Illon rechercher ma famille.

le 28 juin 1940,
beau temps, je vais dîner à Custines. Là j'entends à la radio allemande, car la française n'existe plus, que la Russie réclame à la Roumanie la Bukovine et la Bessarabie. J'avais toujours prévu cela, alors c'est absolument le contraire des cancans d'hier.

Le 29 juin 1940,
dans la soirée, j'ai l'agréable surprise d'apprendre que Jean est rentré. En effet, rentrant des champs j'ai le bonheur de souper avec lui chez Monsieur Buremont. Il me raconte que le reste de la famille passe la nuit à Nancy. Ils ont quitté Ville-sur-Illon à 9h30 en voiture, pris le train à Dompaire, ont passé la Moselle à pied à Pont-Saint-Vincent.

Le 30 juin 1940,
à 6h00 nous partons à Frouard avec deux brouettes pour ramener tout le monde et les bagages, quel bonheur de se retrouver tous. Nouveau transbordement des bagages à Frouard, le pont du canal face à la gare étant sauté, il faut passer sur une péniche en travers du canal. Enfin, vers 9h00 tout le monde est à la maison, le beau temps continue et l'occupation allemande aussi.


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* * *

JUILLET 1940


Le 1er juillet 1940,
je reprends mon service. Il y a 2 trains de Conflans à Pompey et les trains de Nancy viennent à l'entrée du pont de Frouard. Les réfugiés qui continuent de rentrer viennent à pied avec leurs bagages à la gare de Pompey.

Les 2, 3 et 4 juillet 1940,
rien de nouveau.

Le 3 juillet 1940,
au soir le temps se met à la pluie. On ne sait absolument rien.
Est-on en paix ou en guerre, les uns disent que des forts de la ligne Maginot résistent, d'autres que le gouvernement Raynaud avec le général De Gaulle veulent la lutte à outrance, que le gouvernement Pétain Weygand est déclaré traître à la patrie. Une partie de la marine continuerait la lutte. Les Allemands seraient entrés en Espagne, ils viseraient alors Gibraltar ; les Russes seraient entrés en Roumanie. Ce qui est sûr, l'Angleterre continue la lutte. Il parait que les avions anglais ont survolé la région les nuits écoulées.
L'usine a essayé de remettre en route le 1er juillet aussi le 2 nous avions de l'eau à la gare de Pompey.
Pendant que j'écris, une sentinelle allemande est devant moi gardant des wagons de ravitaillement arrivés hier.

Le 4 juillet 1940,
au soir je vois de nombreux soldats Français prendre le train, ce sont les Alsaciens-lorrains que les Allemands libèrent.
On dit que la flotte anglaise bombarde la flotte française à Oran et nous aurait coulé deux navires.

Le 5 juillet 1940,
on me dit que l'armistice a été conclu le 23 Juin avec l'Allemagne et le 24 avec l'Italie. On raconte que les Anglais sont à Dunkerque, à Cambrai, même à Soissons, quelle blague. Il y en a probablement mais ils sont prisonniers. On dit aussi que les États-Unis ont donné 72 heures à l'Allemagne pour évacuer la France.
La chaleur revient à nouveau. Marie-Louise et Jean-Marie sont revenus hier à Pompey. Toujours pas de nouvelles d'Alexandre. Il y a des prisonniers de son régiment à Rambervillers et Baccarat.

Le 6 juillet 1940,
je retrouve de l'encre. Il fait beau. Vers 15h00 passe une longue colonne de prisonniers. Contrairement à ce que j'ai vu à Ville-sur-Illon, les noirs ont le droit de boire, même de la bière. Ils entrent même dans les cafés. Ils viennent de Pont-Saint-Vincent. Toute la nuit les troupes allemandes ont traversé Pompey allant vers le Nord. l'attaque de l'Angleterre doit se préparer.

Le 7 juillet 1940,
temps pluvieux. Encore une longue colonne de prisonniers vers midi. A partir d'aujourd'hui, les cafés sont ouverts aux civils seulement de 10h00 à 13h00 et de 17h00 à 20h00.
Toujours des bruits contradictoires. On dit que la flotte française a bombardé Gibraltar. J'ai peine à le croire.

Le 8 juillet 1940,
vers midi, toujours des prisonniers allant vers Pont-à-Mousson et toujours le retour des réfugiés, c'est une vraie cohue à la gare et sur la route. Assez belle journée avec une averse le soir.
La radio dit que les Anglais auraient abandonné Gibraltar et Malte, j'en doute.
André Parisot a été tué vers Chaumont le 18 juin.

Le 9 juillet 1940,
beau temps. Vers midi encore un interminable défilé de prisonniers. Comme les jours précédents, il dure plus d'une heure. La population pourtant fortement rationnée, distribue tout ce qu'elle peut donner, pain, sucre, café, vin, bière, etc. . Mais que c'est navrant de voir ces tristes défilés, on se demande comment l'armée française avec ses merveilleuses traditions a pu en arriver là.
Le désarroi de notre armée était si grand que la veille de l’arrivée des Allemands à Ville-sur-Illon, c'est-à-dire, le 18 juin dans la soirée, un side-car sûrement allemand avec deux hommes sans armes apparentes, s’est arrêté devant nous, nous a regardés sans rien dire, a fait demi-tour et est reparti vers Darney par où ils sont arrivés le lendemain. Les soldats Français isolés ou en groupes, avec ou sans armes, laissaient circuler sans les arrêter ces éclaireurs. Cela ne peut être comparable qu’à la déroute de l'armée Russe en 1917-1918 et c'est sûrement la même cause, le communisme qui est responsable du désastre.
Il y a maintenant un journal à Nancy, c'est naturellement sous contrôle allemand, il s'intitule Nancy-Presse.

Le 10 juillet 1940,
beau temps, nous commençons à nous serrer la ceinture. A partir d'aujourd'hui à Pompey, le pain est rationné à 300 grammes par personne sans distinction d'âge. Dans d'autres communes, les hommes ont 500 g, les femmes, vieillards et enfants ont 300g, 200g et 100g. Nous avons 750 grammes de sucre depuis le 1er Juin. Maintenant les vivres et objets de toutes sortes commencent à se faire rares.

Le 11 juillet 1940,
temps pluvieux. Yvonne achète le n° 3 de Nancy-Presse en date du 10 Juillet ; très petit format mais 4 pages, aucune nouvelles des événements mondiaux, rien que des informations locales.
Il parait que la radio d’hier annonçait l'entrée à Lyon aujourd’hui des soldats de la ligne Maginot qui ne s'étaient pas rendus. Si seulement Alexandre y était.
Il parait que les Allemands nous ont demandé 43 milliards de francs or. L'Alsace-Lorraine et le Cameroun, et sous la pression de l'Amérique, s'engageraient à évacuer la France rapidement. On dit même pour dimanche prochain, mais j'en doute.
En tout cas je viens d'avoir le premier contact avec ceux qui viennent réparer le pont de Frouard.
Il parait que les anglais ont bombardé les environs de Sarrebourg et nous ont saisi ou coulé des navires de guerre ou de commerce.
Le chômage commence à se faire cruellement sentir. Peu de monde travaille surtout dans les usines.

A midi, je lis Lyon-Soir du 26 juin. Il y a le détail des nombreuses clauses des armistices Franco-allemand et Franco-italien. L'allemand a été signé dans la forêt de Compiègne le 22 Juin 1940 à 21h40, heure d'été allemande, on ne dit pas les signataires. L’italien a été signé par le général Français Huntziger et le Maréchal Italien Badoglio. On n'indique ni le lieu, ni l'heure. Les hostilités ont cessé le 25 Juin à 1h35. A cette heure l'ennemi était arrivé à l'embouchure de la Gironde, à Saint-Etienne, Annonay et Aix-les-Bains. La ligne de démarcation pendant l'armistice passe près de Genève, Dôle, Parey-le-Monial, Bourges, 20 km à l'Est de Tours et à l'Est du chemin de fer, Tours, Angoulême, Libourne par Mont-de-Marsan, Orthez et la frontière Franco-Espagnole.
Sur le front Italien, 50 km sont démilitarisés en avant de leurs troupes et Toulon, Ajaccio, Bizerte, Mers-El-Kébir sont sous leur contrôle.
A l'heure de l'Armistice, une bonne partie de la ligne Maginot tenait encore, sauvant l'honneur.

Le 12 juillet 1940,
on dit que monsieur Lebrun a démissionné.

Le 13 juillet 1940,
on dit que c'est le maréchal Pétain le maître de la France. le président Lebrun quitterait la zone libre pour revenir à Mercy-le-Haut.

Le 14 juillet 1940,
triste fête nationale. Pas un drapeau Français. A l'église un service pour les morts de la guerre.

Le 15 juillet 1940,
rien à signaler.

Le 16 juillet 1940,
on raconte que les généraux commandants au Maroc et au Levant doivent continuer la lutte. Les Anglais bombarderaient violemment les installations allemandes. Ce serait Laval qui dirigerait la France sous les ordres de Pétain. Tout le monde a un peu d'espoir dans la victoire de l'Angleterre, naturellement, moi aussi. Beaucoup comptent toujours sur la Russie et l'Amérique.

Le 17 juillet 1940,
une lettre de Tante Marthe nous dit que des prisonniers du 82 R.I.F. lui ont dit qu'Alexandre était au repliement du régiment, mais à Custines, Monsieur Henry me dit que le 19 juin le 82ème a subi un rude coup d'après les dires d'autres prisonniers.

Le 18 juillet 1940,
on raconte que le Maréchal Pétain va s'installer à Versailles et le ministère, comptant 12 ministres et 3 sous-secrétaires d'état, se réinstallerait à Paris dans les ministères. les Allemands occupent l'île d'Ouessant.

Le 19 juillet 1940,
mon Chef de district, libéré, Monsieur Adam reprend son service.
La démobilisation de l'armée Française se trouvant en territoire non occupé est commencée. Mais quand rentreront nos 2 000 000 de prisonniers.
Un lieutenant du 165 R.I.F. (ligne Maginot), Monsieur Hoffmann de Pompey me dit que cette fameuse ligne a été enfoncée le 15 juin à Cappel, c'est là que se trouvait notre cher Alexandre. Qu'est-il devenu. En tout cas, toujours pas de nouvelles de lui, nous commençons à nous inquiéter.

Le 20 juillet 1940,
de nombreux démobilisés Belges et Français en tenue commencent à rentrer. Le retour des réfugiés continue, les rares trains sont bondés.
Les Français résidant en Alsace-lorraine ainsi que les Juifs, Polonais et noirs coloniaux sont expulsés dans le plus bref délai et ont le droit d'emporter seulement 200F et 20 kg de bagages par personne.

Le 21 juillet 1940,
à Custines, les officiers Allemands font savoir qu'ils désiraient être salués par les Français. Je vais à Norroy toujours pas de nouvelles d'Alexandre ni de René.

Le 22 Juillet 1940,
dans la soirée, Madame Barbier qui a vu son mari prisonnier nous dit qu'il ne reste que 400 hommes du 82ème aussi nous n'avions plus guère d'espoir de revoir Alexandre quand à 21h00, Monsieur Collinet nous dit que son frère Maurice Lamberteaux l'a vu prisonnier se dirigeant vers Sarrebruck. Aussi nous espérons recevoir bientôt de ses nouvelles.

Les 23, 24 et 25 juillet 1940,
il pleut fortement comme les jours précédents.
Des milliers de prisonniers quittent Nancy par train de 2000 hommes. Ils partent en Allemagne, dans des wagons couverts, ligaturés avec du fil de fer pour qu'ils ne puissent ouvrir les portes et s'évader. C'est des procédés employés pour le transport du bétail. On ne se croirait pas au 20ème siècle.
D'après les dires de nombreux prisonniers que les familles vont voir, les troupes de la ligne Maginot se repliant en combattant jusqu'au Donon ont soutenu de durs combats. Le 82 R.I.F. avec son colonel s'est particulièrement distingué. Le dernier communiqué allemand du 25 juin disant qu'un Général de corps d'armée, trois de divisions et 22 000 hommes s'étaient rendu dans la région du Donon faisait sûrement allusion à ces troupes qui ne se sont rendues qu'à l'armistice ou n'ayant plus ni vivres ni munitions. Si une partie de l'armée était démoralisée par la motorisation et l'aviation, certaines unités ont eu une conduite magnifique.

Le 25 juillet 1940,
au soir à 21h15, nous écoutons à la radio de Londres une intéressante causerie de Mlle Curie et deux discours. Cela nous redonne confiance.
Les États-Unis vont livrer 300 avions par mois à l'Angleterre et tout le pétrole nécessaire. Pourvu qu'elle puisse empêcher le débarquement allemand qui sera sûrement tenté. Nous avons confiance qu'elle usera l'Allemagne.
Les Allemands ont coulé le navire français Mekriès qui transportait 1300 soldats de retour d'Angleterre. C'est une nouvelle infamie. Les Anglais ont sauvé environ 1000 survivants.

Le 26 juillet 1940,
il pleut à verse toute la matinée. A 14h00 je passe sur le pont de Frouard dont l'emplacement de la voie TT a été réparé. Nous achevons la pose de cette voie l'après-midi. Pour l’emplacement de la voie 1, il n'en est pas question,.

Le 27 juillet 1940,
beau temps. Il parait qu'il y a de nouveaux billets de la banque de France. C'est le roi Henri IV qui figure dessus avec la devise « labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France ». J'avais appris cela à l'école, mais les temps derniers au lieu d'apprendre cela aux enfants, on leur faisait chanter l'Internationale ou la Carmagnole. Le patriotisme et la religion étaient laissés de côté ainsi que la Marseillaise. Nous payons cela aujourd'hui. la République Française semble bien abolie.
Vers 15h30 un train fait des essais de résistance sur le pont de Frouard. On nous distribue un brassard et une carte pour circuler sur le chemin de fer. Me voilà obligé de porter les couleurs allemandes et la croix gammée abhorrées. Le soir, orage avec grêle.

Le 28 juillet 1940,
plusieurs trains de matériaux passent sur le pont. Vers 18h00 une mauvaise nouvelle nous parvient. Le fils Lamberteaux libéré parce que né en Alsace-lorraine, dit à Jean qu'il n'a pas vu Alexandre. Quelle déception pour nous. Malgré tout nous gardons un peu d'espoir de le revoir, mais comme sa compagnie a du rester pour protéger la retraite et que la ligne Maginot a du être enfoncée à Cappel, le 15, il a pu être enseveli avec ses quatre hommes dans sa casemate les 12, 13, 14 ou 15 juin.
Si seulement je pouvais aller à Cappel mais impossible pour le moment.

Le 29 juillet 1940,
à 9h20 arrive à Pompey le 1er train de voyageurs venant de Nancy. C'est fini le transbordement de Frouard (sur P.N. ligne de Paris au bout du pont de la Moselle) à Pompey. Il commence à circuler des machines allemandes et des trains de troupes. On fait voie unique de Frouard à Pompey par voie TT. A l'usine plusieurs centaines d'ouvriers travaillent par roulement : 3 jours de travail, 3 jours de repos. A 17h00 je prends à Pompey pour Frouard le 1er train de voyageurs pour Nancy. Il vient toujours de Conflans. Les Allemands et des civils Français réparent à Frouard les ponts du canal.

 

Bonjour Charles signé : Mourot.
C'est mon camarade Mourot de Pont-à-Mousson qui ne me voyant pas à mon bureau le 27, m'envoyait le bonjour, j'arrivais aussitôt.
cliquez pour découvrir la page 42 du journal d'Alexandre

 

On sait maintenant que les Allemands n'ont évacué Lyon qu’après que le reste de la ligne Maginot ait mis bas les armes sur l'ordre du gouvernement bien après l'armistice. Les troupes sont néanmoins prisonnières mais semblent avoir un régime de faveur. C'était les troupes de la zone non occupée qui rentraient à Lyon il y a quelque temps et non les héros de la ligne Maginot.
Tous les soirs nous écoutons la radio de Londres qui nous tient un peu au courant des événements. Quelques Français, soldats, marins, aviateurs continuent la lutte. Quel Malheur qu'ils ne soient pas plus nombreux. Les ennemis s'efforcent de brouiller la radio de Londres, il y a des jours à peine si nous l'entendons.

Le 30 juillet 1940,
le général de Gaulle à 21h15 reproche au gouvernement Pétain-Laval d'avoir abandonné à l'ennemi la France d'outre-mer et demande à celle-ci de continuer la lutte avec les anglais.
Nous commençons de souffrir du blocus. On fait la queue devant les magasins pour n'avoir pas grand chose, quelque fois rien. Il paraît que les Anglais ont bombardé à plusieurs reprises la gare de Metz et d'autres endroits dans les environs, mais est-ce vrai ?

Le 31 juillet 1940,
vers 9h00 on dit que l'on voyait les éclatements de la D.C.A. allemande vers Pont-à-Mousson. les Anglais nous jetteraient des tracts encourageants.


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* * *

AOUT 1940


Le 1er août 1940,
vers 16h00 à Frouard, je vois un grand train de prisonniers arrêté depuis un certain temps. Il va de Baccarat à Sedan. De nombreux civils sont là pour voir s'ils n'en connaissent pas et distribuent ce qu’ils peuvent donner, surtout de l'eau car tout devient rare et peu de monde travaille.
Les wagons sont ouverts pendant l'arrêt mais d'un seul côté. Il n'y a pas de bancs, les hommes sont obligés d'être debout ou assis sur le plancher. Ils ne doivent pas descendre pendant l'arrêt mais sans doute que quelques-uns uns ayant descendus, plusieurs coups de feu éclatent, probablement tirés en l'air. Panique dans la foule qui néanmoins reste là.

Le 2 août 1940,
le Général De Gaulle est condamné à mort.
De nombreux volontaires américains débarquent en Angleterre avec les Canadiens.

Les 3 et 4 août 1940,
rien à signaler si ce n'est que l'Est Républicain reparaît sous le nom de l'Écho de Nancy, se vend 1.00 F et est nettement d'inspiration Allemande. Il reproduit les nouvelles de la guerre.

Le 4 août 1940,
par les cheminots de Sarreguemines, j'essaie d'avoir des nouvelles d'Alexandre.

Le 5 août 1940,
R.A.S.

Le 6 août 1940,
un soldat du 82ème dit à mon frère que les casemates de Cappel ont été prises d'assaut avec des lance-flammes. Ce doit être dans la nuit du 14 au 15 juin, aussi l'espoir de revoir vivant Alexandre diminue de jour en jour. Pauvre cher Alexandre quelle mort il a dû avoir dans sa casemate dans laquelle il avait tant confiance ainsi que dans la victoire. Nous n'osons y penser et le saurons nous jamais.

Le 7 août 1940,
l'offensive italienne en Afrique semble commencée.

Le 8 août 1940,
par la Croix-Rouge à Nancy, nous tâchons d'avoir des nouvelles d'Alexandre.

Les 9, 10 et 11 août 1940,
de violents combats aériens se déroulent aux abords et au-dessus de l'Angleterre. Les Anglais semblent avoir l'avantage mais ont abandonné les îles anglo-normandes, c'est-à-dire Jersey, Guernesey, Anvigny, etc.

Le 12 août 1940,
nous apprenons qu'un camarade d'Alexandre, déclare être avec une dizaine de copains dans une ferme d'Allemagne. Cela nous redonne un peu confiance, c'est le sergent Fouchard de Nomeny. Un autre soldat de la 6ème Compagnie de Morey est blessé en Allemagne.

Le 13 août 1940,
un autre soldat de la 6ème, Klein de Nancy fait savoir qu'il est aussi en Allemagne avec Frémet de Nancy qui a écrit le 26 juillet. C'est le 4ème survivant de la 6ème du 82 R.I.F. que nous connaissons.
L'offensive aérienne allemande sur l'Angleterre semble commencée. On parle de 50 à 90 avions allemands abattus plusieurs jours de suite.

Le 14 août 1940,
rien d'important à signaler.

Le 15 août 1940,
jour de l'Assomption, un jeudi, environ 1000 avions attaquent l'Angleterre, 169 sont descendus.
L’Italie avance en Somalie et semble chercher querelle à la Grèce.

Les 16, 17 et 18 août 1940,
R.A.S., le 19 idem.

Le 20 août 1940,
grand discours de Monsieur Churchill. Il annonce la confiance de l'Angleterre en la victoire finale malgré la défection du gouvernement français qui aurait dû continuer la lutte avec la marine, les colonies et l'aviation. C'est du reste l'avis de presque tous les Français. L’Angleterre se prépare pour continuer la guerre en 1941 et 1942 s’il le faut.
C'est écœurant de lire maintenant les journaux Français. C'est exactement comme si nous étions Allemands. Aussi, nous n'en achetons plus.
Marie-Louise écrit à la Croix-Rouge pour tâcher de savoir ce qu'est devenu notre cher Alexandre que Jean-Marie appelle fréquemment.
C'est Sully qui est sur les nouveaux billets et non Henri IV.

Les 21, 22, 23 et 24 août 1940,
rien de nouveau si ce n'est que les Italiens ont pris la Somalie Anglaise et que les Roumains ont rendu la Dobroudja à la Bulgarie.

Le 25 août 1940,
R.A.S.

Le 26 aoû 1940t,
le Duc de Guise meurt.

Le 27 août 1940,
la colonie du Tchad sous le commandement du Colonel Marchand reprend les armes aux côtés de l'Angleterre. Si seulement le reste des colonies Françaises suivaient cet exemple. Il faut dire que le gouvernement qui est toujours à Vichy n'a plus de relations avec Londres, autant dire que nous sommes en guerre avec l'Angleterre mais c'est sous la pression de l'Allemagne et de l'Italie. Les sentiments français malgré les malheurs n'ont pas changé et le Général de Gaulle ranime nos espoirs.
Berlin et Londres ont des alertes et des bombardements assez fréquents ainsi que l'Angleterre, l'Allemagne et l'Italie en grande partie. La situation est tendue entre la Roumanie et la Hongrie.

Le 28 août 1940,
R.A.S.

Le 29 août 1940,
Jean reprend son service à l'usine.
Le Cameroun, l'Afrique Équatoriale reprennent les armes.

Le 30 août 1940,
toutes nos colonies océaniennes semblent en faire autant.
Sous la pression ennemie, la Roumanie cède à la Hongrie ses anciens territoires et revient pour bien dire à ses limites de 1912.

Le 31 août 1940,
rien d'important.


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* * *

SEPTEMBRE 1940


Le 1er septembre 1940,
la grand messe est dite à la paroisse à l'intention de notre cher Alexandre dont nous sommes toujours sans nouvelles.

Le 2 septembre 1940,
R.A.S.

Le 3 septembre 1940,
les États-Unis cèdent 50 contre-torpilleurs à l'Angleterre.
Le même jour suite au sabotage de fils électriques à Pompey, de nombreux jeunes gens sont arrêtés dans la soirée.

Les 4, 5 et 6 septembre 1940,
R.A.S.

Le 7 septembre 1940,
26ème anniversaire de notre cher Alexandre. Une nouvelle nous redonne un peu d'espoir. Nous apprenons que le fils Lavied, sergent chef à sa compagnie est prisonnier en Allemagne. Il est peut-être avec lui.
Le roi de Roumanie a abdiqué.

Le 8 septembre 1940,
la guerre aérienne redouble de violence, dans la région de Londres il y a eu au moins 400 civils tués et 1500 blessés. Des prières publiques ont été dites ce jour en Angleterre et aux États-Unis.
88 avions allemands ont été abattus contre 26 anglais.

Le 9 septembre 1940,
Monsieur Lavied reçoit 3 lettres de son fils. Celui-ci dit qu’il est prisonnier dans une ferme mais seul de son régiment. Il a été pris le 14 juin à 8h00. Cela nous replonge dans l'inquiétude car il ne dit rien d’Alexandre, et son père nous dit qu'il se trouvait à 1800 m de lui.

Le 10 septembre 1940,
R.A.S.

Le 11 septembre 1940,
Monsieur Churchill annonce que la semaine qui suit verra probablement la tentative d'invasion de l'Angleterre, mais celle-ci s'apprête à faire face au danger. Les concentrations de navires ennemis laissent prévoir l'attaque et la guerre aérienne est toujours aussi vive.
vers 20h00 passe allant vers Metz un grand train d'officiers Français prisonniers. Ramassant des lettres qu'ils nous jettent au passage, je suis mis en joue par deux sales Boches, heureusement, ils n'ont pas tiré.

Le 12 septembre 1940,
à 1h00, un avion anglais jette trois bombes entre Dieulouard et Blénod aux abords du chemin de fer et de la route; un mouvement de troupes avait justement lieu, il devait le savoir.

Le 13 septembre 1940,
les avions ennemis bombardent le palais de Buckingham où résident les souverains; d'Angleterre. Ceux-ci sont indemnes mais il y a trois blessés et des dégâts.

Le 14 et le 15 septembre 1940,
la guerre aérienne continue violemment.

Le 16 septembre 1940,
les Anglais annoncent que le 15 les Allemands ont subi leur première défaite de la guerre. Ils ont perdu 187 avions et plus de 500 aviateurs. Les Anglais n’ont même pas perdu 30 avions et la moitié des aviateurs sont saufs.
Les Italiens ont avancé en Égypte où ils ont occupé le port de Sollum.
Les Anglais ont anéanti la base de Calais.

Monsieur le Chanoine Pérignon, curé de Pompey meurt à 87 ans.

Les 17 et 18 septembre 1940,
R.A.S.

Chanoine PÉRIGNON (1852-1940)
Chanoine PÉRIGNON
(1852-1940)

Le 19 septembre 1940,
nous sommes toujours sans nouvelles de notre cher Alexandre et je n'ai plus guère d'espoir de le revoir, d'autant plus qu'un soldat d'un régiment voisin vient de raconter que l’attaque Allemande avait eu lieu le 14 juin dans la matinée sur Barst et Cappel et que les casemates avaient été anéanties. C'est à peu près certain qu’il a été tué dans sa casemate avec ses quatre hommes. Au moins, ont-ils une tombe. Ils sont peut-être restés écrasés sous les blocs de béton. Quelle angoisse de ne rien savoir et dire que nous ne pouvons aller à Cappel prier sur sa tombe.

Les 20, 21 et 22 septembre 1940,
R.A.S., si ce n'est que les vivres, les tissus, les vêtements deviennent de plus en plus rares. On a plus que 250 grammes de sucre par personne pour septembre. Cependant malgré les cartes, le pain est à peu près à discrétion. On a les cartes pour presque toute l'alimentation.

Le 23 septembre 1940,
les Japonais débarquent en Indochine, il semble que nous ayons un peu résisté.
Le Général de Gaulle se présente devant Dakar avec l'escadre Française libre. Il essaye de débarquer sans armes, malgré les parlementaires, les gouverneurs ont la lâcheté de les repousser à coups de canon. Il y a de nombreuses victimes. C'est le commencement de la guerre civile aux colonies. Nous espérons que De Gaulle vaincra ces résistances.

Les 24 et 25 septembre 1940,
R.A.S.

Le 26 septembre 1940,
de nombreux avions français bombardent Gibraltar, c'est une infamie et une trahison plus grande que celle des Saxons à Leipzig. Nous nous demandons comment des Français ont pu donner et exécuter de tels ordres. Après avoir fuit devant eux, nous aidons maintenant les Allemands. C'est à désespérer de la France. Nos glorieux morts de 1914-1918 et de la présente guerre doivent frémir d'indignation dans leurs tombes.


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* * *

OCTOBRE 1940


Le 8 octobre 1940,
la guerre aérienne continue. Un pacte a été conclu entre le Japon, l'Allemagne et l'Italie. Il vise les États-Unis, aussi il se pourrait que ceux-ci se mettent avec les Anglais.
Marie-Louise demande des nouvelles d'Alexandre au ministère des pensions. Nous n'avons toujours pas de réponses à nos demandes.
Le Général Weygand se rend en Afrique pour empêcher nos colonies de se joindre au Général De Gaulle et aux Anglais.

Le 7 octobre 1940,
les Allemands passant en Hongrie envahissent la Roumanie.

Le 8 octobre 1940,
un habitant de Pompey, Monsieur Tarral me dit avoir passé à Cappel qui n'est pas trop abîmé ni les casemates, mais il y a de nombreux trous d'obus et beaucoup de tombes dans les champs. Il ignorait que notre cher Alexandre qu'il connaissait s'était trouvé là. Il est probablement passé près de sa tombe sans le savoir. Toujours pas de nouvelles de lui. Quelles angoisses.

Pour octobre, on aura 500 grammes de sucre et 100 kg de chauffage par mois.

Le 9 octobre 1940,
le ministère des pensions nous répond qu'il n'a pas de nouvelles d'Alexandre.

Le 10 octobre 1940,
une nouvelle nous redonne un peu d'espoir sur le sort d'Alexandre. L'homme qui m'avait renseigné le 8 sur son passage à Cappel vient nous dire qu'il a vu ce matin un ancien du 82ème des environs de chez lui car il est originaire des environs de Sarreguemines. Il paraît que dans la casemate n° 6 de Cappel les 5 hommes sont prisonniers. Dans la n° 7, il y a eu 2 tués, les 8 survivants seraient prisonniers aux confins de la Pologne. Enfin la même incertitude persiste sur son sort. C'est bien poignant pour nous tous.
Le général De Gaulle débarque à Douala, (Cameroun) aux acclamations de la population.

Du 11 au 16 octobre 1940,
la situation semble se compliquer dans les Balkans. la Turquie, la Grèce, la Yougoslavie se sentent menacées et se tiennent sur leurs gardes.
La Russie ne dit rien mais semble observer. Je crois que les Allemands n'osent pas tenter de débarquer en Angleterre. Ils vont probablement tenter une diversion sur le canal de Suez mais il faudrait passer par la Turquie et celle-ci est prête à résister. Il est vrai que les Italiens sont en Tripolitaine, même en Égypte, mais la flotte anglaise vieille.

Le 12 octobre 1940,
le croiseur Ajax a coulé sur les côtes de Sicile trois contre-torpilleurs Italiens.

Les 17 et 18 octobre 1940,
R.A.S.

Le 19 octobre 1940,
les Anglais divulguent que les Allemands ont essayé de débarquer le 16 septembre avec des bateaux à fond plat contenant environ 200 hommes. Ils ont complètement échoué et ont eu de 40 000 à 50 000 hommes tués, blessés ou noyés.

Le 20 octobre 1940,
les Allemands avouent avoir perdu 40 000 hommes.

Le 21 octobre 1940,
Monsieur Churchill à 21h30 parle aux Français. Il nous dit la volonté de l'Angleterre de vaincre et de restaurer la France dans son intégrité. Il nous demande seulement si nous ne pouvons aider l'Angleterre de ne pas la combattre.

Le 22 octobre 1940,
Laval rencontre Hitler et Ribentropp à Paris.

Le 23 octobre 1940,
Hitler et Franco se rencontre à la frontière Franco-Espagnole.

Le 24 octobre 1940,
Hitler invite le Maréchal Pétain à le rencontrer. Il semble que Hitler aux abois cherche des appuis. la rencontre de Hitler et du Maréchal Pétain a lieu le 24 dans une petite gare de la zone occupée. C’était à Montoire.

Les 25 et 26 octobre 1940,
des bruits contradictoires circulent sur cette rencontre.

Le 27 octobre 1940,
le bruit court que le Maréchal Pétain a accepté les conditions de Hitler et que la paix serait signée, la consternation est générale. L’Amérique annonce aussitôt qu'elle va aider l'Angleterre de toutes ses forces et s’armer elle-même.
Le Général De Gaulle se proclame Chef de l'État Français libre, et de Brazzaville au Congo Belge lance un émouvant appel à tous les Français. Il demande à tous ceux qui le peuvent de reprendre les armes.

Le soir nous avons de mauvaises nouvelles de la compagnie d'Alexandre et cela nous plonge dans la désolation, mais j'apprends qu'un nommé Studer, libéré du 82ème à Cappel est à l'équipe de Frouard.

Le 28 octobre 1940,
je vais à 9h00 voir Studer qui était de la 9ème compagnie. Il me dit que tous les hommes des casemates ont été fait prisonniers le 15 juin dans la matinée, qu'il y a peu de victimes, qu'ils ont été emmenés à Stuttgard, et qu'un prisonnier de Pompey lui a dit que notre cher Alexandre était prisonnier avec lui. Alors, nous nous remettons à espérer. Toujours pas de nouvelles de René.
La Grèce ne cédant pas à un ultimatum Italien, est attaquée à 5h30. Les Grecs résistent avec acharnement, la flotte et l'aviation Anglaise arrivent à leur secours.
Hitler et Mussolini se rencontrent à Florence.

Le 29 octobre 1940,
Stuber soupe chez nous, c’est un brave Alsacien de Strasbourg. Par lui, nous avons des nouvelles sûres de ce qui s'est passé à Cappel pendant les journées tragiques de juin. Il nous donne bon espoir pour Alexandre.


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NOVEMBRE 1940


Du 30 octobre au 5 novembre 1940,
les Italiens ont à peine pénétré en Grèce, les Grecs sont même entrés en Albanie.

Le 2 novembre 1940,
on touche du savon pour la première fois depuis l'armistice. Les Anglais ont débarqué dans l'île de Crête.

Le 4 novembre 1940,
je vais à Nancy pour la deuxième fois depuis la guerre. J'allais voir Monsieur Frémet pour avoir si possible des nouvelles d'Alexandre.
Je revois Stuber au retour qui m'affirme à nouveau qu’Alexandre est prisonnier, mais nous en doutons toujours, que c'est poignant.
Nancy est remplie de Boches dont beaucoup ont leurs femmes et leurs enfants. Les magasins n’ont pas assez pour eux. Ils achètent tout, les simples soldats ont 2 marks par jour, ce qui fait 40 francs. Avec cela, ils peuvent acheter.

Le 5 novembre 1940,
les Anglais annoncent avoir eu jusqu’à ce jour 14 000 civils tués et 20 000 blessés.

Le 6 novembre 1940,
les Grecs font plus de 1000 prisonniers.

Le 7 novembre 1940,
Marie-Louise et Jean-Marie, chez nous depuis le début juillet, s'en retournent passer l'hiver à Custines.

Le 8 novembre 1940,
R.A.S.

Le 9 novembre 1940,
monsieur Chamberlain meurt à 72 ans.

Le 10 novembre 1940,
les Anglais font savoir que notre sous-marin Poncelet qui voulait torpiller un de leurs navires, après avoir été endommagé, s'est sabordé. Les Anglais ont sauvé l'équipage, c'était devant Libreville.
Devant l'échec Italien en Grèce, un nouveau commandant en chef Italien est nommé en Albanie.

C'est dimanche, un service a lieu à l'Église pour les morts de la guerre. Monsieur le Curé appelle leurs noms et chaque fois les chantres répondent mort pour la France. Il y a cinq militaires, Decorps, Parisot, Cuny, Lanèque et Dumangin, et cinq civils, c'étaient bien poignant et nous pensions beaucoup à Alexandre et à René dont nous sommes toujours sans nouvelles.

Le 11 novembre 1940,
nous ne célébrons plus l'armistice.
Les Grecs annoncent avoir détruit une division de Chasseurs Alpins italiens. le Russe Molotov se rend à Berlin.

La nuit du 11 au 12 novembre 1940,
3 cuirassés, 2 croiseurs et 2 croiseurs auxiliaires italiens sont coulés ou mis hors de combat par l'aviation anglaise dans le port de Tarente, c'est une grande victoire. Londres nous l'annonce le 13 à 19h15.

Depuis le 11 novembre 1940,
les Alsaciens-lorrains de langue Française sont expulsés, ils sont chassés de chez eux et envoyés en France libre avec seulement quelques bagages; c'est navrant de voir ces trains passer. Les Boches emploient ici la même méthode qu'en Pologne, le transfert de la population pour loger les leurs à la place des expulsés.
Le Général de Gaulle tient maintenant tout le centre de l'Afrique Française.

Les 14 et 15 novembre 1940,
les Grecs continuent à avancer.

Le 16 novembre 1940,
on dit que la Meurthe-et-Moselle serait également expulsée. L'inquiétude se fait sentir dans la population les jours suivants.

Les 7, 18 et 19 novembre 1940,
pas grand changement dans la situation.
Les Italiens semblent en vilaine posture en Grèce et en Albanie. De nombreuses entrevues ont lieu entre les ministres Boches et Macaronis avec les ministres Roumains, Hongrois et Bulgares. Le roi de Bulgarie est convoqué par Hitler en Allemagne et il s'y rend. Il est possible que l'Allemagne voyant les italiens en mauvaise posture aille à leur secours et cherche à entraîner ces trois états dans la guerre contre les Grecs et l'Angleterre, mais la Turquie est prête à se porter au secours de la Grèce et de l'Angleterre.
Quant à la Yougoslavie, elle est probablement prête à défendre son indépendance.

Le 20 novembre 1940,
on apprend que la Hongrie a adhéré à l'axe Berlin, Rome, Tokyo que l'on appelait avant pacte anti-Komintern, c'est-à-dire contre la Russie communiste et maintenant on essaye de faire entrer cette Russie dans cet axe.

Le 21 novembre 1940,
on dit qu'à la suite d'un accord, certains prisonniers vont rentrer et que l'expulsion des Français d'Alsace-lorraine est suspendue. Cependant, il en passe encore 2 trains le 22 au matin.
Dans la matinée les Grecs entrent à Koritza, les Italiens sont chassés de Grèce.
A 19h10, nous avons l'agréable surprise d'entendre la sirène d'alerte, voilà longtemps que nous attendons la visite des Anglais, est-ce eux ou une fausse alerte car nous avons la fin d'alerte à 19h15 sans avoir rien entendu.

Le 23 novembre 1940,
la Roumanie adhère à l'axe.

Le 24 novembre 1940,
la Slovaquie en fait autant.
Pendant ce temps, les Grecs avancent en Albanie.

Du 25 au 30 novembre 1940,
pas grand changement.
Cependant la flotte Italienne au cours d'une rencontre avec les Anglais à l'Ouest de la Sardaigne a été encore endommagée en s'enfuyant à toute vitesse dans ses ports.
Vers minuit dans la nuit du 26 au 27 novembre, mardi au mercredi et 13ème anniversaire de son mariage mon pauvre frère Joseph meurt subitement chez lui à Vandières à l'âge de 39 ans laissant sa femme avec quatre orphelines, quel malheur qui s'abat sur notre famille et nous n'avons toujours pas de nouvelles ni d'Alexandre, ni de René.


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* * *

DÉCEMBRE 1940


Le 1er décembre 1940,
R.A.S.

Le 2 décembre 1940,
j’écris à monsieur le Maire de Cappel pour savoir si Alexandre est enterré là-bas (il a reçu ma lettre mais n'a pas osé me répondre. Il m'a dit qu'il avait attendu des renseignements, je comprends son mutisme et je le pardonne). L'hiver commence, il faisait –8° le matin.

Le 3 décembre 1940,
vers 21h30 un avion probablement anglais lance trois fusées éclairantes au-dessus de Pompey, nous nous attendons à être bientôt bombardés car l’usine marche presque à plein rendement.

Le 4 décembre 1940,
passage d'avions vers 22h00. C'est probablement des Anglais allant bombarder l'Italie, car le 5 on apprend que Turin a été bombardé et chaque fois que l'Italie est bombardée dans le Nord, on entend ici passer des avions.

Le 5 décembre 1940,
le dégel.

Le 6 décembre 1940,
les Indes Françaises passent au général De Gaulle et les Grecs entrent à Santi-Quaranta.

Le 7 décembre 1940,
ils entrent à Argyrocastro.

Le 8 décembre 1940,
R.A.S.

Le 9 décembre 1940,
victoire Grecque, plus de 2000 prisonniers, les anglais attaquent à leur tour en Égypte dans le secteur côtier et capturent 4000 macaronis. les troupes de la France libre, comme on dit, participent brillamment aux opérations d'Égypte.

Les 10 et 11 décembre 1940,
l'avance continue.

Le 11 décembre 1940,
à 21h15 nous entendons le 1er communiqué du quartier général du Général De Gaulle. Les troupes françaises presque toutes en Égypte ont fait de nombreux prisonniers. Ce communiqué nous donne grand espoir.

Le 12 décembre 1940,
les anglais annoncent la reprise de Sidi-Barrani, plus de 20 000 italiens dont 3 généraux ont été fait prisonniers.
Le directeur allemand de Pompey offre à Marie-Louise de nous emmener à Cappel.

Le 13 décembre 1940,
elle obtient à Nancy un passeport pour elle et pour moi. Nous irons à Cappel le mercredi 18 à la recherche de notre cher Alexandre. C'est un beau geste de cet allemand.

Le 14 décembre 1940,
Laval est mis dehors du gouvernement, il est remplacé par Flandin.

Le 15 décembre 1940,
l'avance anglaise continue en Égypte. Le nombre des italiens fait prisonniers se monte à 26 000 et les anglais pénètrent en Tripolitaine. De leur côté, les Grecs continuent à avancer lentement en Albanie.
L'hiver recommence, -4°.

Le 16 décembre 1940,
-6°.
Les Anglais rentrent à Sollum, il n'y a plus un Italien en Egypte.

Le 17 décembre 1940,
-10°.

Le 18 décembre 1940,
par –10° nous partons vers 8h00, Marie-Louise et moi pour notre triste voyage à Cappel à la recherche de notre cher Alexandre. Nous avons la douleur de découvrir sa tombe près de sa casemate sur la crête de Cappel à 17h15. Nous rentrons à Pompey le 19 par le verglas et la neige vers 14h30. Je donne des détails de notre voyage dans les feuilles 47 bis, ter et quater.

Les 20, 21 et 22 décembre 1940,
l’avance grecque et anglaise continue surtout en Afrique.

tombe d'Alexandre CLAUSSE, mort au combat
collection ©Munier&Clausse

Le 23 décembre 1940,
comme une messe est dite à Cappel pour Alexandre, nous allons tous communier ici à celle de 6h45 à son intention.
Le Général De Gaulle nous invite à rester tous chez nous de 15h00 à 16h00 le 1er janvier en guise de protestation contre les allemands, presque tous les Français obéiront, le mot d’ordre se donne discrètement.

Du 23 au 28 décembre 1940,
l'avance Grecque et Anglaise continue lentement. Environ 20 000 Italiens sont assiégés à Bardia en Libye.

Le 28 décembre 1940,
le dégel commence, il continue le 29.

Le 30 décembre 1940,
l'usine de Pompey offre à Marie-Louise de travailler à nouveau à l'usine, ce n'est pas beau, l’usine aurait pu attendre. Elle est déjà lasse de payer une partie du traitement de celui qui a donné sa vie à la patrie. Cependant, elle continue de le payer aux prisonniers dont beaucoup n'ont que ce qu'ils méritent à cause de leur lâcheté.

Le 31 décembre 1940,
triste fin d'année. La pluie a verse, mais triste surtout pour la France écrasée mais non morte. Triste pour notre famille. le cousin Rosan et mon pauvre frère Joseph morts prématurément et sûrement un peu à cause de la guerre 1914-18 et notre cher Alexandre et son cousin René car je n'ai plus d'espoir pour lui, morts au champ d'honneur en héros victimes de l'imprévoyance du front populaire.
Espérons que 1941 et les années suivantes, nous ramènerons la victoire car presque tous les Français ont une entière confiance envers les Anglais et le Général de Gaulle. Espérons que Dieu leur donnera la victoire.


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* * * * * * * * * * * * *

 

- 1941 -

* * *

 

JANVIER 1941


1er janvier 1941,
par un temps exécrable, vers 5h30, nous avons toujours l'heure d'été allemande, passent des avions, sûrement anglais. Ils viennent en guise d'étrennes de porter des bombes aux boches et aux macaronis.
De 15h00 à 16h00 nous restons à la maison, fidèles à l'ordre du général de Gaulle. La neige commence à tomber. On ne voit personne dans les rues, l'ordre a été fidèlement exécuté.

La neige tombant sans arrêt, je passe la nuit du 1er au 2 avec mon équipe à travailler. Le 2 également.

Le 3 janvier 1941,
il gèle très fort et la neige continue à tomber. Il y a bien 30 centimètres, peut-être plus, jamais nous n’en avons tant vu par ici.
A mon service de la voie, nous organisons le service des 3 X 8 mais le service des trains est désorganisé. Il n'y a presque pas de trains et les trains de voyageurs ont un retard considérable.

Les 4 et 5 janvier 1941,
l'hiver continue. Le 5, j'assiste avec Marie, Marie-Louise et Madame Henry à 10h30 à l'église de Custines à la grand-messe offerte par Monsieur le Curé Ganche pour le repos de l'âme de notre cher disparu. Monsieur le Curé nous fait pleurer en prononçant son sermon où il glorifie la mort héroïque d'Alexandre. Jean-Marie vient fort et est toujours meilleur. A Pompey Monsieur le Révérend père Thiriet annonce que le service que nous faisons dire pour Alexandre aura lieu le samedi 11 à 10h00 à l'église.

Le 6 janvier 1941,
à 7h15 les Anglais nous annoncent la prise de Bardia. A 19h15, ils annoncent que Bardia s'est rendue le 5 à 13h30 et qu'ils ont fait prisonniers 6 généraux et environ 30 000 Italiens.

Le 11 janvier 1941,
à 10h00 a lieu le service pour notre regretté Alexandre. Il y avait une nombreuse assistance.
Le même jour nous supprimons le service des 3 X 8 et revenons au

Jean-Marie CLAUSSE âgé d'environ 18 mois
Jean-Marie CLAUSSE
(collection ©Munier&Clausse)

service normal.
Les vivres se font de plus en plus rares. Presque plus de viande, ni de pommes de terre, ni de pâtes, ni de lait, ni de beurre, ni de savon, ni d'huile, ni de graisse, ni de vêtements ni de chaussures, ni de fromage, plus de café depuis longtemps. 300 grammes de pain par personne, les travailleurs ont cependant 400 grammes. Toujours 500 g de sucre par mois et 50 kg de houille seulement pour décembre et encore pour 5 personnes par ménage et l'hiver reste rude. Toujours environ – 10°.

Ma chère femme demeure inconsolable de la mort de notre cher fils, elle nous donne bien de l'inquiétude. Nous avons le cœur déchiré en la voyant soir et matin devant sa photo et celle de René. On voit là le cœur d'une mère et en la voyant on pense à la Sainte Vierge pleurant son Divin fils.

Du 11 au 18 janvier 1941,
l'hiver continue. Le 18 au soir forte chute de neige.
Le Négus d'Abyssinie réforme une armée et établit son quartier général à Khartoum.
On nous dit que c'est un dimanche qu'Alexandre a été enterré où il est maintenant mais nous n'en savons pas plus. Nous n'avons pas de nouvelles ni de Cappel, ni de Maxtadt.

Le 19 janvier 1941,
le dégel.

Le 20 janvier 1941,
la Moselle commence à monter.

Le 21 janvier 1941,
elle déborde.
Hitler et Mussolini se sont rencontrés le 19. Mussolini aux abois semble chercher le secours d'Hitler. l'aviation allemande est déjà en Italie.
Tous les produits se raréfient de plus en plus. On à la carte pour presque tous les vivres, même pour les chaussures. Le blocus anglais se fait sentir, mais tant pis s'il faut souffrir, pourvu que les Anglais nous délivrent.

Le 22 janvier 1941,
Tobrouck en Libye capitule à midi. Les Anglais nous annoncent cette victoire le 23 à 7h15. Les Français se sont distingués à la prise de la ville. Il y a environ 20 000 prisonniers dont 3 généraux et 1 amiral. A la suite de cette affaire, les Allemands prennent le commandement de l'armée Italienne. Quelle honte pour l'Italie.

Les 23 et 24 janvier 1941,
rien à signaler.

Le 25 janvier 1941,
à 10h00 à l'église de Frouard nous assistons sauf Marie-Louise empêchée par la crue de la Moselle, au service commandé par les Intrépides pour le repos de l'âme de notre regretté Alexandre et de son camarade Jean Brocard.

Les 26 et 27 janvier 1941,
rien à signaler.

Le 28 janvier 1941,
nous recevons la réponse de Monsieur Fixe de Maxtadt au sujet de notre cher Alexandre. A notre grand étonnement, il nous dit qu'il le connaissait à peine, qu'il est allé sur sa tombe, mais qu'il ne sait rien de sa mort car il n'était pas avec lui. Alors l’énigme concernant sa mort reste entière, quelle cruelle incertitude, saurons nous jamais comment est-il mort, a t-il souffert ou a t-il été tué net. Peut-être quand les prisonniers rentreront le saurons-nous.

Le 29 janvier 1941,
le Général Metaxas, président du conseil de Grèce meurt dans la matinée.

Le 30 janvier 1941,
Marie-Louise et Jean-Marie viennent chez nous. Leurs présences nous réconforte. Jean-Marie par sa bonne grâce réconforte surtout sa grand-mère. L'après-midi Marie-Louise et Yvonne vont à Nancy. Elles voient aux Magasins Réunis, Monsieur Maurice Louis, c'est lui qui a annoncé aux gens de Pompey la mort d'Alexandre dont il était l'ami.
Étant rentré dans sa famille dans la Moselle, il avait appris en juin lors du repli par des hommes du 8ème sa mort.
Il paraît qu'Alexandre et ses hommes ont été massacrés dans leur casemate soit par les lance-flammes, soit à la grenade ou avec des pétards. Les boches étaient montés sur le dessus, Alexandre n'a probablement pas voulu ou pu se rendre. L'homme que l'on disait blessé dehors à ses côtés n'est pas M. Fixe de Maxtadt, c'est un fermier des environs de Maxtadt mais il ignore son nom. Il tâchera d'avoir des renseignements par M. Fixe sur son compte. Ce fermier, ami d'Alexandre a été en réalité blessé dans la casemate, tandis qu'Alexandre et probablement l'inconnu étaient tués.
Les Boches ont du alors forcer la porte, ont du retirer le blessé, piller la casemate et laisser les morts sur place car en septembre, monsieur louis voulant visiter la casemate a entrevu les cadavres qui se trouvaient encore dedans. C’est honteux pour les Allemands d'avoir laissé ces héros sans sépulture. J'ai toujours confiance qu’ils seront vengés.
Dans la matinée, les Anglais sont entrés à Derna en libye et ils avancent en Erythrée, en Abyssinie et en Somalie, le châtiment commence pour l'Italie. le tour de l'Allemagne viendra après.

Le 31 janvier 1941,
rien de nouveau.


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* * *

FÉVRIER 1941


Le 1er février 1941,
Marie-Louise et Jean-Marie qui vient toujours meilleur, retournent à Custines. Notre pauvre Marie-Louise qui est bien courageuse va reprendre du service lundi 3 février à l'usine de Pompey. Elle retournera au bureau de la correspondance où elle était avant de se marier mais pour le moment elle ne travaillera que les après-midi il lui faut bien la matinée pour s’occuper de la maison et de son cher petit.
C'est malheureux de voir cette pauvre veuve qui aurait du être si heureuse dans son mariage d'être obligée de travailler pour vivre et élever son cher petit.
Quand on pense qu'Alexandre quand il n'y avait plus d'espoir s'est sacrifié pour protéger la retraite on peut dire des fuyards, c'est navrant. Seul des combattants de la trempe d'Alexandre élevés dans l'amour de la religion et de la patrie avaient comme ceux de 1914-18 le courage de tenir. Les autres pourris par les doctrines du front populaire n'en ont pas eu le courage et ont préféré la fuite à la mort glorieuse.

Le 2 février 1941,
les Anglais entrent à Agorda en Erythrée.

Le 3 février 1941,
chute de neige dans la matinée, c'est bien malheureux pour la première journée où la pauvre Marie-Louise recommence à travailler. Au lieu d'aller au bureau de la correspondance on l'a placée au bureau des factures.

Le 4 février 1941,
le froid reprend.

Le 5 et 6 février 1941,
également, il y a 10 degrés de froid.

Le 7 février 1941,
le dégel.
Le soir à 19h15 les Anglais nous annoncent que Benghasi a capitulé le 6 dans la soirée.

Le 8 février 1941,
ils annoncent à 7h15 qu'il y a déjà un général d'armée et un autre de corps d'armée parmi les prisonniers de Benghasi: en Tripolitaine. Il faut dire que l'on appelle ce pays de trois noms, la Tripolitaine, la Cyrénaïque ou la Libye.

Le 9 février 1941,
la flotte anglaise bombarde violemment Gènes et Livourne en Italie.

Le 10 février 1941,
elle bombarde Ostende en Belgique. Les troupes Française du Tchad harcèlent les Italiens dans les oasis du Sud de la Tripolitaine.

Le 11 février 1941,
R.A.S.

Le 12 février 1941,
Franco rencontre Mussolini à Bordighera en Italie. Il se pourrait que l'Italie demande le secours de l'Espagne et peut-être de la France.

Le 13 février 1941,
le général Franco, chef de l'état Espagnol de retour d'Italie, rencontre à Montpellier le Maréchal Pétain chef de l'État Français.

Du 13 au 20 février 1941,
pas beaucoup d'événements, mais il y a un grand mouvement de troupes allemandes et il n'est bruit que d'une attaque imminente de l'Angleterre. Nous avons tous ici confiance qu'elle échouera.
Les États-Unis donnent de plus en plus à l'Angleterre tout ce qu'ils peuvent, et s'arment eux mêmes. Nous espérons qu'ils entreront en guerre un jour ou l'autre. La tension grandit entre eux et le Japon.
La Bulgarie et la Turquie viennent de conclure un accord, je crois qu'il est bon pour l'Angleterre mais les Boches disent le contraire.

Notre pauvre Marie-Louise va peut-être abandonner sa maison de Pompey pour prendre un logement à Custines, quel malheur mais la maison est bien trop grande pour elle et notre bon Jean-Marie. Je les vois assez souvent à Custines et ils viennent nous voir de temps en temps ici et Jean voit encore Marie-Louise à l'usine.

Du 20 au 26 février 1941,
rien d'important. Le 26, le poste de T.S.F. de notre cher Alexandre installé chez nous ne marche plus et on ne trouve plus rien et plus de spécialistes pour réparer, aussi les nouvelles vont être rares chez nous. Il y a bien les journaux à 10 ou 20 sous mais comme tout est favorable aux Allemands, nous les lisons rarement.

Le 27 février 1941,
pour la 1ère fois depuis la débâcle, nous mangeons du porc et nous avons un peu de lard. Il faut dire que les charcutiers en trouvent rarement à acheter, les Boches n'en ont guère laissés.

Le 28 février 1941,
R.A.S.


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* * *

MARS 1941


Le 1er mars 1941,
il court des bruits que le Japon envahit l’Indochine et que la Bulgarie cède ou adhère à l'axe Berlin-Rome-Tokio. Il faut dire que l’Indochine Française était en état de guerre avec le Siam ou Thaïlande et qu'un armistice était en cours sous le patronage du Japon. Les bruits qui courent se rapportent peut-être à cela.

Du 1er au 6 mars 1941,
il court beaucoup de bruits au sujet de la Russie, de l'Amérique et surtout de la Turquie. Les troupes Boches sont entrées en Bulgarie, à la suite de cela l'Angleterre a rompu les relations avec elle et la Turquie aurait minée les Dardanelles.

Le 6 mars 1941,
nous faisons notre première demande de chaussures à la Mairie. C'est bien triste pour les Français d'en être arrivé là. Nous faisons aussi des demandes de bas.

Du 6 au 12 mars 1941,
pas grand chose.
Le 12 on raconte que l'Amérique vient de voter une loi très favorable aux Anglais, la marine de guerre des États-Unis escorterait à l’avenir les vaisseaux américains transportant du matériel en Angleterre.

Du 12 au 19 mars 1941,
R.A.S.,
la paix est conclue entre la France et le Siam en Thaïlande.
Les vivres commencent à manquer sérieusement. Nous n'avons eu que 150 grammes de viande par personne pour la semaine dernière, plus de pommes de terre ou presque, ni de haricots, etc. Il en est de même pour les vêtements. On est obligé de fabriquer de l’espèce de savon avec des recettes plus ou moins bonnes et cela depuis la débâcle.
Il y a aujourd'hui un an notre cher Alexandre venait en permission pour la dernière fois.
La France a cédé au Siam une certaine partie du Cambodge.

Du 19 au 25 mars 1941,
pas grand chose toutefois on disait le 22, jour où on célébrait à Pompey un service commandé par les sous-officiers de réserve dont faisait partie notre cher Alexandre pour les morts au champ d'honneur,
que la Yougoslavie avait adhéré à l'axe (ou est la vaillante Serbie de 1914).

Le 26 mars 1941,
R.A.S.

Le 27 mars 1941,
grâce à un ami de Blainville qui nous procure une lampe, notre poste de T.S.F. marche à nouveau et à 19h15 nous avons le plaisir d'écouter Londres
qui nous annonce que le matin le jeune prince Pierre de Serbie s'est proclamé roi de Yougoslavie et secondé par l'armée et le peuple a chassé le gouvernement qui avait adhéré à l'axe.
La Yougoslavie tout en restant neutre pour le moment passe nettement du côté des alliés. Nous apprenons aussi la prise de Kéren en Erythrée.

Le 28 mars 1941,
les Anglais nous annoncent à 7h15 la prise de Harar la seconde ville d'Abyssinie.


Le 29 mars 1941,
les bonnes nouvelles d'Afrique et de Yougoslavie continuent. En Albanie les Grecs dominent toujours les Italiens.
Je reviens de Custines avec Marie-Louise et Jean-Marie pour aller demain à Norroy tous ensemble.
M. Henry me dit à Custines que d'après les dires de Messieurs Fouchard et Studer de Nomeny qui sont prisonniers mais qui étaient avec notre cher Alexandre que sa mitrailleuse s'étant enrayée qu'il était sorti dehors sa casemate avec son revolver et un mousqueton pour tirer sur les Boches, qu'il avait été pris dans une rafale de balles et d'obus et tué net d'une balle dans la tête. Cela concorde avec les premières nouvelles apprises à Pompey à notre retour de Cappel. C'est un prisonnier des environs de Custines qui a dit cela à la famille Henry.
Sa pauvre mère demeure inconsolable nous en sommes tous bien désolés.

Le 30 mars 1941,
sauf Yvonne qui est à Blainville chez la famille Carré, nous assistons tous y compris Jean-Marie à Norroy à la messe qui est dite pour mon pauvre frère Joseph et notre regretté Alexandre, quel triste anniversaire. Il y a juste un an le 30 mars 1940 vers 9h00, notre cher Alexandre repartait de sa dernière permission, nous ne devions plus le revoir. A Nancy il voyait encore à la gare son oncle Joseph et maintenant, ils sont morts tous les deux, que c’est triste et il repartait si confiant dans l'avenir et dans la victoire.
Nous sommes toujours sans nouvelles de René malgré les recherches faites, aussi comme un doute subsiste, nous n'avons pas osé l'associer à la messe de son cousin et de son oncle.
Un combat naval est en cours en Méditerranée orientale. La flotte Italienne semble subir des pertes. Londres faisait savoir à 21h15 que cinq contre-torpilleurs italiens étaient déjà coulés et des grosses unités avariées. Les batteries côtières françaises d'Algérie ont tiré sur des navires Anglais qui visitaient des navires de commerce français, quelle infamie, les Anglais n'ont pas répondu, ils ont bien fait.

Le 31 mars 1941,
détails favorables sur la bataille navale.


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AVRIL 1941


Le 1er avril 1941,
à 7h15, Londres donne les détails précis de la bataille qui commençait le 28 a continué le 29 dans la mer Ionienne. les Anglais n'ont subi aucune perte, les Italiens ont eu 3 croiseurs et 2 contre-torpilleurs coulés, un contre-torpilleur et un cuirassé de 35 000 tonnes tellement avariés qu'ils ont peut-être coulés. Environ 3000 marins Italiens et Allemands ont été perdus et environ 1000 sauvés par les Anglais.
De nombreux marins allemands se trouvaient sur les navires Italiens. On voit que les Boches ne comptent guère sur les Macaronis. C'est comme en 1917-1918 quand les Franco-Anglais allaient à leur secours.

A partir d'aujourd'hui les travailleurs n'ont plus que 300 grammes de pain, les femmes, les employés, les grands enfants 200 g et les petits enfants 75 grammes.
Les Anglais entrent à Asmara, capitale de l'Érythrée et à Diredaoma, coupant la ligne de Djibouti à Addis-Abéba. les Américains commencent à saisir les navires Allemands et Italiens réfugiés dans leurs ports.
Les étrangers quittent la Yougoslavie.

Du 1 au 4 avril 1941,
les Anglais avancent rapidement en Crythrée si en Abyssinie mais ils ont du subir un échec en Tripolitaine. Les Allemands qui ont débarqué des troupes là-bas, leur ont fait évacuer, le 4, Benghasi.

Le 5 avril 1941,
les nouvelles sont assez bonnes, l'avance ennemie est arrêtée près de Benghasi. La Yougoslavie est mobilisée.


Le 6 avril 1941,
à 7h15, nous apprenons que la Yougoslavie a été attaquée à 13h15, que la Grèce y a été aussi par l'Allemagne à 5h15. Comme à son habitude, l'Allemagne a attaqué de nuit sans déclaration de guerre. Belgrade a été bombardée aux premières heures.
L'Italie se joint à l'Allemagne contre la Yougoslavie qui vient de conclure avec la Russie un pacte de-non agression.
A 19h15, Londres nous annonce que les Anglais sont entrés à Addis-Abeba le 6.

Les 7 et 8 avril 1941,
les nouvelles des Balkans sont rares.

Le 8 avril 1941,
il semble que les boches pénétrant en Grèce orientale aient atteint la mer Égée à Kavalla. les Yougoslaves résistent avec courage et pénètrent en Albanie.

Le 9 avril 1941,
quelques nouvelles de Yougoslavie. Les Serbes résistent avec courage, Belgrade donne de ses nouvelles. Salonique semble menacée par l'Est et par l'Ouest. Les Grecs reculent dans cette région.
Vers 20h00, mauvaises nouvelles. Les boches sont entrés à Salonique (à Uskub, Nisch en vieille Serbie) et à Derna en Libye. Toutefois, les Anglais ont pris Massaoua en Érythrée.

Les 10, 11 et 12 avril 1941,
les Grecs et Yougoslaves résistent avec acharnement, les Anglais débarqués en Grèce entrent en contact.
Les Boches sont entrés à Monastir, Zagreb et Kragujevac. Belgrade est menacée. Les Boches annoncent le 12 qu’ils ont fait leur jonction avec les Italiens en Albanie. La Hongrie à son tour rentre en Yougoslavie dans ses anciens territoires.
Les Américains occupent le Groenland.

Le 13 avril 1941,
mauvaises nouvelles mais données par les Boches. Ils disent qu’ils sont entrés à Belgrade, à Bardia et encerclé Tobrouk.
Triste jour de Pâques pour nous, car nous pensons que notre cher Alexandre était avec nous à Pâques 1940.

Le 14 avril 1941,
Lundi de Pâques, Marie-Louise et Jean-Marie dînent chez nous.
Les Serbes seraient entrés à Durazzo.

Les 15 et 16 avril 1941,
les nouvelles ne sont guère bonnes. Le sol de l'Égypte est à nouveau envahi et le bruit court que les Anglais débarqués en Grèce se ré-embarquent, pourvu que ce ne soit pas un nouveau Dunkerque. Malgré tout, tout le monde a confiance.

Le 17 avril 1941,
mauvaises nouvelles, l'armée Yougoslave aurait capitulé. Les Anglo-grecs résistent désespérément dans le Nord de la Grèce.

Le 18 avril 1941,
les Boches menaçant d'occuper leur logement, Marie-Louise et Jean-Marie reviennent à Pompey.

Le 19 avril 1941,
je lis dans l'Écho de Nancy que la Yougoslavie a capitulé le 17 à 21h00.


Le 20 avril 1941,
la situation semble très grave en Grèce ou les Anglo-grecs résistent avec courage. Les Boches ont pris Larissa et le mont Olympe. Les Anglais pourront-ils ré-embarquer ou tenir, ce n'est pas sûr.

Du 21 au 25 avril 1941,
la situation s'aggrave en Grèce.

Le 23 avril 1941,
le roi et le Gouvernement de Grèce se réfugient dans l'île de Crête pour continuer la lutte, mais l'armée Grecque du continent capitule ce jour-là. La situation des Anglais en Grèce après la reddition des Grecs semble critique.

Les 26 et 27 avril 1941,
l'armée Anglaise de Grèce continue à ré-embarquer.

Le 27 avril 1941,
à 9h25 les boches entrent à Athènes et le même jour à Corinthe et dans le Péloponnèse.

Les 28 et 29 avril 1941,
les Anglais continuent à rembarquer en Grèce.

Le 30 avril 1941,
à 1h00, la sirène de l'usine nous réveille, il y a alerte. A 1h10 toutes les sirènes des environs en font autant. La fin d'alerte vers 2h20. Nous n’avons rien vu ni entendu. Nous nous sommes levés mais nous nous sommes recouchés avant la fin d'alerte. Aussitôt l’alerte je suis allé voir chez Marie-Louise qui couche chez elle avec Jean-Marie et Suzanne, aussi braves que l'était notre cher Alexandre, elles ne se sont même pas levées, sauf Marie-Louise pour me causer. Beaucoup de monde était levé et se sauvait dans les abris ou dans les bois. Il paraît que l'on apercevait au loin l'éclatement des obus dans le ciel mais l'on n'entendait rien. Pour bien dire, nous sommes tous contents de voir ou d'entendre les Anglais, tant pis s'il y a de la casse. Le temps était beau et très étoilé.
L'affaire de Grèce est terminée, les Anglais sont parvenu à rembarquer en laissant leur gros matériel et environ 1/4 de l'effectif sur 60 000 hommes. Ils abandonnent aussi les îles de Grèce sauf la Crête qu'ils doivent tenir solidement.


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MAI 1941


Le 1er mai 1941,
ordre du Maréchal Pétain, le 1er mai est chômé. De Gaulle nous fait savoir que le 11 Mai, jour de la fête de Jeanne d'Arc, de 15h00 à 16h00, nous devons tous sortir dans les rues, individuellement ou en famille. Sûrement que l'ordre sera exécuté.

Du 2 au 5 mai 1941,
pas grand événement, mais les Anglais qui occupaient certains points de l'Irak ont été attaqués par l'armée Irakienne, c'est probablement du travail comme on dit de la 5ème colonne payée par les Boches.

Le 6 mai 1941,
alerte de 0h30 à 1h00. Nous ne nous sommes pas levés et n'avons entendu ni avions ni canons.

Les 7, 8 et 9 mai 1941,
rien d'important.

Le 10 mai 1941,
à 0h50 la sirène d'alerte, fin de l'alerte à 2h00. Nouvelle alerte à 3h20, fin vers 4h00. Nous ne nous sommes pas levés. Il parait qu’il est passé des avions et que quelques bombes sont tombées à Messein.

Les 11 et 12 mai 1941,
rien à signaler.

Le 13 mai 1941,
à 1h15 la sirène d'alerte nous réveille, fin de l'alerte vers 3h00. Nous ne nous levons plus. Il parait qu'il est passé des avions et que quelques bombes sont tombées sur l'usine de Neuves-Maisons.
Hess, de l'entourage d'Hitler, se serait enfui en avion en Angleterre. L'aviation anglaise commence à bombarder sérieusement l'Allemagne surtout Hambourg et Brême.
Londres et les grandes villes anglaises sont elles aussi toujours bombardées, de nombreux avions allemands sont abattus surtout la nuit, des anglais aussi naturellement.

Les 13, 14 et 15 mai 1941,
on ne parle que de la fuite de Rudolf Hess, il est tombé en Écosse en parachute et s'est blessé. Il s'est sans doute sauvé pour sauver sa vie.
De nombreuses troupes allemandes passent se dirigeant vers Toul. On dit qu’elles se dirigent vers l'Espagne. Peut-être que Gibraltar est menacé mais l'Espagne laissera t-elle passer les Boches. Ce n'est pas sur.
Le fameux Amiral Darlan notre premier ministre est à Berlin. Nous ne sommes pas très rassurés sur ces intentions. on ne parle que de collaboration avec les Boches et alors c'est contre les Anglais

Il y a aujourd’hui un an que notre pauvre René est disparu et toujours pas de nouvelles sur son sort, c'est bien triste. Et voilà onze mois pour notre cher Alexandre.

Le 15 mai 1941,
à 21h15 nous apprenons que Darlan a autorisé les Boches à se servir de nos aérodromes de Syrie contre les Anglais, quelle infamie, sûrement qu'ils vont s'en servir pour aller en Irak, c'est une nouvelle menace pour le canal de Suez.

Le 16 mai 1941,
à 21h15 Londres nous annonce que Darlan ayant le 11 mai livré les aérodromes de Syrie et que le Président Roosevelt vient de faire occuper par les marins Américains les navires Français (dont le grand paquebot Normandie) se trouvant dans les ports des États-Unis.
Le Général Dentz, gouverneur de Syrie publie un communiqué prétextant que les avions boches n'atterrissent en Syrie que par nécessité et que cela n'est pas contraire aux lois internationales et que les avions anglais en bombardant, ont fait un acte de guerre hostile à la France. Quelle honte pour nous de voir la France en arriver là. Il parait qu'un officier Français a été tué, tans pis pour lui il n'avait qu'à aller se faire tuer avec De Gaulle, cela aurait été plus honorable pour lui que de se faire tuer pour la cause de l'Allemagne.

Le 17 mai 1941,
on ne parle que de ces événements et on s'attend à voir l'Amérique entrer en guerre prochainement.

Les 18, 19 et 20 mai 1941,
bruits de la capitulation des Italiens en Abyssinie.

Le 20 mai 1941,
à midi, le duc d'Aoste commandant une armée Italienne en Abyssinie capitule mais il reste encore deux autres armées qui résistent mais probablement pas pour longtemps le président Roosevelt a menacé de retirer son ambassadeur en France.
Le duc de Spolète est nommé roi de Croatie le 19 mai. C'est le démembrement de la Yougoslavie. Les boches essaient de s'emparer de l'île de Crête au moyen de parachutistes. Nous espérons qu'ils échoueront.

Du 20 au 25 mai 1941,
la lutte est acharnée dans l'île de Crête et autour de cette île où de nombreux vaisseaux surtout des boches ou macaronis ont été coulés. Les avions Boches ont parvenu à jeter des troupes dans la partie occidentale de l'île et ils s'y maintiennent mais aucune troupe n'a été débarquée par mer.
Au cours d'un engagement naval entre le Groenland et l'Islande le grand croiseur de bataille anglais Hood a été coulé par le cuirassé allemand Bismarck.

Les 26 et 27 mai 1941,
la lutte continue violente en Crête.

Le 27 mai 1941,
on apprend que le cuirassé allemand Bismarck de 35000 tonnes et tout neuf, a été à son tour coulé par les Anglais le 27. Sa victoire sur le Hood par lequel il avait été endommagé n'a pas eu de lendemain. En difficulté, il fut rejoint par les Anglais qui lui donnèrent le coup de grâce.

Le 28 mai 1941,
Marie-Louise reçoit une lettre du capitaine allemand Fischer de Nancy, officier des tombes militaires, il lui signale que le 23 avril notre cher Alexandre a été exhumé de Cappel et inhumé à nouveau mais dans le cimetière militaire Pétersruh Niederhost. Nous ne savons pas où cela se trouve mais nous allons tâcher de le savoir. Il nous dit qu'il y a son alliance et d'autres objets. C'est une petite consolation mais quel calvaire, traîner ainsi son pauvre corps, quel nouveau supplice pour sa pauvre mère et pour nous tous. Marie-Louise a trouvé sur une carte. Niederhost est un village voisin de Cappel.
Le président Roosevelt a prononcé ce matin 28 mai un discours nettement hostile à l'Allemagne.


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* * *

JUIN 1941


Du 28 mai au 3 juin 1941,
la lutte se poursuit acharnée en Crête mais les Anglais ont le dessous et tout comme en Norvège, en France et en Grèce sont obligés de rembarquer mais les anglais ont le dessus en Irak et ils viennent de pacifier ce pays.

Le 4 juin 1941,
l’ex-empereur d'Allemagne, Guillaume II, meurt à Doorn en Hollande.
L’amiral Darlan a prononcé le 31 mai un discours nettement hostile à l'Angleterre. Cet homme qui est complètement sous le joug de l'Allemagne n'hésitera pas à nous mettre en guerre avec nos anciens alliés. Quelle infamie, mais espérons que les hommes ne marcheront pas car presque tout le monde par ici est avec les Anglais.
Il se peut, que d'ici peu, la Syrie et peut-être la Turquie soient le théâtre d'événements importants.

La vie devient de plus en plus dure, on ne mange plus à sa faim et beaucoup d'objets et de vêtements ou de chaussures manquent.
On dit que les mines du Nord et du Pas-de-Calais sont en grève, les hommes ne voulant plus travailler faute de nourriture.

Du 5 au 7 juin 1941,
pas grand chose.
On dit que les grèves du Nord sont finies et que les meneurs auraient été fusillés.

Le 8 juin 1941,
à 13h15, Londres nous annonce qu’à 2h00 du matin, les troupes françaises libres ainsi que des troupes anglaises sont entrées en Syrie. Le Général Français Catroux, commandant en Chef a lancé une proclamation aux Syriens leur promettant l'indépendance et aux Français de Syrie leur demandant de ne pas tirer sur leurs libérateurs. Pourvu que les Français du général Dentz ne résistent pas car Vichy lui a donné l'ordre de résister. Une grave partie est engagée en Syrie d'où peut dépendre le sort de la guerre. Nous espérons quelle sera favorable aux Anglais et au Général de Gaulle.
Tant pis si nous devons souffrir ici, car nous nous attendons à des représailles au cas où les Français de Syrie passeraient avec De Gaulle car leur exemple serait sans doute suivi par d'autres, peut-être que l'Algérie, le Maroc, la Tunisie et le reste des colonies en feraient autant.
Nous attendons les nouvelles de Syrie avec anxiété.

Le 9 juin 1941,
à 7h15 encore pas de nouvelle de Syrie. A 13h15, les nouvelles de Syrie semblent bonnes mais Londres annonce seulement que la radio Italienne dit que plusieurs milliers de soldats Français sont passés aux Français libres. A 19h15 et 21h15 les nouvelles de Syrie semblent toujours bonnes, cependant les Franco-Anglais ont rencontré une certaine résistance.

Le 10 juin 1941,
à 7h15 toujours de bonnes nouvelles. L'avance se poursuit en Syrie mais les parachutistes Allemands tentent d'intervenir. Nous espérons bien que cette fois ils auront le dessous.

Le 11 juin 1941,
les alliés approchent de Damas et bordent la frontière Turque.

Le 12 juin 1941,
l'avance continue mais il y a de la résistance. Le Général Dentz, gouverneur de Syrie a donné l'ordre à ses troupes de se faire tuer sur place mais il n'est obéi que partiellement, c’est navrant de voir cela, c'est le commencement de la guerre entre Français, c'est triste de voir les hommes qui n'ont pas eu le courage de résister devant les Boches, de résister aux Anglo-français qui veulent les délivrer.

Du 13 au 16 juin 1941,
la résistance des troupes de Vichy comme on dit ici s'affirme en Syrie et le gouvernement de Darlan publie des communiqués où il dit que ses troupes résistent à l'ennemi et l'ennemi c'est les Anglo-français, que c'est navrant. La flotte française aurait quitté Toulon probablement pour la Syrie. Darlan fait bien le jeu d'Hitler et il se pourrait qu’il attaque l'Angleterre.
Ce sont en ce moment les tristes anniversaires. Le 14 ou le 15 car nous ne savons au juste, notre pauvre Alexandre a donné sa vie à la patrie. Il doit frémir en voyant la lâcheté de nos dirigeants.

Le 15 juin 1941,
à 14h25, la sirène d'alerte, mais ce ne sont pas les avions Anglais, c'est le feu à Frouard chez Contamine.

Le 16 juin 1941,
à mon réveil je constate que l'on nous a volé cinq lapins pendant la nuit. Dernièrement on a volé un cochon chez Barberi. les vols d'animaux deviennent de plus en plus fréquents, gare les légumes dans les champs. Tout le monde se plaint d'avance et parle de sévir sans pitié pour les voleurs qui seront pris.
A 16h35 il y a un an que nous étions bombardés à Xeuilley.
A 21h15 nous apprenons que les États-Unis ferment les consulats Allemands.

Du 16 au 19 juin 1941,
la lutte continue en Syrie.
Il y a un an aujourd'hui que nous sommes sous la domination Boche. Combien de temps durera encore ce supplice. Dieu seul le sait.
Un avion Boche de bombardement s'est écrasé dans la soirée du 18 sur une maison rue Jeanne d'Arc à Nancy.
Le vin même commence à manquer. C'est incroyable et des trains entiers de wagons foudres passent presque tous les jours pour l'Allemagne. C'est dur pour les Français de se passer de pinard, comme on dit, car on a toujours dit que le pinard avait gagné la guerre de 1914-1918.
Il se passe quelque chose d'anormal tout le long de la frontière Russe, Roumaine et Turque, C'est-à-dire de la Baltique à la mer Noire. Cela semble se gâter entre la Russie et l'Allemagne mais ce n'est que des bruits d'autant plus que la Turquie vient de signer un traité d'amitié avec les Boches mais ce traité comme tous ceux signés par l'Allemagne n’a pas beaucoup de valeur.

Le 20 juin 1941,
nous apprenons que de violents combats se déroulent près de Damas entre les Français de De Gaulle et ceux de Vichy. C'est écœurant pour nous de voir des Français se faire tuer pour Hitler et ses Boches pour Mussolini et ses Macaronis.

Le 21 juin 1941,
même situation.

Le 22 juin 1941,
un dimanche à 7h15, nouvelles sensationnelles. La Russie a été attaquée à 4h00 sans déclaration de guerre par les armées Allemandes, Finlandaises et Roumaines. Les Anglo-français sont entrés à Damas.
Nous avons eu alerte d’une dizaine de minutes vers 2h30 mais n'avons pas bougé et n'avons rien entendu.

Les 22, 23 et 24 juin 1941,
pas grandes nouvelles du front Russe.

Le 25 juin 1941,
les nouvelles du front Russe deviennent plus abondantes. La lutte semble acharnée sur l'immense front de l'océan glacial arctique à la mer Noire. Les Russes résistent avec courage. Les Boches ont avancé de plus de 100 km en certains points et ont occupé Brest-Litovsk de triste mémoire en 1918. Les mêmes noms qu’en 1914-1918 reviennent, Groduo, Brest-Litovsk, Czernowitz, etc. Les pertes surtout en avions sont sévères des deux côtés. Près de 400 avions pour chaque partie en trois jours. Les États-Unis et l'Angleterre aident la Russie tant qu'ils peuvent. L'avance continue en Syrie. Le soir, on apprend que la Suède laisse passer les troupes allemandes et que la Turquie reste neutre.

Les 26, 27 et 28 juin 1941,
la lutte continue sur l'immense front de Russie. Les Russes semblent tenir bon, bien qu'ils reculent en certains points, en quelques endroits ils ont même avancés. La Hongrie leur a déclaré la guerre.
Notre avance continue en Syrie malgré la résistance des troupes de Vichy. Les Anglais commencent à bombarder en plein jour les gares et les usines Françaises.

Le 26 juin 1941,
la gare d'Hazebrouk, le 27 les aciéries des environs de Lille. Il y a de grands dégâts, tant pis pour nous qui sommes obligés de travailler pour les Boches, il faut que les Anglais emploient les grands moyens pour abattre Hitler et sa clique.

Le 29 juin 1941,
les Boches publient les premiers communiqués du front Russe. Ils annoncent des victoires foudroyantes. Ils semblent être arrivés à Durnsk, Vilua, Groduo, Bielostok, Kaunas, Brest, Lemberg et dans la région de Minsk. Ils disent qu'ils ont détruit ou pris 2233 chars de combats et 4107 avions Russes, fait 40 000 prisonniers et pris un matériel considérable. Les russes tout en reconnaissant leur recul disent que les Boches exagèrent fortement, ils disent qu'une bataille terrible est engagée au sud des marais du Pripet, 8000 tanks y participent.
En Syrie, notre avance continue lentement.

Le 30 juin 1941,
la lutte est toujours acharnée en Russie.


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* * *

JUILLET 1941


Le 1er juillet 1941,
au soir nous apprenons que les Allemands ont franchi la Bérésina.

Les 2 et 3 juillet 1941,
de violents combats se livrent sur la Bérésina. Ce n’est pas certain que les Allemands ont pu la franchir ou en tout cas, ils sont arrêtés sur les bords. Ils auront peut-être sur cette rivière le même sort que les glorieux soldats de la grande armée de Napoléon 1er. Les nouvelles du reste du front russe sont assez imprécises. Les boches sont arrivés à Riga et ont ainsi occupé une partie des pays baltes.

Le 4 juillet 1941,
nous apprenons que les Allemands et leurs alliés ont franchi la Duna, la Berésina et le Prut mais de violents combats se livrent de chaque côté de ces cours d'eau. Il semble que les colonies motorisées allemandes foncent sur Moscou et Saint-Pétersbourg, mais l'armée Russe se reforme derrière elles et tient tête à l'infanterie allemande qui ne peut suivre ses colonnes motorisées. Les pertes sont énormes des deux côtés.

Le 5 juillet 1941,
même situation.

Les 6 et 7 juillet 1941,
les Russes contre-attaquent violemment.

Le 8 juillet 1941,
les Américains occupent l'Islande.

Le 9 juillet 1941,
à 13h15 nous apprenons que le général Dentz commandant en Syrie demande la paix.

Le 10 juillet 1941,
vers 18h50 prenant le train pour aller à Norroy, je suis avec tous les cheminots présents à la gare, fouillé par la gendarmerie allemande accompagnée d'un interprète Français. Il parait que ces Messieurs, cherchaient des tracts communistes. Heureusement qu'ils n'ont pas lu cette feuille bien qu'elle ait passé dans les mains d'un gendarme allemand avec le calepin la contenant. J'aurais pu avoir des ennuis.
la feuille qui aurait pu perdre Charles Antoine.

Le 11 juillet 1941,
calme sur le front Russe.

Le 12 juillet 1941,
fin de la lutte fratricide en Syrie par la victoire des Franco-Anglais.

Le 13 juillet 1941,
un pacte Anglo-russe est signé.

Le 14 juillet 1941,
un lundi, la consigne donnée par les Gaullistes de montrer les couleurs nationales par n'importe quel moyen est fidèlement suivie. Beaucoup de personnes arborent les trois couleurs soit à la boutonnière, soit dans les cheveux, même à la ceinture. Dans les maisons ou sur les fenêtres beaucoup de bouquets avec des fleurs blanches, rouges et bleues, même la literie sur des fenêtres représente le drapeau tricolore. Les Boches laissent faire. Suzanne a même mise les couleurs anglaises avec les françaises sur notre fenêtre pour narguer les Boches qui passent dans les trains, il y en a qui nous montrent le poing.

Le 15 juillet 1941,
nous apprenons que d'après les dires du fermier de Maxtadt, notre pauvre Alexandre blessé dans sa casemate, serait sorti dehors avec des grenades et que ses hommes se rendant peu après, l'auraient trouvé tué dehors. Saurons-nous jamais la vérité, cependant cette version semble plausible.
Roger Valentin de sa compagnie a été retrouvé le 3 juin 1940 et enterré à Niederhost dans le même cimetière que notre regretté Alexandre qui aurait été tué le 14 juin 1940 et non le 15 comme nous le pensions.

Le 16 juillet 1941,
les Allemands attaquent à nouveau avec violence le front Russe.

Le 17 juillet 1941,
j'apprends que le fermier de Maxtadt qui était avec notre cher Alexandre, s'appelait Mangin mais tenait une ferme non à Maxtadt mais dans les environs. Il a dit au Directeur Allemand de l'usine, monsieur Schoupkotten qui lui a rendu visite le 13 juillet ou le 14, et qui est passé voir la tombe d'Alexandre à Niederhost, que notre cher fils, blessé dans sa casemate sortant avec des grenades malgré sa blessure, qu’un obus éclatant arrachait la porte. Alexandre pris sous cette porte parvenait à se dégager et était encore vu jetant des grenades, après on retrouvait son corps dans la tranchée.
Monsieur Schoulpkotten a rendu hommage à sa bravoure. Monsieur Mangin a été blessé avec Alexandre.

Le 18 juillet 1941,
alerte de 2h00 à 2h35 mais rien vu ni entendu, toutefois à part moi, la famille s'est levé.

Le 19 juillet 1941,
on apprend que les Boches ayant pris Smolensk sont à 400 km de Moscou. Ailleurs la situation semble se stabiliser en guerre de tranchée.

Les 20 et 21 juillet 1941,
rien à signaler, si ce n'est que nous avons maintenant la carte de vin et celle de tabac. Les personnes qui ont la carte T (travailleur) ou C (Cultivateur) ont droit à 4 litres de vin pour 10 jours, les autres personnes rien. Ainsi chez nous qui sommes 7 personnes moi seul ait droit à 4 litres de vin, c'est peu 4 litres pour 10 jours pour 6 grandes personnes et notre cher Jean-Marie qui a eu 2 ans le 21 et qui est bien fort et bien intelligent pour son âge.

Le 22 juillet 1941,
alerte de 1h50 à 3h15, nous avons nettement entendu au loin le canon ou des bombes ? Il paraît que c’est une usine à Dieuze qui était bombardée.

Le 23 juillet 1941,
alerte de 2h00 à 2h45.

Le 24 juillet 1941,
alerte de 3h00 à 3h30. Nous avons entendu passer de nombreux avions.

Dans la nuit du 24 au 25,
pas d'alerte mais de nombreux avions sont passés.
Pour venir en aide à la Russie, les Anglais bombardent continuellement l'Allemagne de l'Ouest et les installations des pays occupés. Le Nord de la France surtout est bombardé. En Russie l'avance allemande est contenue. Smolensk ne serait même pas occupée par les Boches.
Les japonais nous prennent encore des bases navales et aériennes en Indochine.

Le 26 juillet 1941,
sans passeport, Marie-Louise emmenée en auto par Monsieur Schoupkotten se rend sur la tombe de notre regretté Alexandre à Niederhost. Elle doit aller aussi à Cappel et chez Monsieur Mangin et revenir lundi 28.
Les États-Unis et l'Angleterre bloquent les avions Japonais, cela semble se gâter entre ces pays.

Le 27 juillet 1941,
un dimanche, nous pensons beaucoup à Marie-Louise qui se trouve seule sur la tombe de son bien-aimé, et qui a du aller aussi à Cappel sur les lieux où il est mort en héros. Quel douloureux calvaire pour elle.
Il y a cinq semaines que les Russes ont été attaqués et ils tiennent. Ils ont plus de cran que la plupart des Français n'en ont eu en 1940 car en cinq semaines, l'armée Française était hors de combat.

Le 28 juillet 1941,
à 13h00, Marie-Louise toute courageuse rentre chez nous. Après nous avoir embrassé, elle fond en larmes et nous remet un petit colis de souvenirs de notre cher Alexandre, détail horrible, il y a une côte de notre cher fils, un autre fragment d'os, peut-être d'un pied et deux petits bouts de vêtements. Nous fondons tous en larmes à la vue de ces souvenirs. Elle les a ramassés dans sa tombe de Cappel qui est restée ouverte. Il était à peine enterré dans cette tombe. Dans la tombe de l'inconnu à côté, les deux tibias sont restés, vraiment les restes de nos héros ne sont guère respectés.
Marie-Louise a passé les deux nuits chez M. Mangin et est allée avec lui et madame Mangin à Cappel le 27. La casemate est toujours dans le même état. Elle a revu M. et Mme Bodo. Monsieur Mangin était bien un camarade d'Alexandre mais tout en étant sous ses ordres, il n'était pas dans la même casemate que lui. Il a encore fait une patrouille avec Alexandre le 14 juin 1940 vers 3h00 du matin.
Alexandre avait toujours confiance que les Boches ne passeraient pas. L'attaque s'est déclenchée un peu plus tard. Alexandre bien que blessé est sorti avec des grenades et sans être à l'abri, de toute en hauteur dominant le ravin, lançait ses grenades sur les Allemands devant sa casemate.
Un obus éclatant arrachait la porte qui tombait sur Alexandre. Il était environ 7h00. Alexandre a du encore se dégager mais Monsieur Mangin ne peut l'affirmer. Il a peut-être été tué par cet obus ou est mort un peu après. Madame Mangin a vu environ un mois plus tard, son pauvre corps qui gisait dans la tranchée devant la casemate et il est probablement resté comme cela jusqu’au mois de novembre, date à laquelle il a été mis dans la fosse à peine creusée où nous l'avons trouvé le 18 décembre. Alexandre commandait les trois casemates se trouvant à l'extrémité droite de la crête de Cappel. Jusqu'au bout, il a dit à ses hommes qu'il ne fallait pas que les Boches passent, malheureusement ils ont passé quand même malgré son sacrifice et celui de ses hommes. Ils étaient 14, la plupart sont tombés avec Alexandre, mais derrière eux, il n'y avait plus personne que l'armée en retraite et quelle retraite, on n’ose dire la fuite.
Sa grande croix de Cappel a été de nouveau mise sur sa tombe à Niedershost mais sa mitrailleuse n'y est plus. Niedershost est le nom Français du village que les Boches ont nommé Petersruch.

Les 29, 30, 31 juillet 1941,
la lutte est toujours vive en Russie.


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* * *

AOÛT 1941


Les 1er et 2 août 1941,
les Boches ne semblent plus avancer en Russie.

Le 2 août 1941,
à 12h00 Marie-Louise nous montre les photos qu’elle a prise dimanche 27 juillet de la tombe de notre cher Alexandre à Niedershost et de sa casemate à Cappel ainsi que celles de la famille Mangin. A la mobilisation de Septembre 1938 terminée par l'arrangement de Munich, Alexandre était déjà à la même place où il a trouvé une mort glorieuse. Nous étions allés le voir nous deux Marie-Louise à cet emplacement. Toujours confiant à la France et à la victoire, il nous avait dit que tout était bien prêt mais nous avait ajouté cette parole prophétique, même le cimetière.

Les 3, 4 et 5 août 1941,
la lutte est toujours vive en Russie.

Le 6 août 1941,
vers 3h00 nous entendons passer des avions. Il n'y a pas eu d'alerte à Pompey mais il y en a eu dans les environs.

Le 7 août 1941,
alerte de 0h50 à 2h50, nous avons entendu des avions, le canon tonnait au loin.

Du 8 au 13 août 1941,
la lutte est toujours violente en Russie. Les Allemands et leurs alliés font des efforts désespérés pour s’emparer de Kiev et d’Odessa mais les Russes semblent les contenir.
Des volontaires Français et Espagnols vont combattre aux côtés des Allemands en Russie.
L’amiral Darlan vient d’obtenir des pouvoirs dictatoriaux.
L’aviation anglaise continue d'attaquer violemment l’Allemagne de l’ouest, et l'aviation Russe, Berlin.

Le 13 août 1941,
des émeutes éclatent à Paris à la suite de la dictature Darlan.

Les 14 et 15 août 1941,
la lutte est acharnée en Russie. Les Russes ont évacué Smolensk mais tiennent Kiev.
Les Boches annoncent qu'ils ont atteints la mer Noire à l’Est de Nikolaïev. Les Russes dans le sud de l'Ukraine se repliant sur le Dniepr semblent avoir laissé une armée pour défendre Nikolaïev et Odessa, est-ce volontairement ou involontairement, les jours prochains nous le diront. En tout cas, ces deux villes semblent dépassées et leur sort est incertain mais les Russes ont la maîtrise de la mer Noire.
Le président Roosevelt et Monsieur Churchill dans l'Atlantique au large des côtes Américaines, se sont rencontrés en mer. Des décisions très importantes ont été prises.

Les 16 et 17 août 1941,
continuation de la lutte en Russie. les Allemands sont entrés à Nikolaïev le 17.
La vie devient de plus en plus dure. On a les cartes pour presque tout, mais souvent avec les cartes on n'a rien, presque tout le monde est maigri. Cependant, quelques privilégiés profitent du marché noir comme on dit, il y en a qui changent des œufs pour du tabac, d'autres du vin pour de la viande ou du pain, etc.
On a de la viande juste le samedi et pas beaucoup. Chez nous, pour 7 personnes nous avons 1975 grammes de pain par jour et quel pain. Les fumeurs ont un paquet de tabac tous les 7 jours ou un paquet de 20 cigarettes. On n'a plus de chaussures. Il y a des ouvriers qui marchent avec des souliers qui font peine à voir. Les cordonniers n'ont plus de cuir pour les raccommoder.
Quelle triste vie et cependant tout le monde ou presque a confiance en la victoire finale mais ce n'est pas encore prochainement.
Les ménagères sont encore les plus à plaindre, presque plus de savon, plus de graisse, plus de chauffage.

Du 18 au 21 août 1941,
les Allemands attaquent à nouveau avec violence en direction de Leningrad qui semble menacée, les Allemands étant arrivés à Novgorod à 180 km au Sud. Ils attaquent aussi Kiev par le Nord et Odessa qui est encerclée.

Le 21 août 1941,
notre nièce Paulette reçoit une lettre de la Croix-Rouge lui annonçant que notre neveu René a été retrouvé carbonisé dans les débris de son avion aux environs de Monthermé mais un léger doute subsiste. On n'est pas absolument certain que ce soit lui.
Les Allemands sont entrés à Kherson à l'embouchure du Dniepr.

Le 22 août 1941,
voilà deux mois que la lutte dure en Russie mais les nouvelles ne sont pas bonnes. Dans le Nord, Leningrad est sérieusement menacée, Narva a été prise, au centre Gomel a été prise, Kiev semble menacée à son tour, peut être aussi Moscou et à Odessa les Russes semblent se rembarquer.
Le gros des forces Russes semble avoir réussi à passer le Dniepr mais tiendra t-il sur la rive gauche, nous l’espérons.

Le 23 août 1941,
alerte de 1h15 à 3h35. Nous entendons passer des avions et c'est tout. Nous ne nous sommes pas levés. Ces avions allaient ou revenaient de Mannheim qui a été bombardée.
Les Allemands ne seraient plus qu’à 70 km à l'ouest de Petrograd et à 15 km d'Odessa. Les Russes s'apprêtent à défendre Petrograd rue par rue, maison par maison s’il le faut.

Le 24 août 1941,
à 13h15 Londres dit que les Allemands annoncent qu'ils ne sont plus qu'à 40 km de Petrograd, mais ce n'est pas sûr car le soir les Russes ont l'air de tenir. Cependant, les Boches ont franchi le Dniepr à Gomel mais semblent contenus.

Le 25 août 1941,
dans la matinée les Russes et les Anglais pour faire leur jonction envahissent la Perse que l'on appelle maintenant Iran. Ils font comme leurs ennemis, tous les moyens sont bons pour gagner la guerre. Nous aurions du faire comme cela plus tôt.

Dans la, nuit du 25 au 26 août 1941,
alerte de 23h55 à 2h25. Passage d'avions mais nous ne nous sommes pas dérangés.
Depuis un certain temps en France dans les deux zones, il y a de nombreuses arrestations de communistes et de Gaullistes. La collaboration Franco-Allemande porte ses fruits, les Francos-allemands arrêtent souvent sans preuves. Il y a même eu des fusillés, deux à Paris à la suite des manifestations. L'on ne nous parle que de la croisade anti-bolchevique de Hitler mais on ne nous dit pas qu’avant le 22 juin il était l'allié des Russes. On s'efforce de recruter des volontaires en France pour combattre avec Hitler contre les Russes mais ils n’ont pas l'air d'être nombreux ces volontaires.
La police Française vient d'être doublée.

Les 26, 27 et 28 août 1941,
la lutte est toujours acharnée en Russie. Il semble bien qu’Hitler veut une décision avant l’hiver, mais il ne l’aura pas. Les Russes tout en reculant petit à petit luttent avec acharnement. Les pertes doivent être énormes des deux côtés.
En Iran l’avance anglo-russe bien que rencontrant une certaine résistance progresse rapidement.

Le 27 août 1941,
un attentat a lieu à Versailles, un jeune patriote Français, Paul Collette, 21 ans, du Calvados mais né dans l’Orne, engagé pour la prime dans la légion anticommuniste, blesse gravement à coups de revolver, Pierre Laval, Déat, un colonel et un légionnaire. Ceux qui ont organisé cette légion n’ont que ce qu’ils méritent car c’est honteux de faire combattre les Français pour les Allemands, fût-ce contre les Russes. Dormoy a déjà été assassiné dernièrement avec une bombe. Est-ce la terreur qui va sévir dans notre pauvre France.

Dans la nuit du 27 au 28 août 1941,
alerte de 23h30, à 2h15, mais rien d’anormal.

Le 28 août 1941,
monsieur François Blettner nous dit vers 11h00 qu’un prisonnier libéré est passé le 26 chez lui. Il était dans la casemate de notre cher Alexandre et a été blessé avec lui. Il dit qu’il est mort en héros, il l’a vu mourir. Il devait passer chez nous mais nous ne l’avons pas vu, c’est regrettable. Il habite sur la ligne de Nomeny mais ne sait pas ou ni son nom. Il pense venir travailler à Pompey mais nous pensons le voir un jour.
l’Iran cesse de résister, trois communistes sont guillotinés à Paris.

Le 29 août 1941,
les Boches disent qu’ils ont pris Tallin, capitale de l'Estonie. Saint-Pétersbourg est de plus en plus menacée.

Dans la nuit du 29 au 30 août 1941,
alerte de 23h30 à 3h30 ; C'est bien long 4h00 pour les gens qui se sauvent dans les bois ou dans les abris. Quand à nous, nous ne nous sommes pas dérangés et n'avons rien entendu.

Le 30 août 1941,
Port-Baltique est prise par les Allemands et Viborg est reprise par les Finlandais. Ces deux villes ainsi que Tallin (Reval) avaient été dépassées et assiégées et ont résisté un certain temps.
En regardant une carte, je m'aperçois que le lieu ou est enterré notre cher Alexandre s'appelle en Français, Hoste-Bas, Petersruch et Niedershost sont des noms allemands.

Le 31 août 1941,
la lutte est toujours acharnée en Russie.


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* * *

SEPTEMBRE 1941


Les 1er et 2 septembre 1941,
Odessa tient, mais les Finlandais ne sont plus qu’à 50 km de Saint-Pétersbourg et les Boches ont coupé la ligne de Moscou à cette ville.
On vole beaucoup de légumes dans les jardins. A nous on nous en a pris pas mal. Les lapins aussi continuent à disparaître, mais on prend rarement les voleurs qui n'opèrent que la nuit, c'est cependant défendu de sortir. Cependant un voleur a été pris sur le fait le 31 août à 22h30 en volant deux lapins au Chef de gare. Il a reçu une bonne volée par les employés et les gendarmes, il avait la figure toute tuméfiée, c'était un Italien.

Dans la nuit du 2 au 3 septembre 1941,
alerte de minuit à 3h00. Il est passé de nombreux avions même avant l'alerte, mais comme il n'y a pas de D.C.A. dans la région, on entend rarement le canon.
Les Allemands et les Finlandais sont arrivés devant les défenses extérieures de Saint-Pétersbourg mais la résistance Russe est acharnée.

Le 4 septembre 1941,
je vois deux affiches. Sur l’une 5 communistes fusillés pour manifestation contre l’armée Allemande, sur l’autre trois patriotes dont un lieutenant de vaisseau de la noblesse, c'est le Comte d’Estienne d'Orves âgé de 40 ans, fusillés pour espionnage, condamnés par les cours martiales. Londres nous avait dit il y a quelques jours que ces trois derniers avaient été fusillés par les gardes mobiles Français. Quelle honte pour le gouvernement de Vichy, c'était trois anciens combattants. Un régime de terreur semble vouloir régner dans notre malheureux pays.

Les 5 et 6 septembre 1941,
la lutte est toujours acharnée en Russie.

Le 5 septembre 1941,
un sous-marin allemand attaque un contre-torpilleur américain (le Gril ou le Frin) dans l’Atlantique Nord mais le manque, l’Américain a riposté. En 1917, l’Amérique est entrée en guerre pour un motif à peu près semblable. Nous espérons que quelques incidents de ce genre la feront entrer en guerre aussi cette fois-ci.

Le 6 septembre 1941,
on arrête à Pompey, Jacquet, Arnould, Logut et un habitant de Custines. C'était quatre dirigeants du syndicat de l'usine, je crois qu'ils vont être détenus un mois à Toul, motif très vague. Il parait qu'il y a eu des tracts jetés ou de collés à Pompey. Ce sont les gendarmes Français qui les ont arrêtés parce que communistes ou considérés comme tels.
A la suite d'un coup de revolver tiré à Paris sur un sous-officier allemand qui a été blessé, les Allemands fusillent trois otages. Il est vrai qu'ils avaient annoncé cette mesure à la suite du meurtre d'un autre sous-officier, mais cela n'a pas empêché un nouvel attentat. C'est regrettable car trois innocents ont payé cela de leur vie.

Le 7 septembre 1941,
un navire de commerce Américain est coulé dans la mer Rouge par un avion.

Le 8 septembre 1941,
les Allemands annoncent que Petrograd est encerclée.

Le 9 septembre 1941,
les Russes ont l'air de dire que ce n'est pas vrai en admettant toutefois qu'une unité motorisée ait pu passer. En tout cas le sort de Petrograd à l'air de se jouer est la lutte est acharnée. Les Russes semblent décidés à défendre cette ville coûte que coûte et les Allemands semblent vouloir s'en emparer à tout prix.
Les Anglais occupent l'archipel de Spitzberg mais l'évacuent un peu après en détruisant tout ce qui pourrait servir aux Allemands.

Le 10 septembre 1941,
la lutte redouble de violence autour de Petrograd qui parait encerclée. Les Allemands disent qu’ils bordent la Néva. Les Russes disent avoir remporté un grand succès vers Smolensk.
Un navire du Panama a été coulé par un sous-marin Allemand vers l’Islande, il y a une victime américaine.

Le 11 septembre 1941,
alerte de 4h30 à 5h00.

Le 12 septembre 1941,
l’ordre aurait été donné aux navires américains de tirer sur tous les navires de guerre allemands ou italiens qu’ils rencontreraient.

Du 11 au 15 septembre 1941,
la situation semble stationnaire en Russie, cependant les Allemands ont franchi le Dniepr à environ 200 km de Kiev. L’aviation anglaise est arrivée pour aider à la défense de Leningrad.

Le 13 septembre 1941,
notre nièce Paulette reçoit une lettre datée du 10 de Monsieur Labbé, ingénieur à Monthermé, ancien officier aviateur et prisonnier libéré, il vient d’identifier l’avion de notre pauvre René, celui-ci est tombé à environ 5 km de Monthermé au lieu dit les Voivraies ou les Voiries, le doute n’est plus possible mais c’est navrant, les quelques ossements qui avaient été recueillis et enterrés ont été déterrés par les bêtes sauvages probablement des sangliers, de sorte qu’il n’y a plus trace de son glorieux corps. Monsieur Labbé a eu la délicatesse de faire dire une messe sur l’emplacement où étaient les restes de notre cher neveu. Il a invité Paulette à se rendre là-bas. Un fermier qui a dû voir le combat a invité aussi Paulette à aller chez lui.

Le 16 septembre 1941,
à 4h00, l’ordre est donné aux navires américains de tirer sur tous les navires allemands ou italiens qui se montreront entre l’Amérique et l’Islande, c’est le prélude de la guerre à moins que Hitler et Mussolini interdisent à leurs navires de se montrer dans les eaux en question. Le 12, il avait été seulement question de cette mesure.
Le Shah de Perse (ou d’Iran) abdique en faveur de son fils.

Dans la nuit du 16 au 17 septembre 1941,
alerte de 23h00 à 1h00, nous restons maintenant tous au lit. Il est passé des avions.
Les femmes de plus de 21 ans qui n’ont pas la carte C ou T ont maintenant 2 litres de vin pour 10 jours ce qui nous fait 10 litres par 10 jours chez nous car Jean et Suzanne ayant moins de 21 ans et n’ayant pas la carte T ou C n’ont pas de vin (mais les commerçants n’en on pas toujours et on s’en passe). Pour le reste pas de changement mais on a un peu de charcuterie dans le milieu de la semaine. Tout devient de plus en plus rare et les vols continuent aussi on se dépêche de rentrer les récoltes.
En Russie, Kiev semble menacée, les Allemands ayant franchis le Dniepr mais Odessa et Leningrad semblent tenir bon.
Le marché noir continue de plus en plus. Beaucoup de monde bat la campagne pour trouver quelques choses à manger. Il y en a qui mettent n’importe quel prix et les échanges sont nombreux. Cependant seules les petites quantités de légumes ou de volailles, lapins, œufs, etc. (1 bête ou une douzaine d’œufs et 20 kg de légumes ou pommes de terre) sont autorisées à circuler, on risque des procès. Seuls les grossistes ont le droit d’acheter et de transporter pour livrer aux détaillants.

Dans la nuit du 17 au 18 septembre 1941,
alerte de 23h00 à 24h00 et de 0h20 à 1h00, rien à signaler.
Les Allemands semblent avoir déclenché une grande offensive sur tout le front russe qui vise à l’encerclement de Moscou et de la Crimée.

Le 19 septembre 1941,
ils disent qu’ils sont aux portes de Kiev, le Dniepr est franchi sur presque tout son cours, cependant devant Smolensk les russes attaquent et se rapprochent de cette ville. Leningrad et Odessa tiennent toujours.
A 22h00 la radio française nous annonce que Kiev est occupée par les allemands ainsi que Poltava et que la Crimée est coupée du reste de la Russie et que les jours de Leningrad sont comptés.

Le 20 septembre 1941,
Leningrad semble tenir solidement ainsi que Odessa. Les bombardements anglais sur l’Allemagne redoublent de violence, les avions anglais vont jusqu’à Stettin. Alerte de 23h à minuit.

Du 21 au 25 septembre 1941,
même situation. Un navire américain de commerce a encore été coulé dans l’Atlantique. Les navires de guerre des États-Unis font la chasse au corsaire qui a coulé ce navire.

Le 25 septembre 1941,
dans la matinée, les trains passent sur voie I sur le nouveau pont de Frouard, on va entreprendre aussitôt le nouveau pont pour la voie II. Les deux ponts n’en feront qu’un seul car ils se touchent.

Du 26 au 29 septembre 1941,
guère de changement en Russie.

Dans la nuit du 28 au 29 septembre 1941,
alerte de 22h40 à 5h50. Il y a eu 4 fois alerte mais pour bien dire, alerte toute la nuit.
Les Anglais ont bombardé durement le nord de l’Italie et l’Allemagne du Sud-Ouest surtout Francfort-sur-le-Main, Turin, Gênes.


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* * *

OCTOBRE 1941


Du 29 septembre au 2 octobre 1941,
la lutte est toujours violente en Russie. Leningrad et Odessa tiennent bon ainsi que la Crimée. Leningrad semble même assez dégagée à l’est et en tout cas n’est pas encerclée de ce côté comme les Allemands le prétendaient dernièrement. En Ukraine seulement, les Boches et leurs alliés semblent encore avancer. Depuis la prise de Kiev, les Russes semblent vouloir résister sur une ligne Kharkov-Rostov-sur-le-Don.

Dans la nuit du 1er au 2 octobre 1941,
alerte de 22h45 à 2h15.

Le 2 octobre 1941,
pour la première fois, n'ayant pas eu de vin dans la 3ème décade de septembre et malgré nos économies sur le vin, nous n'en avons plus. Nous buvons de l'eau et de la bière aux repas (il n'y a pas toujours de la bière). Même l'électricité est rationnée, les personnes qui en dépensent de trop sont passibles d’une amende.

Les 2, 3 et 4 octobre 1941,
guère de changement en Russie. Un navire américain vient encore d'être coulé.
Pendant ce temps la guerre continue en Chine depuis environ quatre ans entre le Japon allié de l'Allemagne et de l'Italie et la Chine soutenue par la Russie, l'Angleterre et les États-Unis.

Du 4 au 8 octobre 1941,
grande offensive allemande en direction de Moscou et de la mer d'Azov.

Le 8 octobre 1941,
les Allemands sont à 220 km à l'Ouest de Moscou ayant avancé d'environ 100 km.

Dans la nuit du 12 au 13 octobre 1941,
alerte de 22h45 à 3h00.

Le 15 octobre 1941,
alerte de 2h00 à 6h00. Étant en vendange à Norroy du 9 au 15, pas grandes nouvelles de Russie mais il semble que l'offensive et l’avance allemande aient continuées.
Paulette part à Monthermé sur l'emplacement où est tombé son cher René.

Le 16 octobre 1941,
la situation semble grave en Russie. Les Allemands approchent de Moscou.

Le 17 octobre 1941,
les Boches semblent être à environ 80 km de Moscou où les Russes s'apprêtent à résister. Un destroyer américain est torpillé par un sous-marin allemand dans l'Atlantique nord mais il n'a pas coulé et il n'y a pas de victimes, mais l'incident est grave. Il semble que l'Amérique va armer ses navires de commerce.
A la suite d'une crise ministérielle au Japon, le parti de la guerre semble l’emporter, les États-Unis donnent l’ordre à leurs navires de quitter les ports japonais. La tension s’accentue entre ces deux pays. Le Japon voyant la Russie faiblir ne va t-il pas faire comme la Russie a fait à la Pologne et l’Italie à la France, poignarder la Russie dans le dos, c'est-à-dire l'attaquer en Sibérie.

Le 18 octobre 1941,
on dit que Odessa est prise.

Le 19 octobre 1941,
la prise d’Odessa est confirmée par les Anglais qui disent que les Russes ont évacué la ville.

Du 19 au 25 octobre 1941,
la lutte continue violente en Russie. Les allemands semblent contenus devant Moscou.

Dans la nuit du 22 au 23 octobre 1941,
alerte de 21h05 à minuit 15 malgré la nuit noire et la pluie.

Le 22 octobre 1941,
nous apprenons que Paulette a fait inhumer dans le cimetière de Monthermé le 17 les restes de son cher René. C’est le fermier des Woiries qui les avait conservés.
Il y a eu des sabotages de wagons à l’usine de Pompey mais les coupables n’ont pas été découverts malgré l’enquête.
Une cheminée de l’usine saute le 22 tuant Messieurs Charron et Masson.

Dans la nuit du 24 au 25 octobre 1941,
alerte de 23h45 à minuit.
Suite au meurtre de deux officiers Allemands à Nantes et à Bordeaux, 50 otages sont fusillés dans chacune de ces villes.
Marie-Louise a eu une lettre d’un lieutenant Français qui a inhumé à Niedershost notre cher Alexandre. C’est un certificat pour certifier à la famille sa disparition.

Le 26 octobre 1941,
nous assistons à Norroy au service dit à la mémoire de notre neveu l’adjudant René Munier.

Le 27 octobre 1941,
Marie-Louise nous montre une photo de la tombe de notre cher Alexandre. Sa grande croix de Cappel n’y est plus, c’est une croix uniforme comme les voisines.

Du 25 au 30 octobre 1941,
la lutte continue farouche en Russie. On se bat dans la neige et la boue. Les Allemands sont contenus devant Moscou et en Crimée et se mettent sur la défensive devant Petrograd. Mais ils avancent toujours en Ukraine et s’approchent de Rostof-sur-le-Don.

Le 29 et le 30 octobre 1941,
nous avons ici la première neige au réveil. Le sol en est couvert.
Le général de Gaulle ordonne à tous les Français d’observer cinq minutes de silence le 31 octobre de 16h00 à 16h05, c’est-à-dire de faire une grève de cinq minutes.

Le 30 octobre 1941,
nous apprenons que les Russes ont évacué Kharkov et le 31 que les Allemands ont pénétré en Crimée. La situation redevient grave dans le secteur de Moscou. Les Allemands attaquent à Toula qui se trouve à 175 km dans le sud.
Un contre-torpilleur américain vient d’être coulé dans l’Atlantique Nord.


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* * *

NOVEMBRE 1941


Les 1er, 2 et 3 novembre 1941,
les Russes semblent tenir dans le secteur de Moscou mais la Crimée est envahie, le siège de Sébastopol semble proche.

Les 4 et 5 novembre 1941,
la lutte est très violente devant Moscou.

Le 6 novembre 1941,
les Russes annoncent qu’ils ont gagné la cinquième bataille de Moscou. Par ailleurs ils tiennent bon à Leningrad et à Rostov mais en Crimée ils se sont repliés sur Sébastopol au Sud et Kertch à l’Est et sont ainsi acculés à la Mer Noire mais ils ont la maîtrise de cette mer.
Marie-Louise et Jean-Marie s'en retournent à Custines le 6. C'est une cruelle séparation pour nous tous.

Dans la nuit du 7 au 8 novembre 1941,
alerte de 21h00 à 2h00, l'usine cesse le travail comme d'habitude et est plongée dans l'obscurité mais plus personne ne quitte son lit.

Le 8 novembre 1941,
je passe sur le pont de Custines à mes risques et périls, la reconstruction s'achève. Je fais repasser Marie-Louise avec moi.

Les nuits des 7 au 8 et 8 au 9 novembre 1941 et la journée du 8,
grandes attaques aériennes Anglaises sur les pays occupés, l'Allemagne et l'Italie.

Dans la nuit du 7 au 8 novembre 1941,
surpris par le mauvais temps, les Anglais déclarent avoir perdu sur Berlin, Francfort et Mannheim, 35 bombardiers, et 17 chasseurs de jour le 8 novembre au dessus de la France.
Les Russes semblent tenir sur tout le front et même contre-attaquent.

Du 9 au 13 novembre 1941,
la lutte est toujours aussi violente en Russie, sauf en Crimée où les Russes sont assiégés à Sébastopol et à Kertch. Les Allemands semblent piétiner sur place.
La situation semble tendue entre le Japon et l'Amérique.

Le 12 novembre 1941,
le Général Huntziger, ministre de la guerre celui qui a signé les honteux armistices revenant d'une tournée en Afrique pour se rendre compte de l'état de l'armée et des menées gaullistes, tombe près du Vigan avec son avion par suite du givre et se tue avec tous les passagers et l’équipage.
Les États-Unis demandent à la Finlande de cesser la guerre avec la Russie mais elle refuse.

Du 12 au 16 novembre 1941,
pas grand changement.

Le 15 novembre 1941,
nous apprenons que le navire porte-avions anglais Arc-Royal a été coulé par des sous-marins, il n’y a qu’une seule victime.

Le 17 novembre 1941,
les Allemands annoncent qu’ils sont entrés à Kertch en Crimée où seule Sébastopol tient encore. La bataille reprend avec violence de la mer Noire à l’océan glacial arctique.

Les 18, 19 et 20 novembre,
la lutte est toujours violente en Russie.

Le 20 novembre 1941 à 7h15,
les Russes disent qu'ils sont toujours à Kertch.
Les Anglais annoncent que le 18, ils ont pris l’offensive en Tripolitaine et avancé de 80 km dans le désert de libye. Peut-être que cette fois-ci ils iront jusqu'à la Tunisie.

On dit qu’il n'y aura plus d'alerte à l'usine à cause de la production qui en souffre, naturellement tant qu’elle ne sera pas bombardée ce qui n'est pas sur.

Le 20 novembre 1941 au soir,
les Russes disent qu'ils ont évacué Kertch et qu'ils tiennent sur le reste du front.
Le Général Weygand est mis à la retraite mais c'est sous la pression de l'Allemagne qui n'était pas sure de lui en Afrique.

Les 21 et 22 novembre 1941,
la lutte se poursuit à l’avantage des anglais en Libye. Le 22, les Allemands disent qu'ils sont entrés à Rostov-sur-le-Don. La bataille pour le pétrole du Caucase semble commencée.

Le 23 novembre 1941,
les Anglais annoncent la prise de Bardia et disent qu’ils ont déjà fait 15000 prisonniers en Libye où la bataille fait rage à environ 6 km de Tobrouk qui va être délivrée. Les Italo-allemands encerclés font des efforts désespérés pour se dégager entre Tobrouk et Sidi-Rések.
Le Général Oditt passe avec De Gaulle.
La lutte redouble de violence en Russie, il gèle très fort à Moscou.

Le 24 novembre 1941,
les Allemands ne sont plus qu'à 50 km de Moscou. Mais les Russes résistent avec acharnement ainsi du reste que les Italo-allemands en Libye où Tobrouk n'est pas encore dégagée mais la position des Anglais est bonne.

Le 24 novembre 1941,
nous rentrons pour 130 F un stère de bois et c'est pour 4 mois et il faut aller à l'usine le chercher, c'est tout pour un ménage. Il n'y a plus de houille, ni de boulets ni de coke pour les particuliers à part dans les grandes villes. Il n'y en a que pour les usines et les chemins de fer. Il y aura tout de même 50 kg de pommes de terre par personne pour l'année. On a maintenant 1 paquet de tabac et 1 de cigarette pour 15 Jours. Les hommes fument mélangées avec le tabac des feuilles séchées de vignes, noyer et herbes diverses. Il y en a qui donnent deux kilos de pain pour un paquet de tabac ou du beurre à ceux qui ne fument pas mais qui le prennent quand même.

Les 25, 26 et 27 novembre 1941,
la lutte est acharnée en Russie et en Libye. L’étau se resserre sur Moscou sur les Russes et sur Sidi-Rések sur les Italo-allemands.
On dit que les Allemands s'emparent des manteaux de cuir dont sont porteurs les passants. Ils les payeraient environ 300 F.

Le 27 novembre 1941,
les Anglais de Sidi-Rések font leur jonction avec la garnison de Tobrouk assiégée depuis environ 7 mois. Le gros des forces ennemies est ainsi encerclé, il va sûrement tenter de se dégager.
Les derniers Italiens d'Abyssinie assiégés dans Goudar capitulent.

Les 28, 29 et 30 novembre 1941 et 1er décembre 1941,
la situation semble bonne en Russie et en Libye où les Anglais ont atteints le golfe de Syrte à 150 km au Sud Ouest de Benghasi coupant de nouveau la retraite à l’ennemi qui cependant essaye de se dégager.
Devant Moscou, la situation est toujours grave mais les Russes ont culbuté les Boches dans le Sud et sont rentrés à Rostov-sur-le-Don le 28.

Dans la nuit du 30 novembre 1941 au 1er décembre 1941,
alerte de 21h50 à 22h45.


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DÉCEMBRE 1941


Le 1er décembre 1941,
le Maréchal Pétain rencontre à Saint-Florentin-Vergigny, le Maréchal Goering. La situation s'aggrave entre le Japon et les États-Unis.

Le 2 décembre 1941,
nous apprenons qu'au cours d'un combat contre un corsaire Allemand, le croiseur australien Sydney a été coulé avec tout son équipage de plus de 600 hommes. Son adversaire le Kormoran a lui aussi coulé mais son équipage a atterri en Australie où il a été fait prisonniers.

Du 2 au 5 décembre 1941,
les Anglais sont contenus en Libye. Tobrouk est même de nouveau isolée. Sidi-Rések passe de mains en mains.
En Russie, dans le Sud, les Russes entrent à Taganrog mais en Finlande ils évacuent Hangoë leur dernier point qu'ils tenaient dans ce pays.

Le 6 décembre 1941,
l'Angleterre fait savoir quelle se considère en guerre avec la Finlande, la Hongrie et la Roumanie.

Le 7 décembre 1941,
à 21h45, Londres nous annonce que les avions Japonais ont bombardé les bases américaines des îles Hawaï, Philippines et Guam. Cette fois-ci, c'est la guerre mondiale.

Le 8 décembre 1941,
à 7h15, on a des détails. Les Japonais ont attaqué à la manière Boche sans déclaration de guerre le 7 à 8h00. 150 avions ont bombardé Hawaï ; Singapour aux anglais a été également bombardée. Les Japonais ont débarqué en Birmanie anglaise et à Bornéo aux Hollandais.
L’Angleterre a déclaré aussitôt la guerre au Japon, de même Costa Rica et le Nicaragua. Il est probable que tous les états américains vont en faire autant et déclareront aussi la guerre à l'Allemagne et à l'Italie.

Le 8 décembre 1941
à 21h15, nouveaux détails de l'attaque Japonaise aux Hawaï. Il y a eu 1500 tués, un cuirassé et plusieurs navires américains coulés. Les pertes américaines vu la surprise ont été lourdes.
Le Siam ou Thaïlande laisse passer les Japonais qui viennent par mer ou de l’Indochine française.

Le 9 décembre 1941,
on dit que de violents combats se livrent dans la presqu'île de Malacca où les japonais ont débarqué. Ils ont débarqué aussi dans une des îles Philippines.
Déjà six petits états américains ont déclaré la guerre au Japon.
Nous nous demandons tout ce que va faire la France et surtout ses colonies.
En Russie, les Allemands disent qu’ils sont arrêtés par l’hiver, en réalité, ils sont plutôt à bout de souffle surtout devant Moscou et dans le Sud ils reculent encore.
En Libye, la lutte a repris à l’avantage des Anglais. Tobrouk est de nouveau débloquée mais le gros des forces ennemies est parvenu à s’échapper en direction de l’ouest.
Les Japonais ont attaqué les Anglais le 7 à 2h00 du matin en débarquant au nord de Singapour, mais les Anglais veillaient et le combat s’est engagé aussitôt, tandis que les Américains ont été complètement surpris.

Le 6 décembre 1941,
un avion anglais qui avait découvert la flotte Japonaise avait déjà été canonné par celle-ci.

Le 10 décembre 1941,
à 13h15 les Anglais annoncent un grave revers ; la flotte anglaise d’Extrême Orient sortie de Singapour pour s’opposer aux débarquements Japonais en Malaisie Orientale surprise par les avions japonais, a perdu deux cuirassés, l’un le Prince of Wales de 35.000 tonnes, l’autre le Répulse de 32.000 tonnes.
Les Japonais ont débarqué dans l’île de Luçon, Manille est menacée. Ils ont débarqué dans plusieurs autres endroits et ont isolé Singapour de la terre.
L’amiral Darlan rencontre Ciano à Turin.

Le 11 décembre 1941,
on apprend qu’un petit patrouilleur Anglais est encore coulé à Hong-Kong mais à son tour un cuirassé japonais l’Harduna de 27.000 tonnes est perdu. Les Japonais ont pris l’île de Guam.
En Russie, la situation semble bonne. Les Allemands disent qu’à cause de l’hiver, ils cessent les opérations offensives pour se replier sur des positions de résistance. Ils sont plutôt comme le grand Napoléon et ses braves soldats contraints à la retraite. Ils auront sans doute le même sort.
Costa-Rica, San-Salvador, Panama, Haïti, Saint-Domingue, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua, la Bolivie et Cuba ont déjà déclaré la guerre au Japon.
L’Allemagne et l’Italie déclarent la guerre aux États-Unis.
Les Chinois de Tchang-Kaï-Check attaquent à Canton pour aider à Hong-Kong les Anglais attaqués.

Le 12 décembre 1941,
à 7h15 on annonce qu’un croiseur et un destroyer japonais ont été coulés. A 13h15, on apprend qu’un cuirassé japonais a reçu plusieurs bombes.

Les 13 et 14 décembre 1941,
il semble bien que c’est la retraite Allemande en Russie et en Libye. En tout cas l’offensive sur Moscou est arrêtée.
Les Italiens viennent de perdre deux croiseurs. Chose bizarre, le Japon et la Russie ne sont pas encore en guerre. Ont-ils peur l’un de l’autre, mais chose regrettable, la Russie aura difficile de recevoir maintenant les approvisionnements anglo-américains depuis l’entrée en guerre du Japon et surtout maintenant que beaucoup de ports Russes sont pris par les glaces.

Le 14 décembre 1941,
100 otages juifs sont fusillés à Paris en représailles des attentats contre les soldats allemands. Tout individu pris maintenant avec des armes est fusillé et cela arrive fréquemment. Il y a quelques jours, onze à Brest, 4 à Paris, etc.

Le 15, 16 et 17 décembre 1941,
pas grand changement mais la situation est assez sérieuse à Hong-Kong, en Malaisie, à Bornéo et aux Philippines. Les Japonais profitant de la surprise ayant débarqué dans beaucoup d’endroits. De plus, ils viennent de s’emparer de Macao possession portugaise en Chine en face Hong-Kong.

Le 18 décembre 1941,
il y a un an que nous avons trouvé la tombe de notre cher Alexandre. En matinée une messe a été dite pour lui, nous y assistions tous.
Le soir, on apprend que l’ennemi a subi un grave revers en Libye.

Le 19 décembre 1941,
au matin on apprend que la Martinique a signé un accord avec les Français libres.

Les 19, 20 et 21 décembre 1941,
la situation reste grave en Extrême-Orient, surtout à Hong-Kong. Les japonais débarquent un peu partout même en Nouvelle-Guinée.
La flotte américaine n’a pas encore donnée mais elle ne tardera sans doute pas à intervenir, en tout cas les colonies Américaines, Anglaises et Hollandaises du Pacifique sont en partie envahies car elles n’ont pas assez de troupes pour les défendre et les renforts auront difficile à arriver à cause de la flotte japonaise et de la grande distance.
En Russie et en Libye, la retraite allemande continue lentement en Russie et rapidement en Libye.

Le 22 décembre 1941,
à 7h15 on apprend que le Führer Adolphe Hitler prend le commandement des troupes allemandes, c’est la preuve que cela ne va pas comme il voudrait.

Le 23 décembre 1941,
Churchill est en Amérique avec Roosevelt.

Le 24 décembre 1941,
rien à signaler.

Le 25 décembre 1941,
Noël un jeudi. Suite à un déraillement, nous travaillons toute la journée de 5h00 à 18h00.
A 19h15, j’apprends que la reddition des Anglais à Hong-Kong après une héroïque résistance, en revanche, ils ont pris Benghasi en Libye.
Les îles Saint-Pierre et Miquelon passent avec De Gaulle.

Les 26 et 27 décembre 1941,
la situation favorable en Russie et en Libye, semble grave dans le Pacifique. Manille capitale des Philippines est déclarée ville ouverte et semble devoir être occupée prochainement par les Japonais qui continuent à débarquer pour bien dire sans opposition dans de nombreuses îles.

Les 28 et 29 décembre 1941,
même situation.

Le 29 décembre 1941,
j’apprends par madame Barbier du café de la Lune que c’est le capitaine Marion habitant Nancy mais originaire de Lay-Saint-Christophe qui a identifié et fait enterrer notre cher Alexandre, et non le capitaine Doré comme nous l’avions cru.

Le 30 décembre 1941,
une dépêche nous annonce que ma mère est très malade. Elle meurt le 31 à 5h00 du matin. Triste fin d’année pour nous.

Le 31 décembre 1941,
bonnes nouvelles de Libye et de Russie où les Russes sont à 110 km à l’Ouest de Toula et ont débarqué en Crimée où ils ont repris Kertch et Théodosia.


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- 1942 -

* * *

JANVIER 1942


Le 1er janvier 1942,
un jeudi, triste Nouvel An. Nous veillons ma pauvre mère. Nous l’enterrons le 2 à 15h00.

Le 3 janvier 1942,
les nouvelles sont toujours bonnes de Russie et de Tripolitaine mais plutôt mauvaises du Pacifique où les Japonais sont entrés à Manille et semblent menacer Singapour. J’espère cependant qu’ils ne parviendront pas à prendre cette ville.

Du 4 au 9 janvier 1942,
la situation reste sans grand changement sur tous les fronts. L’hiver est terrible en Russie et ici, il fait environ -14° mais presque pas de neige. En Libye les Anglais semblent arrêtés à Agédabia, à environ 150 km au Sud-Ouest de Benghasi.
La vie devient de plus en plus dure et les vols de plus en plus fréquents. De nombreux cheminots sont révoqués pour vol de colis, de marchandises, de vin, de chauffage, etc.

Les 10 et 11 janvier 1942,
toujours la même situation favorable en Russie et en Libye, et assez critique en Extrême-Orient.

Les 12, 13, 14 et 15 janvier 1942,
l’avance Russe et Anglaise continue lentement en Russie et en Tripolitaine mais Singapour semble sérieusement menacée et l’invasion japonaise continue dans de nombreuses îles. Les Américains tiennent cependant bon pas loin de Manille.
L’hiver continue très rude en Russie et assez rude ici et le chauffage est rare.

Les 16, 17, 18 et 19 janvier 1942,
même situation.

Le 17 janvier 1942,
Monsieur Churchill est rentré en avion en Angleterre après un assez long séjour en Amérique.
Le même jour, les derniers ennemis qui résistaient encore à la frontière d'Égypte se rendaient à Alfaya au nombre de 5500.

La vie vient de plus en plus dure. Les vivres sont de plus en plus rares et toujours plus chers ainsi que toutes les marchandises et les traitements sont toujours à peu près les mêmes.

Le 21 janvier 1942,
on nous annonce une victoire des Russes le 20. Le saillant de Mosaisk devant Moscou où les Allemands s’efforçaient de tenir a été pris mais les Russes en Crimée ont évacué Théodosia. En Libye le contact est repris avec l’ennemi qui s’est retiré d’Adjedabia à El … plus à l’Ouest. La menace sur Singapour s’accentue.
Dans le nord de la Suède, il y a 50°en dessous de zéro.
Ici, il y avait – 18° ce matin. L’hiver a pour bien dire commencé au nouvel an mais le mois de janvier est assez dur.

Du 21 au 24 janvier 1942,
pas grand changement mais en Libye, Rommel a repris Adjedabia aux Anglais.
Il y a eu ici jusqu'à 24° en dessous de zéro.

Le 24 janvier 1942,
forte chute de neige dans la matinée et le dégel à partir de midi.
La conférence de tous les états américains réunie à Rio-de-Janério a voté le principe de la rupture des relations diplomatiques de tous ces états avec les puissances ennemies, c'est-à-dire de l'axe Berlin, Rome, Tokyo.
Même avec des tickets on ne trouve pas de vin en ce moment que par des moyens détournés. Le vin vaut maintenant de 5.00 F à 8.00 F le litre avec des tickets et sans ticket dans les cafés un prix bien supérieur et il faut le boire sur place. Il n'y a guère que les riches qui peuvent s'en payer comme cela car il va de l0 à 50 F même plus mais c'est du bon. Cependant dans les épiceries on peut en avoir à emporter. Les ouvriers en boivent tout de même dans les cafés à un prix de 8.00 F ou légèrement supérieur mais il n'y en a pas souvent. Beaucoup de cafés sont fermés faute de tout, même de la bière.
Les pommes de terre qui valent environ 200 F au ravitaillement général se vendent au marché noir jusqu'à 600 F les 100 kilos et on n’en trouve pas, de même que les œufs qui valent de 2 à 3.00 F l’œuf. Il y a tout de même des ouvriers même leur famille qui boit du vin cher quand ils n’en trouvent pas d'autre quitte à se priver sur autre chose.
Le Siam ou Thaïlande vient de déclarer la guerre aux Anglo-américains. Il y était de fait depuis l'entrée en guerre du Japon.

Du 25 au 28 janvier 1942,
pas grand changement.

Le 27 janvier 1942,
après deux jours de dégel, gel brusque dans la nuit du 26 au 27, -15°.
Ce jour on apprend que les premiers américains venant combattre avec les Anglais sont arrivés en Irlande du Nord. De même, la marine américaine a coulé ou avarié de nombreux navires japonais en Extrême-Orient. En revanche, les sous-marins ennemis ont coulé devant New-York et sur les côtes américaines et canadiennes de l’Atlantique un certain nombre de navires.

Dans la nuit du 27 au 28 janvier 1942,
chute de neige et –2° et le dégel dans la journée.

Le 29 janvier 1942,
la radio française nous apprend que les Italo-allemands ont repris Benghasi.

Le 30 janvier 1942,
Londres nous dit le matin à 7h15 que l’on se bat à 60 km au nord de Singapour. La bataille décisive pour cette ville est commencée, espérons qu’elle sera favorable aux anglais. L’invasion japonaise s’étend toujours, l’avance Russe continue en beaucoup d’endroits et les anglais reculent à nouveau en Libye.

Dans la nuit du 30 au 31 janvier 1942,
fortes chutes de neige.

Le 31 janvier 1942,
à 7h15 Londres nous dit que l’on se bat à 30 km au Nord-Ouest de Singapour.


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FÉVRIER 1942


Le 1er février1942,
à 21h15 Londres nous dit que les Anglais ont évacué la Malaisie et se sont retirés dans l'île de Singapour. La situation est donc grave là-bas. Un bras de mer de seulement 1 km sépare l’île du continent.

Le 2 février 1942,
l’hiver reprend fortement, -l5°.
La flotte américaine pour la première fois vient d’attaquer les Japonais dans leurs possessions d’Océanie et leur a infligé des pertes. Le siège de Singapour est commencé.
De tous les états américains seuls l’Argentine et le Chili n’ont pas encore rompu les relations diplomatiques avec les puissances de l’axe.

Du 2 au 8 février 1942,
pas grand changement. En Libye, les Anglais ont évacué Derna. L’avance Russe continue lentement. Singapour est bombardée mais n’a pas encore été attaquée.
L’hiver continue rigoureusement ici. Il y a une forte couche de neige.

Dans la nuit du 8 au 9 février 1942,
les Japonais déclenchent l’attaque contre l’île de Singapour et y prennent pied.

Le 9 février 1942,
le paquebot français Normandie, le plus grand du monde est incendié dans le port de New-York.

Le 10 février 1942,
les Anglais reculent dans l’île de Singapour tandis qu’en Libye, ils semblent arrêter l’ennemi en avant de Tobrouk. En Russie, l’avance Russe continue lentement.

Dans la nuit du 11 au 12 février 1942,
nous avons l’alerte ici. Nous entendons la sirène d’alerte à 21h45 et la fin d’alerte à minuit 30.
La situation est critique à Singapour le 12.
Les Japonais sont entrés dans la ville le 11. Les Anglais vont probablement être obligés de se rendre ou vont tenter de se rembarquer. Venant après la prise de Hong-Kong, la prise de Singapour serait un rude coup pour l’Angleterre. Mais elle en a vu bien d’autres et à pour bien dire à toutes les guerres, gagnée la dernière bataille. Nous espérons toujours qu’il en sera de même encore cette fois.

Du 12 au 15 février 1942,
la lutte est acharnée à Singapour. Les Anglais résistent avec courage mais ils succomberont probablement sous le nombre.

Dans la nuit du 14 au 15 février 1942,
alerte de 21h30 à 23h40.

Le 15 février 1942,
à 20h30 la radio française nous apprend que les Anglais ont capitulé dans l’après-midi à Singapour, c’est un rude coup pour les alliés mais les Japonais ont payé cher leur victoire. Après avoir lancé de nombreux parachutistes, les Japonais ont débarqué également dans la grande île de Sumatra.

Le 16 février 1942,
on apprend qu’ils ont également débarqué dans l’île de Java (ce n’était pas vrai).

Le 17 février 1942,
on apprend par la radio française qu’environ 60 000 hommes se sont rendus à Singapour aux Japonais. Il y avait 13 000 Australiens et 30 000 Hindous.
L’hiver dure toujours ici.

Du 17 au 22 février 1942,
pas grand changement sur tous les fronts.

Le 21 février 1942,
il y avait ici environ 20 degrés en dessous de zéro et toujours beaucoup de neige sur le sol. Dans les Vosges, la neige atteint plusieurs mètres de hauteur, on me disait six à sept mètres à certains endroits.
Le ravitaillement est toujours plus insuffisant, on nous a supprimé le vin de la dernière décade de janvier et à partir du 1er février, il n’y aura plus par décade que 2 litres de vin pour les cartes T et 1 litre pour les autres cartes, ce qui fera chez nous 6 litres pour nous cinq et encore nous ne sommes pas surs d’avoir cela car on dit que le vin va manquer, les Allemands le prenant de plus en plus.
Le ministère anglais a été remanié.
Le procès de Riom où comparaissent Daladier, Blum, le général Gamelin, etc. est commencé.
Les Japonais ont bombardé à plusieurs reprises Port-Darwin dans le Nord de l’Australie et ont occupé la partie portugaise de l’île Timor.

Le dégel commence ici l’après-midi du 22 février. Nous avons passé un dur mois de janvier ainsi que février.

Du 22 au 27 février 1942,
pas beaucoup de changement sur tous les fronts.

Le 27 février 1942,
il faut déclarer à la mairie les poules et les lapins.
La température reste aux environs de 0°, la neige est à peine fondue.
Les boches enlèvent les statues de bronze dans les villes. On dit qu’ils vont enlever 2 cloches sur trois dans toutes les églises.
L’attaque de Java par les Japonais doit se préparer car ils se sont emparés des îles voisines mais les anglo-américians commencent à arriver à Java.

Le 28 février 1942,
les Japonais débarquent en trois points au nord de Java (nuit du 27 au 28). Le même jour des parachutistes Anglais atterrissent aux environs du Havre, détruisent des installations allemandes et se rembarquent en emmenant des prisonniers.
A plusieurs reprises, les Anglais ont déjà fait de petits débarquements en Norvège et un en France l’an dernier mais ils se rembarquent un peu après.


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MARS 1942


Le 1er mars 1942,
encore -3° le matin.

Du 1er au 4 mars 1942,
pas grand-chose à signaler. Cependant, Java est sérieusement menacée, environ 100.000 Japonais y seraient débarqués.
Enfin, voilà la fin de l’hiver. Le 4, il y avait -4° le matin mais la pluie s’est mise à tomber dans la soirée.
Dans la nuit du 3 au 4, les usines Renault à Billancourt ont été bombardées par l’aviation anglaise. Il y aurait de nombreuses victimes. Il paraît que les Anglais avaient prévenu mais on n’avait pas pris cela au sérieux.

Les 4 et 5 mars 1942,
la radio française donne de nombreux détails sur le bombardement des environs de Paris dans la nuit du 3 au 4. Cela a duré de 21h00 à 23h00. Il y aurait environ 500 tués et 1200 blessés et 200 maisons détruites à Billancourt, Puteaux, Courbevoie, le Pecq, Clamart, Boulogne, Issy, Sèvres, etc. ; et même Versailles, mais elle ne dit rien de l’usine de Billancourt qui d’après ce qu’on m’a dit serait presque détruite. D’après les Anglais ce matin 5 mars, cette usine construisait pour les Allemands environ 6000 camions par mois et de nombreuses pièces d’avions. Les Anglais s’excusent de ce bombardement en disant que c’était une nécessité. Du reste, ils avaient prévenu par tracts, par fusées éclairantes et par avion sirène.

Le 6 mars 1942,
les Anglais nous annoncent que les Japonais sont entrés à Batavia capitale de Java et des Indes Néerlandaises. Ils nous annoncent aussi que les photos prises par eux des usines de Billancourt après le bombardement montrent des tanks incendiés.


Le 7 mars 1942,
ont lieu les obsèques des victimes du bombardement. Le gouvernement décrète que la journée du 7 et le 8 jusqu’à midi sont considérés comme deuil national.

Le 8 mars 1942,
à 16h30 les Anglais bombardent l’usine de Poissy près de Paris qui fait aussi des voitures pour les Allemands. Il n’y a pas de victimes car c’est dimanche. Vers la même heure la gare de triage d’Abbeville et l’usine électrique de Comines près de Lille sont également bombardées.

Le 9 mars 1942,
les Japonais entrent à Rangoon, capitale de la Birmanie. Les indes anglaises semblent à présent menacées.

Dans la nuit du 8 au 9 mars 1942,
les Anglais ont bombardé violemment les usines Krupp à Essen.
Les Russes continuent d’avancer petit à petit.
En Libye, la situation reste stationnaire. Il semble que les Anglo-américains vont entreprendre une grande offensive aérienne contre l’Allemagne et les usines et installations des pays occupés.
Malheureusement, il y aura de malheureuses victimes dans nos pays car nous sommes obligés de travailler pour vivre, mais nous travaillons presque tous malgré nous car nous faisons le jeu de l’ennemi c’est-à-dire de l’Allemagne, de l’Italie et du Japon, car pour nous, le peuple, les alliés ce sont les Anglo-américains (et les Russes même pour les anticommunistes comme moi).
L’occupation Japonaise s’étend. A part l’Australie et la Nouvelle-Zélande et quelques îles, les Japonais occupent tout ou une grande partie de l’Océanie ainsi qu’une partie de la Birmanie et la Malaisie. L’Australie à son tour semble menacée.

Du 9 au 18 mars 1942,
guère de changement. Le général américain Mac-Arthur qui résiste toujours dans l’île de Luçon bien que privé de tout secours et nommé commandant en chef des troupes alliées en Australasie et arrive en Australie en avion.
Des troupes Hollandaises et alliées résistent encore à Java et Sumatra et dans quelques autres îles d’Océanie.

Le 16 mars 1942,
le pont de la route sur la Moselle, entre Pompey et Frouard, est ouvert à nouveau à la circulation. le pont provisoire construit un peu en amont est aussitôt démonté par les soldats Français du Génie.

Le 14 mars 1942,
la radio Anglaise nous a annoncé que par nécessité, les alliés se voyaient dans l’obligation de bombarder les installations se trouvant en territoire occupé, y compris les usines et mines de lorraine. Aussi, la population se montre assez inquiète. Les Anglais nous recommandent d’exiger de bons abris et que ceux qui le peuvent partent pour la campagne.

Du 18 au 21 mars 1942,
rien de nouveau mais le 21, les Anglais nous recommandent à nouveau de nous méfier de leurs bombardements, que la R.A.F. c’est-à-dire la Royale-Air-Force ou aviation anglaise arrive.

Du 21 au 25 mars 1942,
rien à signaler.

Le 26 mars 1942,
à minuit 30 la sirène d’alerte nous réveille, fin de l’alerte à 1h10. La population inquiète est sortie dans les rues pour aller aux abris. Moi je ne me suis pas levé mais ma famille a attendu la fin de l’alerte dedans et devant la maison, mais il n’y a rien eu.

Le 25 et le 26 mars 1942,
je plante mes épices dans un champ assez éloigné. La nuit du 26 au 27, on me vole une partie des oignons, ails, échalotes et oignons échalotes que j’avais plantés. Je porte plainte à la gendarmerie. Il faut dire que la vie devient de plus en plus difficile et les vols de toutes sortes plus fréquents. Tout le monde veut cultiver et on ne trouve presque pas de semences, c’est ce qui explique mon vol.

Le 28 mars 1942,
alerte de 5h40 à 5h55. A part moi qui reste au lit, toute la famille se lève.
A minuit 30, les Anglais débarquent à Saint-Nazaire et rembarquent à 4h00 après avoir détruit une partie du port notamment l’écluse en faisant sauter contre un vieux contre-torpilleur lourdement chargé.

Le 29 mars 1942,
il semble que la Bulgarie qui jusqu’à présent avait résisté aux exigences de Berlin se décide à envoyer des troupes contre les Russes.

Les 30 et 31 mars 1942,
pas de changement.


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AVRIL 1942


Le 1er avril 1942,
Marie-Louise est avertie officiellement par Monsieur le Maire de Custines de la mort au champ d’honneur de notre cher Alexandre. Vraiment on y a mis le temps. Pour René, on n’est pas encore avisé.

Du 1er au 6 avril 1942,
pas beaucoup d’événements.

Le 6 avril 1942,
qui est le lundi de Pâques, la sirène nous réveille brusquement à 3h05, fin de l’alerte à 3h45. Comme c’est l’habitude maintenant, toute la famille à part moi se lève et va devant la maison où même dans la rue prête à se sauver à la mine où il y a un bon abri ou vers le bois au cas où l’avion sirène passerait car tout le monde dit qu’il doit en passer un avant le bombardement. Presque toute la population se lève et fait comme chez nous. Beaucoup de monde même va directement aux abris.

Les 7 et 8 avril 1942,
rien à signaler

Le 9 avril 1942,
les Américains qui depuis de longs jours résistent à des forces très supérieures en nombre dans la presqu’île de Baatan, île de Luçon, capitulent après une héroïque résistance. Ceux de l’île de Corregidor à l’entrée de la baie de Manille résistent encore.
Le dégel entrave les opérations sur le front Russe où on s’attend au bon temps à une grande offensive allemande.
La lutte est toujours vive sur mer où de nombreux navires des deux parties sont coulés ou avariés tous les jours.
Et nous nous serrons toujours plus la ceinture. Notre neveu André est rentré dernièrement de la France-libre. Il dit que là-bas, ils ne sont pas mieux que nous, même plus mal.

Les 10, 11 et 12 avril 1942,
rien à signaler.

Le 13 avril 1942,
alerte de minuit 20 à 2h20. Jean et sa mère se lèvent mais reviennent se coucher un peu plus tard en voyant que nous sommes restés couchés nous trois Yvonne et Suzanne.

Le 14 avril 1942,
bruits de retour au pouvoir de Pierre Laval, cela devient inquiétant.

Le 15 avril 1942,
alerte de 1h00 à 4h00, à part ma femme qui se lève et revient se coucher une demie heure après, nous restons tous au lit. A chaque alerte, il paraît que de nombreux avions anglais passent dans les environs ainsi qu’au dessus de Pompey, mais il n’y a pas de D.C.A. allemande. En plus des alertes par la sirène, les gares sont fréquemment alertées mais la population ignore ces alertes.

Le 16 avril 1942,
encore alerte de 3h30 à 4h30. Cette fois-ci, nous restons tous au lit.

Le 17 avril 1942,
le ministère français démissionne.
Le même jour, sur l’ordre des Allemands à la suite de soi-disant attentats dans la région, il faut organiser un service de garde civique pour le 18 à 21h00. Le conseil municipal décide de mettre 10 hommes toutes les nuits de 21h00 à 6h00 pour garder l'usine et la ville. Ces hommes de 18 à 60 ans seront pris en suivant la liste électorale en commençant par la lettre A et naturellement on ne sera pas payé. Un conseiller municipal assistera tous les jours à la prise de service ce qui fait que ce sera mon tour tous les 12 jours.
Le matin, une douzaine d'anciens communistes de Pompey et environs ont été arrêtés comme otages par les Allemands.
Le jour commençait à tomber, à 21h15 alerte, fin à 21h30. Nouvelle alerte à 21h40 fin à 21h50.

Le 18 avril 1942,
au matin on apprend que Laval doit être au pouvoir et que les Anglais ont bombardé l'Italie la nuit écoulée, c'était leur passage aux alertes d'hier soir. Le soir, la nouvelle est confirmée, Laval est Président du Conseil et Darlan commandant en chef des armées de terre, de mer et de l'air.

Le 18 avril 1942,
vers 22h00 un explosif éclate au PN de Marbache, n°1, il avait été mis sur voie I, file II dans le PN entre le rail et le contre-rail. Il abîme l'âme et le patin du rail mais ne gêne pas la circulation. La garde-barrière s'en aperçoit seulement le 19 vers 7h30 en voyant qu'elle a des carreaux cassés. Une enquête sévère est en cours.

Le 19 avril 1942,
un dimanche, l'équipe remplace le rail avarié.

Dans la nuit du 20 au 22 avril 1942,
alerte de 23h40 à 0h10.

Dans la nuit du 21 au 22 avril 1942,
les Anglais débarquent aux environs de Boulogne et rembarquant 2h après.

Du 22 au 27 avril 1942,
pas grand changement mais l'aviation anglaise bombarde durement l'Allemagne et les installations des pays occupés.

Le 25 avril 1942,
le général Giraud, ancien gouverneur de Metz, prisonnier de guerre près de Dresde s'évade. Il s'était déjà évadé en 1914, il va sûrement tenter de rejoindre le général De Gaulle dont il était le Chef à Metz, mais y parviendra t-il car les Boches ont promis 100.000 marks pour sa capture. Il a 63 ans, c'était un de nos meilleurs généraux. Nous l'avons vu à Metz ainsi que De Gaulle à la revue du 11 novembre l938.

Le 28 avril 1942,
alerte de 0h55 à 1h15 et de 4h00 à 4h20. Nous ne quittons plus notre lit. Le même soir comme conseiller municipal à 20h30, j'organise le service des 10 gardes civils qui patrouillent toute la nuit de 21h00 à 6h00.
A 21h15, Londres nous dit que le Général Giraud aurait quitté la Suisse le 25 avril.

Les 29 et 30 avril 1942,
pas grand événement, mais le 30 à 6h00 une explosion détériore gravement le pont-levis de Malzéville entravant la circulation sur le canal. Les sabotages continuent dans la région malgré les mesures prises, c'est presque incroyable car tout Français pris en possession d'armes à feu ou d’explosif est fusillé. Certains disent que c’est peut-être les Allemands qui font du soi disant sabotage pour énerver la population et exercer des représailles, cela peut-être vrai.


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MAI 1942


Du 1er au 5 mai 1942,
les Japonais progressent en Birmanie. Ils ont occupé Mandalay la capitale le 1er.

Le 4 mai 1942,
nous recevons la nouvelle que la maison de nos parents à Norroy s'est en partie écroulée le 1er mai vers l3h00. De plus, il va probablement falloir opérer ma sœur. Vraiment le malheur s'acharne sur notre famille.

Dans la nuit du 4 au 5 mai,
Jean prend son premier service de garde civil et nous avons l'alerte de minuit à 4h00. Nous avons entendu passer des avions à trois reprises, mais toujours rien d'anormal par ici, aussi on ne quitte plus son lit.

Le 5 mai 1942,
à 7h15, je crois comprendre à la radio qu'il se passe quelque chose d'anormal à Madagascar.
A 9h15, Londres nous dit que pour devancer les Japonais qui auraient sûrement occupés la grande île, les gouvernements Anglais et Américain ont prévenu Vichy qu'ils allaient occuper la base navale de Diégo-Suarez et qu'à la même heure les flottes alliées étaient devant la ville.
Deux amiraux Japonais avaient été reçus les jours derniers par Laval et le Maréchal Pétain. Alors comme en Syrie les alliés montrent de l'énergie, pourvu que les Français ne résistent pas comme là-bas.
A 13h15, nous apprenons que les opérations sont en cours pendant que la flotte croise devant la ville. Des troupes ont débarqué de l'autre côté de l'isthme, qu'elles traversent en rencontrant une légère résistance.
A 20h30, Vichy publie un communiqué annonçant ces événements et un télégramme du gouverneur de Madagascar disant qu'il a donné l'ordre aux troupes de résister jusqu'au bout. Seules les forces Anglaises participent à l'opération. Il n’y a pas d'américains pour le moment. Ils semblent ne pas vouloir brusquer les choses avec Vichy.

Le 6 mai 1942,
alerte de minuit 30 à 1h00 et de 2h00 à 4h00. Les vols de toutes sortes continuent. Les jours derniers un cochon de 30 kg a encore été volé à Pompey. Des pommes de terre plantées sont déterrées pour être soient mangées soient replantées par les voleurs. Tout devient de plus en plus rare. Pour nous cinq, nous n'avons plus que 18 litres par mois de vin et les trains complets continuent à partir en Allemagne ainsi que des trains d'oranges, et il n'y en a pas pour les petits français.
Beaucoup de personnes sont affaiblies par les privations et font peine à voir. Actuellement je suis malade moi-même. Je tiens à peine sur mes jambes. J'ai 10 jours par le Docteur.
Pour avoir quelques carottes au magasin des Coopérateurs, les ménagères font depuis plusieurs jours des queues interminables. Beaucoup de personnes surtout les hommes ont de la furonculose, certains sur tout le corps et il y en a qui ont cela depuis plus de 6 mois. On dit que c'est le pain qui est cause de cela. Il est tout gris et mauvais. Il est composé de blé avec le son et de toute sorte de produits farineux probablement, seigle, orge, maïs, féveroles, etc. et on dit qu'on ne fera pas la soudure avec le blé, il se pourrait que les rations de pain soient encore réduites.
Le médecin que je viens de revoir me donne des piqûres et des ampoules pour boire pour me fortifier. Il dit que c'est de la faiblesse due au manque de vitamines, je m'en doutais bien, mais il ne peut donner de rations de vivres en plus. Il nous faudrait bien un peu plus de pain, de matières grasses, de légumes secs, de pommes de terre, de patates, de vin, etc. mais rien à faire, c'est la loi.
Dans la soirée on apprend que les Français résistent à Madagascar, c'est bien malheureux. Les Français disent qu'ils résistent avec courage, les Anglais disent que les pertes sont assez lourdes des deux côtés. Le croiseur français Bougainville et le sous-marin Beneziers ont été coulés.
Les Américains qui résistaient à Corregidor aux Philippines depuis de nombreux jours viennent de capituler après une héroïque résistance.

Dans la nuit du 6 au 7 mai 1942,
encore une alerte de 23h50 à 3h15. Les Anglais comme les deux nuits précédentes allaient avec de nombreux avions bombarder les villes de l'Allemagne du Sud dont Stuttgart.

Le 7 mai 1942,
à 15h15 Londres dit que les officiers Français de Diego-Suarez viennent de mettre bas les armes, tant mieux, l'effusion de sang n'aura pas durée longtemps.
Les boches brouillent de plus en plus les émissions de Londres sur toutes les ondes, soient grandes, courtes ou petites. C'est énervant, il y a des moments où on ne comprend rien du tout.
Le pont du chemin de fer entre Pompey et Frouard étant terminé, le 8 à 10h30 passe sur la voie 1 le premier train. C'est encore un grand train de pinard allant naturellement en Allemagne, alors comme avant la guerre, la circulation des trains et normale devant chez nous.

Depuis le 4 mai 1942,
une bataille navale est engagée entre les flottes alliées et Japonaise dans le Sud-Ouest du Pacifique. Elle a commencé à environ 1800 km à l'est des îles Salomon et s'est poursuivie dans la mer de Corail. Les communiqués américains et australiens disent que c’est une victoire, leurs pertes sont infimes, celles des Japonais sont de 9 navires de guerre coulés dont un porte-avion, un croiseur lourd, un croiseur léger, deux destroyers et quatre canonnières et 7 avariés dont un porte-avion, un croiseur lourd et un croiseur léger.

Le 9 mai 1942,
au matin, Londres nous dit que la bataille aéronavale du Pacifique est momentanément terminée. Les Japonais s'étant retirés dans leurs bases.
Malgré les sévères condamnations prononcées par les tribunaux, le marché noir continue de plus belle. On paie le double environ, même le triple et plus des prix du ravitaillement officiel et les fortunés peuvent encore se procurer des vivres et autres choses. Des bêtes sont abattues clandestinement et vendues de même. Du blé caché, de la farine, des étoffes, des chaussures, du vin, des poules, des lapins, etc., sont cachés ou une faible partie est déclarée. Et il y a le troc qui est aussi défendu, mais qui se fait aussi beaucoup et qui n'est guère punissable, cependant il y a aussi des condamnations mais plus légères.
On ne donne pas d'argent, on paie en nature. On donne du beurre, du lait, des œufs, des lapins, des pommes de terre, des légumes pour n'importe quel travail. Les ouvriers ne veulent pas d'argent, ils préfèrent des vivres ou autre chose. Il y en a qui se passent de pain pour avoir du tabac et donnent 2 kg de pain ou 4 ou 5 œufs pour un paquet de tabac ou même de cigarettes. Les propriétaires de poules ou plutôt ceux qui en ont déclaré sont obligés de donner 25 œufs par poule et par an alors ceux qui ne les ont pas déclarées rient, mais il y aura sûrement des dénonciations.
Pour les lapins on dit qu'il faudra en donner un chaque cinq déclarés. Tout le monde s'efforce de cultiver cette année. Beaucoup de monde qui n'avait jamais jardiné, plante. Ceux qui plantaient, plantent plus encore mais quand on a des terrains, car ici, ils sont assez rares.
Il y en a qui vont planter dans les villages même assez éloignés. Ici on défriche les terrains se trouvant sur les plateaux. Ces terrains n'étaient plus cultivés depuis de nombreuses années. On retourne aussi une partie de la prairie pour la planter. Tout cela a été divisé en parcelles de 2 ou 4 ares par les soins de la commune ou de l'usine, mais les semences sont rares et il faut la carte de jardinage. On a obtenu 7 kg de pommes de terre de semence pour 2 ares de terrain.

Du 9 au 13 mai 1942,
pas beaucoup de changement. Cependant hier 12 on a appris que les Boches avaient déclenché le 8 une violente attaque contre les Russes en Crimée dans la presqu'île de Kertch. Est-ce le commencement de leur grande offensive de printemps qu'ils annoncent depuis longtemps. Ils auraient 2 millions d'hommes et 24 divisions blindées prêts à entrer en action sur un front de 400 km dans le bassin du Douetz et en Crimée. Ce serait le pétrole du Caucase qui serait visé, mais les Russes sont là, et ont derrière eux les Anglais et les Américains.
Malgré la résistance des Anglais et des Chinois, les Japonais approchent des Indes.

Le 13 mai 1942,
dans la soirée les Allemands annoncent un grand succès dans la péninsule de Kertch.

Le 14 mai 1942,
jour de l'Ascension, les Russes disent qu'ils se sont simplement repliés en bon ordre sur de nouvelles positions et à 15h15 ils annoncent que les tanks ont percé les lignes allemandes dans la région de Kharkov.
Aujourd'hui Marie-Louise et Jean-Marie qui est un bon petit diable maintenant sont chez nous pour toute la journée. Naturellement, on parle d'Alexandre et de René. Paulette est partie à Monthermé. Il y aura demain 2 ans que René est tombé et d'aujourd’hui en un mois, il y aura aussi 2 ans que c'était le tour d'Alexandre.
Des pourparlers sont en cours entre les États-Unis et l'amiral Robert, gouverneur des Antilles et de la Guyane Française, Laval veut s'en mêler, mais les États-Unis l'ignorent.

Du 14 au 18 mai 1942,
la lutte devient vive en Russie.

Le 18 mai 1942,
les Russes annoncent qu'à la suite de leur attaque commencée le 12 dans la région de Kharkov, ils ont avancé par place d'une soixantaine de kilomètres en faisant un butin considérable. Pour la péninsule de Kerteh, ils se contentent de dire que l'on se bat avec acharnement aux abords de la ville de Kertch.
Quant aux allemands, ils ont annoncé le 16 qu'ils avaient pris la ville et le port le 15.
Aujourd’hui ils disent avoir déjà fait 68 000 prisonniers dans la péninsule depuis le 8, mais comme en 1941, ils doivent exagérer fortement car l'armée Russe a l’air de se bien porter malgré qu'ils ont annoncé sa destruction à maintes reprises l'an dernier.

Du 18 au 21 mai 1942,
la lutte est vive en Russie. Les Russes continuent d'avancer légèrement dans la région de Kharkov. Mais à environ 150 km dans le Sud de cette ville, les Allemands ont déclenché à leur tour une offensive qui semble avoir progressé et il parait bien qu'ils vont être à nouveau maître de la péninsule de Kertch s'ils ne le sont déjà.
Sur les autres fronts, pas grand changement. Cependant les japonais semblent maintenus à présent.

Le 20 mai 1942,
ici, alerte de 1h50 à 2h45. Il fait une sécheresse qui devient une calamité. Les jardins et les prés font peine à voir. A part quelques petites averses insignifiantes, il n'est pas tombé d'eau depuis la fonte des neiges. Ce n'est pas cela qui nous donnera des vivres et il en faudrait car la vie devient de plus en plus dure.

Le 21 mai 1942,
le pont de Custines étant terminé, la ligne de Pompey à Nomeny est rouverte au trafic mais avec seulement un train de marchandises tous les deux jours.
Pas de trains de voyageurs pour le moment.
Il faut ménager le chauffage, ainsi ici nous n'avons depuis longtemps que 4 trains omnibus par jour dans chaque sens et les dimanches et fêtes, seulement trois et même un seul les mois d'hiver. Il est vrai qu'il y a encore 1 ou 2 express dans chaque sens tous les jours.

Le 22 mai 1942,
nous avons enfin un peu de pluie, elle est la bienvenue.

Le 23 mai 1942,
le président et les ministres du Mexique décident de déclarer la guerre aux puissances de l'axe. Les chambres doivent ratifier cette décision le 26.

Du 23 au 28 mai 1942,
la lutte est acharnée dans la région de Kharkov. Les Russes du Maréchal Timochenko sont arrêtés dans leur avance et ont de la peine à contenir la violente contre-offensive que les troupes du Maréchal Von Bock ont déclenchée sur leur flanc gauche. Les Russes ont évacué la péninsule de Kertch. Seule Sébastopol résiste en Crimée.

Le 27 mai 1942,
les Germano-italiens de Rommel sont passés à l'offensive en Cyrénaïque. Heydrick, sous chef de la Gestapo est blessé à Prague.

Le 28 mai 1942,
la déclaration de guerre du Mexique à l'axe est officielle. Les forces brésiliennes coulent un sous-marin ennemi au large de la côte du Brésil.
La garde civique est supprimée à Pompey le 28 au soir.

Le 29 mai 1942,
Marie-Louise reçoit des autorités Françaises, l'alliance de notre cher Alexandre, mais pour comble de malheur, elle s'aperçoit que ce n'est pas la sienne.

Dans la nuit du 30 au 31 mai 1942,
plus de 1000 avions bombardent la Ruhr et la Rhénanie, principalement Cologne. 44 avions ne rentrent pas en Angleterre à la suite de cette opération la plus importante de la guerre jusqu'à ce jour.
Les Américains pour la deuxième fois viennent de bombarder Tokyo.
La bataille fait toujours rage en Libye et au Sud de Kharkov. Il semble que l'ennemi est contenu.

Nous avons de la pluie en abondance, il était grand temps pour les récoltes.


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* * *

JUIN 1942


Les 1er et 2 juin 1942,
l’offensive ennemie en Libye et en Russie semble se ralentir ; en Russie elle est même arrêtée et en Libye…….

Dans la nuit du 1er au 2 juin 1942,
1036 avions anglais bombardent Essen et ses environs, 33 ne sont pas rentrés.
Ces chiffres viennent d'être donnés par Monsieur Churchill et il ajoute que ce n'est que le début car les Américains n'ont pas encore sorti. Les Allemands ne bombardent plus guère l'Angleterre, cependant à la suite du bombardement de Cologne, ils disent en représailles avoir violemment bombardé Canterbury.
Les Chinois disent qu'en Chine les Japonais ont employé des gaz toxiques.

Les 3 et 4 juin 1942,
la guerre aérienne s'intensifie.

Le 5 juin 1942,
plus de 1000 avions anglais survolent les territoires occupés, c'est principalement des chasseurs.

La nuit du 3 au 4 juin,
c'est Brême qui est violemment bombardée. De plus, les commandos anglais font encore une incursion entre Boulogne et le Touquet.
Les dégâts à Cologne et à Essen ont été terribles. On parle de dizaine de milliers de morts et blessés.
Heydrick est mort de ses blessures. A la suite de cet attentat 181 Tchèques, hommes et femmes ont déjà été fusillés par les Allemands et malgré la prime de 10 millions de couronnes offerte, les coupables n'ont pas été arrêtés.

Le 4 juin 1942,
ma sœur a été opérée à l'hôpital de Nancy.

Du 4 au 8 juin 1942,
la lutte continue surtout dans les airs.

Le 7 juin 1942,
à 7h15 Londres nous annonce une grande victoire aéronavale américaine. La flotte Japonaise surprise dans les parages de l’île Midway dans le Pacifique avait déjà perdu 2 porte-avions, 1 cuirassé, 1 croiseur, plusieurs autres navires et beaucoup d'autres étaient endommagés.

Le 8 juin 1942,
à 9h15, Londres dit que la bataille navale continue.
En France depuis l'armistice, il y a trois zones. La zone interdite, la zone occupée et la zone non occupée. Dans la zone interdite, la nôtre, on circule comme on veut à part la nuit où de 23h00 à 5h00 il faut une autorisation. Pour aller dans les deux autres zones, il faut un passeport.
Dans la zone non occupée ou libre, il y a la petite armée Française dite armée de l'armistice.
Aux colonies, il semble y avoir encore une assez forte armée et on demande aux jeunes gens des trois zones de s’y engager ou de rengager. On se demande toujours pour quoi faire. Est-ce pour combattre avec ou contre les boches.
De nombreux jeunes gens s'engagent ou rengagent, la plupart disent qu'au moins dans l'armée, ils auront à manger.
Dans les deux zones, interdite et occupée, les soldats Français viennent en permission et il y a aussi des détachements de travailleurs mais ils sont tous sans armes. C'est bizarre de voir les soldats Français et Allemands se croiser ou se saluer.
Dans la zone libre, les Allemands ne l'occupent pas, mais les commissions dites d'armistice ont le droit d'y circuler ainsi qu'aux colonies et on y travaille comme ici pour l'Allemagne et l'Italie et tout y est réquisitionné pour les mêmes.
La faim se fait sentir dans les trois zones de la même façon et la pénurie de tout augmente.
Les journaux à l.00 F n'ont plus qu'une feuille depuis longtemps et voici encore le plus mauvais moment car il n'y a plus de vieux légumes, surtout plus de pommes de terre. Vivement les nouvelles pommes de terre et les nouveaux légumes.
Tout le monde continue à maigrir, c'est effrayant. On ne voit guère que les commerçants, les employés de mairie, les trafiquants et les cultivateurs qui ont bonne mine.
Les vols ou la confection de faux tickets et de cartes d'alimentation sont fréquents.

Le 8 juin 1942,
à 15h15, Londres dit que la bataille aéronavale est terminée la flotte Japonaise ayant disparu au cours de la nuit. C'est bien une victoire américaine. Ils ont seulement perdu un contre-torpilleur et un porte-avion a été avarié.
Les pertes japonaises seraient à peu près celle annoncées hier matin : 2 porte-avions coulés et probablement un troisième, pas de cuirassé coulé, mais trois ou quatre gravement endommagés, pas de croiseurs coulés mais plusieurs endommagés et un certain nombre d'autres navires soit coulés soit endommagés.
Londres annonce à la population des côtes françaises de la frontière Belge à la frontière Espagnole d'avoir à se tenir sur ses gardes et si possible de partir pour ne pas gêner les opérations prochaines et ne pas risquer sa vie inutilement.
Beaucoup de monde croit la fin de la guerre proche par suite de l'écrasement de l'axe au cours de l'été, mais moi je ne suis pas encore si optimiste.

Le 9 juin, 1942
on apprend que Rommel a de nouveau attaqué en Libye mais il est contenu. La division française du général Kœnig qui défend Bir Hakeim dans le désert à la gauche des Anglais depuis le début de l'attaque se couvre de gloire et repousse tous les assauts.
Sébastopol est violemment attaqué depuis plusieurs jours mais tient bon également.
Les Japonais font actuellement un gros effort en Chine Centrale pour s'emparer de tout le littoral Chinois. Pourvu que Tchang Kaï-Chek puisse tenir car il est pour bien dire maintenant coupé des alliés depuis que les Japonais se sont emparés de la route de Birmanie par laquelle il recevait la plus grande partie de ses approvisionnements.
On raconte que la gare de Saint-Pierre-des-Corps a été violemment bombardée le 5 ou 6 courant. Mais est-ce vrai car la radio n'en a pas parlé.

Le 10 juin 1942,
Marie-Louise et Jean-Marie sont chez nous. Nous avons au marché noir 2kg de veau à 60 F le kilo.
Un ouvrier nous dit avoir eu de même 3 kg de pain à Nancy à 10 F le kg et de la farine à 10 F la livre et le tout sans ticket. C'est presque le double ou plus du prix normal mais on est content tout de même et on risque encore d'être pris.
Jean et moi ne fumant pas, mais nous prenons tabac et cigarettes comme tout le monde, nous avons encore la chance de troquer tabac et cigarettes contre du pain, des œufs ou autre chose. Enfin, nous commençons à avoir carottes et petits pois dans le jardin, malgré tout on ne mange pas à sa faim. C'est bien pénible pour tout le monde surtout pour les mamans qui font la cuisine.

Le 11 juin 1942,
à 21h15, Londres annonce qu'un traité d'alliance auquel les États-Unis se sont associés a été conclu le 26 mai entre la Russie et l’Angleterre pour 20 ans. Il comprend 8 articles et prévoit la création d'un deuxième front en Europe en 1942. Donc attendons prochainement un débarquement allié mais où, nous verrons bien. Enfin nous espérons.

Jean-Marie CLAUSSE
Jean-Marie CLAUSSE
(collection ©Munier&Clausse)
On dit que les populations du littoral commencent à évacuer.
Londres nous dit aussi à 21h15 que vu l'offensive de Rommel en Libye, les Français qui tenaient Bir-Hakeim ont reçu l'ordre de se replier.
En Russie, la bataille a l'air de se rallumer vers Leningrad et Kharkov et Sébastopol tient toujours.
Sous le régime Hitlérien, les Juifs sont persécutés de toutes façons. En France maintenant on emploie les mêmes procédés. Depuis vers le 1er Juin, ils sont obligés de porter sur le côté gauche un insigne d'au moins 6cmx6cm pour que tout le monde les reconnaissent.

Du 12 au 16 juin 1942,
pas grand événement à signaler.

Le 13 juin 1942,
nous touchons au ravitaillement 1 kg de vieilles pommes de terre par personne. Elles sont toutes noires, nous les payons 3F80 le kg. La moitié au moins est gâtée. Elles viennent d'Allemagne, les Boches n'en voulant probablement plus, nous les envoient. Ils préfèrent nos nouvelles car ils doivent les prendre, on n'en voit pas.

Le 14 juin 1942,
un dimanche c'est le deuxième anniversaire de la mort de notre cher Alexandre. Nous assistons à Norroy à la Grand Messe dite à son intention et à celle de son cousin René.

Le 15 juin 1942,
ma sœur rentre à Norroy de l’hôpital de Nancy.

Du 16 au 18 juin 1942,
l'ennemi semble attaquer en de nombreux endroits en Russie et il s'acharne sur Sébastopol mais il est partout contenu.
De même en Libye mais là, il semble avoir marqué quelques progrès.
De vifs engagements aéronavals ont eu lieu en Méditerranée et ont duré plusieurs jours. Deux grands convois anglais allant à Malte ont été attaqués à la fois par l'aviation, les sous-marins et les navires de surface comprenant cuirassés, croiseurs, etc. l'un venant de Gibraltar a été attaqué dans le détroit de Sicile, l'autre venant d'Égypte au large de ses côtes. Les pertes et les avaries semblent sérieuses des deux côtés mais la plus grosse partie des convois est arrivée à destination. Vu la fréquence des attaques des navires marchands par l'aviation, les sous-marins et les navires de surface, tous les navires marchands des belligérants ou presque sont groupés en de grands convois escortés par des navires de guerre qui les protègent, cela n'empêche pas qu'il y en a souvent de coulés et que les attaques des convois durent quelquefois trois ou quatre jours.

Nous avons eu au ravitaillement deux œufs par personne pour juin à 2F15 l'œuf. Cela fait 5 œufs par personne que nous avons eu régulièrement depuis la débâcle.

Du 18 au 21 juin 1942,
la situation est stationnaire en Russie mais la situation semble critique à Sébastopol. L'ennemi est arrivé près de la célèbre tour de Malakof où Mac-Mahon a dit en 1855, j'y suis, j'y reste.
En Libye, Rommel est arrivé à la frontière d'Égypte. La situation semblait revenue comme en novembre 1941. Les Anglais rentraient dans leurs anciennes positions. Mais le 21 à 21h15 Londres nous fait savoir que Tobrouk a été prise. la situation là-bas semble donc assez sérieuse.
Churchill est de nouveau à Washington. Il est parti en avion, de même la reine Wilhelmine de Hollande et le roi Pierre de Serbie sont partis en Amérique en avion.
Les Japonais ont pris pied dans les îles Aléoutiennes près de l'Alaska.

Le 20 juin 1942,
nous mangeons les premières pommes de terre nouvelles du ravitaillement. On nous en donne 2kg par personne pour juin à 5F20 le kg.
A une séance du conseil municipal le 18, nous sommes saisis de nombreuses plaintes d'habitants qui se plaignent de pour bien dire, mourir de faim. Mais on n'y peut pas grand chose. C'est effrayant, de nombreuses personnes ne tiennent pour bien dire plus sur leurs jambes. Les gens vous disent qu'ils ont maigri de 5, 10, 15, 20, 30 et même 40 kg. Tout le monde se plaint de sa carte de ravitaillement. Ceux qui ont la carte C voudraient avoir la carte T ou inversement. Ceux qui ont le régime urbain voudraient avoir le régime rural ou le contraire. Il faut dire qu'il y a une différence entre les cartes C (cultivateur) T (travailleurs d'autres métiers, JI, JII, JIII (jeunes en 3 catégories de 0 à 2l ans), A : Adultes de 21 à 65 ans et V : vieillards au-dessus de 65 ans. Il y a en principe le régime rural dans les communes de moins de 2000 habitants et urbain au-dessus de 2000. Cela dépend aussi pour le classement de la situation du lieu, soit agricole, soit industriel. Les habitants ruraux sont favorisés pour certaines choses, les urbains pour d'autres. Bref, personne n’est content mais en principe, il fait meilleur habiter actuellement la campagne que la ville et les gens des gros centres battent continuellement les fermes ou les villages à la recherche de quelque chose à manger ou à boire.

Le 22 juin 1942,
il y a un an que la Russie a été attaquée.
A 7h30, la radio française nous dit que 25 000 Anglais ont été faits prisonniers à Tobrouk. Trois forts de Sébastopol seraient pris.

De nombreux boulangers sont condamnés pour donner quelques grammes de pain en trop ou du pain ou de la farine sans ticket. Les uns à la fermeture de leur boulangerie de 15 jours à 2 mois, les autres à de fortes amendes.

Le 23 juin 1942,
Marie-Louise et Jean-Marie partent à Choiseul (Haute-Marne) pour 3 semaines.

Les 24, 25 et 26 juin 1942,
Sébastopol tient toujours et les Allemands et leurs alliés attaquent dans la région de Kharkov.
En Libye, la lutte se poursuit sur la frontière.

Le 25 juin 1942,
Marie-Louise reçoit enfin la vraie alliance de notre cher Alexandre. Il y a trois médailles avec.

Dans le nuit du 25 au 26 juin 1942,
plus de 1000 avions Anglais bombardent Brême. Pendant ce temps, d'autres avions attaquent les installations ennemies dans les territoires occupés. 56 avions ne rentrent pas à leurs bases.

Le 27 juin 1942,
il semble que c'est la fameuse offensive de printemps annoncée depuis si longtemps par les Allemands qui est déclenchée contre les Russes.

Du 27 juin au 2 juillet 1942,
l'offensive allemande se développe en Russie et en Égypte mais on a peu de détail car la radio de Londres est beaucoup brouillée et on entend à peine celle des français.


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JUILLET 1942


Le 2 juillet 1942,
à 7h30, nous comprenons par la radio de Vichy que Sébastopol est pris.
A 13h30, par la même radio, nous apprenons qu'un combat décisif est engagé à 90 km d'Alexandrie. La situation est donc assez grave, surtout en Égypte car ce n'est plus en Libye que l'on se bat. L'avance allemande semble avoir été foudroyante depuis la prise de Tobrouk et Alexandrie la grande base navale anglaise ainsi que le canal de Suez sont directement menacées. Espérons que les Anglais se ressaisiront ces jours-ci, car ils doivent avoir des réserves dans le Proche Orient et des Américains doivent déjà se trouver là-bas.
Les Russes ont fait payer cher aux Allemands la prise de Sébastopol.

Du 2 au 7 juillet 1942,
l'offensive Allemande continue violemment, mais elle est contenue en Égypte à une centaine de kilomètres à l'Ouest d'Alexandrie où les Anglais sont maintenant dans une assez bonne position.
En Russie par contre la situation est assez grave dans le Sud. Les Allemands ont avancé assez fortement. Ils visent le pétrole du Caucase. Nous espérons bien qu'ils n'y arriveront pas mais ils ont franchi le Don vers Voronej.

Le 7 juillet 1942,
il y a cinq ans que le Japon est en guerre avec la Chine.

Du 7 au 16 juillet 1942,
pas de changement en Égypte, en Russie du Sud les Russes tout en contenant les ennemis, continuent à se replier. Les Anglais ont occupé l'île de Mayotte près de Madagascar.
Ici, il y a un mouvement insolite parmi les Allemands. Ils ont réquisitionné beaucoup de chevaux et d'autos et ont emmené les chauffeurs civils de ces autos avec 4 jours de vivres. Ils gardent maintenant les gares, les ponts, les chemins de fer, les passages à niveau. Ils semblent avoir la hantise d'un débarquement Anglo-américain.
Vichy fait une intense propagande pour que les ouvriers Français partent travailler en Allemagne.

Le 11 juillet 1942,
j'ai repris mon service après une interruption de 68 jours due à ce régime à crever de faim.

Du 16 au 24 juillet 1942,
continuation de l'offensive allemande en Russie.

Le 24 juillet,
l'ennemi serait entré à Rostov où il avait déjà été l'an dernier. En Égypte il est nettement arrêté, même les Anglais ont légèrement avancé. Les Japonais arrêtés aux portes de l'Inde continuent leur effort en Chine.
Les auteurs ou complices des récents attentats en Meurthe-et-Moselle au nombre de 38, dont 8 femmes, sont passés à la cour martiale à Nancy ; une quinzaine ont été condamnés à mort.

Le 25 juillet 1942,
au soir, les civils à Norroy, Vandières, etc., montent la garde sur la route nationale. Les Allemands semblent mettre en état de défense l'usine et les ponts. Ici, ils creusent des trous pour tirailleurs et portent maintenant des grenades en prenant la garde. On sent qu'ils ont la hantise des avions anglais.

Du 26 au 30 juillet 1942,
guère de changement dans la situation générale. Cependant, la progression allemande continue légèrement en Russie dans le secteur de Rostov.

Le 30 juillet 1942,
il y a alerte dans les environs, de 1h30 à 3h30. Nous n'avons pas eu d'alerte à Pompey, probablement pour ne pas arrêter le travail de l'usine. Il parait qu'il est passé de nombreux avions.

Le 29 juillet 1942,
le commandant en chef de l'aviation anglaise s'est adressé par là radio au peuple allemand en l'avertissant qu'il n’avait encore presque rien vu de la guerre mais qu'il allait le voir. Que toutes les parties de l'Allemagne allaient être bombardées systématiquement.
Les boches continuent à patrouiller sur la ligne. Il y en a presque toujours deux devant chez nous. Ils ont déjà commis trois petits vols de légumes dans notre jardin. Comme nous, ils ont l'air d'avoir faim.
Le cuir devient rare pour eux aussi. Beaucoup n'ont plus de bottes. Pour nous, on se croirait revenu aux temps anciens. Beaucoup de personnes n'ont plus que des semelles de bois retenues aux pieds par des lainières d'étoffe et de gros sabots de bois ou même des souliers en caoutchouc. De grands enfants marchent pieds nus.
Les vols de légumes, surtout de pommes de terre sont fréquents, cependant les voleurs risquent gros. On en a pris plusieurs ici la nuit, les temps derniers.
Il y en a qui les arrachent avec des outils. D'autres tirent les fanes à la main, un autre fouille la terre à la main sous les fanes, de cette façon on s'en aperçoit à peine, il a déjà fouillé 5 ou 6 pieds dans un de nos jardins et a opéré au moins 6 ou 7 nuits depuis une quinzaine.


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AOÛT 1942


Du 31 juillet au 11 août 1942,
la situation s'aggrave en Russie du sud, c'est bien le pétrole du Caucase qui est en jeu. Après avoir franchi le Don à Rostov et bien plus au nord, les Allemands s'avancent en direction de la mer Caspienne. Le 11, ils annoncent qu'ils sont à mi-chemin entre cette mer et la mer Noire. S’ils atteignent la Caspienne, la situation serait très grave pour les Russes qui ne pourraient presque plus recevoir de pétrole. Mais peut-être que les Allemands vont tâcher de franchir les monts Caucase pour aller directement au pétrole de Bakou.
Les Russes pourront-ils les arrêter dans ces deux directions, avant Bakou et avant la Caspienne. Il est probable que nous le saurons bientôt. La radio dit déjà le 11 que des puits de pétrole seraient en feu.

En Égypte, les Allemands sont définitivement arrêtés. Adieu Alexandrie, le Nil et le canal de Suez, mais il était temps que les Anglais se ressaisissent.
Les Américains aidés des Australiens viennent de débarquer aux îles Salomon d'où ils s'efforcent de chasser les Japonais. C'est pour bien dire leur première opération offensive. Espérons qu'ils vont continuer. Dans les Indes, il y a de l'agitation.

Le 12 août 1942,
alerte de 4h30 à 5h00. C'était le bombardement de Mayence.

Dans la nuit du 12 au 13 août 1942,
il est passé de nombreux avions et tout le monde s'accorde à dire que l'on entendait au loin de nombreuses explosions ou du tir de DCA mais pas d'alerte ici (c'était un deuxième bombardement sur Mayence).
Ayant constaté à 3h30 le 13 que les 2 patrouilleurs Allemands de devant chez nous nous avaient pris des tomates, je signale ce vol, c'est le cinquième, au Chef de Poste de la gare. Après un semblant d'enquête, il me déclare que ses hommes nient, mais que c'est peut-être les patrouilleurs de Frouard, alors inutile d'insister. Cependant, les bottes faisaient preuve s'il l'avait voulu dans la terre fraîchement retournée.

Le 13 août 1942,
à 12h15, la radio nous déclare que les Américains sont en ligne en Égypte et qu'ils progressent aux îles Salomon. Aux abords du Caucase, la résistance Russe semble grandir.
La même radio de Londres avertit les cheminots français des régions du Nord et du Nord-Ouest que les bombardements des chemins de fer vont s'intensifier et prendre un champ plus large. Alors gare à nous.

Le 14 août 1942,
nous avons au marché noir, 1.200 kg de mouton pour 82.00 F c'est cher 70.00 F le kilo, mais quelle aubaine car il y a longtemps que l'on a perdu le goût du mouton, du porc et de bien d'autres choses. Pour bien dire l'argent ne compte plus. Il faut manger, on achète à n'importe quel prix et tout ce que l'on peut avoir. Chez notre fournisseur, la Ruche de Pompey, où nous sommes inscrits, nous venons d'avoir 5 k de raisins pour 70.00 F et nous les avons acceptés. En temps normal nous n'aurions pas acheté 5k de raisins à un tel prix.

Les 15, 16, 17 et 18 août 1942,
le recul Russe continue lentement dans le Nord du Caucase. Partout ailleurs, les Russes tiennent bon. En Égypte et en Extrême-Orient, peu de changement.

Le 17 août 1942,
à Moscou, Churchill rencontre Staline. Les États-Unis sont représentés. Tous les grands chefs militaires des pays alliés y assistent ou y ont des représentants. Cette réunion doit être très importante.

Le 19 août 1942,
des troupes anglaises, américaines, canadiennes, et françaises débarquent à la pointe du jour à Dieppe. Après une lutte acharnée toute la journée, ces troupes rembarquent dans la soirée. Les pertes ont été lourdes des deux côtés. C'est le premier débarquement en France de jour et la première fois que des Français et des Américains combattent à nouveau sur le sol de notre pays. Ce gros coup de main a réussi. Les alliés qui avaient débarqué jusqu'à des tanks ont détruit avant de repartir de nombreuses installations dont une batterie de six pièces.
Ils reviendront et pour de bon, nous l'espérons presque tous.

Le 20 août 1942,
plus de 500 avions alliés survolent de jour le nord de la France et bombardent notamment les trains en gare d'Amiens.

Du 20 au 24 août 1942,
les Russes reculent toujours au Nord du Caucase mais tiennent toujours à Stalingrad malgré les efforts de l'ennemi.
A la suite du torpillage de plusieurs navires brésiliens, le Brésil déclare la guerre aux puissances de l'axe.

Le 25 août 1942,
alerte à 0h15, fin de l'alerte à 1h30; nouvelle alerte aussitôt et fin vers 3h00. On entendait très bien le canon ou les explosions. C'était le bombardement de Francfort et Wiesbaden.

Le 26 août 1942,
les Russes reculant toujours dans le Sud, l'ennemi est arrivé au sommet des monts Caucase. La situation semble assez grave dans ce secteur.
Le duc de Kent, frère du roi d'Angleterre est tué dans un accident d'aviation en Écosse. Il se rendait en Islande.

Le 27 août 1942,
attaquant avec succès sur un front de 150 km vers Rejev, c'est-à-dire aux environs de Moscou, les Russes vont peut-être ralentir l'avance ennemie dans le Caucase.

Le 28 août 1942,
rien d'important.

Le 29 août 1942,
alerte de 0h15 à 4h00 (c'était Nuremberg et Sarrebruck qui servaient de cible).

Les 30, 31 août et 1er septembre 1942,
l'avance ennemie semble marquer le pas dans le Caucase. Stalingrad tient toujours et les Russes avancent légèrement vers Rejev à l'ouest de Moscou. le 31 août, l'ennemi attaque à nouveau en Égypte.



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* * *

SEPTEMBRE 1942


Le 1er septembre 1942,
nous avons la 1ère alerte de jour depuis l'armistice. Elle dure de 14h10 à 14h55. Nous n'avons rien vu, ni rien entendu. A midi nous avions eu la satisfaction de voir les Boches quitter la surveillance des voies de communication et de l'usine. Il parait qu'ils vont en Russie et n'en sont pas enchantés. Pourvu que ces indésirables ne soient pas remplacés par d'autres.

Le 2 septembre 1942,
alerte de 2h30 à 4h30. Un avion anglais probablement en difficulté a lâché 2 bombes entre Ville-au-Val et le pont de Mouze, dans les champs qui ont brûlé pendant l/4 d'heure. Les explosions ont été terribles. Il y a eu des carreaux cassés à Dieulouard distant de plus de 2km. Une vache a été tuée et une autre a du être abattue.

Le 3 septembre 1942,
alerte de 2h00 à 5h00. Le même jour les civils remplacent les Boches dans la garde des voies ferrées. Maintenant c'est en payant 8h00 à 6.00F soit 48F par jour. On prend des volontaires de 16 à 65 ans et même plus. A défaut de volontaires, on réquisitionne.

Du 2 au 9 septembre 1942,
l'ennemi avançant toujours dans le Caucase, après avoir franchi les monts Caucase et le détroit de Kertch, a atteint la région de Novorossisk.

Le 9 septembre 1942,
alerte de 2h45 à 3H00.
Les Allemands disent qu'ils ont atteint la Volga dans les environs de Stalingrad mais les Russes n'en parlent pas.
Les Allemands auraient mobilisé les Alsaciens-lorrains, il parait qu'ils en auraient fusillés parce qu’ils ne voulaient pas se soumettre. On dit qu'ils en ont fait autant au Luxembourg. Les Anglais entreprennent de nouvelles opérations à Madagascar, ils vont sans doute occuper toute l’île. Pas de changement en Extrême-Orient et en Égypte.

Du 9 au 16 septembre 1942,
Stalingrad tient toujours mais le 16 la situation y semble grave. Ailleurs, guère de changement.

Du 17 au 21 septembre 1942,
la lutte est acharnée à Stalingrad. Les Boches ont pénétré dans la ville mais les Russes résistent héroïquement et défendent la ville rue par rue, maison par maison, Il semble que ce soit un nouveau Verdun. Ailleurs, peu de changement.

Dans la nuit du 19 au 20 septembre 1942,
alerte de 23h00 à 3h30. Cette fois Nancy est bombardée. De nombreuses bombes tombent dans le quartier de la gare, une d'entre elles tombe sur l'express Nancy-Bruxelles qui quittait la gare. Deux voitures sont incendiées. Il y a d'assez nombreuses victimes et de nombreux dégâts. Cette fois au bruit des explosions, la famille s'est sauvée à l'abri au village. Moi j'étais à Norroy où j'ai entendu les sirènes de Pont-à-Mousson de 1h00 à 3h30.
Munich a été violemment bombardée cette nuit. On commence en France à démonter de nombreux kilomètres de voies ferrées. Il faut du matériel pour les Boches. On supprime la deuxième voie ou les 3ème et 4ème sur les lignes les moins importantes.

Du 21 septembre au 13 octobre 1942,
la situation reste stationnaire sur tous les fronts malgré les efforts de l'ennemi. Les Russes tiennent bon à Stalingrad et dans le Caucase. Les Boches sont obligés de dire qu'ayant atteints leurs objectifs ils se préparent à une nouvelle campagne d'hiver.

Le 29 septembre 1942,
jour où j'ai 56 ans, je suis privé du poste de T.S.F. de notre cher Alexandre, Marie-Louise quittant Pompey pour Custines où elle a trouvé un logement. Adieu les nouvelles de Londres et d'ailleurs. Il faudra nous contenter des nouvelles toujours favorables à l'ennemi données par les journaux, nous en prenions rarement, nous prendrons à l'avenir de temps en temps, l’Écho de Nancy pour être tenu à peu près au courant de la situation.

Le 30 septembre 1942,
au matin, je constate que l'on nous a encore volé 4 lapins devant chez nous. Il faut dire que la situation alimentaire et autre est toujours la même. Cependant la récolte de légumes et surtout de pommes de terre a été assez bonne. On aura peut-être moins faim en hiver que par le passé.


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OCTOBRE 1942


Le 1er octobre 1942,
je prends ma retraite. J'avais été commissionné le 14 Juin 1912 à la Compagnie de l'Est à laquelle j'avais débuté en 1903 comme auxiliaire.
Une vive inquiétude se manifeste dans la population. Pour continuer la guerre il faut de la main d’œuvre à l'Allemagne et elle en demande à la France à la condition de libérer un prisonnier pour trois ouvriers spécialistes. On appelle cela la relève et on demande des volontaires, mais ils ne sont pas nombreux. Aussi comme l'Allemagne en exige, le gouvernement Laval vient de décréter la loi sur le travail obligatoire. Y sont astreints certaines catégories d'hommes de 18 à 50 ans et de femmes de 21 à 35 ans et les départs de nombreux ouvriers sont organisés dans les entreprises, les usines, etc.
On donne à l'ouvrier une feuille qu'il doit signer dans les 24 heures. Cette feuille lui indique l'usine où il ira, à raison d'environ 0 mark 64 par heure et 60 heures par semaine et cela pour un an. S'il refuse de signer, on applique les sanctions qui consistent à ce qu'il paraît à être privé de travail ici.

Le 14 octobre 1942,
plusieurs alertes dans la région l'après-midi mais pas à Pompey.

Du 15 au 25 octobre 1942,
la situation reste la même sur tous les fronts. Le Creusot a été bombardé le 17 de jour par près de 100 avions. Il y a une cinquantaine de tués et une centaine de blessés.

Dans la nuit du 23 au 24 octobre 1942,
alerte de 23h00 à 23h15 et de 1h45 à 2h15. La nuit du 24 au 25 alerte de 22h00 à 23h00 et aussitôt alerte de 23h00, à 4h00.
Nous avons eu 25 kg de pommes de terre par personne au prix de 220 F les 100 kg. On en aura encore 25 kg pour le reste de l’année ou à la place des rutabagas ou des topinambours. C'est peu pour les personnes qui n'ont pas de jardin surtout celles des villes. Les pommes de terre sont abondantes et tout le monde se débrouille pour en avoir au marché noir. Le prix varie de 200 F à 1000 F. C'est incroyable mais il ne faut pas se faire prendre. Il est interdit d'en transporter sans autorisation.
Il n’y a plus de trains de voyageurs omnibus les dimanches.

Du 24 octobre au 2 novembre 1942,
pas beaucoup de changement.
Toutefois les alliés ont déclenché une grande offensive en Égypte le 25 octobre, J'en ignore les résultats.
Il y a toujours des alertes jour et nuit dans la région mais il n'y en a pas eu ici.
Il n'est bruit que de l'attaque prochaine de Dakar par les alliés, si seulement les Français de Vichy ne résistaient pas pour éviter une guerre fratricide mais il est probable qu'ils résisteront à moins que la présence des soldats des États-Unis ne les fassent changer d'attitude.
Nous avons reçu les pommes de terre du 2ème envoi, 25 kg par personne, ce sera tout pour jusqu'au mois de juin prochain.


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NOVEMBRE 1942


Du 2 au 8 novembre 1942,
la situation semble s'améliorer.

Le 5 novembre 1942,
on annonce une grande victoire anglaise en Égypte. la fameuse armée blindée de Rommel serait battue et en retraite.

La nuit du 7 au 8 novembre 1942,
alerte de 20h00 à 21h00 et de 23h45 à 1h00. C'était le bombardement de Gênes et Milan.

Le 8 novembre 1942,
un dimanche, le matin nouvelles sensationnelles, tout le monde a l'air réjoui. Les Américains seraient débarqués à Alger et à Oran. Il y aurait de la résistance mais nous espérons qu'elle sera rapidement brisée. Nous attendons avec impatience de bonnes nouvelles de ce coup de force mais gare ici, ce que nous allons prendre. Nous allons encore nous serrer la ceinture davantage.
C'est une vraie déportation des Français en Allemagne qui a lieu en ce moment. De gré ou de force, il faut partir. Mon neveu André qui devait se marier le 7 a reçu l'ordre le 4 de partir le 7. Vu que c'était le jour de son mariage, on lui a accordé un sursis jusqu'au l2 et il partira pour le Hanovre.
Nous avons assisté le 7 à son mariage à Villers-sous-Prény.
En Russie et en Extrême Orient guère de changement.

Le 9 novembre 1942,
est une journée heureuse, ce n'est que conversation entre tout le monde et les journaux le confirme ; on dit que les hostilités ont cessé presque partout en Afrique Française du Nord. Les Anglo-américains ont débarqué hier 8 à partir de 3h00 à Alger, Oran, Casablanca, Mogador, Agadir, etc. sans rencontrer beaucoup de résistance. A Alger, la vie est déjà normale. Vichy a cependant donné l'ordre de résister et Darlan est à Alger, mais Giraud y est aussi et a parlé à la radio ainsi que De Gaulle.
Les événements ont l'air de prendre une tournure favorable. L'armée Rommel ne tardera pas à avoir le coup de grâce ; déjà six divisions italiennes auraient capitulées, après ce sera le tour de l'Italie d'être probablement envahie. Certains parlent déjà de la fin proche de la guerre, mais n'allons pas si vite car l'Allemagne est très forte mais son tour viendra et elle sera envahie à son tour et nous espérons bien que les alliés ne seront pas si maladroits qu'en 1918.
Pendant que j'écris cela à 21h30 par une nuit très noire, voilà la sirène d'alerte à l'usine. 21h40, des avions passent, ils vont encore sans doute, rendre visite à Mussolini et à ses macaronis. Fin de cette alerte à 23h00.

Les 10 et 11 novembre 1942,
la situation semble bonne en Algérie et au Maroc où la résistance semble cesser.

Le 11 novembre 1842,
jour anniversaire du glorieux jour de 1918, on apprend que les Allemands rompant l'armistice, pénètrent en France libre qu'ils vont sans doute toute occupée. Cela ne changera rien à la situation. Le Maréchal Pétain proteste près de Hitler contre cette mesure.
Ce jour 11, après 40 jours de repos, je prends du service à l’usine de Pompey au service de la voie comme à la S.N.C.F.

Le 12 novembre 1942,
on dit que toute résistance a cessé au Maroc et en Algérie et que les Américains se préparent à entrer en Tunisie pour prendre à revers l'armée de Rommel qui est en retraite.

Le 13 novembre 1942,
au matin on apprend que l'amiral Darlan a conseillé à la flotte Française de rallier Gibraltar. Il semble donc que Darlan a roulé les Boches et s'était lié aux Américains. Dans la soirée on apprend que les Anglais sont entrés à nouveau à Bardia et à Tobrouk. les Allemands et les Italiens ont occupé le reste de la France et la Corse. Le Maréchal Pétain les a laissé passer sans résister. Il s'est contenté de protester. Laval est allé voir Hitler et Ciano. On raconte que Doriot a été assassiné et que les Anglais ont fait 130 000 prisonniers mais est-ce vrai ? Ce n'était pas vrai.

Les 14, 15 et 16 novembre 1942,
les nouvelles sont contradictoires.

Le 14 novembre 1942,
on annonce que l'ennemi ayant amené des troupes en Tunisie, les Français lui résistent. On dit aussi que le général d'Afrique Giraud qui a pris le commandement des troupes françaises a été victime d'un attentat de deux officiers Français qui ont été fusillés. Le général serait indemne.

Le 15 novembre 1942,
on dit que le général Weygand serait arrêté sur l'ordre de Pétain qui le 16 désavoue Darlan.

Le 16 novembre 1942,
le général Delattre de Tassigny est également arrêté.

Dans la nuit du 15 au 16 novembre 1942,
alerte de 20h10 à 20h50 et de minuit à 1h00.
Peu de nouvelles de la flotte et des troupes d'Afrique.

Du 16 au 22 novembre 1942,
les nouvelles sont toujours contradictoires. Les alliés semblent s'installer fortement en Algérie et au Maroc et commencent à pénétrer en Tunisie où ils se heurtent à Tabarka sur le littoral aux troupes ennemies. On ne sait pas grand chose des troupes françaises d'Afrique mais nous avons l'espérance que sous le commandement du général Giraud elles vont marcher contre l'ennemi. La flotte française semble s'être concentrée à Toulon que l'ennemi a promis de ne pas occuper. Un grand combat naval a eu lieu dans les parages des îles Salomon. Les Antilles Françaises ont été occupées par les Américains.
L’Espagne a mobilisé partiellement.
Laval a eu les pleins pouvoirs par Pétain. Ils semblent tous deux d'accord avec l'ennemi ; c'est malheureux.

Le 18 novembre 1942,
nous avons eu une alerte de 20h05 à 20h30.

Le 22 novembre 1942,
on raconte que Tunis serait occupé par les alliés. Ce n’était pas vrai.
On dit à nouveau que Doriot a été victime d'un attentat et qu'il serait mort de ses blessures. Ce n'était pas vrai.
Benghasi a été repris par les Anglais.
Nous sommes tellement privés de lait que Jean a été en chercher deux litres à Belleau ce jour 22 avec Yvonne, en vélo naturellement mais Belleau est distant d'une douzaine de kilomètres.
On dit que le Général Weygand a été transféré en Allemagne.

A 20h50 passent de nombreux avions, nous avons l'alerte seulement à 21h00. La nuit est belle. Pendant plus d'une heure les avions passent sans arrêt. Il y en a qui passent si bas que nous les voyons très bien. Fin de l'alerte à 23h45. C'était le bombardement de Stuttgart.

Du 23 au 30 novembre 1942,
les Russes attaquent avec succès sur plusieurs points des fronts du Centre et du Sud.

Le 26 novembre 1942,
alerte de 20h00 à 21h45.

Le 27 novembre 1942,
vers 4h00 les allemands et les Italiens sous un prétexte futile et reniant leurs promesses envahissent Toulon et tâchent de s'emparer de la flotte française. Les marins Français tout en repoussant l'ennemi sabordent leurs vaisseaux au nombre d'une soixantaine. Seuls 3 ou 4 parviennent à s'échapper. Quel malheur que les marins Français n'avaient pas eu le courage auparavant de se joindre aux anglo-américains.

Le 28 novembre 1942,
alerte de 22h00 à 23h00.
Sur l'ordre de l'ennemi, l'armée Française d'armistice a été démobilisée le 27.


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DÉCEMBRE 1942


Du 1er au 13 décembre 1942,
la lutte est violente en Russie mais le front ne semble guère bouger. Cependant les deux adversaires s’attribuent des victoires. On ne sait qui croire, il est vrai qu'il en est presque toujours ainsi. On a peu de nouvelles d'Afrique du Nord. les alliés veulent sans doute s'installer fortement au Maroc et en Algérie avant d'achever de conquérir la Tunisie où l'ennemi semble fortement installé à Tunis et Bizerte.
Quant à l'armée de Rommel, elle semble s'être arrêtée sur ses anciennes positions d'El-Aguiela au Sud-Ouest de Benghasi. D'après l'ennemi, des dissentiments existeraient entre De Gaulle, Giraud, Darlan, etc. et les Américains auraient des ennuis avec les Français et les Arabes d'Afrique du Nord.
A part l’Indochine et une partie de la Tunisie qui sont occupées par l'ennemi, tout le reste des colonies Françaises est occupé par les Français libres ou par les Anglo-américains.

Le 6 décembre 1942,
alerte de 19h10 à 21h45. Le 7, alerte de 20h05 à 20h55. Le 9, alerte de 19h45 à 20h35 et le 11 de 21h40 à 21h55. C'était principalement Turin qui était bombardé.
Le prix de la vie monte sans cesse. Le litre de vin coûte plus de 6.00 F. Une chemise vaut 150.00 F.

Le 9 décembre 1942,
environ 80 ouvriers de Pompey sont partis presque tous de force pour travailler en Allemagne.

Du 14 au 28 décembre 1942,
les Russes continuent à attaquer avec succès. En Tunisie guère de changement. En Libye, Rommel a été délogé le 14 de ses positions d'El Aghiela et bat en retraite vers l'Ouest.

Le 21 décembre 1942,
alerte de 19h15 à 23h20. C'est Munich qui a été bombardé.

Le 24 décembre 1942,
l'amiral Darlan a été assassiné à Alger par un jeune homme qui a du être fusillé le 26.


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- 1943 -

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JANVIER 1943


Du 28 décembre 1942 au 10 janvier 1943,
la situation reste stationnaire en Afrique du Nord. En Russie il semble bien que les Russes attaquent partout et avancent sensiblement. Cependant d'après les journaux, les Allemands aidés des troupes Européennes résistent partout victorieusement aux Russes, mais les radios alliées et neutres assurent que les Russes avancent.

Le 9 janvier,
on dit que les Russes ne sont plus qu'à 70 km de Rostov sur le Don. Il paraît que l'hiver n'est pas rude en Russie.
Ici du 27 décembre à ce jour 10 janvier, la température a varié de 0° à 10° de froid. Nous avons eu un peu de neige les 29 et 30 décembre, elle a fondu le 1er janvier avec une légère pluie par 0°. L'hiver jusqu'à présent n'est pas très rude, heureusement car comme tout ce qui est nécessaire à la vie le chauffage est rare et très cher, il faut le ménager.

Du 11 au 31 janvier 1943,
nous avons eu des alertes le 14 de 19h55 à 20h30, le 17 de 12h15 à 12h45, le 18 de 22h30 à 23h30 et le 27 de 0H00 à 0h15.
Le beau temps a continué ici, nous n'avons pour bien dire pas d'hiver.
La situation est excellente sur le front Russe ; ceux-ci attaquent et progressent à peu près partout, à Stalingrad, d'assiégeants les Allemands ont été assiégés à leur tour et leur 6ème armée à peu près détruite, seuls quelques milliers d'hommes résistent encore ce jour 3l. Leningrad qui était presque bloquée a été par la reprise de Schusselbourg complètement débloquée le 19. L'Italie n'a plus de colonies, les alliés sont entrés à Tripoli le 23. L'armée Rommel s'est retirée en Tunisie sur la ligne Mareth. En Tunisie la situation n'a guère changée.
Pendant 10 jours, Roosevelt et Churchill et de nombreux personnages se sont rencontrés à Casablanca. 46.000 personnes ont été évacuées du quartier du vieux port à Marseille le 24.
Les Allemands construisent des fortifications sur tout le littoral même à l'intérieur vers Soissons. Ils attendent partout l'attaque des alliés.
De nombreux civils Français sont obligés d'aller travailler dans l'organisation Todt.


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FÉVRIER 1943


Du 1er au 14 février 1943,
pour bien dire nous avons du beau temps.
Les Russes continuent leur offensive avec violence et avancent. Les 2 derniers défenseurs allemands de Stalingrad ont été exterminés, c'est une grande victoire Russe et pour bien dire la première défaite allemande. La 6ème armée allemande forte d'environ 330.000 hommes y compris 2 divisions Roumaines et 1 régiment Croate y a été anéantie mais ne s'est pas rendue.

Le 7 février 1943,
on a appris que les Russes avaient atteint la mer d'Azov. Le 9, qu'ils étaient rentrés à Koursk, le 13 à Krasnodar et Vorahilo. De nombreux trains de troupes allemandes quittent la France en toute hâte pour la Russie. Tout le matériel, même les casques, est camouflé de blanc, couleur neige car il y a tout de même de la neige-là bas.
En Afrique pas de changement. Churchill s'est rencontré à Adana en Turquie avec le président de la république Turque. On parle de l'entrée en guerre de la Turquie au côté des alliés.

Nous avons eu alerte le 3 de 21h30 à 22h30 et dans la nuit du 13 au 14 de 22h40 à 1h05.
La population de Lorient a été évacuée. Il est question que celle de Brest va l'être aussi.

Du 14 au 28 février 1943,
l'offensive russe continue victorieusement. Le 15, on apprend que les Russes sont rentrés à Rostov et à Vorchilovgrad, le 16 à Kharkov. Il semble bien que les Allemands qui sont restés dans le Caucase sont cernés, à moins qu'ils ne puissent passer en Crimée par le détroit de Kertch ce qui est peu probable.

Le 16 février 1943,
j'ai pris de 18h00 à 22h00 la garde civique avec Jean. Nous avons eu des alertes, le 14 de 21h00 à 21h40, le 16 de 22h25 à 23h05, le 20 de 21h00 à 23h30, le 21 de 2h00 à 2h30, la nuit du 24 au 25 de 23h55 à 0h40 et de 1h00 à 3h40, la nuit du 25 au 26 de 23h00 à minuit et de 0h20 à 2h00.
En Tunisie, peu de changement. Du côté du Japon, la situation ne varie plus guère. Il faut d'abord battre l’Allemagne et l'Italie après ce sera son tour.


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MARS 1943


Du 1er au 7 mars 1943,
peu de changement sur les différents fronts toutefois en Tunisie, les alliés ont pris pied dans la ligne Mareth le 1er et les Russes ont repris Rëjev le 2 et continuent leur offensive mais les Allemands résistent énergiquement et même contre-attaquent sur le Douetz.

Le 1er mars 1943,
la ligne de démarcation qui partage la France en deux zones et pour bien dire supprimée. Il ne faut plus de passeport pour la franchir, la carte d'identité suffit. Les correspondances postales ordinaires sont également rétablies.
Les départs d'ouvriers pour l'Allemagne continuent, c'est une vraie déportation. Les 3 classes 1940, 1941 et 1942 viennent de passer la révision pour le travail obligatoire, presque tous les jeunes gens de Pompey et environs bons pour le service de ces trois classes partent aujourd’hui 7 pour travailler en Allemagne. Il doit en être à peu près partout la même chose.
Pour avoir chanté des chansons patriotiques le 2 Mars à Nancy, presque tous les conscrits des environs avaient été arrêtés et jetés en prison pour plusieurs jours par les Allemands.

Du 7 au 14 mars 1943,
l'offensive Russe continue avec succès dans le secteur central et le 12 on apprend que les Russes sont entrés à Wiazina(?), mais plus au sud ils reculent devant une offensive allemande.

Le 13 mars 1943,
on apprend que les Boches sont rentrés dans Karkov que les Russes défendent rue par rue. Ailleurs guère de changement.
Ici nous avons eu alerte la nuit du 8 au 9 de 21h40 à 1h55, c'était le bombardement de Nuremberg, la nuit du 9 au 10 de 22h20 à 3h20, c'était celui de Munich et la nuit du 11 au 12, c’était celui de Stuttgard. Il est passé de nombreux avions ces deux dernières alertes.
Il paraît qu'il y a eu de nombreux attentats en France. Rennes et Rouen ont été bombardées, il y a eu de nombreuses victimes Françaises.

Du 14 au 28 mars 1943,
pas grand changement. Après la reprise de Kharkov par les boches, ceux-ci sont arrêtés sur le Douetz supérieur. De leur côté, les Russes avancent un peu en direction de Smolensk. En Tunisie, les alliés ont pris l'offensive.

Le 14 mars 1943,
nous avons eu l'alerte de 21h40 à 23h00.
la vie est toujours plus dure, c'est à peine si l'on trouve à se vêtir, se chausser et se nourrir et à quel prix. Une paire de soulier vaut environ 300.00 F et on a droit à un ressemelage par an soit en cuir ou en caoutchouc. Les légumes et pommes de terre commencent à s'épuiser, gare les prochains mois. On touche maintenant du sel égrugé, il n'y en a presque plus de blanc. La ration de viande est ramenée à 90 grammes une semaine sur deux au lieu de 120. La ration de tabac va encore être diminuée.


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AVRIL 1943


Du 28 mars au 18 avril 1943,
la situation reste stationnaire en Russie.
En Tunisie l'offensive alliée a progressé. Après avoir pris la ligne Mareth, les alliés sont entrés à Gabès le 30 mars, à Sfax le 10 avril et le 11 à Kairouan. Le cercle se resserre autour de Tunis et de Bizerte où les Boches vont sûrement offrir une résistance désespérée. Il est probable que les Italiens qui sont avec eux lâcheront avant eux. Après l'affaire de Tunisie réglée, il est probable que ce sera le débarquement en Sicile et après en Italie.
Les bombardements aériens alliés redoublent de violence en territoire ennemi et occupé, malheureusement, il y a toujours de nombreuses victimes dans les pays envahis mais c'est une dure nécessité.
Les usines Renault à Billancourt ont été bombardées le 4 avril dans l'après-midi. Il y a eu plus de 400 morts.
Anvers en Belgique y a été le 5 dans l'après-midi. Il y a eu plus de 2.500 tués.

Le 1er avril 1943,
nous avons eu alerte par temps pluvieux de l7h10 à 17h35, le 9 de 1h00 à 1h15, le 11 de 1h20 à 4h30, la nuit du 14 au 15 de 23h20 à 3h00, c'était le bombardement de Stuttgart, plus de 500 avions mais 23 perdus et la nuit du 16 au 17 de 22h45 à 5h00, bombardement de Brême, des usines Skoda à Pilsen en Tchécoslovaquie et de Ludwishafen où travaille notre neveu André. Les Anglo-américains y ont perdu 53 avions sur plus de 600.
Il paraît qu'il y a maintenant de nombreuses alertes de jour dans les environs et que plusieurs gares et usines dont Pont-à-Mousson ont été mitraillées dans la nuit du 14 au 15.
Les villes de l'Italie du Sud sont également beaucoup bombardées, seule Rome est respectée.
La guerre sur mer est toujours intense et les sous-marins ennemis coulent toujours beaucoup de navires.
En Extrême-Orient, peu de changement.


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MAI 1943


Du 18 avril au 9 mai 1943,
rien de nouveau en Extrême-Orient.
En Russie c'est le calme, sauf dans la tête de pont du Kouban à Novorossik où les Russes tâchent d'anéantir les dernières troupes ennemies qui sont encore dans le Caucase.
En Tunisie l'offensive alliée a progressé et le 7 Mai les alliés sont entrés à Tunis et Bizerte. la fin de la résistance ennemie en Afrique est proche.

Nous avons eu alerte le 2 mai de 20h45 à 21h20. La garde civique a été supprimée le 24 avril.
A Norroy je me suis procuré 6 œufs pour 30.00 F et ici nous avons eu une chopine de Cognac pour l30 F dans le commerce et c'était encore par faveur.
A l'usine nous avons tous été pesé et mesuré pour se rendre compte de l'état de santé. Pour remplacer les nombreux ouvriers partis de gré ou de force travailler en Allemagne, une centaine de tirailleurs Sénégalais sous la surveillance de sentinelles Boches, travaillent maintenant à l'usine.

Du 9 au 16 mai 1943,
c'est la fin de la domination ennemie en Afrique. Le 12, le général allemand Von Arnim qui remplaçait Rommel au commandement de l'armée d'Afrique s'est rendu vers Bizerte aux Français avec une partie de son armée. C'est le commencement de la revanche.

Le 13 mai 1943,
le général italien Messe s'est rendu aux alliés au cap Bon vers Tunis avec le reste des troupes ennemies. Il y a environ 175.000 Prisonniers. Ailleurs guère de changement.

Le 14 mai 1943,
alerte de 0H10 à 0h30 et le 16 de 0h20 à 2h20.
Churchill est en Amérique où il confère avec Roosevelt.

Du 16 au 23 mai 1943,
peu de changement sur tous les fronts mais les bombardements aériens alliés s'intensifient toujours. Bordeaux a été bombardée il y a eu près de 200 morts.
Dans la Ruhr 2 grands réservoirs contenant des millions de mètres cubes d'eau ont été détruits. Il y a eu de nombreux noyés.

Le 18 mai 1943,
alerte de 0h45 à 2h00, le 20 de 1h30 à 3h15 et le 22 de 1h00 à 2h00. Au cours de l'alerte du 20, 7 trains auraient été mitraillés entre Châlons-sur-Marne et Nancy.

Le 30 mai 1943,
alerte de 2h40 à 3h10.


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JUIN 1943


Du 16 mai au 6 juin 1943,
peu de changement sur aucun front.
La 3ème Internationale ou kommitern a été dissoute par Staline.
Les Généraux Georges et Vuillemin sont parvenus à passer de France en Algérie pour rallier De Gaulle et Giraud. La flotte Française d'Alexandrie est enfin passée avec les anglais.

Du 6 au 20 juin 1943,
pas grand changement, toutefois après un intense bombardement aérien et naval, la forteresse italienne de l'île Pantelleria s'est rendue le 11, les îles Lampédusa et du Roi en ont fait autant un peu après.
Nous avons eu alerte le 12 de 2h05 à 2h10.
Le roi d’Angleterre s'est rendu à Alger. Nous vivons tous dans l'attente d'un débarquement allié sous peu en Italie ou ailleurs.
La vie est toujours très dure. Toujours 350, 275 ou 100 grammes de pain selon l'âge et la profession et on parle encore que la soudure sera difficile. Malgré les tickets ou les points beaucoup d'objets manquent, les commerçants n'en ayant pas pour bien dire : l’huile, le savon, le café n'existent plus et combien d'autres choses. On peut dire que depuis 3 ans, nous n'avons mangé ni lard, ni viande de porc.

Le 21 juin 1943,
alerte de 1h35 à 4h05, le 25 de 2h45 à 3h 15.


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JUILLET 1943


Le 5 juillet 1943,
une grande bataille s'est engagée sur le front central Russe, vers Orel et Bielgorod et continue encore sans beaucoup de changement dans les positions. Il semble que c'est les Boches qui aient pris l'offensive, mais ils le démentent et disent que c’est seulement une attaque locale de leur part qui a déclenchée l'offensive Russe. Les alliés affirment que c'est une offensive allemande, alors qui croire.
Il est vrai que la propagande soit alliée, soit ennemie dit souvent des mensonges pour remonter le moral de son côté ou décourager l'adversaire.

Le 9 juillet 1943,
alerte de 1h00 à 2h05 et le 10 de 1h25 à 2h25.

Le 10 juillet 1943,
un samedi vers 8h00, étant au travail, nous apprenons que les alliés ont débarqué en Sicile. La radio a annoncé la nouvelle à 6h30. Enfin voilà la nouvelle tant attendue du débarquement en Europe. On peut dire que c'est le commencement de la délivrance, est-elle proche ou éloignée ? Je crois qu'elle est encore éloignée et que nous n'avons pas encore fini de souffrir, car les Boches sont toujours fort, presque toute l'Europe travaille pour eux.

Les 11, 12, 13 et 14 juillet 1943,
la lutte est toujours vive en Russie.
Le débarquement allié en Sicile a eu lieu le 10 vers 4h00 sur la côte Sud-Est aux environs de Syracuse qui a été prise.
Plus de 2.000 navires ont pris part à cette opération qui progresse lentement, car on estime qu'il y a environ 300.000 Italiens et 100.000 Allemands en Sicile. La lutte sera sans doute vive et assez longue.

Ce jour 14 juillet 1943,
on a repos pour la fête nationale mais il n'y a aucune réjouissance. Il y a eu alerte le 13 de 0h20 à 0h50.

Du 14 au 25 juillet 1943,
nous avons eu alerte le 15 de 2h00 à 3h00, le 16 de 1h30 à 3h40, le 17 de 1h00 à 3h55, le 19 de 1h35 à 2h00.
L'Italie est actuellement violemment bombardée. Rome y a été à son tour le 19. Il y a eu plus de 700 tués.
Les alliés sont déjà maîtres des 3/4 de la Sicile ; ils sont arrêtés devant Catane mais sont entrés à Palerme le 22.
En Russie la bataille commencée le 5 se poursuit avec acharnement, les Russes semblent avoir l'initiative des opérations, ils vont probablement s'emparer prochainement d'Orel. Les Boches et leurs alliés semblent maintenant partout sur la défensive.


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AOÛT 1943


Du 25 juillet au 15 août 1943,
nous avons eu alerte le 10 août de 1h00 à 3h00. On entendait distinctement la canonnade ou les explosions. C'était Sarrebruck, Mannheim et Francfort qui écopaient. Le 11 de 0H00 à 4h00, c'était Nuremberg, le 13 de 1h30 à 2h30 et aujourd'hui jour de l'Assomption un dimanche, de 0h30 à 1h30.
Rome a été de nouveau bombardée ainsi que de nombreuses villes d'Italie, d'Allemagne et des pays occupés, même des usines et gares de l'est de la France, Vesoul, Besançon, Belfort, Chalindrey, Sochaux, le Creusot, etc.

Le 25 juillet 1943,
Mussolini a été remplacé par le maréchal Badoglio. C'est la première fissure dans l'axe ; avec lui a fini le régime et l'ère fasciste, mais l'Italie continue la guerre, peut-être plus pour longtemps car il semble y avoir de l'ébullition mais les Allemands l'occupent.
En Sicile, la fin approche. Les alliés se rapprochent de Messine le but final. Catane a été pris le 5.
En Russie, les Russes continuent l’offensive, Orel et Bielgorod ont été pris le 5 et ils sont aux portes de Kharkov.
Adieu la Savoie, Nice, la Corse et la Tunisie que revendiquaient Mussolini et les Italiens.

Du 15 août au 5 septembre 1943,
nous avons eu alerte le 17 de 0h30 à 3h00 et de 16h00 à 16h20, le 18 de 23h30 à minuit, le 19 de 0h10 à 1h00, le 20 de 0h45 à 2h30, le 23 de 1h10 à 2h20, la nuit du 25 au 26 de 23h45 à 0h30, le 28 de minuit à 4h00, le 1er de 2h00 à 3h45 et le 2 de 23h45 à minuit.
Le roi Boris III de Bulgarie est mort mystérieusement le 28 Août.
L'offensive Russe continue victorieusement. Les Russes sont rentrés à Kharkov le 23 et le 30 à Taganrog.

Le 17 août 1943,
la Sicile était complètement conquise mais une partie des troupes ennemies a pu repasser en Italie.


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SEPTEMBRE 1943


Le 3 septembre 1943,
un vendredi, 4ème anniversaire de la guerre, nous avons la joie d'apprendre que les Anglais prenant pied sur le continent avaient débarqué à 4h30 à l'extrémité Sud-ouest de l'Italie.

Le 4 septembre 1943,
ils occupaient Reggio de Calabre et San Giovanni.
La moisson a été abondante et la vendange le sera aussi mais nous n’aurons pas plus de pain, ni de vin à moins que les événements ne se précipitent, ce qui pourrait arriver car l'Italie semble bien malade et les bombardements sur l'Italie, l'Allemagne et les pays occupés sont de plus en plus terrifiants.
Suite à la sécheresse, les légumes surtout les pommes de terre sont rares. On se demande ce que l'on va manger plus tard.

Du 5 au 12 septembre 1943,
nous avons alerte la nuit du 5 au 6 de 23h15 à 2h30.

Le 6 septembre 1943,
nous avons la surprise d'entendre la sirène d'alerte en plein jour, c'est très rare, il est 10h00, en même temps on entend de nombreux avions et nous apercevons très haut dans le ciel environ 200 avions américains qui par vagues successives allaient bombarder Stuttgart et par nécessité malheureusement Strasbourg, probablement la gare ou une usine. Nous étions tous heureux de les voir passer et on les acclamait.

Dans la nuit du 6 au 7 septembre 1943,
alerte de 23h00 à 3h10 et la nuit du 7 au 8 de 23h15 à 1h40.

Le 8 septembre 1943,
on apprend que les Russes avançant toujours, ont repris Stalino, la Crimée semble menacée.
Ce même jour, vers 19h00 nous apprenons que l'Italie a capitulé sans condition. On y croit à peine vu les canards qui courent souvent mais c'était vrai.

Le 9 septembre 1943,
nous avons des détails. Un armistice dévoilé seulement le 8 avait été signé le 3 en Sicile au quartier général du général en chef américain Eisenhower entre les alliés et un représentant du roi d'Italie et du maréchal Badoglio. Cela va abréger considérablement la guerre mais les Allemands s'efforcent de résister partout en Italie dans les Balkans et dans le sud de la France où ils tâchent de remplacer les Italiens défaillants. La situation semble très confuse. Déjà les alliés ont débarqué vers Naples et occupent Tarente. D'autres débarquements semblent imminents peut-être ailleurs qu'en Italie.
Il semble qu'en certains endroits, les Allemands se battent avec les Italiens, du reste ils viennent en pleine mer de leur couler un cuirassé. Dans d'autres, ils les désarment. Il se pourrait que quelques Italiens continuent la lutte du côté des Allemands car ceux-ci viennent de former un gouvernement Italien fasciste mais il semble qu'il ne sera guère suivi.

Il est probable que l'heure de la libération approche pour nous. Nous espérons voir bientôt, les alliés ici venant par les Alpes, ce qui ne veut pas dire que ce sera la fin de la guerre car les Boches tout en évacuant la France, s'ils le font de gré ou de force, peuvent très bien résister ailleurs surtout sur leur ligne Siegfried.

Du 12 au 19 septembre 1943,
les Russes continuent leur avance et ont repris Briansk, Novorossisk et Marioupol.
En Italie les alliés débarqués dans le golfe de Salerne au sud de Naples le 9, y ont été violemment attaqués par les Allemands et s'y sont difficilement maintenus mais maintenant la jonction est faite avec les troupes débarquées au sud et à l'est et les alliés occupent déjà le sud de l'Italie de Bari à Salerne, mais le reste est occupé par les Boches et l'Italie va devenir un champ de bataille ; tant pis pour elle. Les Italiens n'auront que ce qu'ils méritent.

Le 12 septembre 1943,
Mussolini mal gardé par les Italiens a été enlevé par les Allemands.

Dans la nuit du 15 au 16 septembre 1943,
nous avons alerte de 23h45 à 0h45.

Du 19 au 26 septembre 1943,
l'avance Russe continue. Poltava, Smolensk Rosland ont été repris. Le Dniepr franchi en plusieurs points.

Dans la nuit du 23 au 24 septembre 1943,
alerte de 23h05 à 0h35 et le 24 de 18h00 à 18h15.
En Italie l'avance continue au delà de Salerne. la Sardaigne a été évacuée par les Boches et les alliés ont débarqué en Corse le 20 malgré une assez vive résistance des Allemands qui au nombre d'une douzaine de mille tiennent encore au Cap Corse mais pas pour longtemps.

Le 25 septembre 1943,
au cours d'une conversation avec Monsieur Heintz de Pompey qui prisonnier libéré depuis quelques mois se trouvait en Allemagne avec de nombreux sous officiers du 82ème RIF qui avaient connu notre cher Alexandre, nous avons enfin des détails sûrs, concernant sa mort. Les armes de la casemate ne fonctionnant plus, malgré les conseils de prudence de ses hommes, Alexandre est sorti dehors avec son fusil mitrailleur et s'est mis à tirer sur les Boches. Il a été tué net d"une balle à la tête. Un peu après, un obus arrachant la porte de la casemate a projeté celle-ci sur son cadavre. Nous espérons avoir d'autres détails quand les prisonniers reviendront.

Du 26 septembre au 10 octobre 1943,
l'avance alliée continue lentement en Italie du Sud.

Le 28 septembre 1943,
les alliés entrent à Foggia et le 1er Octobre à Naples. Sous la pression des alliés, principalement des troupes françaises, les Allemands évacuent la Corse le 5 Octobre.

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OCTOBRE 1943


L'offensive Russe continue. les Russes ont franchi le Dnieper, la Bérisina et le Pripet en de nombreux endroits.

Dans la nuit du 2 au 3 octobre 1943,
alerte de 21h45 à 2h20, la nuit du 3 au 4 de 23h40 à 0h30. Le 4 de 11h15 à 12h40 et de 21h10 à 23h00. Le 7 de 13h30 à 14h00 et la nuit du 7 au 8 de 23h30 à 2h05.
Par suite de la bonne récolte de blé, certaines catégories de consommateurs ont 25 grammes de pain de plus depuis le 6. Ce qui fait 100 grammes en plus par jour chez nous soit 1700 grammes pour nous cinq, quelle aubaine.
Le blé est taxé 4.10 F le kilo pour le cultivateur ou en trouve au marché noir de ce prix jusqu'à 10.00 F. Les pommes, les poires varient de 6.00 à 20.00 F et plus. Le prix dépend de la tête du client, de la rapacité du vendeur ou de la prodigalité de l'acheteur qui la plupart du temps achète à n'importe quel prix chez le producteur tout ce qu'il peut trouver.

Du 10 au 24 octobre 1943,
pas grand changement en Italie mais le 13, le gouvernement Italien de Badoglio a déclaré la guerre à l’Allemagne tandis que le gouvernement de Mussolini continue la guerre à ses cotés.

Le 11 octobre 1943,
nous avons quitté la maison de Saint-Euchaire où nous habitions depuis près de 22 ans pour le 2ème étage du n°67 rue de Metz.
En Italie les alliés continuent d'avancer lentement. Une grande conférence a réuni à Moscou les ministres des affaires étrangères de Russie, des États-Unis et de l'Angleterre, Messieurs Molotov, Coudel Hull et Eden accompagnés de nombreux délégués. La Chine était également représentée. Elle a duré du 19 au 30 octobre. D'importantes mesures ont été prises.
L’avance Russe continue. Le 26, les Russes sont entrés à Dniepropetrovsk et le 27 à Krivorog.

Le 12 octobre 1943,
on apprend que le Portugal a cédé des bases navales et aériennes aux alliés aux Açores.
Les Russes continuent d’avancer. Le 9, le Kouban a été évacué par les Allemands.

Le 14 octobre 1943,
nous avons eu alerte le 14 de 14h00 à 16h30. Il est passé environ 300 avions américains. C'était le bombardement de Schweinfurt en Bavière. Des combats ont eu lieu dans les environs et plusieurs avions ont été descendus des deux parties. Londres dit que les alliés ont perdu 62 bombardiers mais ont abattu 114 chasseurs Boches. Les Boches s'attribuent une grande victoire aérienne en disant qu'ils ont perdu 17 chasseurs mais abattu 129 bombardiers, la plupart quadrimoteurs.
Il faut dire que la plupart des bombardiers ont de 4 à 10 hommes d'équipage. Les Américains ont beaucoup de quadrimoteurs dits libérators ou forteresses volantes avec une dizaine d'homme à bord. Les chasseurs n'ont qu'un homme à bord. Généralement les Anglais bombardent de nuit et les Américains de jour.

Le 18 octobre 1943,
alerte de 10h30 à 11h00, de 15h20 à 16h35 et de 21h50 à 23h00.

Le 20 octobre 1943,
alerte de 14h20 à 14h50.

Le 24 octobre,
on apprend la prise de Mélitopol. Le Dniepr ayant été franchi en de nombreux points, les troupes allemandes du Sud surtout en Crimée semblent en vilaine posture.

Le 26 octobre,
Marie-Louise nous montre une lettre du lieutenant qui en novembre 1940 a enterré notre cher Alexandre. Il dit que outre l'alliance que Marie-Louise a reçue, il a retrouvé sur lui 455 F, un titre de permission et des fragments de photo et qu'il lui a extrait une dent aurifiée, qu'elle peut réclamer cela. De plus, il a constaté que la mort avait été instantanée par suite de l'éclatement du crâne probablement par éclat d'obus et qu'il avait encore la jambe droite cassée au-dessus du genou.


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NOVEMBRE 1943

 

Le 1er novembre 1943,
les Russes arrivent à l'isthme de Pérékop isolant ainsi la Crimée que les Allemands n'ont pas évacué. Les jours suivants, ils débarquent à Kertch en Crimée et arrivent aux abords de Kherson à l'embouchure du Dniepr.

Le 3 novembre 1943,
alerte de 20h45 à 21h00, le 4 de 19h10 à 19h50, le 5 de 19h15 à 19h45 et de 22h30 à 23h00, le 7 de 11h00 à 12h00.
En France de nombreux sabotages ont lieu contre les canaux, les chemins de fer et autres installations. De nombreuses personnes accusées de collaborer avec l'ennemi sont assassinées même des soldats allemands. La presse dit que c’est du terrorisme commandé par les communistes et par Londres mais la plupart de nous pense que c'est l’œuvre de patriotes.

Du 7 novembre au 5 décembre 1943,
pas beaucoup de changement sur le front de l’Italie.
L'offensive Russe continue toujours. Les Russes sont entrés à Kiev le 6 novembre, à Jotomir le 14 mais ont évacué cette ville le 20, à Gomel le 26. Ils approchent de la frontière Polonaise.

Le 11 novembre 1943,
en allant travailler, nous avons la joie de voir qu’un Français avait planté un drapeau tricolore en haut de la cheminée du haut fourneau n° 2. Sous la menace de graves sanctions envers le personnel, la direction Française de l'usine s'est vue contrainte de faire enlever ce drapeau dans la soirée.

Le 17 novembre 1943,
alerte de 19h30 à 20h15 et de 20h35 à 21h30. Le 18 de 19h50 à 21h00, le 26 de 21h25 à 5h00. Au cours de cette alerte un avion en difficulté a laissé tomber 3 bombes vers Villers-Saint-Etienne mettant en émoi toute la population des environs. Encore alerte de 11h05 à 12h10 et de 21h00 à 22h00.

Toute le semaine du 22 au 28 novembre 1943,
Berlin a été violemment bombardée.
Toulon y a été le 24 et a eu près de 500 tués. Marseille vient de l’être aussi avec une cinquantaine de victimes.
Les sabotages, vols, assassinats, cambriolages des mairies pour s’emparer des points et cartes d'approvisionnement continuent toujours en France et le marché noir aussi car la vie devient toujours plus difficile.
Une conférence a réuni au Caire, Roosevelt, Churchill et Tchang-Kai-Chek. Une autre à Téhéran en Perse ou Iran, Staline, Roosevelt et Churchill. Des décisions très importantes ont du être prises à ces deux conférences.
En Extrême-Orient à part des escarmouches aux îles Gilbert et Salomon, pas beaucoup de changement.


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DÉCEMBRE 1943


Du 5 au 26 décembre 1943,
nous avons eu alerte le 24 de 2h40 à 4h20 mais dans la région il y en a eu de nombreuses. Pour ne pas arrêter la production de l'usine, on ne sonne plus l'alerte ici que quand les avions arrivent.
En Italie, Russie et Extrême-Orient, pas grand changement. Toutefois les Russes sont entrés à Tcherkassy le 14.
On reprend à nouveau la garde civique. Nous deux Jean, nous l'avons prise à la gare de Frouard de 20h00 à 24h00 le 13.
Après la conférence de Téhéran terminée le 1er, une nouvelle a réunie au Caire, Churchill, Roosevelt, le président de la république Turque, Ismet Inonu et son ministre des affaires étrangères Menemencioglou. Il semble bien que la Turquie va prendre position pour les alliés et qu'à l'heure H elle entrera en guerre ou tout au moins livrera le passage ou des bases alliés.
Marie-Louise a reçu les quelques souvenirs de notre cher Alexandre.
Il parait que les Russes ont pris Kherson le 20.

Voilà le 5ème Noël,
que nous passons en guerre. Nous espérons bien que ce sera le dernier et que l'Allemagne sera écrasée en 1944 mais il restera encore probablement le Japon.

Le 26 décembre au 1er janvier 1944 au matin,
l'offensive Russe continue victorieusement. Les Russes sont entrés à Korasten le 29.
Au cours d'un combat naval au large du Cap Nord le 26 décembre 1943 le cuirassé allemand Scharhorst de 26000 tonnes monté par un équipage de 1460 hommes est coulé. Les bombardements des pays occupés et de l’Allemagne continuent. Berlin et les grandes villes allemandes ne sont plus que ruines. Les victimes sont innombrables.

Le 30 décembre 1943,
par temps très couvert, nous avons alerte de 11h55 à 14h30. Environ 1300 avions allant bombarder l'Allemagne du Sud-Ouest passent dans un bruit assourdissant mais le temps est tellement brumeux que l'on ne voit rien.
A part quelques gelées blanches atteignant à peine 6 degrés en dessous de zéro, nous n'avons pas encore eu d’hiver.

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- 1944 -

 

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JANVIER 1944


Ce matin 1er janvier 1944,
nous apprenons que les Russes ont repris Jitomir et sont dans les faubourgs de Vitebsk. En Italie et en Extrême-Orient pas de changement pour ce 1er Janvier 1944.
La nuit dernière un explosif a détérioré la façade du café du coin du pont de la Moselle. Le patron est probablement soupçonné de collaboration avec l'ennemi.

Du 1er au 16 janvier 1944,
nous avons alerte le 2 de 4h55 à 6h15, le 7 de 11h20 à 13h20.
En Extrême-Orient et en Italie guère de changement. L'offensive Russe continue. On dit que maintenant c'est celle d'hiver cependant il n'en fait pas encore ici. Les Russes ont pénétré en Pologne au sud des marais du Pripet le 4, sont entrés à Berditchev le 5, à Kirovograd le 10 et à Sarny le 12 mais les boches résistent avec acharnement et sont toujours sur le Dniepr inférieur et en Crimée où ils sont encerclés ainsi que devant Leningrad.
On attend avec anxiété le prochain débarquement des alliés où se produira t-il et quand ? Probablement pas avant le printemps, en tout cas quand il se produira nous aurons sans doute des jours sombres à passer.
Les Dimanches et jours fériés il n'y a plus ni trains, ni autobus, ni journaux et ceux-ci n'ont plus qu’une feuille de 0,30 m x 0,45 m depuis le 3 janvier.
Pour avoir renversé Mussolini, le Comte Ciano son gendre et 4 autres grands personnages Italiens sont fusillés le 11 par le nouveau parti fasciste républicain. Pauvre Italie, elle paie maintenant sa trahison.

Le 20 janvier 1944,
Novgorod a été prise et Leningrad bloquée en partie depuis de longs mois a été débloquée.
En Italie les alliés débarquent le 22 janvier à 50 km au sud de Rome à Nettuno et à Anzio mais ont difficile d'avancer ainsi que plus au sud sur l'ancien front où la résistance allemande est très vive.

Le 26 janvier 1944,
l'Argentine rompt les relations avec les puissances de l'axe, ainsi toute l'Amérique est en guerre ou a rompu les relations avec l'ennemi.

Le 30 janvier 1944,
alerte de 19h15 à 20h40.


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FÉVRIER 1944


Le 6 février 1944,
alerte de 12h30 à 13h30 et de 20h30 à 23h00. Le 8 de 11h05 à 11h45, le 11 de 11h30 à 12h20 et de 12h45 à 13h40, le 13 de 15h30 à 16h00 et le 20 de 5h30 à 6h00.
L’offensive Russe s'étend dans le Nord. Le 3 février les Russes entrent en Esthonie à Narva et à Rovréo et Lontsk en Pologne. Le 8 ils enlèvent la tête de pont de Nilopol sur le bas Dniepr, le 13 ils prennent Longa entre les lacs Rinen et Pelpous, le 18 Maria-Roussa et anéantissent de nombreuses divisions ennemies encerclées depuis la prise de Nikopol.

La nuit du 11 au 12 février 1944,
je prends la garde à Frouard de 23h55 à 4h00. Jean malade ne peux la prendre.

Le 12 février 1944,
le temps se met au froid et nous avons quelques millimètres de neige mais jusqu'à ce jour le froid n'a pas dépassé moins 6 degrés.
Vu le blé en abondance cette année, on peut s'en procurer quelque kilos en battant la campagne, on le paie de 4.10 F à 8.00 F le kilo et on le broie dans les moulins à café ou dans des moulins faits dans les usines, mais tout le reste et toujours de plus en plus rare et de plus en plus cher. Il est vrai que les traitements ont été relevés de 15 ; 17 et 20 % le 1er juin l943.
De nombreux jeunes gens réfractaires au travail en Allemagne se cachent où ils peuvent, ou ont pris comme on dit le maquis principalement en Haute-Savoie ou dans le Massif-Central où ils sont traqués par les forces de Police française. De véritables batailles ont lieu de temps en temps. Ces jeunes patriotes reçoivent des armes parachutées par les anglo-américains et vivent comme ils peuvent. Notre neveu André venu en permission à Noël n'est pas retourné non plus à Ludwisfafen et vit comme il peut à Norroy et à Villers-sous-Prény.

Du 20 au 27 février 1944,
les alliés piétinent sur place en Italie mais ils intensifient la guerre aérienne sur l'Allemagne.
Nous avons alerte le 21 de 2h55 à 6h00 et de 20h30 à 22h20, la nuit du 24 au 25 de 21h00 à 1h00 et de 1h50 à 3h20. Au cours de l'alerte de 21h00 à 1h00 plusieurs explosions ont été entendues. Un avion anglais en difficulté a laissé tomber ses bombes et est tombé à ce que l'on raconte entre Vandières, Norroy et Villers. L'équipage aurait des morts, des blessés et des survivants qui se seraient enfuis.

Le 25 février 1944,
alerte de 12h15 à 13h35 et la nuit du 25 au 26 de 20h45 à 3h15.
D'après la radio de Londres environ 6000 avions anglo-américains ont jeté 10000 tonnes de bombes en trois jours les 19, 20 et 21 sur l'Allemagne de la frontière ouest à Leipzig. Environ 170 avions ont été descendus d'après les journaux. Un avion serait tombé en pleine ville de Briey.
Les Russes continuant à avancer sont arrivés aux bords du lac Peïpous et sont entrée à Krivoï-Rog le 22 .

Le 25 février 1944,
notre pauvre Jean atteint de nouveau d'ostéomyélite a été opéré à l'hôpital de Pompey vers midi.

Le 27 février 1944,
après-midi un dimanche ont eu lieu à Villers-sous-Prény les obsèques des 4 aviateurs Australiens tués vers 22h00 le 24 entre Villers et Vilcey. C'était une belle manifestation en faveur des alliés. Les Boches ont du rager mais ont laissé faire. Plusieurs milliers de personnes des environs ont assisté aux obsèques. Ma sœur, mes neveux et nièces y étaient. De fortes sommes ont été recueillies pour l'achat de fleurs et de couronnes. A Norroy environ 3000 F ont été recueillis. Cet avion en difficulté avait jeté ses bombes dans les terrains vagues aux bords de la Moselle à la sortie nord de Pont-à-Mousson et avait du chercher à atterrir mais sans y réussir. Aussi l'équipage se jeta en parachute mais trop tard. les jeunes gens de Villers en voyant tomber l'avion se portèrent à son secours et ramenèrent un blessé et trois cadavres. A la pointe du jour ils trouvèrent un quatrième cadavre encore chaud. Ce pauvre garçon avait agonisé toute la nuit mais malgré qu'on entendait ses plaintes par intermittences, on n'avait pas pu le découvrir. Il parait que plusieurs membres de l'équipage se seraient échappés indemnes.

Le 28 février 1944,
nous avons eu alerte de 12h35 à 14h00.


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* * *

MARS 1944


Du 27 février au 12 mars 1944,
l'hiver à continué mais pas bien rude. A peine -10° pendant quelques jours et une légère couche de neige que le soleil des après-midi faisait disparaître. Les canaux ont été à peine gelés et la navigation chose fort rare n'a pas été interrompue de l'hiver. Aujourd'hui c'est le dégel par une légère pluie.
Le terrorisme continue en France. On assiste a de vraies batailles entre les jeunes gens qui tiennent le maquis et les forces du maintien de l'ordre. De nombreuses exécutions de patriotes ont lieu journellement pour le motif soit d'avoir pris part à des attentats, soit d'avoir d'accord avec les anglo-américains constituer des stocks clandestins d'armes. Ces armes sont jetées par les avions alliés.
En Italie et en Extrême-Orient c'est toujours le statu-quo.
En Russie, les Russes continuent toujours leur offensive et avancent légèrement. Le 10 ils sont entrés à Ouman.

Le 2 mars 1944,
nous avons alerte de 2h00 à 5h10 de 11h55 à 12h20. Le 3 de 22h10 à minuit, le 5 de 23h00 à 23h30, le 6 de 13h00 à 13h30 et le 7 de 23h00 à 23h20.
Berlin est toujours violemment bombardée.

Le 6 mars 1944,
vers midi les Américains auraient perdu d'après les journaux environ 200 avions, la plupart quadrimoteurs, au cours d'un raid sur Berlin.
Nous attendons dans l'anxiété les prochains graves événements qui ne doivent guère plus tarder à se produire.

Du 12 au 26 mars 1944,
rien en Extrême-Orient et pas de changement en Italie, cependant de violents combats ont eu lieu à Cassino.
Les Russes avancent maintenant dans le sud. Ils sont entrés à Kherson le 14, à Vinnitsa ensuite, ont franchi le Bug et le Dniester et sont entrés le 20 en Roumanie par le nord de la Bessarabie. Cependant l'ennemi est toujours à Nikolaïev et résiste en Crimée bien qu'encerclé depuis longtemps.

Nous avons de nombreuses alertes, le 13 de 22h00 à 22h30, le 14 de 0h20 à 0h40, la nuit du 15 au 16 de 22h00 à 1h20, le 16 de 10h15 à 12h00 et de 13h10 à 14h00, le 18 de 12h30 à 14h00 et de 21h30 à 23h00, le 20 de 11h20 à 11h55 et de 21h20 à 23h00.

Le 20 mars 1944,
meurt le général de Castelnau et Puchen ancien ministre de Laval est fusillé à Alger.

Le 22 mars 1944,
alerte de 0h20 à 2h00, la nuit du 23 au 24 de 21h50 à 0h30, le 24 de 9h35 à 11h15 et le 25 de 22h10 à 22h30. A presque toutes ces alertes passent de nombreux avions que l'on ne voit pas tellement ils sont haut. Cependant le 16 à 13h35 nous avons très bien vu entre deux nuages une vague de 53 avions tous groupés et le 24 au cours de l'alerte de 9h35 à 11h15 trois vagues d'avions dont une a bombardé le champ d'aviation d'Essey-les-Nancy faisant malheureusement des victimes parmi la population. Nous avons entendu les quelques explosions.

Le 28 mars,
nous avons alerte de 14h00 à 15h00.
Toujours pas ou peu de changement en Italie et en Extrême-Orient. Les Russes continuent toujours l'offensive. Le 27 mars, ils franchissent le Prut pénétrant dans l'ancienne Roumanie. Le 28 ils sont près de Kovel, Tarnopol Dzernovitz, Jassy et des Carpathes et entrent à Nicolaïef. le 30, ils entrent à Czernovitz, le 31 à Otchakof.


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* * *

AVRIL 1944


Le 1er avril 1944,
alerte de 9h50 à 10h30. Après cette alerte vers midi passent de nombreux avions qui viennent de bombarder l'Allemagne.

Le 6 avril 1944,
alerte de 1h40 à 2h40 et de 16h15 à 16h55. Le 10 de 9h00 à 10h00. Le 12 de 13h35 à 14h00. Le 14 de 12h40 à 13h20.
Les Russes continuent toujours l’offensive. Ils entrent le 9 à Odessa. Ils attaquent en Crimée, le 11 ils entrent à Kertch, Le 14 à Simpéropol, ainsi en quelques jours la Crimée est presque délivrée. L’ennemi va sans doute s'enfermer dans Sébastopol et y tenir tant qu'il pourra. On dit que les Russes sont déjà entrés en Slovaquie et sont sur les monts Carpathes mais n'ayant pas la radio je n'en suis pas sûr. En tout cas la Russie est actuellement presque délivrée et les Russes sont assez profondément en Pologne et en Roumanie. Il s'en est fallut de peu que la Hongrie capitule mais les boches ont envahi ce pays. Il semble que ce pays ainsi que la Finlande, la Slovaquie, la Roumanie et la Bulgarie voudraient se détacher de l'Allemagne mais ils ne le peuvent pas car ils sont occupés. Mais il est à peu près sûr qu'à la première occasion tous ces pays abandonneront la lutte.

Du 16 avril au 7 mai 1944,
l'offensive aérienne anglo-américaine s'intensifie dans l'Allemagne et les pays occupés. Les voies ferrées et les aérodromes sont bombardés systématiquement par des milliers d'avions de jour et de nuit. Les gares de Noisy-le-Sec, Juvisy, Tergnier, Rouen ont été bombardées la nuit du 18 au 19. Il y a eu environ 1700 morts à Rouen et environ 740 dans la banlieue de Paris qui a été de nouveau bombardée la nuit du 21 au 22 dans sa région nord, même à Montmartre.

Le 22 avril 1944,
nous avons alerte de 18h30 à 19h00. Il est passé quelques avions.
Londres a annoncé que notre député, Louis Marin, fuyant Vichy, venait d'arriver dans cette ville.
Depuis longtemps Londres nous invitait à évacuer le littoral et les abords des usines et voies ferrées. Le 17, nous avons été invités à évacuer les abords des voies ferrées dans un rayon de 100m, ailleurs c'est 300m et de force. Aussi beaucoup de monde quittent leur domicile. On se croirait revenu aux jours sombres de mai et juin 1940, mais c'est le bombardement que l'on fuit et non l'invasion que tout le monde souhaite.
On vit toujours dans l'attente du débarquement quelque part, mais il se fait attendre. Ce sera sûrement la plus grande bataille de tous les temps, probablement que des milliers d'hommes tomberont du ciel pendant que les autres débarqueront. En France une armée secrète dite armée de la résistance est prête à se joindre aux libérateurs. Elle est armée par des armes parachutées, un jeune homme de 15 ans m'a montré un revolver chargé de 6 balles. Et dire que tout civil armé est passible de la peine de mort.
En France il y a toujours une espèce de guerre civile surtout dans les zones montagneuses et il y a toujours des fusillades et des assassinats.

Le 23 avril 1944,
un dimanche, alerte de 8h30 à 9h00. La messe de 8h30 est retardée jusqu'à la fin de l'alerte. Nouvelle alerte de 14h30 à 15h40. Le 24 alerte de 12h15 à 13h30. Nous voyons passer de nombreuses vagues d'avions allant bombarder Friedrichshafen et Munich.

Le 25 avril 1944,
alerte de 0h05 à 1h10. Il passe tellement d'avions que nous nous levons pour regarder du balcon dans la direction de l'Est. On entend des explosions, le ciel semble embrasé et ce n'est que comme un feu d'artifice. C'est le bombardement de Mairnheim, Karlsruhe et Munich. Nouvelle alerte de 9h00 à 11h10, passage de nombreux avions et bombardement dans toutes les directions, Metz, Ars, Essey-lès-Nancy, Toul, Dijon et tout près Millery où il y a 2 tués. J'ai entendu pour la 1ère fois depuis 1940 le sifflement des bombes avant l'explosion et j'ai vu la fumée des bombes de Millery qui passaient au dessus de la côte de Custines.

Le 26 avril 1944,
alerte de 9h15 à 9h55 et de 10h05 à 10h50.

Le 27 avril 1944,
de 0h55 à 2h30, il passe de nombreux avions et de 18h00 à 20h00 nous voyons de nombreuses vagues d'avions et entendons le bombardement de la gare de Blainville où il y a 23 tués et de nombreux blessés, et des aérodromes de Toul et d'Essey-lès-Nancy. A 23h40 nous entendons un avion, des explosions puis la sirène d'alerte. C'était de nouvelles bombes sur Essey ; fin de l'alerte à minuit.

Le 28 avril 1944,
alerte de 0h10 à 2h30, passage de nombreux avions, et de 9h35 à 10h25.
Les Russes sont entrés à Tarnopol le 15 avril après un siège d'un mois. Ils assiègent toujours Sébastopol. Maintenant leur offensive semble arrêtée. Est-ce volontairement ou non, nous le saurons sans doute bientôt. Ils semblent regrouper leurs forces. Ailleurs rien de nouveau.


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* * *

MAI 1944


Le 1er mai 1944,
alerte de 17h45 à 19h40, passage de nombreux avions.

Le 4 mai 1944,
de 0h10 à 0h45, explosions vers l'ouest. C'était le bombardement du camp de Mailly.

Le 7 mai 1944,
comme j'écris, voilà la sirène. Il est 9h50 fin à 10h30. Malgré l'interdiction des réunions pendant les alertes même dans les églises, Monsieur le Curé a dit la grand-messe de 10h15.
Vu la carence des transports suite aux bombardements et aux sabotages, nous n’avons plus depuis le 1er mai que 2 litres de vin par mois et même souvent pas de bière. La vie est toujours plus dure et plus chère. Le vin coûte environ 10.00 F et la bière 5.00 F le litre.

Du 7 au 14 mai 1944,
nous vivons toujours dans l'attente de grands événements. Le calme semble régner sur tous les fronts. Cependant les Russes ont pris Sébastopol le 10 et les alliés ont attaqué sur tout le front du Sud de l'Italie le 12.

Le 8 mai 1944,
nous avons eu alerte de 0h15 à 1h10, le 9 de 9h00 à 10h05. Nous avons vu passer de nombreuses vagues d'avions juste au-dessus de nous et assister à un court combat entre 3 avions.

Le 11 mai 1944,
alerte de 15h15 à 16h30. C'était le bombardement des gares d'Épinal et de Belfort. On dit qu'il y aurait environ 150 tués à Épinal et 25 à Belfort, mais les chiffres sont souvent exagérés par les journaux pour tourner les Français contre les alliés, mais c'est inutile.
Cependant actuellement les grandes gares françaises et belges sont bombardées pour arrêter le trafic allemand et malheureusement notre ravitaillement mais c'est une nécessité. Nous nous attendons tous à passer de mauvais jours, beaucoup de monde déménage pour aller dans les villages ou dans les maisons plus éloignées des voies ferrées. Encore alerte le 11 de 18h30 à 20h35.

Le 9 mai 1944,
à 16h00 l'usine de Pompey nous paie et nous met en congés payés du 10 au 16 inclus. C'est l'arrêt de toutes les usines métallurgiques de la Meurthe-et-Moselle et probablement d'ailleurs sous prétexte du manque de coke.
Pour implorer la paix, Monseigneur l'Évêque fait promener dans tout le diocèse de Nancy les statues renommées de la Sainte-Vierge, celle de Notre Dame de Bonsecours est arrivée à Pompey à l’église vers midi le 11. Venant de Custines portée par 6 hommes et accompagnée par un grand cortège, c’était impressionnant. La relève par la population de Pompey c'est faite au passage à niveau n°1 de Marbache. Tout le long du parcours ce n'était que verdure et décorations de toutes sortes. la plus grande partie de la population était à la procession ou la regardait passer. Une croix portée par 2 hommes accompagnait la statue. Après environ un séjour de 24h à Pompey, Notre Dame de Bonsecours nous a quitté le 12 avec le même cérémonial que la veille. Nous l'avons remise à la population de Frouard vers 10h00 de l'autre côté du pont sur la Moselle.

Le 12 mai 1944,
j'ai pris la garde civique ici sur les voies de 3h00 à 6h30. Alerte de 11h45 à 13h05.

Du 14 au 28 mai 1944,
le calme règne sur le front russe, ainsi qu'en Extrême-Orient. Mais sur le front de l'Italie du Sud, l'attaque commencée le 12 par les alliés progresse. Cassino et le Mont Cassin ont été pris au début et les troupes débarquées à Nettuno et Anzio attaquant à leur tour, la jonction a été faite le 25.
Les bombardements alliés sont toujours aussi violents si ce n'est plus. Nous avons alerte le 20 de 10h30 à 11h50. Le 23 de 9h40 à 11h00 et il passe de nombreux avions que l'on ne voit pas le temps étant couvert mais on entend des explosions un peu partout, Metz, Bayon, Epinal, etc. étaient bombardées.

Le 25 mai 1944,
alerte de 8h30 à 10h30. On voit quelques avions mais on en entend de nombreux et vers Nancy on voit dans le ciel des signaux qui indiquent l'objectif à bombarder. C'était le champ d'aviation d'Essey. Il est bombardé à nouveau ainsi que la gare de Blainville.
L'express Nancy-Belfort est mitraillé entre Gray et Châtel-Nomexy. Il y a 2 tués et plusieurs blessés, aussi il n'est plus guère prudent de voyager.

Le 27 mai 1944,
alerte de 11h30 à 14h20. Toujours de nombreux avions et aussi des explosions au loin. Metz a été encore bombardée, c’est la 3ème fois dans la semaine écoulée. La gare est impraticable à ce que vient de dire un ouvrier qui a été obligé pour venir ici de prendre le train à Ars. Les alliés sont vraiment maîtres du ciel. Les quelques rares avions allemands qui sont encore par ici n'attaquent plus et se sauvent au début des alertes. Ils volent très bas en tournant dans la région pour éviter les coups. De plus il n'y a pas de DCA.
Le Maréchal Pétain est venu à Nancy les 26 et 27 mai, ensuite il est allé à Épinal.

Le 28 mai 1944,
après 9 jours de congé, l'usine de Pompey nous a repris mais peut-être pas pour longtemps. De plus nous ne faisons que 7h par jour soit 42h par semaine. Seul le fourneau n° 2 marche et l'on fait du nettoyage. Beaucoup d'ouvriers demandent à partir pour gagner plus ailleurs.
50 jeunes ouvriers sont désignés pour partir mardi 30 en Allemagne. Ils sont de la classe 1944. De plus les boches en ont demandé 200 autres pour déblayer l'aviation d'Essey. Ils ont commencé hier 27 et travaillent de force aujourd'hui et demain bien que ce soit la Pentecôte (ils ont tout de même eu repos le jour de la Pentecôte).
Nous vivons toujours dans l'attente de grands événements. les déménagements continuent. Malheureusement la récolte s'annonce mal, il fait une grande sécheresse. Il n'y aura guère de légumes et presque pas de fourrage. De plus nous avons eu 2 gelées assez fortes, la dernière le 23. Les haricots, pommes de terre, tomates, la vigne ont beaucoup soufferts, c'est un vrai désastre. On se demande avec anxiété ce que l'on mangera et boira plus tard, encore moins que maintenant sans doute, cependant nous nous serrons toujours la ceinture de plus en plus.
Nous avons alerte le 29 mai de 16h50 à 17h05, le 30 de 10h45 à 11h10 et de 11h45à 11h55 et le 31 de 12h55 à 13h05.
Les bombardements sur les voies de communication et les champs d'aviations en France sont très violents. l'Écho de Nancy du 30 mai signale qu'en 48 heures surtout le 27 Mai il y a eu en France plus de 4000 morts, dont 1500 à Marseille, 870 à Saint-Étienne, 700 à Lyon, 300 à Avignon, 261 à Nice, 130 à Nîmes, 100 à Chambéry, 160 en Seine-et-Oise et une centaine dans les trains mitraillés.

l'Écho du 31 mai 1944,
signale qu'avec les victimes des bombardements de Nantes, Amiens, Abbeville, Belfort, les chiffres de la veille se montent à 5388 morts, 7275 blessés et plus de 100.000 sinistrés.


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JUIN 1944


L’écho de l’Est du 1er juin 1944,
signale encore 2000 morts à Rouen.

Du 28 mai au 11 juin 1944,
c'est toujours le calme sur le front de l'Est. Cependant les Finlandais qui depuis longtemps se contentaient de garder leur frontière mais ne voulaient pas déposer les armes, ont été de nouveau attaqué par les Russes le 10.
En Extrême-Orient c'est toujours quelques escarmouches. Il faut d'abord liquider l'Allemagne, le tour du Japon viendra ensuite.
L'offensive alliée en Italie progresse. Le 4 juin les alliés entrent à Rome. C'est la 1ère capitale délivrée. Le 8, ils entre à Civita-Vecchia et le 10 à Viterbe. les Français se sont particulièrement distingués.

Sur les 50 ouvriers de Pompey de la classe 1944 et 20 remplaçants qui devaient partir travailler en Allemagne le 30 mai, 5 seulement sont partis et se voyant presque seuls, ils sont descendus aux stations suivantes. Un nouvel essai de départ a eu lieu le 31, aucun n'est parti. Jusqu'à ce jour il n'y a pas eu de sanctions, c'est bizarre mais il est encore temps.
Cependant, messieurs Noël et Pierson ont été arrêté avant-hier 9, est-ce pour cela on n'en sait rien. C'est peut-être parce qu'ils sont officiers de réserve, car il paraît qu'il y en a beaucoup d'arrêter les jours derniers.

Le 6 juin 1944,
un mardi à 8h15 se répand comme une traînée de poudre la nouvelle tant attendue du débarquement.
Les alliés seraient débarqués dans le Nord de la France. Dans la journée on a des détails. Le débarquement a eu lieu de l'embouchure de la Seine jusqu'à Barfleur. L'opération a commencé à 1h30 par l'atterrissage de nombreux parachutistes, ensuite les troupes ont commencé à débarquer vers 7 heures. Un violent bombardement par l'aviation et les navires de guerre protégeait et avait devancé le débarquement.
Jamais pareille opération n'avait eu lieu et malgré les fanfaronnades de l'ennemi, elle a parfaitement réussie. La fameuse muraille de l'Atlantique est enfoncée. L'opération a été menée par environ 11.000 avions avec 3l.000 hommes à bord, 4000 navires et 2000 bateaux de tous modèles. D'innombrables dragueurs de mines montés par 10.000 marins ouvraient la route à cette immense flotte. Les pertes ont été minimes. L'aviation allemande s'est à peine montrée ainsi du reste que la marine.
On s'est battu avec acharnement dans la journée à Caen et à Rouen même dans les îles anglo-normandes mais c'était les parachutistes, probablement qu'ils ont été décimés.
Cependant plusieurs têtes de pont ont été établies à l'embouchure de la Seine, de l'Orne et de la Vire. Bayeux a été occupé le 8, Isigny et Trévières le 9 et le 10. La presqu'île du Cotentin va sans doute être coupée car des parachutistes sont lancés vers Coutances. l’aviation pilonne sans arrêt les communications et les renforts débarquent sans cesse.

Depuis le 8 juin 1944,
nous faisons 48 h par semaine à l'usine et nous avons la semaine anglaise.

Enfin le 10 juin 1944,
nous avons tout de même de la pluie, mais il était temps.

Du 11 juin au 2 juillet 1944,
la situation se développe favorablement sur les trois fronts européens. En France Carentan a été pris le 12, le 18 la presqu'île du Cotentin a été coupée à sa base. Le 25 les alliés ont pénétré dans Cherbourg qu'ils ont coupé complètement le 27 faisant environ 20.000 prisonniers. Quelques groupes d'Allemands résistaient encore dans le nord du Cotentin. Ils se sont rendu le 1er Juillet.
En Finlande les Russes sont entrés à Viborg le 20. Le 22, ils ont déclenché leur offensive d'été entre le lac Peïpous et Mohilev et enfoncé le front ennemi à Vitebsk qu'ils ont occupé le 26. Ils sont entrés à Orcha et Mohilev le 28 dépassant Minsk, ils sont déjà avancés de plus de 200 km.

Le 19 juin 1944,
Les Français du général Delattre de Tassigny ont débarqué dans l’île d'Elbe qu'ils ont occupée complètement le 19 faisant l800 prisonniers.

Le 20 juin,
les alliés sont entrés à Pérouse et Grossetto et ils approchent de Sienne et de Livourne en Italie.

La nuit du 15 au 16 juin 1944,
des engins mystérieux sont tombés sur Londres et le sud de l’Angleterre et continuent à y tomber faisant pas mal de dégâts mais certainement que les alliés trouveront le moyen de se débarrasser de ces engins. On dit que c'est des avions sans pilote ou plutôt des bombes volantes ou fusées. Ces engins seraient lancés jusqu'à environ 250 km. C'est un peu comme les Bertha qui en 1917 bombardaient Paris. Cela tombe un peu n'importe où, c’est pour répandre la terreur et remonter le moral des boches. C'est l'arme V1.

Le 23 juin 1944,
nous avons alerte de 19h50 à 20h20, le 27 de 18h40 à 19h20, le 28 de 8h20 à 9h35. A cette dernière alerte il passe de nombreux avions et on entend quelques explosions. A Pagny-sur-Moselle il tombe 6 bombes dans les prés.

Le 29 juin,
alerte de 1h30 à 2h30. D'innombrables avions tournent et passent au dessus de nous. C'était le bombardement de Blainville et de Metz. On entend quelques explosions, tout le monde se sauve vers les abris. Moi seul reste sur le balcon à regarder. Ce n'était que fusées dans le ciel.

Le 28 juin 1944,
Philippe Henriot, ministre, a été assassiné chez lui par des patriotes déguisés en agent. C'est le sort réservé maintenant aux collaborateurs de l'ennemi, c'est malheureusement une espèce de guerre civile. Les troupes de la résistance font maintenant beaucoup parler d'elles et viennent en aide aux alliés par des sabotages et même des batailles.
La nuit dernière les voies ont été coupées entre Dieulouard et Belleville et vers Vandières un train a déraillé et le pont canal de Norroy a sauté en face (le neveu Marcel y était).

Le 30 juin 1944,
ma femme a été opérée de l'appendicite chronique.


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JUILLET 1944


Du 2 au 16 juillet 1944,
la lutte est dure en Normandie. Les alliés ont pris Caen le 9.
En Italie, Sienne a été pris le 3 et Arezzo le 9.
En Pologne maintenant et non plus en Russie car elle est libérée, les Russes sont à une soixantaine de kilomètres de la Prusse Orientale. Le 3, ils sont entrés à Mircok et Polotzk, le 5 à Kovel et le 14 à Vilera.

Le 11 juillet 1944,
alerte de 11h00 à 12h00, le 12 de 12h00 à 13h15, le 13 de 2h00 à 2h35, de 9h30 à 10h05, de 10h35 à 11h50. A toutes ces alertes et même après il est passé d'innombrables vagues d’avions. C'est surtout Munich qui a été bombardé. Encore alerte le 14 de 21h00 à 22h00, le 15 de 2h00 à 2h15, le 16 de 1h40 à 2h00 et de 8h40 à 10h05. A cette alerte il est passé de nombreux avions.

Le 14 juillet 1944,
au réveil on a eu la surprise dans beaucoup d'endroits de voir flotter dans les rues, en haut des clochers, sur les monuments ou ailleurs le drapeau tricolore. Dans la journée sur l'ordre de la gendarmerie il a fallut les enlever.

Du 16 au 30 juillet 1944,
l'avance Russe continue. Depuis le 22 juin elle a été rapide. Le 16 juillet les Russes sont entrés à Grodno, le 27 à Narva et à Lublin, le 28 à Przemysl, Brest-litorsk, Lemberg, Bialystok et Dvinsk en Lettonie. Ils sont aux portes de Varsovie et de la Prusse Orientale.
En Italie, le 19 les alliés sont entrés à Ancône et à Livourne et le 23 à Pise.
En Normandie la lutte est très dure, cependant la tête de pont s'agrandit peu à peu. Les Américains à l'aile droite sont entrés à Saint-Lô le 18 et à Coutances le 29 et les Anglais à l'aile gauche sont à Troarn.

Le 17 juillet 1944,
nous avons eu alerte de 9h55 à 11h00, le 18 de 9h35 à 9h50, le 19 de 2h00 à 2h15 et de 9h45à 11h00, le 21 de 9h30 à 10h40 le 24 de 11h30 à 11h40, le 25 de 0h45 à 2h00, le 26 de 0h45 à 1h15et de 19h00 à 19h10, le 27 de 1h30 à 1h40, le 28 de 1h00 à 1h21 et le 29 de 1h00 à 2h05. A presque toutes ces alertes, il est passé d'innombrables avions et nous avons entendu de nombreuses détonations.
Trois avions anglais sont tombés de nuit. L'un à Essey-lès-Nancy, un autre à Airainville et le 3ème près de Millery.
Les Vl continuent à bombarder le sud de l'Angleterre et en France le maquis a presque tous les jours l'honneur du communiqué allemand.
Le pont canal de Norroy aussitôt réparé a sauté à nouveau dans la nuit du 22 au 23.

Le 20 juillet 1944,
le colonel allemand Von Stauffenberg a commis un attentat contre Hitler. Il a été fusillé ainsi que des complices. Le Führer a eu quelques brûlures et une douzaine de généraux, amiraux et hauts personnages de son entourage ont été blessés, trois en sont morts.
Il semble bien qu'en Allemagne il y a des dissentiments dans l’armée entre les Hitlériens et le parti des Hohenzollern qui voyant sans doute la partie perdue voudrait demander la paix.
Le général Von Sputuagel commandant à Paris a été blessé mortellement dans la région de Verdun par les maquisards. Il a payé sa dette car il avait fait fusiller de nombreux Français.
On ne parle presque plus de la guerre en Extrême-Orient. Cependant les Américains ont pris l’île japonaise de Shaîpan.

Le ravitaillement est toujours plus difficile. les trains ne roulant presque plus à cause des bombardements et des sabotages dans presque toute la France et ailleurs. Les gens des villes sont surtout à plaindre.

Du 30 juillet au 6 août 1944,
les événements se précipitent favorablement en France.

Le 31 juillet,
les Américains entrent à Granville et Avranches.


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AOÛT 1944

 

Le 2 août 1944,
les Américains entrent à Pentorson en Bretagne. Le 3 à Rennes et Vire, le 4 à Dinant et Fougères, le 5 l'avance est foudroyante. Le 6 au matin nous apprenons que les Américains ont atteints le 5 la Loire entre Nantes et Saint-Nazaire. Qu'ils sont aux portes de Brest occupant ainsi presque toute la Bretagne. De plus, ils ont occupé Mayenne et approchent d'Angers.
En Italie les alliés sont entrés à Florence le 4.
Sur le front de l'Est, les Russes sont entrés à Kovno ou Kaünas capitale de la Lituanie le 31 juillet. Le 1er Août, ils atteignent la mer dans le golfe de Riga et le 3 ils entrent en Prusse Orientale. Ils marquent le pas devant Varsovie, mais sont à une soixantaine de kilomètres de Cracovie. Ainsi de nombreuses troupes allemandes sont cernées dans les pays Baltes et en Bretagne, elles n'ont plus que la mer pour s'échapper.
La Turquie a rompu les relations diplomatiques et économiques avec l'Allemagne. C'était le 30ème anniversaire de la guerre de 1914. Par un juste retour des choses, ce pays qui s'était en 1914 laissé entraîner dans la guerre par l'Allemagne, se déclare aujourd'hui contre elle.
Le président de la république Finlandaise a démissionné et il est question de la paix avec ce pays.

Le 3 août 1944,
nous avons eu alerte de 15h20 à 15h40 et de 15h50 à 16h30, par beau temps nous avons vu passer plusieurs centaines d'avions. Le champ d'aviation de Toul a été bombardé au passage.

Du 6 au 13 août 1944,
l'avance continue en Italie et sur le front de l'est. En Extrême-Orient, les Japonais seraient chassés de la Nouvelle-Guinée.

Le 9 août 1944,
nous avons eu alerte le 9 de 12h40 à 13h00 et de 19h40 à 20h05, le 10 de 11h00 à 11h20. A cette alerte les gares de Conflans et Longuyon ont été bombardées. Encore alerte le 11 de 11h40 à 12h00 et de 14h45 à 15h20 avec passage de nombreux avions à cette dernière.

Le 12 août 1944,
alerte de 10h40 à 11h00 avec passage d'avions nombreux et pas très haut et ce jour 13 de 0h20 à 0h40 et de 10h45 à 11h10 avec passage de quelques avions à cette dernière.
En France les nouvelles sont contradictoires. Il semble que le front part du Sud-Est de Caen en passant par Vire, Alençon, Chartres, Châteaudun, le Mans et Angers. Toutes ces villes étant occupées par les Alliés.
Les Anglais ont une forte résistance à surmonter de Caen à Vire mais avancent petit à petit tandis que devant les Américains qui semblent marcher sur Paris et ont franchi la Loire le 11 vers son embouchure. Tout fait croire que c'est la débâcle chez les Allemands. En Bretagne les Allemands résistent encore à Brest, Lorient et quelques autres endroits, mais ce n'est qu'une question de jours, ceux qui s'étaient enfermés à Saint-Malo se sont déjà rendu.

Le 6 août 1944,
au soir on avait appris l'occupation de Châteaubriant, Laval, Vannes, Saint-Brieuc, etc . Le 7 celle de Château-Gontier et Nantes, le 9 celle du Mans et d'Angers, le 10 celle de Chartres, le 11 celles de Châteaudun et Alençon mais ce jour là des bruits fantaisistes ont couru. Dans la matinée le bruit se répand que les Américains sont à Etampes et Rambouillet, dans l'après-midi qu'ils sont à Versailles, à 16h00 qu'ils sont à Paris et Orléans et le comble vers 18h00 que les Français sont débarqués à Nice.

Le 12 août 1944,
on dit que les Américains sont à Troyes et marchent sur Dijon. Ils seraient même à Meaux et aujourd'hui 13 presque tout le monde croit cela.
Ce qui a probablement donné naissance à tous ces bruits, c'est probablement le parachutage dans beaucoup d'endroits de soldats alliés qui ont du se joindre aux maquisards.

Ceux-ci font beaucoup parler d'eux. Les trains ne roulent presque plus, ce n'est que sabotages. La nuit dernière les voies ont été sabotées près de Belleville et près de Vandières, c'est à dire en bas de Norroy. C'était la 3ème fois dans la semaine à cet endroit. Les deux premières fois un wagon de minerai a déraillé sur voie II, et l'omnibus de 6h00 a déraillé sur voie 1. Cependant il n'y a pas eu de victimes.
Nous assistons en ce moment à la fuite des boches, civils et soldats qui semblent se sauver en Allemagne ou tout au moins s’en rapprocher. Ce n'est qu'autos chargées de soldats, de civils, il y a aussi beaucoup de femmes et d'enfants. Il y en a aussi qui vont à pied, nous regardons cela avec joie. Il semble bien que notre délivrance est proche. Cette sale race qui se croyait installée pour toujours dans notre beau pays de France doit avoir la rage au cœur de nous quitter après nous avoir pressuré pendant plus de quatre ans, s'être bien nourrie à nos dépens pendant qu'ils nous faisaient pour bien dire mourir de faim et de soif, sans compter les nombreux Français qu’ils ont fusillés ou massacrés ou martyrisés. Cela nous rappelle les sombres jours de juin l940 mais maintenant ce sont les boches qui fuient l'invasion et non les Français.

Du 13 au 27 août 1944,
l'avance alliée continue sur tous les fronts. Elle est lente en Italie et en Russie mais la Roumanie a conclu l'armistice le 23 sur la base d'avoir son territoire de 1940 et ses troupes combattent même maintenant les boches qui se sauvent ou sont faits prisonniers.
Les Russes bordent déjà le Danube sur une centaine de kilomètres. La Bulgarie à son tour a demandé l'armistice hier 26 et désarme déjà les Allemands. C'est une belle brèche dans le front de l'Est, cela rappelle 1918.

Le 14 août,
nous avons eu alerte le 14 de 10h40 à 12h05 par beau temps. Plus de 1000 avions allant bombarder l'Allemagne sont passés, c'était magnifique à observer. Encore alerte de 13h20 à 13h35.

Le 15 alerte de 16h00 à 16h30, le 17 de 15h15 à 16h45 avec violent bombardement de l'aérodrome d'Essey-lès-Nancy par de nombreux avions que l'on voyait très bien d'ici.

Le 25 août 1944,
alerte de 10h20 à 10h45, le 26 de 0h00 à 1h30, de 9h40 à 10h10, de 11h15 à 12h00 avec bombardement dans les environs de Nancy et de 12h15 à 12h30. Aujourd'hui 27 de 12h50 à 13h10.
En France les bruits fantaisistes continuent à circuler. On voit les alliés partout, ce sont souvent les F.F.I. forces françaises de l'intérieur qui du reste font du bon travail et se sont emparées de nombreuses villes, Annecy, Marseille, Lyon, Tarbes, Bordeaux, Toulouse, Paris, etc .
Les alliés ont du entrer le 14 à Argentan, le 15 ils débarquent de Toulon à Cannes, le 17 ils ont du entrer à Dreux, Orléans, Saint-Tropez, Saint-Raphaël et Draguignan, le 18 à Rambouillet et Versailles, le 21 à Melun et Nantes où ils franchissent la Seine, le 22 à Angoulême, Montargis, Aix et Valensole, le 23 à Bordeaux, Sens et Meaux et Marseille. Ce jour là 50.000 Allemands se rendent près d'Argentan et 50.000 parisiens des F.F.I. après une lutte héroïque de quatre jours délivrent Paris. Le lendemain 24 les alliés y entrent ainsi qu'à Évreux et Elbeuf.

Le 25 août 1944,
le général De Gaulle entre à Paris. Le 26, les alliés entrent à Troyes, Honfleur et Toulon. le général Leclerc avec une division française blindée est entré à Alençon le 18 et à Paris le 24. Le général Delattre de Tassigny avec de nombreuses troupes françaises prend part aux opérations du midi.
Il semble qu’à part quelques points qui résistent encore notamment Brest, tout le littoral de la Seine à Cannes et les frontières d'Espagne et d'Italie soient délivrés.
Les sabotages des routes et des chemins de fer continuent. Les boches qui continuent à fuir en sont tellement furieux qu’à Pont-à-Mousson ils ont massacré 9 civils et fait sauter une maison.
Pétain a été arrêté par les Allemands et il n'y a plus de gouvernement français.
Les journaux sont à 1.50 F depuis le 4 août, et nous n'avons plus de vin depuis fin juillet.
Le Général Kœnig le héros Bir-Hakeim a été nommé gouverneur de Paris. Les généraux De Gaulle, Koenig et Leclerc ont échappé à la mort le 26 suite à une fusillade place de la Concorde et à Notre-Dame au cours d'un Te Deum.
Ce jour on dit que les alliés seraient à la frontière Suisse et à Nogent-sur-Seine.

Vers 18h00, Novéant, Pagny, Onville et Arnaville auraient été bombardés.

Le 14 août 1944,
à Norroy mon neveu Marcel me dit qu'il est un des auteurs des sabotages des voies de communication en bas de Norroy. Je l'en félicite et lui dit qu'il mérite la Croix de guerre. Maintenant il y a la Croix de la libération.

La semaine du 27 août au dimanche 3 septembre 1944,
est pour tous très émouvante. Nous attendons les américains à tout instant, mais ce jour 3 au réveil nous voyons encore quelques sales boches et quelques autos dans les rues. Il est vrai que nous serons avertis de leur arrivée par la destruction des deux derniers ponts sur la Moselle car ils sont décidés à tout détruire. L'armée allemande semble vouloir résister à Custines et ailleurs sur la rive droite de la Moselle mais comme la nôtre en 1940, elle est en pleine décomposition malgré tout elle conserve ses armes mais c'est pour massacrer ou rançonner les civils, ce n'est que vélos volés ainsi qu'autos et maisons ou magasins pillés. Pour paiement on a le revolver sous le nez.
Monsieur Husson de Belleville venant travailler ici a été abattu à Marbache, le 2.

 

Hôtel de Ville de Frouard

Hôtel de ville de Frouard
(Collection ©Jean-Luc GOURET, image cpa retouchée)

 

Le 28 août 1944,
on dit que les alliés sont à Vitry-le-François et Montélimar, le 29 à Château-Thierry, Soissons, Fismes, Reims, Châlons-sur-Marne et Nîmes. Ce jour on entend distinctement le canon du front aussi quelle joie. Ils approchent car les nouvelles sont imprécises et rares, la radio ne renseigne presque pas et les journaux encore moins. Tout le monde voit des colonnes motorisées sillonner la France en tout sens mais personne ne sait où elles sont. Ce qu'il y a de sûr, il y en a et elles avancent vers nous et vers les frontières Belges, luxembourgeoises, Boches, Suisses, Italiennes, Espagnoles et vers la mer. Toute la France sera bientôt délivrée.

Le 30 août 1944,
les alliés seraient à Bar-le-Duc, Saint-Dizier, Rouen. Les boches viennent de miner tous les ponts et se préparent à les faire sauter. Alerte de 22h50 à 23h10.

Le 31 août 1944,
on entend le canon toute la journée vers l'ouest et il se rapproche. Dans la soirée on entend de nombreuses explosions vers Toul, la dernière plus violente à 22h10. C'est sans doute les dépôts de munitions où les ponts qui sautent. Avant 13h30 et avant 17h00, le bruit court que le pont de Custines va sauter aussi tous les ouvriers habitant l'autre côté de la Moselle quittent l'usine et retournent chez eux mais c'étaient de faux bruits car il est encore débout mais plus pour longtemps. (13h15 encore alerte fin à 13h30, on entend des avions très bas). Je continue. Ce 31 la population est avertie d'avoir à évacuer les abords des ponts dans un rayon de 100 mètres. Dans la soirée on dit qu'ils sont à Commercy, à Thiaucourt, Nancy, Norroy, Pont-à-Mousson. Ce n'était pas vrai pour ces deux dernières localités et il n'y sont pas encore.

Dans la nuit du 31 août au 1er septembre 1944,
les boches cantonnant ici et dans les environs se sont sauvés tellement vite qu'ils ont presque tout abandonné même les vivres qui naturellement ont été pillés par les plus hardis.
Nous avons eu alerte aérienne le 28 août de 0h00 à 1h30 et de 9h00 à 10h20. A cette dernière alerte où les avions ont fait sauter un dépôt de munitions à Lecourt en Moselle (nous avons vu la fumée), pour la première fois depuis 1940, nous voyons la DCA tirer, c'était des batteries allemandes installées à Frouard. Encore alerte de 12h50 à 13h00 avec violent tir de DCA.


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* * *

SEPTEMBRE 1944


Le 1er septembre 1944,
à 1h20 une violente explosion nous réveille, nous entendons des pierres tomber tout près, c'était le pont servant au trolley du canal dit pont des boches sur la Moselle que ceux-ci venaient de faire sauter. C'était le début et depuis cela continue. Dans leur rage de quitter la France pour le plaisir de détruire, ils s'en prennent à tout, même à des objectifs qui n’ont rien de militaire.
A peine remis de cette émotion à 1h35, une explosion plus violente encore nous fait regarder par la fenêtre. Nous apercevons vers Frouard une énorme fumée et des flammes. Nous pensions que c'était le pont de la route qui venait de sauter mais les barbares ils avaient installé un dépôt de munitions dans Frouard à l'ancien Hôtel de Ville en plein centre de la ville et ensuite prévenant à peine 5 minutes avant la population, ils venaient de le faire sauter.
Les dégâts à Frouard sont considérables. En plus de l'ancien hôtel de ville, de nombreuses maisons sont ou détruites ou fortement détériorées. la maison Gérardin de 12 locataires est comme pulvérisée de plus il y a quelques blessés. Les ponts de Liverdun ont sauté à la même heure. La journée a été très mouvementée. On entendait le canon mais il semblait s'éloigner vers le Nord. En vérité la colonne qui semblait venir sur Pont-à-Mousson, s'éloignait, vers Metz et Verdun en passant par Thiaucourt à ce qu'il semble.
Le travail cesse à l'usine ce 1er septembre. Tous les ouvriers reçoivent un acompte de 500F plus 100F par enfant. Plus de journaux, plus de trains sur Toul, le dernier ici vers 13h00 allant sur Pagny, plus de lumière à la suite de l'explosion de Frouard, adieu la T.S.F., plus de lettres puisqu'il n'y a plus de trains, sur la route presque plus de circulation.
Alerte de 13h20 à 13h30 et de 15h55 à 16h10. Bombardement de camions vers Dieulouard et nous avons vu les avions piquer et la fumée.
La fuite des Boches civils et militaires commencée le 12 août est à peu près terminée.
Au soir le pont du canal sur la voie Pompey-Nomeny et les deux ponts sur le canal à l'intérieur de l'usine avaient sauté.

Hôtel de ville de Frouard dynamité par les allemands

Hôtel de ville de Frouard détruit par les allemands
(Collection ©Alain MARIOTTE)

La nuit du 1 au 2 septembre 1944,
à part quelques coups de fusils et explosions et quelques avions a été assez calme.

Le 2 septembre 1944,
au matin j'apprends que le 1er, les alliés sont entrés à Saint-Mihiel, Verdun, Vouziers, Rethel, Sedan, Abbeville, Nice et Vintimille en Italie. De plus une auto-mitrailleuse américaine est venue jusqu'à Rosières-en-Haye tout près d'ici mais est repartie.
Après une longue sécheresse, nous avons la pluie. Ce jour on dit que Briey et Toul sont pris.
Alerte de 18h25 à 18h40.

La nuit du 2 au 3 septembre 1944,
des boches passent encore cambriolant plusieurs maisons et rançonnant en vivres des commerçants. On entend quelques coups de fusils, un chien blessé mortellement aboyer dans la rue. C'était le chien de Monsieur Godepoy en face de chez nous, il s'était échappé, un Allemand l'avait abattu de plusieurs coups de fusils. On entend encore un avion et quelques explosions dont celle du pont-canal de Liverdun.

Le 3 septembre 1944,
pendant que j’écris, alerte de 10h35 à 11h10, en voici une autre à 11h35. On entend de nombreux avions dans le brouillard car le temps et pluvieux. Fin de cette alerte à midi mais des avions sont encore passés après. 13h40, encore un violente explosion mais nous ne voyons rien. Voilà un avion qui passe très bas, tous boches et Français nous le regardons passer car il passe toujours quelques Allemands et il y en reste pour faire les destructions.
Ce jour 3 au matin nous entrons dans la sixième année de guerre. J'apprends en allant à la messe au village car celle de la Chapelle à cause de la proximité des ponts n'a pas lieu, que les alliés sont entrés à Metz. Vers midi on dit qu'ils sont à Pont Saint-Vincent.
L’avance est toujours lente en Italie, mais les alliés marchant maintenant sur Gênes, la débâcle ne tardera pas sans doute à s'y produire. Sur le front de l'Est, les Russes sont entrés en Roumanie à Bucarest et Cônstantza. Ce pays est à peu près débarrassé des Allemands et les Russes vont faire leur jonction avec les patriotes Yougo-Slaves qui luttent depuis longtemps dans les montagnes.
Les boches se trouvant en Grèce vont être ainsi isolés. Sur le reste du front, les Russes avancent lentement.

Cette journée, 5ème anniversaire de la guerre devait se terminer tragiquement ici à Pompey. L'électricité étant rétablie vers 9h00, nous apprenons que l'avance alliée est rapide. Thionville, Longwy, Dunkerque, Charleroi et Namur sont occupés. Les Américains ont franchit la Moselle entre Metz et Nancy, aussi nous avons espoir qu'ils seront là aujourd'hui et on prépare drapeaux et guirlandes pour les recevoir. Nous avons encore alerte de 15h35 à 15h45, de 16h45 à 17h10, de 18h25 à 18h40, de 18h55 à 19h00.
A 19h50 on crie que le pont du chemin de fer va sauter. En effet, à 19h55 nous le voyons sauter. Un garde de l'usine, Monsieur Castelli qui se trouvait tout près, n'étant pas prévenu a été tué. Il est bien plus abîmé qu'en 1940. Voyant toutes ces alertes, nous pensons que la nuit ne sera pas calme et que probablement le pont de la route sautera. Encore alerte de 21h30 à 22h30 (non c'était le pont du chemin de fer qu'ils achevaient de détruire). Encore alerte de 22h45 à 0h30. Au début de cette dernière alerte un avion nous survole longuement. Je l'observe du balcon au 2ème étage. Tout-à-coup il bombarde, plusieurs bombes tout près de chez nous explosent. A la maison il y a quelques dégâts. A moins de 100 m plusieurs maisons sont pulvérisées. Notre boulangère, Madame Viant est gravement blessée, elle a été transportée à Nancy, on pense la sauver. Il y a aussi plusieurs blessés légèrement.
Fin de cette alerte à 1h10.

Dans la nuit du 3 au 4 septembre 1944
encore 2 violentes explosions à 2h50 et 4h45 mais nous ne savons où.
Ce matin 4, alerte de 9h35 à 9h50, tout est calme en ce moment, le monde est au déblaiement des dégâts et nous attendons l'explosion du dernier pont et l'arrivée des libérateurs mais les boches sont toujours là.

Le 4 septembre 1944,
à 9h40 on crie que le pont de la route va sauter (erreur).
A midi, j'ai été occupé une partie de la matinée à déblayer les décombres de notre maison, verres, tuiles, quelques objets mobiliers, etc. L'eau étant coupée je viens d'aller en chercher dans la rue Nouvelle. Il y a beaucoup d’Allemand ici et tout indique qu'ils s'apprêtent à résister, non seulement sur la rive droite de la Moselle mais aussi sur la rive gauche. Je crois que nous allons nous trouver dans la bataille.
L'avion qui a bombardé la nuit voulait probablement faire sauter le pont sur la route pour couper la retraite à ceux de la rive gauche, c'est dommage qu'il l'ait raté car les Allemands le feront tout de même sauter à la dernière minute.
Il fait un beau soleil et on n’entend rien, tout est calme mais c'est le calme avant la tempête. Naturellement il n'y a plus d'électricité. On dit que les Américains sont à Villey-Saint-Étienne. Alerte de 15h55 à 16h40. Vers 16h20 les avions bombardent vers Pont-à-Mousson et passent ici sans rien laisser tomber. A la même heure, le feu prend à la Charpenterie et au Modelage de l'usine. En moins d'une 1/2 heure, ces deux bâtiments sont détruits. On croit que c'est un court-circuit suite aux destructions opérées dans le voisinage par les Allemands. Encore alerte de 18h20 à 18h40, de 18h50 à 19h05 et à 22h30, la fin de cette dernière n’a pas été donnée.

Le 5 septembre 1944,
au réveil, nous entendons le canon vers Pont-à-Mousson, Toul et Pont-Saint-Vincent. On distingue même des coups de fusils et de mitrailleuses vers Toul donc ils approchent et nous attendons la délivrance dans la journée ou peut-être la nuit. Au village ils ont de l'électricité.
Alors nous apprenons que les alliés occupent Bruxelles, Anvers, Aix-la-Chapelle, alors ils sont déjà en Allemagne et ont pénétré en Hollande.
10h00, je rentre de l'enterrement de Monsieur Castelli. On dit qu'ils sont à Nomeny. le canon tonne dans à peu près toute les directions et tout près.
Une manœuvre d'encerclement est probablement en cours, seule une sortie en direction de Strasbourg est encore possible aux Allemands mais le pourront-ils, nous attendons la destruction des derniers ponts de la route.
Une partie de la population a couché dans les bois. On dit que le pont va sauter.
10h20, c'était un faux bruit, le pont est encore debout et pas encore prêt à sauter car les Allemands ne se sauvent pas encore. En voila qui creusent dans le trottoir devant la salle des fêtes, ils veulent sans doute faire sauter la route mais gare les maisons, nous sommes à environ 150 m.
10h40, nous comptons 43 avions américains qui vont d'ouest en est et en voilà encore d'autres. Le temps est très beau, le canon tonne toujours mais les avions passent sans être salués par la D.C.A., il n'y en a peut-être plus. C'est plutôt des emplacements de mitrailleuses que les boches font devant la salle des fêtes.
De 16h00 à 12h20 passent d'assez nombreux avions, à 12h55 encore d’autres, on ne voit plus d'avions allemands depuis assez longtemps, il faut croire qu’ils n’en ont plus guère.
Le canon tonne de plus en plus près et on entend la fusillade et les mitrailleuses pas très loin vers l'Ouest. Une batterie allemande vient de se démasquer vers Bouxières sur la rive droite et semble tirer vers l'ouest.
Les boches viennent d'assassiner Monsieur Georges au village et blesser Monsieur Bajoni, ici au café moderne à 50 m de chez nous. Ils ont tué de cinq balles de revolver Mr Bernard.
Je viens de voir passer son corps porté par les pompiers à 15h30.
Ils se conduisent comme des brigands et non comme des soldats, ils entrent dans les maisons et emportent ce qui leur plaît, bijoux, montres, vivres, bon vin, etc., malgré les protestations des habitants.
Hier soir comme nous prenions notre repas, deux de ses bandits armés sont entrés chez nous au 2ème étage, le café du rez-de-chaussée étant fermé. Ils cherchaient le patron pour avoir de la bière, enfin ils ont encore été corrects mais il est probable que si nous n'avions pas été là nous aurions été cambriolés. Chez Monsieur Croubat ils ont pris 60.000 F et bien d'autres choses malgré ses protestations. Comme en 1940, on ne sonne plus d'alertes.

La nuit du 5 au 6 septembre 1944,
comme les précédentes était très claire, la canonnade a duré toute la nuit cependant par moment le calme était complet. On distingue maintenant très bien le départ et l'arrivée des obus alliés et vers minuit pour la première fois depuis 1918 j'ai entendu le sifflement des obus, c'était la batterie allemande du glacis de Bouxières qui tirait dans la direction de Saizerais.
Presque toute la population du faubourg est allée coucher au village, au bois, à la plaine ou dans les abris de l'usine. Ma famille est allée dans un abri de l'usine, mais moi j'ai couché dans mon lit, c'était peut-être imprudent.
Au réveil j'apprends que les alliés seraient à Rotterdam et Strasbourg et ici tout près à Nancy, Gondreville, Saizerais et Belleville. Mais les boches sont toujours là et rien n'indique leur départ, mais partiront-ils ? Ce n’est plus guère sûr, ils seront sans doute contraints à capituler.
A 8h40 on entend une sirène vers Frouard et quelques avions font leur apparition dans le brouillard car le temps devient pluvieux. Vers 9h1/4 un avion seul observe longuement, il est mitraillé par les Allemands. Vers 10h00 ce même avion semblant régler le tir, une batterie alliée probablement installée vers Saizerais bombarde le Fond de la Vaux où se trouve des Allemands. Un obus tombe malheureusement dans les cités du Maroc blessant légèrement plusieurs personnes dont Mlle Acklinger que je vois emportée à l'hôpital blessée à la jambe. J'étais dans notre jardin près des cités et j'entendais tous les départs, sifflements et arrivées de ces obus qui tombaient pas loin de moi. J'ai rapporté un éclat comme souvenir.
A 11h1/2 j’ai assisté aux obsèques de Messieurs Georges et Bernard massacrés hier. Comme pour Mr Castelli hier pas d’office à l'Église, simplement absoute au cimetière où les corps étaient déposés et défense de se rassembler, ordre des Allemands. C'est un vrai supplice qu'a enduré Monsieur Georges avant d'être abattu.
Un sous-officier et deux soldats avaient au cours d'une perquisition trouvé un revolver chez lui, ils l'ont arrêté dans un abri, l'ont emmené devant chez lui et devant le monde pendant au moins 1h1/4 l'ont obligé à tenir les deux bras en l'air en lui disant en ricanant qu'il allait mourir. Quand n'y tenant plus il laissait tomber les bras sous la fatigue et l'émotion, malgré les supplications de sa femme et de la foule, ces bourreaux l'obligeaient sous la menace à les remettre en l'air. Il était père de trois petits enfants. Finalement ces bourreaux le poussèrent dans la cour de sa maison et l'abattirent de trois balles de revolver.
Pour Mr Bernard arrêté dans la rue par également un sous-officier et deux hommes, trouvé porteur d'un revolver, il fut poussé dans le café moderne, reçu d'abord un coup de poing en pleine figure et aussitôt fut abattu à coups de revolver. Il était aussi marié et père de plusieurs jeunes enfants.
Il pleut légèrement et la canonnade continue mais pas très violente. Quand seront nous délivrés ? C'est une question d'heures mais peut-être encore de jours. Enfin ils sont tout près mais c'est incroyable on ne peut savoir exactement où, car on n'a plus de communications avec Nancy ni les environs et c'est presque défendu de sortir de la ville et même par moment du faubourg au village.
Il n'y a plus d'enlèvement d'ordures, tous les tas d'ordures et les débris du bombardement sont entassés au bord des trottoirs. Plus de gaz, plus d'électricité, à peine de l'eau une fois par jour pendant quelques instants. Pour les vivres plutôt plus que d'habitude parce que les commerçants pour éviter le pillage par les Allemands vident leurs stocks. Néanmoins pas de vin, il faut croire qu'il n'y en a plus, on s'habitue à l'eau, car il n’y a presque plus de bière ni de limonade.

Le 7 septembre 1944,
13h00 : l'après-midi du 6 la canonnade a fait rage vers Toul et Pont-St-Vincent. Ici tout près presque rien, ni sur rive droite, ni sur rive gauche. Nous apprenons que les Américains ne sont nullement ni à Nancy, ni à Belleville, cela ne m'étonne pas car on raconte tellement de bobards et beaucoup de personnes comprennent mal la radio ou les conversations, ou les déforment à plaisir ou sans le vouloir.
Dans la soirée quelques rafales de mitrailleuses nous indiquent qu'ils ne sont cependant pas loin de nous entre Saizerais et Liverdun. A 19h40 combat sans résultat entre deux avions au-dessus de nous et très bas.
La nuit très claire a été presque calme, quelques coups de canon et un peu avant le jour quelques avions. La famille a couché en face chez nous au café du Casino dans la cave de Mr Tonnelier sur des lits de fortune, moi comme la veille j'ai couché dans mon lit.
C’est le trentième anniversaire de la naissance de notre regretté Alexandre. Nous assistons à une messe anniversaire à sa mémoire à la Chapelle de l'hospice à 7h00. Dès le début de la messe, le canon se met à tonner tout près. Cela nous rappelle sa naissance en 1914 au son du canon tout proche sous l'occupation allemande à Pont-à-Mousson alors que ces mêmes boches attaquaient la côte de Sainte-Geneviève sans pouvoir la prendre.
A la sortie de la messe nous apprenons que les alliés sont entrés à Pont-à-Mousson, à Besançon, à Chalon-sur-Saône et qu'ils sont bien à Strasbourg et en Hollande. Ici nous serions encerclés avec 75000 Allemands.
Les Russes libérant la Roumanie, seraient entrés en Yougo-Slavie et seraient à 100 km au-delà de Varsovie qui n'est cependant pas prise. La Finlande aurait capitulée et la Bulgarie rompu les relations avec l'Allemagne.
La bataille fait rage depuis 7h00 ici tout près. Les Américains car on croit que ce sont eux qui sont dans nos parages, doivent attaquer la forêt de l'avant-garde, ce n'est que sifflement d'obus, on entend les départs et les arrivées, le crépitement de la fusillade et le tac-tac sans arrêt des mitrailleuses. Ils avancent car un homme du village vient d'être blessé par une balle. Cela nous rappelle les combats de 1914-1915 au Bois-le-Prêtre que nous observions par la fenêtre de notre logement du 63 boulevard Ney à Pont-à-Mousson.

La matinée a été pluvieuse, on a pas vu un seul avion. Le temps se lève et on dit que les Américains sont à Liverdun et à l'Avant-Garde, cependant le combat a ralenti.

Le 8 septembre 1944,
7h00 : le combat a continué l'après-midi du 7 et a cessé à la tombée de la nuit. J'ai appris le soir que les Américains arrivaient à l'entrée de Belleville vers midi. Un avion américain a réglé le tir une partie de l'après-midi. A 20h00 un obus a éclaté sur la maison Lhommée rue des Jardins Fleuris, pas de victimes.
La nuit a été assez calme, canonnade intermittente et passage d'assez nombreux avions vers 2h00 et 4h00. Quelques mouvements de voitures allemandes dans les deux sens et deux tanks allant vers le village vers 5h00.
Ce matin 8, à 6h15 la canonnade reprend de plus belle. Je repère une batterie allemande derrière le château de Clévant au bord d'une haie, je voyais les flammes des départs. la nuit a été très claire.

Le 9 septembre 1944,
8h00 : la journée du 8 a été pluvieuse par moment. A plusieurs reprises il est passé des avions et un ou deux à certains moments réglaient le tir des Américains.
Le duel d'artillerie a duré toute la journée et vers 13h00 la bataille d'infanterie faisait rage. A deux reprises les alliés ont fait un feu terrible sur le bois de l'avant-garde. Malheureusement de l’infanterie Allemande circulant sur la route à plusieurs reprises a été repérée et les Américains ont bombardé les voies de communications principalement la route nationale, de 16h00 à 4h00 du matin.
Quelle nuit nous avons passé. Pour une fois je suis allé coucher à l'abri chez Mr Tonnelier avec ma famille. De nombreuses maisons ont été abîmées, la maison du coin de la rue des Jardins Fleuris juste en face chez nous a été incendiée complètement à 2h00. Huit ménages étaient dedans. J'étais là avec les pompiers et quelques rares personnes, toute la population étaient dans les abris. Pour comble de malheur les conduites étant fermées, on n'avait pas d’eau au début. Un obus aussi sur la maison circonvoisine sans trop de dégâts.
Monsieur Grandjean, Monsieur Metz et la petite Pierlot ont été tués, la petite Besançon mortellement blessée, elle vient de mourir, aussi plusieurs blessés dont Mme Grandjean et le petit Pierre.
La nuit était noire et pluvieuse. A cette heure-ci le calme règne. Les boches sont toujours là mais voilà déjà l'avion repéreur américain. Madame Viant blessée la nuit du 3 est morte à l’hôpital de Nancy. Voilà déjà le canon.

 

Destruction du pont de Custines

Destruction du pont de Custines
(Collection ©Jean-Luc GOURET)

 

Le 10 septembre 1944,
9h00 : la journée du 9 a été assez belle et le canon a tonné toute la journée. Les Boches ont fait sauter 4 maisons dont l'ouvroir Saint-louis route de Liverdun. Les Américains bombardent toujours la forêt de l'avant-garde mais maintenant aussi la forêt de Haye vers Frouard, Champigneulles. Quelques rafales de mitrailleuses vers 9h00. A part cela pas de combat d'infanterie.
Un ou deux avions de reconnaissance ont réglé le tir toute la journée. Malheureusement le bombardement de Pompey a repris de 12h30 à 21h00. Plusieurs maisons ont été encore abîmées surtout vers le pont, mais pas de victimes. Tout le monde reste dans les abris jour et nuit, quelle vie. Il est défendu de sortir et il n'y a plus de ravitaillement. Les Allemands ne laissent plus circuler, ils ont tout pris : voitures, chevaux, charrettes, vélos, etc. Il n'y a plus de farine alors plus de pain et même plus d'eau, elle est fermée. Il faut vivre avec les réserves.
Dans les deux jours une centaine d'obus au moins sont tombés ici, une seule pièce tire, un coup quelquefois tous les l/4 d'heure ou plus, d'autres fois quelques obus coup sur coup. la nuit à part la canonnade a été calme.

 

Ouvroir Saint-Louis avant sa destruction

L'ouvroir Saint-Louis avant sa destruction.
(Collection ©Jean-Luc GOURET, image CPA retouchée)

Le 10 septembre 1944,
Ce matin les boches sont toujours là et la canonnade intermittente, un avion règle le tir depuis le jour. A 9h40 une vague d'avions passe et bombarde du côté de Custines, nous apercevons la fumée au bout de la rue de Metz. Peu après elle bombarde au Fort de Frouard.
11h30, nous venons de subir un violent bombardement par avions. Il y a beaucoup de dégâts surtout aux cités Saint-Euchaire où il y a malheureusement beaucoup de victimes. Les ponts étaient probablement visés, celui d'ici et celui de Custines qui a du aussi être bombardé. Une vingtaine de personnes sont ensevelies dans une cave de la Cité que je viens de voir écroulée et pas un cri, sont-ils morts ou vivants ?
13h00, il y aurait 8 personnes d'ensevelies dans une cave, 6 dans une autre et probablement une dans une troisième, tous aux Cités et encore 7 ou 8 au Chalet Navarre près du pont. Les travaux de déblaiement et de sauvetage sont en cours. Ce coup ci ils n'ont pas raté le pont. Je viens de le voir, la partie Nord est détruite mais on dirait qu'un tremblement de terre a passé, toutes les maisons de Pompey aux abords du pont sont détruites, c'est un vrai désastre. Le pont de Custines est détruit aussi mais on me dit que ce sont les Allemands qui l'ont détruit eux-mêmes hier.
D'après ce qu'on dit, les Américains approchent. Ils seront sans doute là dans la soirée. Les quelques Allemands qui restent seront obligés de se rendre à moins qu’ils ne passent la Moselle à la nage ou en barques mais ils les ont presque toutes détruites.
Il est probable que nous ne serons plus bombardé par les Américains mais nous le seront sans doute encore par les Allemands.
17h00, on a retiré actuellement cinq cadavres des caves écroulées. Les avions n'ont pas arrêté de nous survoler depuis le matin. La mitrailleuse crépite en ce moment au bord du bois, c'est sans doute la dernière résistance Allemande dans ce secteur. Tout à l'heure on a vu quelques soldats allemands sans armes, comme les nôtres en 1940, ils attendaient d'être fait prisonniers.
Les Allemands vont achever de faire sauter le pont. Ils préviendront par trois coups de fusils. Il parait que Custines a écopé aussi le matin et qu'il y a des incendies. Pauvre Marie-Louise et Jean-Marie, pourvu qu'ils soient sains et saufs. Nous avions vu la fumée de ce côté et je l'aperçois encore. Les Américains sont aux abords de Pompey. On leur a causé ; une femme a même embrassé le premier qu'elle a vu.
Voilà les Allemands qui s'apprêtent à résister devant chez nous ou à se rendre. Non, ils veulent résister, ils se mettent en position de tir contre les maisons, empêchent de sortir et font arrêter les travaux de sauvetage. Nous nous rappelleront de ce dimanche 10 Septembre 1944, comme à Xeuilley le 16 Mai 1940 nous avons échappé à la mort de près.

 

à droite le chalet Navarre en ruine

à droite le chalet Navarre en ruine
(collection ©Alain MARIOTTE)

Le 11 septembre 1944,
9h00 : la soirée du 10 s'est achevée dans le calme. Nous avons couchés chez Mr Tonnelier. Avant de me coucher j'ai voulu voir ce qui se passait, les Allemands étaient toujours en position de tir devant chez nous. L'un m'a menacé de son fusil en me faisant signe de m'en aller. La journée avait été très belle, la nuit aussi mais noire. La nuit écoulée a été noire mais calme, à peine quelques coups de canon au loin. Nous avons attendu en vain que le pont saute à nouveau.
Ce matin, l'avion de reconnaissance américain nous a réveillés. Les Boches n'étaient plus devant chez nous, mais ils étaient devant la gare. Nous voilà encore dans la même situation ; serons-nous délivrés aujourd'hui ? C'est la question que tout le monde se pose. Il est probable qu'il y aura bataille de rues dans la journée. Hier soir des Américains sont venus au village et à l'usine mais sont repartis.
On vient d'évacuer un blessé de Custines, on dit qu'il y a une vingtaine de morts là- bas, place des Halles et rue des Pêcheurs.
On vient de dire que Mr Aigle venait d'être tué par les Allemands parce qu’il était en barque sur la Moselle.
Voilà les Allemands qui tirent au fusil et à la mitrailleuse sur l'avion qui repère. Trois morts retirés des décombres passent sur des civières. Les Allemands ont détruits hier des installations à l'usine.
Et depuis plusieurs jours nous sommes absolument sans nouvelles de l'extérieur. On ne sait pas où sont les alliés ni en France, Belgique, Hollande, Italie, Pologne, etc . On ne sait même pas ce qui se passe tout près.
Pour la première fois nous venons de déjeuner sans pain. Quand en aurons-nous ?

 

Pompey bombardée

Pompey bombardée

Le 15 septembre 1944,
18h30 : la journée du 11 a été belle et l'activité aérienne assez grande. Assez fort bombardement par canons sur les abords de Frouard. On pense qu'il y a au moins 25 morts du bombardement du 10. Pour ma part j'ai retiré avec d'autres personnes, Mr et Mme Fontaine et un de leurs enfants. On doit les mettre dans une fosse commune. Vu la proximité du pont, les Allemands empêchent de retirer les derniers cadavres. Il parait qu'à Custines il y a 27 morts.
Vers 18h30 l'ordre est donné d’évacuer tout le monde en direction de Nancy sous peine d'être fusillé après cette heure. Presque tout le monde part. La famille Tonnelier et nous se cachons dans leur cave (9 personnes). La nuit est calme à peine quelques coups de canon. Nous sommes réveillés par des coups de fusils tout près et entendons des cris. C'était Mr Laurent qui était tué et Mr Révérend blessé.

Le 12 septembre 1944,
La journée est belle et calme mais nous n'osons sortir. A 13h00 la soldatesque Teutonne enfonce la devanture de Mr Tonnelier mais se contente de demander à boire et s'en va naturellement sans payer. A 16h45 deux sales Boches nous découvrent dans la cave et nous somment de partir immédiatement vers Nancy. Obligés de s'exécuter, accompagnés par eux jusqu'au pont qui avait sauté nous le franchissons à 17h00. Les matériaux ayant obstrué les deux arches sautées, on pouvait passer sur les déblais et au moyen d'échelles, comme les fantassins ennemis, nous avons remontés sur la partie intacte.
A 20h15 nous arrivions à Nancy au 85 de la rue de Metz dans le château du Comte Walesky où nous avons été hébergés par les soins du Secours National. Pendant tout le trajet nous avons assisté à un violent bombardement aérien de la forêt de Haye. la nuit a été assez agitée et belle.

 

Le pont sur la Moselle de Pompey à Frouard

Le pont sur la Moselle de Pompey à Frouard
(Collection ©Jean-Luc GOURET)

 

Le 13 septembre 1944,
Le beau temps au réveil et le canon vers Lunéville et la forêt de Haye. Activité aérienne toute la journée. Nous touchons enfin à Nancy un peu de pain, 150 g par jour, nous en avions perdu le goût, mais nous n'avons guère plus de nouvelles qu'à Pompey. Nuit du 13 au 14, calme et pluvieuse.

Le 14 septembre 1944,
vers 5h30 une violente explosion nous réveille. C'était un pont sur le canal qui venait de sauter tout près, c'était le début de nombreuses destructions à Nancy, entre autre les moulins Vilgrain mais aussi le signal de la fuite de la horde Teutonne.
Vers 9h00 la pluie a cessé et j'ai appris que le pont de Pompey avait achevé de sauter, que les Boches avaient quitté Pompey, que les Américains étaient à Faulx, Nomeny, Bosserville et Neufchâteau. les Allemands quittaient Nancy, à 15h10 ils faisaient sauter le grand pont d'Essey et à la nuit tombante ceux de Malzéville et Champigneulles.
A 15h00 étant devant le pont-levis du canal rue Sainte-Catherine qui venait de sauter, je vois la foule qui depuis le matin était en effervescence, faire prisonnier un Allemand voleur comme ils le sont presque tous, qui voulait s'emparer d'un vélo pour se sauver plus vite. C'était le début, à partir de ce moment tous les Allemands isolés ou en petits groupes sont fait prisonniers. Pour 15h00 toute la partie sud de la ville jusqu'à la rue Jean Lamour était libérée. Vers 17h00 il ne restait plus que quelques Allemands de l'autre côté du canal pour les dernières destructions. la journée a été excessivement calme, ni avions, ni canonnade.

Le 15 septembre 1944,
avec Mrs Tonnelier père et fils, je quitte Nancy à 7h30, nous passons le canal à Frouard sur l'écluse de Clévant et la Moselle sur des planches jetées sur le pont des Boches détruit. A 9h20 nous étions chez nous tous les trois. les Boches n'avaient pas entrés chez nous mais ils cherchaient à boire les bonnes bouteilles et avaient enfoncé les portes de notre cave et de notre écurie. Ils n'avaient même pas pris de lapins mais tous les jeunes étaient crevés de faim. Enfin ils ne nous ont pas volé grand chose, heureusement qu'ils n'en ont pas eu le temps.
A 15h00 je vois le premier Américain, un jeune homme en auto. La foule l'entoure (il y a déjà beaucoup de monde de rentré), on l'embrasse. Barbier ouvre son café à cette occasion et vend beaucoup de demis, je lui donne ma carte militaire des environs que je conservais depuis le régiment et je remonte mettre le drapeau tricolore à la fenêtre, c'était le premier à Pompey.
Aussitôt beaucoup de drapeaux sont apparus aux fenêtres suivant mon exemple.
A 19h10, je vois une quinzaine de fantassins américains en tirailleurs rasant les maisons car il y a encore des Allemands de l'autre côté de la Meurthe et l'on tiraille au-dessus de cette rivière d'ici à Nancy surtout près de Champigneulles.
Le soir grande activité aérienne. Les Américains mitraillent vers Custines où il y a encore une batterie Boche à ce que l'on me dit. Il n'y a plus un seul avion Allemand depuis longtemps, la fameuse Lutwaffe a disparu.

La nuit du 15 au 16 septembre 1944,
le canon a encore pas mal tonné, même des coups de fusils tout près.

Le 16 septembre 1944,
au réveil, temps brumeux. Je vois 3 Américains en patrouille et beaucoup d'hommes de Frouard. Ils racontent que hier soir une vingtaine d'Allemands repassant la Meurthe sont venus à Frouard où il n'y a pas encore d'Américains et sous prétexte de représailles ont mis le feu aux cités de Montataire.
La journée a été brumeuse et pluvieuse. Aussi il pleut dans presque toutes les maisons qui ne sont pas démolies, car les toitures ont beaucoup de tuiles cassées. J'ai été toute la matinée sur la toiture par la pluie pour éviter de graves dégâts car il commençait à tomber de l'eau sur les lits. N'ayant pas de tuiles j'ai pris les deux rangs du bord pour boucher les trous au-dessus des appartements.
Monseigneur Fleury, évêque de Nancy, est venu malgré le temps nous visiter le 16 à 16h00, heureusement car aujourd'hui 17 c’est un vrai déluge.
La famille Tonnelier et la nôtre devait rentrer hier, mais nous les avons attendues en vain. Toute la journée il y a eu rafales de mitrailleuses et coups de fusils d'ici à Nancy et le soir des obus sur Frouard où il y a eu 2 morts et 4 blessés. Aussi nous pensons qu'ils n'ont pas osé se mettre en route ou on retourné.
Nous commençons à voir circuler les Américains comme la veille. Hier soir de nombreux avions ont mitraillé les environs de Custines, c'était impressionnant de les voir piquer. Les Boches sont toujours à Custines où la famille Henry, Jean-Marie, Marie-Louise sont sains et saufs à ce que l'on m'a dit. Pas de nouvelles de Norroy.
Les Américains en nombre considérable auraient passé la Moselle à Dieulouard et la Meurthe à Nancy, aussi nous espérons que les Boches qui sont en face de l'autre côté de la Meurthe et de la Moselle auront bientôt cessé de nous canarder.
Les F.F.I. de Pompey organisés et armés de fusils, fusils-mitrailleurs, mitraillettes, revolvers, etc., pris aux Boches ou abandonnés, échangent des coups de feu avec eux au-dessus des rivières, patrouillent en ville pour éviter le pillage, de concert avec la gendarmerie, et procédant aux arrestations des mauvais Français qui ont dénoncé les patriotes qui ont été arrêtés ou massacrés comme c'est le cas ici, et des collaborateurs notoires. Ici Olry et plusieurs Algériens ont été arrêtés.
Il a plu toute la nuit et la canonnade a fait rage dans la direction de Nancy et ici tout près seulement quelque coups. Encore quelques coups de mitrailleuses au réveil et le calme depuis sans doute à cause de la pluie qui tombe sans arrêt.
Nous avons attendu en vain nos familles toute la journée, le mauvais temps les a empêchées sans doute de revenir car à peine si l'on a entendu le canon. Il paraît que les Américains sont sur le plateau de Malzéville.

Le 18 septembre 1944,
8h00 : la nuit très noire a encore été en partie pluvieuse par moment le canon tonnait encore assez fort. Il m'a semblé que les Américains tiraient de la forêt de Haye en direction de la vallée de l'Amezule. Ce matin le temps est couvert et l'on entend quelques coups de canon au loin, mais ici rien. Les hordes Teutonnes, modernes Huns d'Attila ont peut-être quitté les bords de la Meurthe et de la Moselle.
Que la vie est donc triste ici dans les ruines. Les rues sont pleines de décombres et rien pour les enlever, pas d'eau à part celle de quelques puits, pas de gaz, pas d'électricité, pas de journaux, pas de lettres, aucune nouvelles, mais surtout pas de ravitaillement et quand en aurons-nous ? A défaut de pain on mange les quelques biscuits que l'on conservait précieusement et on se nourrit de légumes et de fruits et de quelques conserves et on boit de l'eau de puits.

Le 19 septembre 1944,
10h00 : la journée du 18 a été brumeuse et la nuit écoulée très noire. le canon a tonné presque sans arrêt surtout la nuit et pas bien loin.
Hier dans la soirée étant au champ, j'ai entendu un combat d'infanterie aux abords de Custines. les rafales de mitrailleuses et la fusillade faisaient rage dans la côte au ras du village peut-être même dans celui-ci. J'entendais les balles siffler, les obus américains tombaient comme la grêle sur les bois au-dessus et dans la côte et aussi du côté de Nancy. A midi j'en avais déjà vu 4 éclater au bord du bois entre Custines et Malleloy.
Ce matin, le canon tonne toujours et le temps est brumeux. A l'usine on vient d'organiser des équipes de déblaiement pour la ville. On vient de rouvrir l'eau en ville.
Hier 18, nos familles sont enfin revenues. Elles étaient ici à 10h30 après avoir passé la Moselle en barque. Elles ont assisté à Nancy le 15 à l'arrivée des Américains et à la punition des mauvaises Françaises qui ont eu des relations avec les Boches. Devant la foule on leur a coupé les cheveux à ras et fait une marque sur la figure. le 16 en revenant ici, elles ont au pont Biais de Champigneulles été prises sous le feu des mitrailleuses et des fusils et on les a obligées à repartir à Nancy. Le 17, la pluie qui a tombé à verse toute la journée les a empêchées de partir.
Hier est paru le 1er numéro de la République de l'Est libéré. On y trouve la composition du nouveau gouvernement de la République enfin revenue. Il y a le Général De Gaulle comme président du conseil et comme ministres, Messieurs Jenneney, Teitgen, De Menthon, Bidault, Vittel, Jacquinot, Grenier, Lefebvre, Mendes-France, Parodi, Tixier, Billoux, Tanguy-Prigent, Capitan, Binet, Général Catroux et le Triequer. Monsieur Prouvé est nommé maire de Nancy, Mr Chailly-Bert commissaire de la République pour la Meurthe-et-Moselle, la Meuse et les Vosges, Mr Blache Préfet de M-et-M, le lieutenant colonel Boutillot intendant de Police.
Les dernières nouvelles que nous avions eu sur l'avance alliée étaient un peu exagérées. Rotterdam et Strasbourg même Aix-la-Chapelle ne sont pas encore occupées. Cependant cette dernière ville est dépassée et aux 3/4 encerclée et la ligne Siegfried est entamée aux environs.
La frontière Allemande a été franchie en un 2ème point. Après avoir libéré la ville de Luxembourg, les alliés ont pénétré en face en Allemagne sur 5 km de profondeur. la frontière hollandaise a été franchie aux environs de Hulst ; la profondeur d'après le communiqué est de 4 km. Mais on se bat encore en France et en Belgique, il y a encore des îlots de résistance le long des côtes. 11309 prisonniers ont été fait au Havre.
Ici c'est la 3ème armée américaine débarquée en Bretagne et Normandie qui opère. Elle a fait sa jonction avec la 7ème armée débarquée dans le midi, aux environs de Belfort. 82000 prisonniers dont 49500 par les Français ont été fait au cours des batailles du Midi.
De nombreuses affiches viennent d'être posées, elles sont signées du colonel de Chevigné commandant la 20ème région.
En Italie l'avance continue mais lentement.
Les Russes sont entrés à Sofia, à Praga faubourg de Varsovie, ont libéré les 4/5 de la Slovaquie et fait leur jonction avec les patriotes Yougo-Slaves et Tchèques. Ils se battent encore en Roumanie. La Grèce est à peu près isolée.

Le 20 septembre 1944,
11h00 : la journée d’hier et la nuit écoulée ont été assez calme, quelques coups de canon de temps en temps, rien vers Custines qui serait peut-être libérée. Toujours nuit noire et temps couvert.
L'artillerie américaine doit tirer sur la côte d'Amance même au-delà. Je viens de lire le communiqué qui pour la 1ère fois et affiché contre un arbre devant le cimetière. C'était celui du 18. Il dit que Metz n'est pas encore prise mais presque encerclée, que de violents combats se déroulent dans la région de Pont-à-Mousson, que Lunéville est dépassée, que la dernière armée Allemande en France dans le Midi s'est rendue. Il y avait encore 20.000 hommes. Que la ligne Siegfried est enfoncée en deux endroits, que les alliés sont à 40 km de Cologne, que Boulogne est attaquée, que plus de 1000 avions ont jeté de nombreuses troupes en Hollande sur les derrières de l'ennemi, qu’en Italie l'avance continue et que les Russes préparent une formidable offensive.
Le nombre des morts à Pompey s'élève à 45 depuis le 3 septembre, tués par le bombardement canon et avion, par explosion des ponts, et tués par fusils ou massacrés, ou morts des suites de leurs blessures.
La journée d’hier a été nuageuse ce qui n’a pas empêché l'activité aérienne qui a été assez grande. L’après-midi les avions comme d'habitude réglant le tir, les Américains ont effectué un violent bombardement des hauteurs dominant Custines et Pompey sur la rive droite. Il m'a semblé que Custines devait être libéré car les quelques coups de fusils que j'ai entendu semblaient être dans les bois. Comme réponse les Boches ont envoyé quelques obus sur Pompey tuant deux femmes et blessant une dizaine de personnes.
Vers 8h00 aujourd'hui malgré le brouillard épais, ils ont recommencé et ont tué le garde-champêtre Blettner près du pont. Il est probable qu'ils ont remarqué des rassemblements à l'entrée hier car les Américains y étaient assez nombreux prenant des dispositions pour le reconstruire.
Les F.F.I. continuent à monter la garde en accord avec les Américains au bord de la Moselle et de la Meurthe. Nous les voyons partir en ordre comme des soldats mais ils sont en civil, ils ont seulement un brassard.
Ces cochons de Boches m'ont pris une paire de bottines toute neuve, une boite de biscuits, etc. Une personne qui vient de Custines libéré nous dit que toute la famille Henry est en bonne santé.

Le 22 septembre 1944,
11h00 : hier après-midi, beau temps. Ce matin fort brouillard et la nuit calme et noire ; à peine quelques coups de canons. Hier après-midi comme les jours précédents, bombardement des positions allemandes autour de Custines, particulièrement le soir des environs de Clévant dont le château semble détruit ; les avions réglant toujours le tir. Aucune nouvelles des opérations.
Nous avons maintenant 200 g de pain par jour et à Pompey. Les jours précédents, il fallait aller à Frouard chercher nos 150 g.

Le 23 septembre 1944,
9h00 : l'après-midi du 22 a été très belle, aussi la bataille a repris de plus belle. Elle semble s'éloigner et se situer vers Faulx, peut-être Leyr, Bouxières-aux-Chênes, c'est-à-dire les hauteurs du grand Couronné de Nancy. l'aviation a observé et bombardé sans arrêt. Cependant d'après des réfugiés fuyant Custines, il y avait encore des Allemands hier à Custines et Malleloy.
Nous avons eu hier après-midi la République du 21. On y lit que Boulogne et Brest ont été pris, que la ligne Siegfried est percée en deux nouveaux points, que l'avance est grande en Hollande où la jonction est faite entre les troupes débarquées par avions et la 2ème armée Anglaise.
Ici toujours de vifs combats et prise de Gerbéviller et Fougerolles, et Lans-le-Bourg dans les Alpes.
L'armistice sur à peu près les bases de 1940 a été signé le 19 entre la Russie et la Finlande. Les Russes sont à 8 km de Varsovie, arrivent à la frontière Grecque et progressent partout.
En Italie légère avance ainsi qu'en Extrême-Orient.

Hier à 13h00 et 15h00, les Boches nous ont envoyé 6 obus tout près de chez nous. Il y a eu 4 blessés et ils nous ont fait passer une drôle de nuit. A 22h00 ils nous on envoyé une de ces rafales et ont continué jusqu'à vers 3h00, et une dernière à 4h30. A part moi, tout le monde de la maison s'est sauvé à la cave et le canon n'a pas arrêté de tonner.
Au réveil le temps est pluvieux et à cette heure le calme règne.

Le 24 septembre 1944,
11h00 : Il a plu toute la journée d’hier et à part une courte mais violente canonnade à 16h00 dans la direction de Nomeny-Metz, c'était le calme, et la cause, les Allemands avaient évacué la rive droite. Des personnes venant de Bouxières-aux-Dames et Custines avaient apporté la nouvelle dans la matinée. Ils nous avaient bombardés en signe d'adieu.
Le rôle des F.F.I. est terminé ici. Et nous voilà tranquilles, nous pourrons dormir dans nos lits car il n'y a plus que leur aviation à craindre, et on ne la voit plus. Nous avons maintenant le journal tous les jours, cependant il ne paraîtra pas le lundi, il n'y a qu'une page, coûte 1.50 F et a un format de 0,45 x 0,60.
La lutte est toujours vive dans le secteur de Lorraine où Épinal est atteint.
En Hollande, le Rhin est atteint au delà de Nimègue.
Les Russes sont entrés à Tallin capitale de l'Estonie. En Italie et en Extrême-Orient légère avance.

La nuit le canon a tonné assez fort au loin. Ce matin temps légèrement pluvieux et c'est le calme.

Le 25 septembre 1944,
9h30 : hier il a plu presque toute la journée et malgré cela le canon a encore tonné fort du côté de Metz-Nomeny. La nuit également, il n'a cessé de tonner. Hier soir il est passé de nombreux avions.
Nous deux Jean nous sommes allés à Custines hier. Nous avons eu la joie de trouver Jean-Marie et Marie-Louise en bonne santé ainsi que Mr et Mme Henry. Tous leurs carreaux sont brisés mais leur mobilier est intact. Custines est comme Pompey fortement abîmé. Ils ont vu la mort de près le 10. La maison en face à été pulvérisée, ils étaient dans leur cave à moins de 15 m. Ils ont couché 3 semaines dans une cave au Vieux Château. Pauvre Jean-Marie, si jeune, aller coucher à la cave. Son cher père y avait couché aussi à Nancy en 1917-1918 et il était encore plus jeune, malgré cela il s'en rappelait.
Ce matin le temps est encore pluvieux et c'est le calme.

Le 27 septembre 1944,
13h00 : il a plu presque sans arrêt les 25 et 26, malgré cela le canon tonne de temps en temps jour et nuit. De grosses pièces américaines se trouvant du côté de Marbache tirent toujours vers la Seille.

Le 25 septembre 1944,
à 11h00 dans la pluie et le brouillard il est passé de nombreux avions. Officiellement Leyr a été pris et le nettoyage des forêts de Faulx et de Champenoux continue.
Les Généraux De Gaulle, Juin et Leclerc sont venus dans la soirée du 25 à Nancy.
L'avance continue sur tous les fronts. la pluie a cessé mais le temps est couvert.

Du 27 à la fin septembre 1944,
l'avance continue mais lentement sur tous les fronts. En Hollande les alliés ont du quitter Arheim mais tiennent bien Nimègue, Aix-la-Chapelle et Metz ne sont toujours pas prises.
Ici le communiqué nous a annoncé la prise de Port sur seille et des combats près de Gravelotte, dans les forêts de Gremecey et de Parroy. Charmes et Épinal sont prises mais Belfort ne doit pas l'être.
En Italie, Rimini est prise et les alliés tiennent les hautes vallées qui descendent vers la plaine du Pô. Les Russes libérant les états Baltes sont arrivés près de Riga où ils ont atteints le golfe du même nom. Ils approchent de la Hongrie et de la Tchéco-Slovaquie. Cettigné, capitale du Monténégro a été libérée. Les alliés ont débarqué en Albanie le 27. Les Américains se sont emparés de nouvelles îles dans le Pacifique.
Ici nous travaillons à l'usine pour la remise en marche depuis le 28.
Le 27 des voitures américaines passaient déjà sur le pont de Custines. De nouveau aujourd'hui nous avons encore la pluie. Le canon tonne toujours jour et nuit et pas bien loin, de temps en temps on entend même les mitrailleuses

Le 28 septembre 1944,
une vraie bataille a fait rage toute la journée vers Belleau, Moivrons et Leyr. l'aviation est toujours active.

Le 29 septembre,
à 22h30, la D.C.A. américaine a tiré sur un ou plusieurs avions allemands. La plupart des journaux reparaissent depuis le 27. Comme avant la guerre nous lisons l'Éclair de l'Est, format de 2 pages 0,30m x 0,45m. C'est notre dernier jour avec 150 g de pain, demain nous en toucherons 300 g. Nous avons eu hier 150 g de viande au lieu de 90 ou 120. Aujourd'hui plusieurs cafés ayant de la bière rouvrent leurs portes.


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OCTOBRE 1944


Du 1er au 8 octobre 1944,
la bataille n'a pas cessé dans les environs c'est-à-dire vers Belleau, Sivry, Moivrons, etc. Elle a été particulièrement violente jour et nuit les 1er et 2 et la nuit écoulée et à cette heure 9h00 elle continue, toutes les armes tirent sans arrêt. L’aviation malgré le mauvais temps qui a duré presque toute la semaine a été assez active surtout dans la soirée. A plusieurs reprises nous avons vu les avions piquer et avons entendu de violents bombardements et vu d'énormes colonnes de fumée.

Le 3 octobre 1944,
vers 12h30 il est passé allant bombarder l'Allemagne d'innombrables avions. Ils sont repassés environ 1h00 après. Depuis hier le temps semble se remettre au beau.
Sur tous les fronts pas beaucoup de changement. L'avance continue lentement. Calais a été prise le 2, mais toujours le point noir des relations Russo-Polonaises. Varsovie qui était aux mains des patriotes Polonais depuis plus de deux mois a été reprise par les Boches bien que les Russes soient à proximité de la ville. En Grèce le Péloponnèse a été libéré.
L'aviation allemande qui n'ose plus se montrer de jour ici, vient quelquefois nous rendre visite la nuit et est prise à partie par la D.C.A. américaine.

Le 7 octobre 1944,
la circulation sans passeport est reprise à Pompey sur le pont de la route. Les Américains ne badinent pas avec la circulation, il faut des passeports pour aller de l'autre côté de la Meurthe et de la Moselle et encore il faut des motifs très sérieux.
Ils empêchent de passer sur le pont de Custines à part le ravitaillement. Alors il faut passer en barque si on trouve et même ils empêchent. Nous pensons que c'est à cause de la proximité du front, sans doute que quand les boches seront plus loin on circulera comme on voudra. Enfin pour le moment c'est embêtant, toujours pas de facteur, la poste ne marche pas encore, toujours sans nouvelles de Norroy. Il parait qu'il faut un passeport pour y aller et il faut le demander à Dieulouard ou à Toul.
Un train de matériel américain est arrivé de Paris à Nancy mais en faisant de grands détours. A quand du ravitaillement car les ponts sont sautés dans presque toute la France et ce qui prime c'est la conduite de la guerre ce qui est logique. Tant pis pour les civils nous continuons à nous mettre la ceinture nous avions perdu le goût du café et de bien d'autre chose maintenant nous avons perdu le goût du vin et depuis le 6 les journaux sont de nouveau à petit format et à une feuille de 0,30m x 0,45m. La République de l'Est libérée a repris ce jour son ancien nom d'Est Républicain.

Le 8 octobre 1944,
17h00, la journée a été belle, la bataille semble s'être un peu calmée, cependant on voit encore en ce moment de grandes fumées vers Sivry ou Moivrons. Le même fait s'est encore produit à midi. Le communiqué dit que l'ennemi a repris un peu de terrain vers Sivry.
Tous les morts de septembre victimes de la guerre ayant été enterrés sans cérémonie à l'Église, les autres aussi du reste, un service solennel a eu lieu ce-jour à 10h15 à l'Église à leur mémoire. Les dernières victimes des bombardements viennent d'être retirées des décombres. L’électricité a été remise le 7.
La Hongrie est envahie. Du 8 au 15 octobre, l'avance continue partout, elle est toujours lente en Italie cependant les alliés approchent de Bologne.
Sur le front de l'Est les Russes sont entrés à Riga capitale de la Lettonie et sont enfin entrés en Prusse Orientale car ils n'y étaient pas encore malgré les bruits qui avaient couru il y a plusieurs mois. Ils avancent vite en Hongrie et en Yougo-Slavie. En Grèce, Athènes est libérée.

Ici le 9 octobre 1944,
la bataille a fait rage toute la journée, toujours du côté de Belleau, Sivry, etc. mais elle s'éloignait. Les Américains avaient attaqué le 8 au matin, fait environ 700 prisonniers et repoussé l'ennemi.
La lutte continuant le 9, les Américains avaient pris les monts St Jean et Toulon.
Les boches avaient dû repasser la Seille, laissant dans les deux jours environ 1700 prisonniers. Les batteries installées près de Custines ont tiré leurs dernières salves le 10 et maintenant à peine si l'on entend le canon.
Le mauvais temps a duré presque toute la semaine ce qui gêne beaucoup les opérations surtout l'aviation. Cependant à deux reprises il est passé de nombreux bombardiers. Nancy a été bombardée à plusieurs reprises à coup de canon.
Nous avons des nouvelles de Norroy et Yvonne y va en vélo. Tout le monde est en bonne santé dans la famille et pas beaucoup de dégâts dans le village. Marcel s'est engagé à Nancy au 26ème R.I. qui est reconstitué. Ici les F.F.I. comme partout ailleurs, s'engagent en grand nombre dans la nouvelle armée française. Ils continuent (ceux qui restent) à faire la police de concert avec les Américains, ils sont toujours armés.
Il est arrivé à Pompey le 1er train américain venant de Conflans mais toujours pas de trains de poste pour les civils ici.

Le 10 octobre 1944,
a passé ici une compagnie d'infanterie française venant de Nancy, c'était la première que l'on voyait depuis 1940. Les sections portaient des fanions, marqués Metz, Strasbourg, etc.

Du 15 au 22 octobre 1944,
la pluie n'a presque pas cessé, aussi la Moselle a débordé et le 20, le pont de la route miné par les eaux s'est effondré dans la partie qui n'avait pas été détruite mais qui avait dû être ébranlée par les explosions de 1940 et 1944.
En Italie l'avance est toujours lente. Les Américains ont débarqué dans l'île de Legte dans les Philippines. Les Russes ont déclenché une grande offensive de la Baltique à la Yougo-Slavie et progressent. Salonique a été évacuée par les Allemands le 18, Belgrade a été prise le 20 et Laguse le 21 par les alliés aidés des patriotes. Sur le front Ouest, l'avance est lente, les Allemands résistant farouchement, cependant Aix-la-Chapelle a été prise le 20 par les Américains qui y ont fait plus de 10.000 prisonniers.
Ici on entend toujours le canon mais faiblement. Les Allemands sont toujours à Nomeny et à Metz. Vu le mauvais temps l’aviation n'est guère active. Cependant la nuit du 19 au 20 par une nuit étoilée vers 22h30 et 1h00 nous avons été survolés assez longuement par des avions allemands. La D.C.A. américaine a ouvert un feu violent, aussi presque tout le monde s'est sauvé à l'abri y compris ma famille. Cependant moi je suis resté au balcon à regarder. C'était un vrai feu d'artifice, éclatement d'obus, fusées, etc. mais heureusement pas de bombardements
Le régent Horthy de Hongrie a demandé l'armistice le 16, mais aussitôt les Allemands ont formé un gouvernement à leur dévotion, n'empêche que c'est la scission en Hongrie.

Du 22 au 29 octobre 1944,
le temps a encore été pluvieux mais ce jour 28 il semble se remettre au beau.
L'avance alliée est toujours très lente en Italie. Sur le front de l'Est la lutte est acharnée en Prusse Orientale où les Russes progressent lentement. Ils progressent aussi en Tchéco-Slovaquie, Hongrie et Yougo-Slavie. En Albanie, Tirana la capitale a été occupée par les patriotes albanais.
Une grande bataille navale s'est déroulée dans les eaux des îles Philippines, commencée le 23, elle s'est terminée plusieurs jours après par la déroute de la flotte japonaise qui a eu de nombreux vaisseaux coulés ou avariés. les Américains eux aussi ont perdu plusieurs navires, ils ont encore débarqué dans l’île de Samar. Sur le front ouest pas grand changement, cependant en Hollande l'avance est assez sensible.

A peine si l'on entend le canon ici.

Le 26 octobre 1944,
le pont du chemin de fer de l'usine sur le canal a été remis en service.
Le gouvernement du général De Gaulle a enfin été reconnu par les alliés. Il y a maintenant la zone des armées, elle s'étend à l'Est des départements de la Seine inférieure, de l'Oise, de la Seine-et-Marne, de l'Yonne, de la Saône-et-Loire, du Rhône, de l'Ardèche et du Gard. Elle est sous le contrôle allié. Le reste de la France forme la zone de l'Intérieur sous le .contrôle français.

Le 30 octobre 1944,
le pont du chemin de fer était rétabli à voie unique sur Voie l et les trains américains commençaient à rouler de Conflans à Nancy, mais toujours rien pour les civils, ni trains, ni poste, pas plus de ravitaillement que du temps des Boches, et même interdiction de circuler au-delà de 6 km sans passeport et pour avoir un passeport il faut un motif très sérieux. Enfin c'est de petits inconvénients auprès de la délivrance et c'est à cause de la proximité du front.


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NOVEMBRE 1944


Du 29 octobre au 5 novembre 1944,
le temps a encore été un peu pluvieux. Ici c'est le calme. les Américains établissent un nouveau pont en amont de celui écroulé, à l'ancien emplacement où les Boches en avaient fait un provisoire.
L'avance est toujours lente en Italie et sur le front de l'Est. Cependant les Russes sont entrés à Budapest le 4 novembre (non, ils étaient seulement aux abords).
Ici le communiqué signale la prise d'Abaucourt et de Létricourt, celle de Baccarat et de Maizières-les-Metz. la Belgique est entièrement libérée, les 12.000 Allemands qui tenaient encore dans Zeebrugge ayant capitulés le 3.
En Hollande la libération des îles de l'estuaire de l'Escaut se poursuit. les Russes sont entrés en Norvège dans l'Extrême Nord.

Ici les F.F.I. sont licenciés.

Du 5 au 12 novembre 1944,
l'avance est toujours lente en Italie et sur le front de l'Est. Les journaux d'aujourd'hui disent que les Russes viennent de déclencher une grande offensive et percé le front Germano-Hongrois en deux endroits.
Ici il a plu presque toute la semaine et le 7 la pluie tombait à torrent par moment, aussi ce jour là, la Moselle a débordé et le 9 la crue atteignait son maximum habituel surprenant les Américains qui campaient sur ses bords et qui furent obligés d'abandonner leurs tentes. Ce matin 12 en plus de la pluie, la neige recouvre les hauteurs, c'est une vraie calamité en ce moment.

Le 5 novembre 1944,
une vive canonnade a eu lieu l'après-midi vers Nomeny et de nombreux avions de bombardement sont passés. A 23h30 violent tir de D.C.A. contre un avion ennemi.

Le 7 novembre 1944,
Roosevelt est réélu Président des États-Unis.

Le 8 novembre 1944,
vers 5h00 une violente canonnade vers Nomeny nous réveille, c'est le début de la grande offensive de la 3ème armée américaine commandée par le Général Patton. Nomeny et de nombreux villages ont été délivrés ce premier jour et l'avance continue à l'heure actuelle du Luxembourg au canal de la Marne au Rhin. Château-Salins, Delme, Vigny, Luppy, Koenigemacker sont atteints ou dépassés, le cercle se referme sur Metz.
Le temps a été assez beau, aussi on a vu quelques avions mais à 16h30 la pluie s'est encore mise à tomber.

Le 9 novembre 1944,
entre deux averses de 9h00 à 11h00, nous avons assisté par temps assez beau à un inoubliable spectacle. Ce n'était qu'avions de bombardement dans le ciel et des fusées vers Metz indiquaient les points à bombarder. Nous entendions les explosions et le sol tremblait, les vagues d’avions passaient sans arrêt au loin, jetaient leurs bombes et repassaient au-dessus de nous. Ce jour là le pont de la route étant heureusement terminé, les Américains passèrent dessus, mais il est encore interdit aux civils.
Depuis le 8 le canon n'a pas cessé de se faire entendre mais il s'éloigne et maintenant on l'entend à peine à cause de l’offensive. Le 8 vers 7h00 les Américains ont posé des affiches ordonnant à tout le monde de rentrer dans les maisons et défense de circuler en ville et sur les routes même pour le ravitaillement. Nous avons quitté le travail à l'usine les 8 et 9 à cause de cela.
Les affiches sont encore apposées mais malgré cela les Américains ont laissé circuler à partir du 9 au matin en ville et le 10 sur les routes.

Le 10 novembre 1944,
nous avons vu 5 camions de prisonniers Allemands. Le même jour, Monsieur Lepercq, ministre des finances est mort dans un accident d'auto.

Le 11 novembre 1944,
a été férié.

Du 12 au 23 novembre 1944,
le temps a encore été pluvieux, même le 15 nous avons eu une forte chute de neige, cela gêne considérablement l'offensive alliée. Nous avons eu seulement trois assez belles journées les 17, 18 et 19.

Le 14 novembre 1944,
ici, la circulation des civils a été enfin autorisée sur les ponts de la Moselle mais elle reste pour bien dire interdite sur les grandes routes. Cependant il ne faut plus de passeport sur la rive gauche de la Moselle et de la Meurthe.
Sont nommés ministre des finances : Monsieur Pleven, des colonies : Monsieur Giacobi, du ravitaillement : Monsieur Ramadier.

Le 21 novembre 1944,
à 19h30, la D.C.A. tire quelques salves contre un avion.
Sur tout le front Ouest, l'offensive alliée continue. Le port d'Anvers est complètement dégagé et en Hollande la Meuse est atteinte presque partout. En Allemagne on avance lentement.

Ici le 13 novembre 1944,
nous avons entendu une forte canonnade ainsi que le 17. Ce jour là nous avons vu passer l'après-midi une cinquantaine de bombardiers.

Le 18 novembre 1944,
les Américains pénètrent dans Metz.
Les Français attaquant dans la trouée de Belfort, entrent à Montbéliard.
Ce jour là nous voyons d'assez nombreux avions.

Le 19 novembre 1944,
Metz est encerclée. Allant à Morey avec Yvonne, nous apercevons de grands incendies à Metz ou aux environs et nous voyons dans des champs des cadavres de chevaux et de vaches tués par les obus ou les bombes et qui ne sont pas encore enterrés. Au cours de notre voyage l'après-midi d'innombrables avions venant de bombarder l'Allemagne nous survolent.
Dans la soirée les Français atteignaient le Rhin au Sud de Mulhouse.

Le 20 novembre 1944,
les Français entraient à Belfort, Altkirch et Dannemarie faisant plus de 10.000 prisonniers. De plus ils libéraient Gérardmer, Blamont, Badonviller.

Le 21 novembre 1944,
ils entraient à Mulhouse et jetaient un pont sur le Rhin sans indiquer l'endroit (pour le pont ce ne devait pas être vrai).

Le 22 novembre,
les Américains de la 7ème armée entraient à Sarrebourg et ceux de la 3ème avançaient en Sarre à l'Est de Thionville et abordaient un peu partout la ligne Maginot et la ligne Siegfried.

Aujourd'hui 23 novembre 1944,
le front part de la Sarre et passe à l'Est, en avant de Faulquemont, Albestroff, Insviller, Elvange, Hillimer où en 1938 nous avions cherché notre cher Alexandre, Freyhouse pour aboutir à la trouée de Saverne. Peut-être qu'à cette heure ci la tombe de notre cher fils est redevenue Française.
En Italie, Forli a été prise. Sur le front de l'Est les Russes semblent arrêté pour le moment aux abords de Budapest et a une quinzaine de kilomètres à l'intérieur de la Prusse Orientale. Rien de nouveau en Extrême-Orient.

Ici il reste encore quelques îlots de résistance à Metz et à Belfort. Il pleut toujours et la Moselle est très haute. Le ravitaillement est toujours aussi peu abondant, même moins de graisse, toujours ni vin, ni café, même aujourd'hui de la farine de seigle dans le pain.

Du 23 novembre au 3 décembre 1944,
pas grand changement en Italie, en Extrême-Orient ni au front de l'Est. Cependant les Russes sont à 150 km à l'ouest de Budapest qui n'est pas encore prise et les Yougo-Slaves sont arrivés à Trieste et viennent de pénétrer en Autriche.
Sur le front Ouest, le 23 à 18h00, les troupes françaises de la division Leclerc après avoir forcé la trouée de Saverne sont entrées à Strasbourg.

Le 24 novembre 1944,
en Hollande, Venlo était prise. Saint-Dié incendiée par les Boches avait été aussi délivrée le 23. Le Thillot, Saâles, Insming y avaient été le 25. Le 28 Saint-Avold y est à son tour, Haguenau et Sarreguemines le 29.

Le 27 novembre 1944,
vers 20h00, il en est passé d'innombrables avions allant bombarder Fribourg-en-Brisgau. Quelques forts tiennent encore à Metz, aussi nous entendons encore le canon mais sourdement.

Le 28 novembre 1944,
les Américains ont démonté les ponts métalliques sur la Moselle et le canal entre Custines et Marbache-Pompey, d'où grande gêne pour la population obligée à nouveau de passer la Moselle en barque et pour de nombreux mois.

Le 30 novembre 1944,
il a tonné sans arrêt toute la journée. Nous avons à nouveau du pain blanc, mais toujours 350 g


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DÉCEMBRE 1944


Le 2 décembre 1944,
les Américains entrent à Sarrelouis.
Nous avons le droit d'envoyer des cartes postales sans être illustrées, mais toujours pas de trains, cependant quelques tramways vont rouler à Nancy et jusqu'à Champigneulles à partir du 4.

Aujourd'hui 3 décembre 1944,
les alliés en Allemagne bordent la Roër sur 32 km, bordent la Sarre en plusieurs endroits et approchent de Sarrebruck. l'Alsace est en partie délivrée. Les alliés étant au Nord de Mulhouse et à Erstein au sud de Strasbourg, cependant les Allemands s'accrochent encore aux Vosges. Ils viennent en se retirant de faire sauter les ponts de Strasbourg qu'ils tenaient encore.
Ici à part quelques belles journées, le temps a encore été pluvieux aussi la Moselle a encore débordé et le 26 novembre elle avait atteint son maximum. C’est une vraie calamité pour les Alliés. Cependant à chaque accalmie de nombreux avions se montrent, même quelquefois par le mauvais temps.
Le général Leclerc de son vrai nom s'appelle de Hauteclocque.

Du 3 au 17 décembre 1944,
le temps a encore été pluvieux. La Moselle a débordé à nouveau le 13, mais aujourd'hui il semble se mettre enfin au beau.
Pas grand changement sur les fronts, cependant en Italie, Ravenne a été occupée par les alliés le 5, et les Russes viennent de pénétrer en Tchéco-Slovaquie.
Ici Sélestat a été prise le 3, Ribeauvillé le 5, Forbach le 8. Les alliés sont en Allemagne un peu partout cependant le Rhin n'est franchit nulle part et Wissembourg et Colmar ne sont pas encore prises. Les derniers forts de Metz se sont enfin rendus, le 8 ceux de Plappeville et du St Quentin et le 13 le fort Jeanne d’Arc.
Le général De Gaulle vient de rentrer d'un voyage à Moscou.
Des mouvements insurrectionnels ont eu lieu en Belgique et en Grèce, les troupes alliées ont dû intervenir.

Le 16 décembre 1944,
les Allemands ont attaqué par surprise la 1ère armée Américaine sur 80 km, de Montjoie à Echternach, ont enfoncé son front et ont envahi à nouveau une partie de la Belgique et du Luxembourg.

Du 17 décembre 1944 au 1er janvier 1945,
1945 la situation ne change guère en Italie. Les alliés ont cependant pris Fanza. Sur le front de l'Est les Russes occupent une partie de Budapest où l'on se bat avec acharnement.

Le 22 décembre 1944,
la pluie a enfin cessé, nous avons un peu de neige et le temps se met à la gelée, c'est enfin le beau temps avec quelques degrés en dessous de zéro.
L'aviation se montre active, il y a des jours où il passe de nombreux bombardiers alliés. La nuit nous avons quelquefois la visite d'avions Boches, la D.C.A. tire, ils ont jeté quelques bombes aux environs.

Le 26 décembre 1944,
les Allemands sont arrivés à 6 km de Namur et de Dinant mais là ils ont été arrêtés et ont commencé à reculer. La garnison de Bastogne encerclée depuis plus de 8 jours a été délivrée.
Le vent venant du Nord nous entendons distinctement le canon de cette grande bataille.

A Noël 1944 nous avons eu enfin la messe de minuit avec permission de rentrer pour 1h00 du matin.


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- 1945 -

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JANVIER 1945


Du 1er au 14 janvier 1945,
le temps reste à la gelée avec cependant moins de 10° en dessous de zéro et il y a environ 10 centimètres de neige. Certains jours nous voyons passer d'innombrables avions alliés et nous entendons le canon au loin.
Le saillant qu'avaient fait les Allemands en Belgique et au Luxembourg se rétrécit peu à peu. Les alliés ont repris l'initiative. De la Sarre à la Suisse, les Allemands se sont montrés agressifs et nous ont fait reculer par endroit, surtout vers Bitche. Ils ont repassé le Rhin au Nord et au Sud de Strasbourg et sont contenus assez difficilement. Ils occupent toujours en France avec plus de 100.000 hommes, Dunkerque, Lorient, Saint-Nazaire, la Rochelle et leurs environs ainsi que presque toutes les îles sur les côtes.
En Italie peu de changement. En Extrême-Orient les Américains ont réussi le 9 un grand débarquement dans île de Luçon aux Philippines. Plus de 700 navires et 2500 transports y ont pris part. Sur le front de l'Est la lutte est toujours acharnée dans Budapest que les Russes prennent maison par maison.

Le 12 janvier 1945,
les Russes auraient attaqué sur la Vistule et percé le front allemand sur 60 km et 40 km de profondeur.
Le ravitaillement est toujours aussi défectueux, toujours pas de vin depuis fin août, 2 décades de tabac seulement pour janvier, presque pas de chauffage. A part la viande dont nous avons en moyenne 200 grammes par semaine, nous avons même moins que du temps des Boches. Les usines ne marchent presque plus. Le marché noir sévit toujours. Les soldats américains ont des vivres en abondance Quelques personnes en profitent mais ils en gâtent beaucoup et même les enterrent au lieu de les donner aux Français. Ils ont une paie très élevée aussi ils boivent beaucoup dans les cafés surtout de l'alcool qu'ils paient n'importe quel prix et que les cafetiers se procurent au marché noir. Toute la mirabelle et le marc des environs y passent.
Il y en a qui vendent de tout pour boire : tabac, savon, graisse, conserve, chocolat, vêtements, couverture, souliers, etc., et quand ils ont bu, les coups de fusils et de revolver ne sont pas rares.
Toute l'armée américaine est motorisée, ce n'est que autos et camions de tous modèles. Il y en a d’énormes, on ne voit pas d'infanterie aller à pied, il n’y a pas de chevaux tout est tracté ou porté : canons, mitrailleuses, etc. A peine quelques motos et quelques vélos.

Ici la classe 1943 doit partir en janvier ; les classes 44, 45, 42, 41 et 40 suivront. De plus tous les hommes de 18 à 48 ans doivent se faire recenser.

Du 14 au 21 janvier 1945,
nous avons le dégel le 18, mais hier et aujourd'hui 21 nous avons à nouveau la neige. Il y en a plus de 0,20 m, elle tombe en bourrasque chassée par un fort vent ; hier du nord, aujourd’hui de l'ouest mais il ne fait pas bien froid. Malgré cela les avions ne cessent de passer depuis le matin, on ne les voit pas tellement le temps est bas mais on les entend bien.
Par le beau temps du début de la semaine, un jour 7000 avions chasseurs et bombardiers anglo-américains ont attaqué l'Allemagne. Peu de changement en Extrême-Orient et en Italie. Sur le front Ouest, l'avance continue lentement dans le saillant des Ardennes.
En Alsace la 1ère armée française a attaqué hier vers Colmar sur un front de 40 km. Les alliés ont signé hier l'armistice avec le gouvernement provisoire Hongrois.

Depuis le 15 janvier 1945,
tous les trains de voyageurs marchant à la vapeur sont supprimés.

Le 17 janvier 1945,
De Gaulle a parlé à la radio pour exhorter les Français à la patience.

Le 18 janvier 1945,
par suite de la crise économique l'usine nous met en chômage.
L'offensive Russe commencée le 12 au sud de Varsovie s’est continuée les jours suivants et s'est étendue jusqu'à la mer Baltique sur un front de 650 km. Le front Allemand est enfoncé presque partout. Le 16 ont apprend la prise de Kielce et Radom, le 17 au soir celle de Varsovie et Cracovie, le 18 celle de Czestochawa en Pologne et de Pilkallen et Goldapp en Prusse Orientale, le 19 en apprend que les Russes sont entrés en Silésie dans la région d'Oppelu et qu'ils ont pris Piasuy, Loviez, Skiernlavice, Modlin, Piotrkow, Sbaczew en Pologne. Le 20 les journaux disent qu'ils ont pris Lodz, Jaslo, Gorlice, Mlàwa, Dzialdovo, Plack et Carnow toutes en Pologne.

Le 21 janvier 1945,
les journaux d'aujourd'hui annoncent la prise de Cilsitt, Grossk, Isgirren, Kanhennen, Czillen en Prusse Orientale, Nouy-Sacz en Pologne et Kosice, Presov, Bardjov en Slovaquie. Pest est prise mais la lutte continue encore à Buda dans quelques pâtés de maisons.

Du 21 au 28 janvier 1945,
le temps reste à la gelée, il y a eu 15° de froid et de la neige, il y en a environ 0,30 m, c'est rare d'en voir tant par ici.
Le mauvais temps a gêné l'offensive française en Alsace, néanmoins elle a gagné quelques terrains. Guère de changement sur les autres fronts à part celui de l'Est.
L'offensive Russe continue irrésistiblement. Les journaux du 23 nous apprennent que les communiqués du Maréchal Staline, annoncent la prise de Tannenberg, Allenstein, Insterbourg, Guiezuo, Hohen-Salza, Alexandrov, Ordenov, Labiszyu, Osterode, Dentch-Eylan. Ceux du 24, que les Russes bordent l’Oder sur 60 km au sud de Breslan et qu’ils ont pris Namelan, Bernstadt, Pitschen, Bromberg, Saafeld, Mohrun, Freystadt, Whillenberg, Ortelsburg, Wehlan, Labian, Darkehuen, Trenbourg. Ceux du 25 que les Russes ont franchi l'Oder et sont entrés à Oppelu, Rawiez, Transchenberg, Kalisz, Rosnaiava, Lelchawa. Ceux du 26 que les Russes sont arrivés à la Baltique à l'est d'Elbing et qu'ils sont entrés à Tolkernit sur la baie de Dantzig et à Marienbourg, Mulhausen, Ctuhm, Capian, Allenburg, Nordenburg et Hindenburg.
Ceux d'aujourd'hui 28 qu'ils sont entrés à Ninlaiken, Barten, Rhein, Rastenberg, Sosnovice, Dabrowa, Myslovice, Bedzin, Gornica, Czervac, Levoca, Spieska-Novarèse, Spisska-Staravèse, Vadovice et Nenhausen. Toutes ces villes sont situées en Prusse Orientale, en Pologne en Silésie ou en Tchéco-Slovaquie et les Pays Baltes.

Vendredi 26 janvier 1945,
les Russes se trouvaient à 190 km de Berlin. Environ 30 divisions allemandes se trouvent encerclées en Prusse Orientale en Lituanie et en Lettonie. Elles n'ont plus que la mer Baltique pour s'échapper. De plus Thorn et Posên sont encerclés et les Russes, sont aux portes de Breslau.

Le 30 janvier 1945,
l'avance Russe continue, les journaux du 30 disent qu'ils ont pris Nonry-Targ et Sehoùlanke, Woldenberg et Drisen. Le 31, Bianbaum, Bishofstein. Wartenburg et Linde.


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FÉVRIER 1945


Le 1er février 1945,
les Russes ont pris Landberg, Meseritz, Schurebus, Zulbichau, Jastrow, Flasow, Friedeberg, Friedland, Heilsberg et atteint l'Oder à 75 km de Berlin.

Le 2 février 1945,
Thorn, Ratzebuler, Dentch-lissa. le 3, Donnau, Drossen et aujourd’hui 4, Vietz et Sternberg. l'Oder est bordé sur une grande longueur et franchit près de Breslau. Berlin commence à être évacué.
Ici les Franco-Américains sont entrés le 2 à Colmar.
Aux Philippines les Américains approchent de Manille.

Depuis le 31 janvier 1945,
nous avons le dégel et suite à la fonte des neiges la Moselle a débordée. L'activité de l'aviation alliée est toujours grande, jour et nuit il passe des avions, quelquefois en quantité.

Le 18 janvier 1945,
nous n'avions chômé à l’usine que pour 3 jours, nous chômons à nouveau depuis le 1er février, seuls les bureaux et quelques ouvriers travaillent.

Du 4 au 25 février 1945,
l'avance continue sur le front Est. Les journaux du 6 annoncent que les Russes sont entrés à Kranz, Landsberg, Bartenstein, Neudamm, ceux du 7 à Chlau, Brieg, Loven, ceux du 9 à Krensberg, Reftz, Bernstein, du 10 à Franenburg, Parchwitz, Liegwitz, du 11 à Elbing, Prienssich-Eylau, du 13 à Bunzlau, LBieloko et enfin dans le reste de Budapest, du 14 à Bentheu, du 15 à Nenzaiz, Freystadt, Goldberg, Neustadtel, Sprottan, Jauer, Striegan, Schneidemuhl, du 16 à Konitz, Grunberg, Tunhola, Sommerfeld, Soran, du 18 à Sagan, Mehlsack, Wormditt et que l'un des plus jeunes chefs Russes, le Général Tcherniakovsky âgé de 36 ans, commandant un groupe d'armées avait été tué en Prusse Orientale, du 22 à Czersk, du 24 à Arnswalde et que 23.000 Allemands s’étaient rendus à Posen après un siège d'un mois.
En Italie pas de changement. En Extrême-Orient les Américains sont entrés Manille d'après les journaux du 6, de ceux du 17 ils ont bombardé Tokyo avec 1500 avions et de ceux du 20, ils ont débarqué dans l'île d'Inoshima.
Sur le front ouest l'avance alliée est lente mais continue. Nous attaquons un peu partout. La ligne Siegfried est enfoncée en beaucoup d'endroits.

Le 10 février 1945,
la Haute-Alsace est libérée et les alliés bordent le Rhin de la Suisse au Nord de Strasbourg.

Le 23 février 1945,

la Belgique et le Luxembourg sont libérés.
Les trois grands, Staline, Churchill et Roosevelt se sont réunis à Yalta en Crimée. La plupart des États Sud Américains déclarent la guerre à l'Allemagne et au Japon, le 23 la Turquie (ce n'était pas vrai) et le 24 l'Égypte en font autant.
Les bombardements de l'Allemagne sont de plus en plus terrifiants. Le 14, 9.000 avions anglo-américains l'ont bombardé sur tous les fronts et à l'intérieur.

Il passe maintenant tellement d'avions alliés que je ne note plus leur passage.

Ici le 10 février 1945,
le couvre-feu a été supprimé.
Doriot a été tué en Allemagne par l'aviation alliée.

Depuis le 6 février 1945,
avec tous les chômeurs de Pompey, je travaille à Rosières-en-Haye sur le champ d'aviation américain, c'est très intéressant. Nous travaillons au milieu de machines, bombes, avions de toutes sortes. Nous assistons au départ des avions chargés de bombes et à leur atterrissage au retour du front. Ce sont des chasseurs et des chasseurs-bombardiers. Il n’y a pas de forteresse volante. J'ai cependant vu un Libérator à quatre moteurs se poser ou mieux s’abîmer près de nous à la suite d'avaries. Les 8 hommes d’équipage sont sortis indemnes. J'ai vu aussi quelques légers accidents au départ et à l'atterrissage. On nous emmène à Rosières en camion et à midi nous sommes nourris.
L'avance continue sur les fronts Est et Ouest. En Italie peu de changement, cependant les Américains ont débarqué dans l’île de Mindanao et les Japonais désarment les Français en Indo-Chine. Les journaux du 27 février sous apprennent que les Russes sont entrés à Prenssich-Friedland, ceux du 28 à Hammerstein, Schalachaux, Bublitz, Stéger.


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* * *

MARS 1945


Le 1er mars 1945,
les Russes sont entrés à Schlagau, Neu-Statin, Prerchiau, du 4 à Rummelsbourg, Malinow et atteint la Baltique entre Stettin et Dantzig, du 6 à Stargard, Nougrard, Polzin, du 7 à Grandenz, Belgard, Treptow, Greifenberg,, Kaminin, Plathe, Gultow, du 8 à Stargorad,-Guiew, Scheminitz, du 9 à Butow, Koscergynaz, Schlawe, du 10 à Stolp, Rugenwalde, Stolpummude et du 11 à Lanenburg et Kartuzy.
Par ici les alliés sont entrés le 1er Mars à Munchen-Gladbach. Le 2 sont arrivés au Rhin près de Dusseldorf et sont entrés à Crefeld, Vento, Roermond et Trèves, le 5 à Enskirchen et Gemund, le 6 à Cologne et Dormagen, le 7 à 16h30 les Américains franchissaient le Rhin à Remagen à une vingtaine de kilomètres au sud de Bonn et y établissaient une solide tête de pont. Le 8 ils entraient à Bonn et l'Éclair de l'Est d'aujourd'hui 11 nous dit qu'ils sont à 3 km de Coblence et ont de nouveau franchit le Rhin au nord de Remagen.

Je travaille de nouveau à l'usine depuis le 2. Nous faisons 40 h par semaine mais de nombreux ouvriers vont encore à Toul et Rosières et demain près de 300 iront à Essey-les-Nancy.
Nous avons maintenant le droit d'écrire des lettres. Des trains de voyageurs circulent un peu partout en France en nombre restreint mais ici il n'y en a pas encore. De nombreux Américains cantonnent à Pompey et dans la région. Beaucoup logent chez les habitants. Il y a des bals fréquents donnés par eux, ils y invitent tout le monde surtout le beau sexe et restaurent gratis.
Beaucoup d'habitants sont nourris par les Américains. Ils vont chercher le rabiot aux cuisines, c'est presque écœurant de voir, surtout les femmes et les enfants faire la queue, il y a même des gens qui pourraient s'en passer mais qui profitent de la largesse des Américains.
Le ravitaillement est toujours aussi peu copieux, surtout les matières grasses, les effets et ni vin, ni café, etc. mais on nous promet qu'il va s’améliorer.
Le marché noir sévit comme du temps des Allemands. On trouve de la graisse à 400 ou 500 F le kilo, du sucre à 200 F, etc .

Du 11 au 18 mars 1945,
l'avance alliée continue sur les fronts Est et Ouest.

Le 13 mars 1945,
on apprend que les Russes sont entrés à Kustrin, Weyherowo, Puck, Tczew, le 15 à Alstohl et-Zvolen et aujourd'hui 18 qu'ils sont aux portes de Stettin et de Dantzig, mais les Allemands tiennent toujours à Breslau, Kosnigsberg ainsi qu'en Lituanie et Lettonie.
On apprend aujourd’hui que les Américains ont pénétré dans Coblence et dans les faubourgs de Sarrebruck.
L’aviation alliée jette maintenant des bombes de 10 tonnes.
Les Allemands auraient fait des offres de paix qui ont été repoussés.

Ici hier est rentré le premier prisonnier de Pompey délivré par les Américains à Coblence.
En Indo-Chine les Français résistent aux japonais qui voulaient les désarmer.

Du 18 mars à fin mars 1945,
les fronts Allemands Est et Ouest craquent de toutes parts. La fin semble approcher.
Ici l'Alsace est délivrée et il n'y a plus un Boche en armes sur la rive gauche du Rhin et celui-est franchit de toutes parts et largement dépassé.
De nombreux prisonniers ouvriers ou déportés sont délivrés tous les jours.

Les journaux du 20 mars 1945,
nous annonçaient la prise de Kolberg, ceux du 21 la prise d’Altdamin, Bransberg, du 23 Neustadt, Steinan, Falkenberg, Ober-Glogan, Cosel, Krappitz. Du 2 Zoppot, du 25 Szekesfohervar, Viszprem, Neisse, du 27 Bouska-Bystrica, Bapa, Deveczer, du 28 Strehien, Rybnik, Rosenberg, du 29 Gyor, Komarou, Zoran, Losian, Gdynia, du 30 Sombathely, Kapuwar, Kolzeg, du 3l Dantzig-, Komarno, Verchely, Surany-Novy, Zang, Konyatice.

Aujourd'hui jour de Pâques,
Ratibor, Biskan, Vardar, Kormend, Szengottahard, Czirgo, Nitra et Galanta. Pour le front ouest on apprend par les journaux du 20 la prise de Coblence, par ceux du 21 celle de Worms, Kaiserlautern, Mayenne, Sarrebruck, Deux-Ponts, du 22 Ludwigshafen, du 24 Spire, Landau, Pirmasens, Siegburg, Breischeid, du 25 qu'en présence de Monsieur Churchill l'assaut du Rhin a été donné à 22h00, le 23 face à la Rhur par les troupes de Montgomery qui ayant parachuté 40.000 hommes de l'autre côté du Rhin, l'ont franchit en quatre points, de plus Patton avec la 3ème armée américaine l'a franchit en face Darmstradt, du 27 la prise de Francfort-sur-le-Mein et de Darmstadt, de Viesbaden et d'Aschaffenburg, du 28 de Wurzbourg, Limbourg, Marmheim, du 29 Herboun, Darsten, du 30 Bochalt, Borkemm, Isselbourg, Marbourg et que la 1ère armée française a traversé le Rhin en partant du Palatinat, du 31 Helmond, Mumster, Heidelberg, Palderbronn et ce jour 1er avril ils annoncent que la Ruhr est encerclée, mais pour tromper l'ennemi les alliés donnent peu de nouvelles sur l'avance de leurs troupes.
Toutes les armées, 1ère canadienne, 2ème anglaise, 9ème, 1ère, 3ème, 7ème américaine et 1ère française semblent lutter de vitesse à travers l'Allemagne.
Le front d'Italie ne bouge pas et les Américains ont encore débarqué dans l'île de Cebu aux Philippines.
L'Argentine à son tour a déclaré la guerre à l'axe le 27 mars.

Le 24 mars 1945,
nous avons enfin touché un litre de vin par personne, c'était le premier depuis fin août et 75 grammes de café pour le mois.
Des trains omnibus ont été mis en marche ici depuis le 19 sauf les dimanches aussi au soir du 24 je vais à Norroy et je reviens le 26 au matin.


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* * *

AVRIL 1945


Du 1er au 8 avril 1945,
l'avance alliée continue sur les fronts Est et Ouest. Les Russes et leurs alliés Roumains, Bulgares, Hongrois ou Yougo-Slaves sont entrés à Nagykamisza, Zlogan, Sopron,,Trcova, Hlovence, Sence, ceux du 4 à Wiener-Nesistadt, Neurkirchen, Eisenstadt, Gloguitz, Magyarovar, Kremmisza, Topolghani et qu'ils sont aux portes de Vienne, du 5 à Bratislava capitale de la Slovaquie, du 6 à Ruzomberck et que la Russie le 5 a rompu son Pacte de neutralité avec le Japon, du 7 à Sarajevo, Malacky, Bruck, Prieviza, Banovzice, Gospitck, et aujourd'hui 8 que l'on se bat dans Vienne et ses faubourgs mais que les Russes sont déjà à Saint-Polten à 50 km à l’Ouest.

Le 2 avril 1945,
le général Eisenhower commandant en chef allié a lancé un appel à l'armée allemande lui demandant de capituler mais la lutte continue.
Une lettre de Montpellier de notre neveu Marcel nous apprend que l'on va le 6 ou le 7 lui couper une jambe au-dessous du genou à la suite d'un coup qu'il a reçu par ici quand il faisait dérailler les trains du temps de l'occupation allemande. Il s'est fait soigner trop tard et les fatigues de sa campagne en Alsace ont empêché la guérison, vraiment notre famille n'a pas de chance.

Le 3 avril 1945,
nous apprenons l'entrée à Lippstadt, Stadtlahm, le 4 à Gelsenkirchen, Rheine, Nordhorn, Enheim, Rappenau, Warbourg, Cassel, Osnabruck, Gotha, le 5 à Heilborm, Fulda, Wahufried, Zutphen, Zivolle et Carlsruhe capitale du duché de Bade par les Français, le 6 à Minden et que le Weser est franchit, le 7 à Coeverden, Neufhans Wierden laren, Donsbourg
Les alliés sont aux portes de Hanovre et à une vingtaine de km de Brême et les Français bordent le Nickar et l'Enz.
Le plus grand cuirassé Japonais, le Yamato vient d'être coulé. En Italie un léger succès à Tamarcchio.

Du 8 au 15 avril 1945,
la débâcle allemande continue. Les journaux du 10 nous annoncent que Koënisgberg a capitulé et que les Russes y ont fait 27.000 prisonniers et qu'ils sont entrés à Tulin et à Neu-langenbach. Ceux du 11 nous disent que toute résistance organisée a cessé dans Vienne et que Bernsdorff est occupée, du 14 que Hodonin est prise et aujourd'hui 15 que les Russe sont à Wolkersdorf, Martinsdorf à 25 km de Luiz, à 50 km de Graz et qu'ils ont déclenché l'attaque décisive contre Berlin.

Le 12 avril 1945,
nous avons appris que les villes de Essen, Bochum, Cobourg, Erfurt, Brunswick étaient occupées et que l'Elbe était atteinte, le 14 que les alliés étaient à 11 km de Leipzig et à Halle, Bitterfeld et Iéna, et ce jour 15 que les Français venant du nord sont à Kelh en face de Strasbourg et les alliés à Arhnem, Gromigue, Winschoten, Velzen, Dessau, Emsteck, Pégan, Hertzdorf, Schwartzach, Obernai et que la 9ème armée américaine général Simpson était à 55 km de Berlin.
Dans la semaine nous avons hébergé un permissionnaire de l'artillerie américaine qui avait cantonné à Pompey dernièrement. Ce jeune homme, Mr Paul de l'état du Wisconsin, de la 7ème armée général Patch était venu de Neustadt (Bavière) et y est retourné hier 14. Il était d’une correction parfaite, fils de fermier il est étudiant en médecine. Nous nous comprenions en consultant les dictionnaires. Nous garderons tous de lui un excellent souvenir.
A partir de ce jour le pain est ici à 6.90F le kg et toujours 350 g par jour pour les travailleurs, la bière à 8.00 le litre. Je viens d'obtenir une paire de souliers pour 455F et encore ils ne sont pas bien solides.
Les salaires sont un peu relevés. J'ai depuis le 1er mars l6.00 F de l’heure mais nous ne faisons que 40h par semaine.

Le 20 avril 1945,
sur le front ouest nous apprenons que les villes de Brunkiom, Lanenfurde, Burdfelde, Syke, Bassum sont occupées, le 11 celles de Pforzheim, Hanovre, Schurinfurt, Verden, Bedheim, Furstenan, Deventer, NiederstOcken, le 13 celles de RaStadt, Baden-Baden, Arnstadt, Weinar, Cobourg, de plus que le Chili a déclaré la guerre au Japon.
Malheureusement nous apprenons que le président des États-Unis, Franklin Roosevelt est mort subitement à 15h35 le 12 à Warm-Springs en Géorgie où il se reposait, c’est une grande perte. Le vice-président Harry Truman lui succède.
L'Elbe est franchie par la 9ème armée près de Magdebourg, Russes et Américains marchant sur Berlin ne sont plus qu'à 120 km les uns des autres.

Du 15 au 22 avril 1945,
la débâcle allemande s’accentue. Les journaux du 17 nous disent que sur le front ouest les alliés sont entrés à Laenvarden, Kothen, Gera, Eisenberg, Colditz, que la mer du Nord est atteinte en Hollande, qu'ils sont à 25 km de Hambourg, à 14 km de la frontière Tchéco-Slovaque et à 40 km à l'Est de Strasbourg.
Ceux du 18 que l'on se bat dans Leipzig et dans Nuremberg et que la frontière Tchèque est atteinte.
Ceux du l9, la prise de Werdan, Greiz, Metzschkau, Oelsnitz, Soltan, Brunkurn, et que les Français ont liquidé la poche de Royan faisant 10.000 prisonniers et rendant Bordeaux et la Gironde à la navigation.
Ceux du 20, nous disent que Leipzig, Magdebourg, Potten, Kuice, Lunebourg, Interfeld, Wiridenfeld, Ansbach, Oberkirch, Frendenstadt, Nagold sont pris et que 64 km seulement séparent les Russes de Koniev des Américains de Hodges.
Ceux du 21 nous disent que la poche de la Ruhr est résorbée, plus de 300.000 Allemands y ont été fait prisonniers, que la Hollande est en partie délivrée mais que les Allemands font sauter les digues causant de graves dégâts et que Nuremberg, Neumarck et Tubrigen sont pris.

Aujourd’hui 22 avril 1945,
les journaux disent que Russes et Américains auraient fait leur jonction dans la région de Dresde, que Patton est entré à Asch, que Hambourg est presque encerclée et que Stuttgart est attaquée et que les Français ont pris Vieux-Brisach et atteint le Danube à Douan-Eschinger.
Sur le front Est, les Russes d'après les journaux du 18 seraient entrés à Godrencken, ceux du 20 nous disent que Koniev a franchit la Sprée et que Youkov est entré à Seélow, ceux du 21 qu'ils ont pris Spremberg et Weisswasser et ceux d'aujourd'hui qu'ils se battent dans les faubourgs de Berlin qui est soumis à un effroyable bombardement et qu'ils ont pris Kabitchev et Kornarov.
De plus le front d'Italie s'anime. On apprend aujourd'hui que Bologne est tombée. L’Espagne a rompu les relations avec le Japon.

Du 22 au 29 avril 1945,
la débâcle allemande se précipite. Les journaux d'aujourd'hui 29 nous annoncent que les Allemands ont demandé la paix aux États-Unis et à l'Angleterre. On leur aurait donné jusqu'à mardi soir 1er mai pour la demander également à la Russie.
L'Italie est presque libérée par les alliés aidés par les patriotes Italiens. Le 24 les journaux disaient que le Pô était atteint, le 25 qu'il était franchi, et Ferrare, Modène, la Spezzia pris. Le 27 que Mussolini était fait prisonnier par les Italiens à Pallanza sur la rive ouest du lac Majeur et que Milan, Novare, Lugano, Gênes, Parme, Plaisance, Turin, Brescia, Côme, Reggio étaient pris, le 28 San-Remo, Vérone, Monza et Varèse, et que le Maréchal Graziani était fait prisonnier.

Aujourd'hui 29 avril 1945,
que Chiéri, Toile, Rovigo, Vicense, Suze, Mantoue et Padoue étaient pris.
La jonction des troupes alliées à travers l'Allemagne a été faite par la 69ème division d'infanterie américaine et la 18ème division de la garde Soviétique à Corgan sur l'Elbe le 26 à 16h00.
Le maréchal Pétain s'est constitué prisonnier le 26 à 20h00 à la Ferté-sous-Jougue frontière Suisse, il a été interné le 27 au fort de Montrouge.
On apprend par les journaux du 24 que les Russes ont pris Trappan et Francfort sur l'Oder et qu'ils se battent au cœur de Berlin.
Par ceux du 25, que Berlin est encerclé et que les Russes ont pris Potsdam, Zossen, Berlitz, Zana, Marienthal, Rangsdorf, Didierdorf, Teltorv, Kielheim, Mulberg, Pulovitz, Wandlitz, Blenkerverde, Hennigsdorf, Karlsdorf, Naneun, Flatow, du 26, Pillau, du 28 Stettin, Wittemberg, Gartz, Schwendt, Peukum, Kazkasv, Strella. Du 29 Torgelow, Pazesvock, Strasburg, Templin, Koenigsristerbrausen, et qu'une grande partie de Berlin est occupée dont le Reishtag.
Hittler serait mourant à Berlin.

Le 24 avril 1945,
nous avons eu 1 litre de vin par personne.

Le 25 avril 1945,
s'est ouverte à San Francisco une grande conférence de toutes les nations alliées. Les Français sont entrés d'après les journaux du 24 à Stuttgart, Fribourg et ont atteint le lac de Constance, du 25 à Ulm et les Alliés à Appingglam, Zevern, Singen et le 26 Regen, du 27 à Eger-Rohren, Constance, Brême, Ingalstadt, Ratisbonne, du 28 à Gurburg, Geyttingen, Memmingen, et aujourd'hui 29 à Angsbourg, Schougan, Fussen, Langsberg, Kompten, Willenshafen, Dussen.
Aujourd'hui on vote en France pour les conseils municipaux et le 13 mai ce sera le scrutin pour les ballottages. Ils avaient été élus en 1935.
C'est la déroute Allemande, la fin est proche.

Le 30 avril 1945,
Sur le front Italien les journaux nous disent que Venise est prise et que Mussolini avec 14 chefs fascistes a été fusillé à Milan par les Italiens.
Le journaux disent également que les Russes ont pris Austerlitz, Lukow, Hoenmer, Valéeshes, Blamerchagen, Guetenberg, Taschenberg, Kraaz, Damen, Weizenburg, Raslenben, Huswalde, Ringenvalde, Friedrisenvalde, Auklam, Friedland, Neu-Brandenbourg et Lychen.
Sur le front franco-anglo-américain, prise de Munich, Oldenbourg, Schausen, Grieflingen, Maxberg, Schoffehding, Finning.


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MAI 1945


Le 1er mai 1945,
les journaux nous disent que Trévise et Coni sont pris. Ceux du 3 que le feu cesse à midi en Italie et dans une partie de l'Autriche. Le Général Von Vietinghoff ayant signé le 29 avril une capitulation sans condition.
Les Yougo-Slaves ayant pris Fiume et Trieste ont opéré leur jonction à Mont-Faléone avec la célèbre 8ème armée anglaise.
Sont prise les villes de Mossburg, Friedrishafen, Lindau.

Le 3 mai 1945,
les journaux annoncent que les derniers défenseurs de Berlin au nombre de 70.000 ont capitulé le 2 à 15h00.
Hitler serait mort à Berlin le 30 avril mais sa mort est mystérieuse.
Laval, Déat, Bonnard sont arrivés en avion en Espagne à Barcelone où ils sont internés n'ayant pas voulu partir. Les Allemands évacuent le Danemark, l'île d’Oléron est prise, Lubeck, Schiverni, Bronnan, Salbroug sont pris et les Anglais ont atteint la Baltique à Wismar.
Les Russes sont aussi entrés à Rostock, Narnemmude, Ribritz, Teterow, Mirow et Laage.

Le 4 mai 1945,
les journaux disent que les alliés sont entrés à Hambourg, Elbendorf, Grabow, Lutkenvisch, Leiz et au Danemark et que la 2ème armée anglaise à fait 50.000 prisonniers.
Ceux du 5 la reddition d'Amsterdam, Leyde et Rotterdam et la prise de Pelsen et de Berchtesgaden et que le feu cessait à 8h00 ce jour.
Le maréchal Montgomery fait savoir que les forces ennemies du Danemark, de la Hollande et de l'Allemagne du Nord-Ouest y compris Héligoland et les îles de la Frise avaient capitulé sans condition.

Ceux d'aujourd'hui 6 mai 1945,
nous disent que le feu cesse à midi de Chenmitz à Linz et à la frontière Suisse. les Allemands de ce secteur ayant aussi capitulé sans condition.
Prague serait aux mains des patriotes Tchèques.
On attend la fin des hostilités d'un moment à l'autre.
Les Allemands résistent encore en Norvège, à Breslau, en Bohême et dans les poches de l'Atlantique.
En Extrême-Orient les Australiens ont débarqué le 2 à Bornéo et le 3 les Anglais sont rentrés à Rangoon capitale de la Birmanie.

Du 6 au 10 mai 1945,
c'est la fin des opérations en Europe. L'Allemagne est complètement battue. Elle vient de signer une capitulation sans condition, sans précédent dans l'histoire.

Le lundi 7 mai 1945,
vers 16h00 le bruit se répand ici , je l'apprends seulement à l6h45 en quittant le travail à l'usine, que l'Allemagne a capitulé. A 17h00 tous les gueulards et sirènes des usines se font entendre longuement et les cloches des églises sonnent à toute volée. L'allégresse est générale, tous les drapeaux que l'on possède sont mis aux fenêtres. Le soir retraite aux flambeaux et bal toute la nuit. Bal aussi le lendemain et le surlendemain car ordre du gouvernement les 8 et 9 mai sont jours fériés et aujourd'hui l0 jour de l'Ascension l'est également aussi cela fait trois jours de repos.
Le temps est magnifique. On a tout le temps de fêter la victoire mais on n'a que de l'eau à boire, ni vin, ni bière et rien de plus dans les magasins.
C'est dans une petite école de Reims servant de grand quartier général au Général Eisenhower à 2h41 le 7 (soit 0h41 heure française avant la guerre) qu'a été signée cette capitulation par le général Allemand Gustav Jodl pour son pays et par les généraux Walter Bedell Smith chef d'état major du général Eisenhower pour l'Angleterre et les États-Unis, Ivan Suslaparoff pour la Russie et François Sevez pour la France. Toutes les troupes allemandes doivent capituler sans condition et pour 23h01 le 8.
Cependant d'après la radio allemande l'ordre de cesser le feu n'a été donné que le 9 à 4h00. L’amiral allemand Doenitz remplaçant Hitler est actuellement le chef responsable de l'Allemagne. Il vient de dissoudre le parti Nazi.

Les journaux nous donnent les dernières nouvelles de la guerre. La garnison de Breslan a capitulé le 7 et les troupes de Norvège ont déposé les armes, ceux du 9 nous disent que la lutte continuait encore en Bohême surtout à Prague entre les Allemands et les Tchèques mais que les Américains de Patton et les Russes de Koniev arrivant, les Allemands avaient cessé le combat.
les îles de Rhodes et de Crête seraient occupées par les Anglo-Grecs, et Lionbliana a été occupée par les Yougo-Slaves.
Ceux d'aujourd'hui nous disent que les Allemands de la Rochelle, Saint-Nazaire et Lorient ont mis bas les armes. Il semble qu'il y aurait encore des combats en Bohême.

L'acte définitif de capitulation a été signé hier, 9 à Berlin à 0h15 dans le quartier de Kalrlshorf où se trouve le commandement soviétique de la place de Berlin, par le maréchal Keitel commandant en chef les forces armées du Reich, par l'amiral Friedenburg, commandant en chef de la marine et le général de l'air Koberst Stumpf commandant les forces aériennes, en présence du maréchal de l'air sir Arthur Tedder, commandant en chef adjoint des forces expéditionnaires alliées et du maréchal Georgi Joukov représentant le grand état-major de l'armée rouge. Le Général De Lattre de Tassigny commandant la 1ère armée française et le général Spaatz chef des forces aériennes tactiques des États-Unis ont signé comme témoins.

Le Japon reste seul. L'Éclair de l'Est d’aujourd'hui dit que les superforteresses ont bombardé l'île Kiou-Siou et que les navires de guerre alliés ont bombardé la côte sud de l'île d'Okinawa.
La précédente guerre avait duré du 2 août 1914 au 11 novembre 1918 soit plus de 51 mois. Celle-ci du 3 septembre 1939 au 7 mai 1944 soit plus de 68 mois de guerre, ce qui fait près de 10 ans de guerre dans notre existence et il y a encore la guerre contre le Japon.


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JUIN 1945

 

Du 4 au 15 juin 1945,
le gouvernement a échangé tous les billets de banque de 50F et au-dessus ainsi que toutes les obligations et bons à court terme. Le commerce des fruits et légumes est libre maintenant. Pour le reste c'est comme pendant la guerre, cartes, tickets, points existent toujours.
Pour l'armistice les Français occupaient le duché de Bade, une partie du Wurtemberg, de la Bavière et de l'Autriche. Maintenant les Américains commencent à quitter l'Europe pour repartir soit chez eux, soit contre le Japon. Celui-ci commence à être bombardé sérieusement. L’île d'Okinawa est prise et des progrès ont lieu dans les îles Hollandaises et Philippines ainsi qu'en Birmanie et en Chine. Des bruits de demande de paix par le Japon ont déjà couru.
Toute l'armée allemande, c'est-à-dire des millions d'Allemands et des milliers d'étrangers enrôlés de gré ou de force a été faite prisonnière, c'est un désastre sans précédent. Pour nous en
1940 une partie de notre armée avait encore échappé à la capitulation. Pour ne pas les nourrir et pour que la vie économique reprenne en Allemagne, les alliés sont en train de libérer plusieurs millions de prisonniers.
La conférence de San-Fransisco dure toujours. Elle doit se terminer mardi 26 juin.
En Syrie il s'est produit des incidents anti-français malheureusement les Anglais ont pris parti contre nous. Il semble que nous allons évacuer la Syrie et le Liban, il est vrai que nous avions promis l'indépendance à ces pays.

24 Juin 1945,
La vie reprend petit à petit son cours normal. Presque tous les prisonniers militaires et déportés civils sont rentrés ainsi que les travailleurs. On frémit d'horreur en entendant les récits des déportés, c'est inimaginable ce qu'ils ont vu et enduré dans les camps d'Allemands. De nombreux y sont morts soit de faim, soit massacrés, martyrisés ou fusillés, passés à la chambre à gaz pour être asphyxiés et ensuite au four crématoire. Ceux qui sont revenus sont dans une faiblesse extrême, il leur faudra du temps pour se remettre. Les travailleurs et les soldats ont été assez bien traités.
Le ravitaillement est toujours médiocre. Nous venons de toucher notre cinquième litre de vin depuis fin août 1944. Nous n'avons plus de viande qu'une fois tous les 15 jours, toujours presque pas de chaussures, ni vêtements, ni articles de ménage. Les journaux à 2 pages sont à 2.00 F. Nous avons cependant un peu plus de graisse, le marché noir sévit toujours et la vie atteint des prix fantastiques. Les salaires viennent encore d'être relevés.


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JUILLET 1945

 

Le 1er juillet 1945,
je suis allé à Paris avec Suzanne, nous avons visité le tombeau de l'Empereur et celui de l'Aiglon.
Yvonne et Suzanne sont allées le 16 août à Hoste-Bas sur la tombe de notre cher Alexandre.

Le 5 juillet 1945,
les Français sont entrés à Berlin qu'ils occupent avec les Russes, les Anglais et les Américains. Vienne aussi est occupée dans les mêmes conditions.
En Angleterre les élections ont amené les travaillistes au pouvoir. Attlée a remplacé Churchill.
A Postdam-les trois grands, Staline, Truman et Attlée se sont rencontrés.


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AOÛT 1945

 

Le 19 août 1945,
du 15 juin à ce jour la guerre avec le Japon a continué mais elle est pour bien dire terminée. Les anglo-américains ayant inventé la bombe atomique d'une puissance incroyable, en ont jeté une d'un avion le 6 août sur Hiroshima, une autre le 8 sur Nagasaki détruisant en grande partie ces deux villes avec leurs habitants.
De plus la Russie ayant déclaré la guerre le 9 au Japon, celui-ci le même jour a demandé la paix. Après des pourparlers, les alliés ont accepté le 15 août, jour de l'Assomption un mercredi, et l'ordre a été donné aussitôt de cesser le feu. Malgré cela vu l'immensité du front, le feu continu encore dans beaucoup d'endroits surtout en Chine et en Corée sur le front russe.
Comme pour l'Allemagne c'est la capitulation sans condition, livraison de la flotte, de l'armée, de l'aviation et occupation du pays mais l’Empereur reste.

Ici la vie reprend peu à peu sont cours. la navigation a repris sur le canal et les trains roulent mais le ravitaillement est toujours difficile. Les derniers prisonniers rentrent.
Après un procès de trois semaines, le Maréchal Pétain a été condamné à mort, à l'indignité nationale et à la confiscation de ses biens le 15 août. Mais vu son grand âge, près de 90 ans, les jurés ont demandé que la peine de mort ne soit pas exécutée. Le Général De Gaulle vient de commuer sa peine en celle de détention à perpétuité. Il est interné au Pourtalet dans les Pyrénées.
Les tribunaux jugent actuellement les traitres et les collaborateurs. Il y a de nombreuses condamnations à mort, aux travaux forcés ou à la prison.
Les Français occupent une partie de la rive gauche du Rhin, de Bade, du Wurtemberg, de la Bavière et de l'Autriche.


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SEPTEMBRE 1945

 

A ce jour 16 septembre 1945,
la vie reprend peu à peu son cours normal mais le ravitaillement est toujours précaire. Les salaires sont élevés, j'ai 26.70 F de l'heure à l'usine mais tout est hors de prix et le marché noir sévit toujours. Aussi on a du mal à boucler son budget et ceux qui ne peuvent plus travailler sont à plaindre. Les rentes sont baissées, la caisse d'épargne ne donne plus que 2,25 du 100.
La capitulation Japonaise a été signée officiellement le 2 septembre en baie de Tokyo à bord du cuirassé américain Missouri. Le Général Leclerc a signé pour la France. Auparavant les alliés avaient débarqué et le Japon est occupé maintenant. Les opérations de guerre sont maintenant terminées, tous les Japonais ont capitulé les uns après les autres. Singapour, Hong-Kong, Port-Arthur, la Chine, les îles Hollandaises sont libres.
Les Français commencent à arriver en Indo-Chine où les ont précédé les alliés et même les Chinois. Mais il y a de l'ébullition en Annam où des Français ont été massacrés et leurs biens pillés. Les annamites réclament l'indépendance.
Les ministres des affaires étrangères de France, Russie, États-Unis, Angleterre et Chine sont réunis à Londres et préparent le traité de paix qui sera certainement bien compliqué.

Suzanne est allée seule à Lourdes du 20 au 26 et à Paris le 9 septembre.
Marie-Louise et Jean-Marie sont allés le 2 septembre sur la tombe de notre regretté Alexandre. Jean-Marie qui a 6 ans maintenant a pleuré sur la tombe de son cher papa.

Le 27 septembre 1945,
Hiro-Hito empereur du Japon a été reçu par le général Mac-Arthur.
Beaucoup de colonies sont en révolte et réclament leur indépendance. C'est le cas des colonies Hollandaises, des îles de la Sonde et de notre Indo-Chine où nous avons du mal à nous réinstaller. Nous avons presque évacué la Syrie. La paix sera difficile à signer car la Russie à de grandes exigences.
La conférence des ministres à Londres s'est terminée sans résultat.
Laval a été fusillé le 15 octobre. D'assez nombreux traîtres subissent le même sort.

Les 23 et 30 septembre 1945,
la France a voté pour les conseils généraux. Le 21 octobre pour les députés à la Constituante et pour le référendum pour la Constitution.
Le ravitaillement est toujours difficile, cependant les tickets de pain sont supprimés depuis le 1er novembre mais la farine est toujours rationnée. La vie atteint des prix catastrophiques, les salaires suffisent difficilement à assurer l'existence. Les gens qui ne peuvent plus travailler sont à plaindre.


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NOVEMBRE 1945

 

Le 4 novembre 1945,
Marie-Louise est retournée seule sur la tombe de notre bien-aimé à la Toussaint, Jean seul et Suzanne et Yvonne ensemble y étaient allés avant. J'y vais avec Marie après demain 6 car les trains marchent maintenant de Sarreguemines à Béning. Nous descendrons à Farschviller et ferons environ 5 km à pied pour aller à Hoste-Bas.

Le 13 novembre 1945,
le Général De Gaulle a été élu président du gouvernement provisoire à l'unanimité de 555 votants.

Le 15 novembre 1945,
Pétain a quitté le Portalet pour l'île d'Yeu.
Nos libérateurs, les généraux américains Pacth et Patton sont morts. Le premier de maladie aux États-Unis, le deuxième à la suite d'un accident d'auto en Allemagne, il est enterré en Luxembourg.


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- 1946 -

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JANVIER 1946

 

Le 10 janvier 1946,
s'est ouvert à Londres la première assemblée des Nations Unies. 51 puissances alliées y sont représentées. La Russie faisant toujours une politique un peu à part est en désaccord avec l'Iran et la Turquie.
La vie est toujours difficile. Pour nos étrennes nous avons eu les lettres à 3.00 F et le rétablissement de la carte de pain et avec 350 grammes.
Depuis la libération jusqu'au Nouvel an nous n'avons en Meurthe-et-Moselle touché que 17 litres de vin contre 60 à Paris. Pour la viande et les matières grasses cela va un peu mieux. Pour les chaussures, les vêtements, le linge, la literie, le chauffage, etc. toujours pas d'amélioration. Heureusement l'hiver n'est pas rude. Il a gelé les 8 et 9 décembre 1945 et du 1er au 8 janvier 1946 aux environs de -10°.
Yvonne s'est mariée le 26 décembre avec Jean Munier de Morey et ils nous ont quittés le 1er janvier pour s’installer dans ce village.

mariage de Yvonne CLAUSSE et Jean MUNIER

mariage de Jean MUNIER et Yvonne CLAUSSE
collection ©Elisabeth GEY)

 

Du 14 au 28 janvier 1946,
il y a un peu gelé et un peu de neige le 20.


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FÉVRIER 1946


Février 1946,
a été pluvieux aussi les rivières viennent de déborder.
L'Organisation des Nations Unies O.N.U. a terminé sa première réunion à Londres. Les résultats semblent incertains. Il semble y avoir deux blocs opposés, d’un côté l'Angleterre et les États-Unis, de l'autre la Russie.
Le monde Arabe est en ébullition. L'Angleterre a fort à faire aux Indes, en Égypte, en Palestine. On se bat toujours aux Indes Néerlandaises, même encore en Indo-Chine, même en Chine. A quand les traités de paix qui doivent avoir lieu à Paris. Liban et Syrie sont indépendants et réclament le départ des derniers Français.

Notre ravitaillement est toujours aussi peu copieux et pour comble, nous fermons la frontière Espagnole le 1er Mars à cause de la politique de Franco. De quoi nous mêlons-nous, nous avons assez à faire chez nous. Franco a pris les devants, voyant cela il a fermé ses frontières 24 heures avant nous.


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MARS 1946


Le 3 mars 1946,
le général De Gaulle a démissionné le 20 Janvier. Fêlix Gouin a été élu à sa place le 23.

Le 16 mars,
j'ai changé de service à l'usine. J'ai quitté rails, traverses et ballast pour faire la distribution de l'oxygène et de l'acétylène.

Le 25 mars 1946,
vers 18h30 j'ai ressenti une secousse de tremblement de terre.


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AVRIL 1946


Le 29 avril 1946,
un deuxième haut-fourneau a été remis en service ici.


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MAI 1946


Le 5 mai 1946,
le Référendum pour la Constitution a été repoussé en France.

Le 26 mai 1946,
nous deux Marie nous sommes retournés à Hoste-Bas sur la tombe d'Alexandre. Madame Valentin de Senones nous y avait donné rendez-vous car son fils y repose également.


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JUIN 1946


Le 2 juin 1946,
nouvelles élections pour les Députés encore pour 7 mois. Le parti M.R.P. est en tête mais il n'y a guère de changement.

Le 13 juin 1946,
pour la première fois depuis 1940 nous avons eu de la chicorée.

Le 20 juin 1946,
Mr Bidault .M.R.P. est élu président du G.P. de la R.F. Il forme son ministère et reste ministre des Affaires Étrangères où il se distingue car il y a toujours les réunions des quatre grands, les quatre ministres des A.F. de France, Russie, Angleterre, États-Unis ou leurs adjoints pour préparer les traités de paix. Cela s'annonce difficile car la Russie continue à rester isolée. On ne sait ce qui se passe au-delà d'une ligne de l'Adriatique à l'Elbe, c’est-à-dire chez elle et dans les pays qu'elle occupe. Cependant ils se sont mis d'accord pour que Trieste soit internationalisé. Brigue, Tende et quelques petits territoires seront cédés par l'Italie à la France.


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JUILLET 1946


Le 1er juillet 1946,
le train de Pompey-Nomeny a circulé à nouveau. La reconstruction des ponts se poursuit activement mais celle des maisons n'est même pas commencé, on ne fait que du provisoire.

Le 21 juillet 1946,
Jean-Marie a aujourd'hui 7 ans. Il est bien bon pour son âge, quel malheur que son père n'est plus là, ils seraient si heureux tous les trois Marie-Louise. Ma sœur a aussi aujourd'hui 57 ans.
La vie reprend peu à peu son cours normal, mais presque tout est encore rationné et toujours les mêmes rations. Pain 350 g par jour au plus, sucre 500 g par mois etc. la viande est un peu plus copieuse maintenant, mais le vin est toujours aussi rare.

Le 29 juillet 1946,
se réuniront à Paris les délégués de 21 puissances alliées pour discuter les traités de paix avec l'Italie, la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie et la Finlande.
Pour l'Allemagne qui n'a plus de gouvernement il n'en est pas encore question. On ne sait pas quel sort elle aura, pourvu que l'on ne recommence plus l'erreur de 1919. Ce qu’il y a de sûr, la Russie ne lui rendra pas la Prusse Orientale. Mais pour la Rhénanie, la Sarre, la Ruhr l'accord est difficile.
Pour l'Autriche qui n'est pas considérée comme pays ennemi, il paraît qu'il n’y aura pas de traité de paix. Quand au Japon on n'en parle pas.


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OCTOBRE 1946


Le 13 octobre 1946,
Référendum pour la Constitution. Elle est adoptée avec seulement 36% des inscrits. De Gaulle avait dit de la rejeter.

Pour la Toussaint nous sommes retournés à Hoste-Bas avec Marie, Suzanne nous accompagnait. Avec elle je suis allé à Cappel. Marie est restée à Hoste avec Mme Valentin.


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NOVEMBRE 1946

 

Le 10 novembre 1946,
on a voté pour les Députés. Mr Blum a été élu le 12 Décembre président du gouvernement provisoire. Le 7 décembre on avait voté pour les conseillers de la République (c'est l'ancien Sénat).

Le 24 novembre 1946,
vote pour les grands électeurs qui éliront les conseillers de la République.


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DÉCEMBRE 1946

 

Le 26 décembre 1946,
est le jour officiel de la naissance de la 4ème République.


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- 1947 -

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JANVIER 1947


Le 2 janvier 1947,
baisse générale de 5% décrétée par Blum sur tous les prix de vente.

Le 16 janvier 1947,
Vincent Auriol est élu de justesse au 1er tour Président de la République.

La guerre sévit en Indo-Chine où les Viet-Namiens nous ont attaqués par surprise mais nous prenons le dessus.

Le 22 janvier 1947,
le ministère Ramadier est formé.


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FÉVRIER 1947


Le 10 février 1947,
à Paris ont été signés les traités de paix avec l'Italie, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie et la Finlande.


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MARS 1947

 

Le 1er mars 1947,
nouvelle baisse de 5%.

Le 4 mars 1947,
à Dunkerque signature d'une alliance Franco-Anglaise.
la vie est toujours difficile. Jean-Marie est presque un grand garçon maintenant.

Le 9 mars 1947,
une dizaine de criminels de guerre allemands, Goering, etc. ; ont été pendus le 16 octobre 1946.

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Je termine ces nombreuses pages. Je ne croyais pas tant en écrire quand j'ai commencé.


.............................................................................................9 mars l947
...............................................................................................CLAUSSE

 

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Annexes

 

 

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Feuille 47 bis

Le 18 décembre 1940,
un mercredi, nous partons Marie-Louise et moi par 10° de froid vers 8h00 pour notre triste voyage à la recherche de notre cher Alexandre. Vers 8h30 nous montons dans l'auto de Monsieur Schoulpkotten directeur allemand de l’usine de Pompey. A notre étonnement, il ne nous conduit qu'à Metz et nous dit que là, nous aurons certainement une voiture pour nous conduire à Cappel. Les trains n'allant toujours pas à Saint-Avold, nous prenons à 13h00 l'autobus pour cette ville où nous arrivons vers 14h30. Puis,

nous partons à pied pour Cappel distant d'environ 14 km où nous arrivons vers 16h45. Nous voyons la première tombe française avant Macheren qui est presque détruit et où le clocher de l'église et comme suspendu dans le vide. Nous traversons Bartz presque détruit, nous voyons le château presque intact. C'est dans sa cave que notre cher Alexandre a passé une bonne partie de la guerre, nous nous promettons d'y repasser le lendemain.

 

De Bartz, nous apercevons Cappel et une casemate très haute sur la crête, c'était celle d'Alexandre.

 

A Cappel, nous entrons chez Monsieur le Curé. A ses premières paroles, je comprends qu'Alexandre est tué, mais il ne nous le dit pas et nous emmène chez le Maire. Là, même mutisme mais le gendre du Maire, ancien du 82ème à la 5ème veut nous accompagner,

casemate d'Alexandre
d'après les photos que nous lui montrons, il a connu Alexandre. Il nous montre sa casemate haut perchée, c'était celle vue de Bartz. Nous escaladons le talus très à pic, nous approchons de la casemate. Nous apercevons deux tombes à côté, il a la gentillesse de nous faire passer derrière pour ne pas voir les noms car il les connaissait, nous observons la casemate presque intacte. Je fais encore la remarque qu'il y a du avoir des survivants et nous avons à nouveau une lueur d'espoir. Notre guide alors nous ramène tout doucement devant les deux tombes et nous dit, c'est là, et à notre grande stupeur, nous lisons sur une, celle de gauche, 82ème R.I. Classe 1932, Clausse Charles. Nancy 604. Une mitrailleuse est sur sa tombe, celle avec laquelle il a tué des Boches peut-être par centaines, sa plaque d'identité est après sa croix, sur la tombe voisine, simplement Soldat Français inconnu. Une immense douleur s'empare de nous, mais nous avons le courage de la surmonter, la pauvre Marie-Louise qui avait confiance jusqu'au bout se montre très courageuse.

Nous visitons ensuite sa casemate, dans l'intérieur c'est un amas énorme d’étuis de cartouches et de bandes de mitrailleuses toutes tirées, nous avons au moins la satisfaction de voir qu'il a vendu chèrement sa vie, mais je ne m'explique pas sa mort. Je l'attribue aux lance-flammes, du reste les gens de Cappel le disaient et les journaux l'avaient assez écrit et montré en image. La casemate avait résisté et il n'avait pu être tué à l’intérieur par obus. Alors comme il y avait 3 bidons sans enveloppes et comme tout était noirci comme par de la fumée et que la porte avait du être fermée de l'intérieur car elle était tordue ainsi que les gonds, il était vraisemblable qu'Alexandre et ses hommes avaient du subir le martyr d'être brûlés vifs.

Nous visitons alors les 2 casemates toutes proches, là, 3 tombes identifiées dont l'Adjudant Gross. Une quatrième casemate se trouvait en contre bas de celle d'Alexandre et semble aussi intacte. L'adjudant Gross devait commander 2 casemates et Alexandre les 2 autres dont la sienne et celle d'en bas.

Je dois dire qu'à la suite d'une erreur sur son livret militaire, notre cher Alexandre s'appelait Charles, Alexandre avait été omis au recrutement, né le 7 septembre 1914 à Pont-à-Mousson. Il s'était engagé à 18 ans au 10ème B.C.P. à Saverne, c'est pour cela qu'il faisait partie de la Classe 1932.

Nous disons adieu à notre cher disparu et rentrons à Cappel pour y passer la nuit. Nous trouvons deux lits de fortune et un bon accueil chez un brave ouvrier, Monsieur Bodo.

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Feuille 47 ter

Vers 21h00, nous avons la satisfaction d'entendre pendant au moins 15 minutes un violent bombardement vers Sarrebruck. La terre tremblait et le ciel était illuminé par les fusées éclairantes des Anglais et l'éclatement des obus de D.C.A.

Alexandre commence à être vengé.

Monsieur le Curé très aimable, nous avait offert à passer la nuit dans sa cuisine si nous n'avions rien trouvé. le reste de la nuit, les avions ont encore passé à plusieurs reprises.

Le lendemain 19 décembre 1940,
nous nous levons de bonne heure. Je vais dans la nuit à la recherche de la tombe de Valentin avec Monsieur Bodo, mais nous ne la trouvons pas. Nous rentrons à la maison. Avec Marie-Louise, nous assistons à une partie de la messe et remontons dire adieu à notre vaillant disparu. Comme souvenir, je prends 8 étuis de cartouches dans les dernières qu'il a tirées, j'en aurais bien pris plus, encore des bandes, mais il y a la douane. Marie-Louise prend un peu de terre sur sa tombe et nous redescendons dire adieu à Monsieur le Curé et à M. et Mme Bodo. Ces braves gens ne veulent rien accepter. Nous donnons 40.00 F pour dire une messe à Cappel le lundi 23 décembre à 8h00, elle sera chantée.
Nous partons en auto pour Saint-Avold vers 9h50, arrêtons quelques instants au château de Bartz où nous trouvons la cave intacte ainsi que le divan d'Alexandre. Nous nous arrêtons encore devant 2 tombes et arrivons à Saint-Avold à 10h20. Nous manquions l'autobus de 5 minutes et il n'y en avait pas avant 14h10. Alors nous partons à pied pensant trouver une occasion pour Metz. Malgré le verglas et la neige, nous marchons bien trois kilomètres et nous avons la chance de monter dans une auto à quatre places avec deux allemands. A midi juste, ils nous arrêtaient devant la gare de Metz où nous prenions le train de 12h11 pour arriver à Pompey vers 14h30.
Quelle consternation générale en nous voyant rentrer, quelle tristesse sur tous les visages à nos récits de sa mort.
Nous avions appris à Cappel que le pauvre corps d'Alexandre et de son voisin étaient seulement là depuis un mois environ. Ils étaient restés dans la tranchée près de la porte de la casemate. Je ne sais s’ils avaient ou non de la terre sur leurs pauvres corps. J'avais présumé que morts dans leur casemate, leurs corps dévalisés par les Boches avaient été jetés dans la tranchée. C'était le lieutenant Robardet que nous avons connu ensuite à Hostes avec des prisonniers Français qui l'a enterré mais sans cercueil à la place où il est maintenant.
Quel douloureux calvaire. Peu après notre arrivée, je vais avec Jean à Custines prévenir la famille Henry.
Le lendemain 20 décembre 1940, je vais à Norroy, Vandières, au Haut de Rieupt prévenir tous les parents. Quel serrement de cœur, en m’entendant raconter cela, Paulette et toute la famille abandonnent le dernier espoir de revoir vivant mon neveu René disparu depuis le l5 mai avec son avion.
Mais alors le 20 dans la matinée, nous apprenons que l'on savait ici que notre cher fils avait été tué le 15 juin devant sa casemate mais personne n’avait osé nous le dire. C'est bien regrettable, notre calvaire n’aurait pas été si douloureux surtout pour Marie-Louise que l'émotion aurait pu faire rester sur la tombe de son bien-aimé.
Il parait que Monsieur Fixe de Maxtadt près de Cappel, soldat et ami d'Alexandre avait été blessé, tandis que lui était tué net. Guériet prisonnier libéré, il avait écrit cela à un ancien du 82ème travaillant aux Réunis à Nancy et qui connaissait aussi Alexandre. Celui-ci l’avait répété à Madame Poirot de Pompey qui à son tour l'avait dit à beaucoup de monde sauf à nous. C'est bien regrettable car étant à Cappel j’aurais été à Maxtadt voir M. Fixe. Je lui ai écrit le 22 en lui disant de nous donner tous les renseignements qu’il pourrait sur la mort héroïque de notre regretté Alexandre.

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Feuille 47 quater

Les 21 et 22 décembre 1940,
Marie-Louise et notre pauvre Jean-Marie qui est si bon et qui est maintenant orphelin restent à Pompey avec nous.

Le 23 décembre 1940,
comme une messe chantée est dite à Cappel à 8h00 à sa mémoire, tous ici nous communions à la messe de 6h45 en souvenir de notre cher disparu, que Dieu a sûrement accueilli près de lui, car il l’a toujours aimé, prié et servi.
Dans l’après-midi, ma chère Marie-Louise et mon cher Jean-Marie repartent à Custines. Une vie bien triste commence pour eux, espérons que Dieu en aura soin et qu'un jour, nous nous retrouverons tous près de lui où Alexandre nous aura préparé la place.
Au cours de notre voyage nous avons encore eu la tristesse de traverser les villages lorrains presque vides soit par suite des expulsions soit à cause des dévastations. On voyait aux environs de Metz les villages intacts, comme désert, presque tous les volets fermés.
On ne voyait que les uniformes abhorrés. A Metz aussi, l'Esplanade ressemblait à un désert et dans les rues presque que de la soldatesque.
Les statues Françaises ont disparu même celle du Maréchal Ney que Guillaume avait respecté et que Hitler a fait détruire. A leur place, il y avait un arbre de Noël.
J'écrivais toutes ses notes pour Alexandre afin qu’il les lise quand il reviendrait victorieux, mais Dieu en a décidé autrement. Enfin, je continuerai tant que dureront les événements actuels. Ce sera pour Jean ou pour ses sœurs ou pour Jean-Marie. Veille de Noël 1940, sans messe à Minuit, que c'est triste.
J'oubliais, pendant qu'à Cappel nous assistions au bombardement de l'Allemagne, ici il y avait aussi alerte. Pour la première fois les Anglais bombardaient la région, plusieurs bombes sont tombées à 21h15 à Frouard notamment à l'usine Munch et sur un bateau ; pas de victimes mais des dégâts.
Par une coïncidence bizarre, le feu avait pris près de chez nous dans un hangar, chez Valli, un peu avant que les bombes ne tombent, aussi la famille a passé une bien mauvaise nuit d'autant plus qu'elle nous attendait car nous avions pensé rentrer de Cappel dans la même journée.
Le quartier des casernes à Nancy avait aussi été bombardé et il y a eu des victimes, toutes allemandes.
A Metz, au passage à midi, nous avions appris cela et nous étions inquiets de rentrer.
Pour la première fois depuis les jours tragiques de mai et juin la famille avait été à l'abri mais ce n'est pas probablement la dernière.
Alexandre sera vengé ! Marie-Louise est venue nous revoir cet après-midi.

....................................................................................................24.12.1940 CLAUSSE

 

Je dois ajouter que le 19 juillet 1940, Monsieur Hoffmann de l'usine de Pompey, lieutenant au 165ème et prisonnier libéré, m'ayant dit que le 15 juin la ligne Maginot avait été enfoncée à Cappel. Depuis j'avais le sombre pressentiment de la mort d'Alexandre car le connaissant, je savais qu'il n'avait pas reculé comme malheureusement presque toute l'armée et un peu après j'ai eu la vision de sa grande croix à peu près à l'endroit où j'ai trouvé sa tombe et j'avais toujours cette croix à l'esprit. Aussi je n'ai pas été si surpris que notre pauvre Marie-Louise.
Alexandre avait dit à sa dernière permission que quoi qu'il arrive, il ne reculerait pas, il a tenu parole. Il est mort en brave.
J'ai revu hier à Custines notre pauvre veuve. Le petit orphelin dormait, je n'ai pas osé le réveiller. Que c'est triste maintenant dans notre famille.

.......................................................................................................7.12.1940 CLAUSSE

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blason de Pompey permettant le retour à l'accueil

 

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