Autour du tramway
Nancy - Pompey
en
1922
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TRIBUNAL CORRECTIONNEL
La veuve Brizevin détective privée
..Mme Renée-Léontine Roy, veuve Brizevin, âgée de 38 ans, voyageuse de commerce à Nancy, 33, rue Sainte-Catherine, a tenté d'escroquer une somme de 220 francs à un négociant de la ville dans des conditions assez originales.
..La veuve Brizevin, après avoir été caissière dans un café où elle a pu s'apercevoir de nombreux négociants, se livre depuis un certains temps à d'autres occupations.
..Un jour, se trouvant, vers 2 heures de l'après-midi, place Carnot, elle aperçut un homme déjà d'un certain âge qu'elle connaissait pour être commerçant dans un faubourg de Nancy ? Il était accompagné par une jeune et sémillante personne et tous deux semblaient attendre le tramway. Avec la sûreté de coup d'œil d'un grand stratège sur le champ de bataille, la veuve Brizevin devina que la jeune personne n'était pas l'épouse du négociant. Elle s'approcha d'eux, elle entendit l'homme qui appelait affectueusement sa compagne « Loulou ». Sa conviction en fut fortifiée. Aussi n'hésita-t-elle pas à prendre place avec eux dans le même tramway.
..Au terminus de Pompey, le négociant et son amie descendirent et se dirigèrent vers la forêt où ils voulaient faire une promenade sentimentale. La veuve Brizevin les suivit à une cinquantaine de mètres de distance. Voyant qu'ils étaient filés, le commerçant et sa compagne hâtèrent le pas et parvinrent à dépister le veuve Brizevin, dont la curiosité leur semblait bien gênante.
..A 6 heures du soir, le négociant rentrait dans ses bureaux. A six heures 30, il fut extrêmement surpris de voir apparaître de nouveau la veuve Brizevin.
..- Vous pouvez vous flatter de m'avoir fait courir. Je suis chargée de vous surveiller, lui déclara-t-elle sans autre préambule.
..Le commerçant en resta abasourdi.
..- Vous m'étonnez … franchement vous m'étonnez … Mais qui peut me faire surveiller ?
..- Votre femme ! pardi ; répliqua la veuve Brizevin.
..Elle expliqua qu'elle faisait partie en qualité de détective, du personnel d'une agence de police privée, sur la demande de l'épouse du négociant, de surveiller sa conduite.
..- J'ai été très surprise, ajouta-telle sévèrement, de vous apercevoir en compagnie de cette jeune personne. Je vous croyais plus sérieux.
..- Me faire surveiller !... Je ne peux pas croire à une chose pareille... répétait le négociant.
..- Enfin, que faut-il dire à mon patron ? questionna la visiteuse.
..- Ne lui parlez de rien ! supplia le négociant.
..- Je ne veux pas vous créer d'histoires, cependant j'aurai travailler pour des « prunes » car cela me fait 150 francs de perdu. Mais méfiez-vous ! Tenez-vous sur vos gardes !
..La jeune détective se retira. Le lendemain elle revint chez le commerçant. Il n'était pas là. Elle lui fit dire de passer chez elle le soir même.
..Flairant un chantage, le négociant préféra se rendre au bureau de police. Il expliqua son cas à M. Imbert. Prévoyant que la veuve Brizevin ferait une nouvelle démarche chez le négociant, le commissaire envoya chez celui-ci, dès le matin, deux agents qui se dissimulèrent dans un escalier, à un endroit où ils pouvaient entendre ce qui se disait dans le bureau.
..Leur attente ne fut pas longue. A neuf heures, la veuve Brizevin entrait.
..- Je viens pour arranger l’affaire, déclara-t-elle.
..- Je le veux bien, répondit le commerçant, mais enfin, que se passe-t-il exactement ?
..-Je suis au service d’une agence de police privée et depuis 8 jours je vous surveille. Je n’ai pas encore rendu compte à personne de ce que je sais. Je veux bien ne rien dire à mon directeur. Mais dans ce cas je serai « bec de gaz », car on ne me paie que les enquêtes qui aboutissent.
..Le commerçant lui demanda combien il devrait verser pour obtenir son silence.
..- Vous me donnerez 200 francs pour moi et 10 francs pour ma fille, répondit la détective, puis elle jura solennellement qu’elle ne dirait jamais rien même à la femme du négociant si elle venait à la rencontrer en ville.
..Le commerçant sortit de son portefeuille 4 billets de 50 francs et un de 20 francs. Il les donna à Mme Brizevin qui les tenait encore en mains lorsque les agents sortant brusquement de leur cachette l’appréhendèrent.
..Conduite au commissariat de police, elle avoua qu’elle n’était nullement détective privée et qu’elle avait pris ce titre pour faire chanter le négociant.
..La veuve Brizevin, qui est vêtue d’un élégant manteau gris clair et qui est coiffée d’un chapeau noir, renouvelle ses aveux devant le tribunal. Elle exprime même quelques regrets en ajoutant aussitôt d’une voix mielleuse.
..- Je ne pensais pas, en agissant ainsi, que cela m’amènerait ici …
..Elle s’était sans doute imaginée que le négociant n’oserait pas se plaindre à la police.
..Elle s’efforce d’apitoyer le tribunal en disant qu’elle est veuve de guerre et qu’elle a trois enfants à sa charge.
..M. le substitut fait connaître que depuis cette affaire, une nouvelle plainte a été déposée contre la prévenue pour abus de confiance, une enquête est ouverte à ce sujet.
..Le tribunal a condamné la veuve Brizevin à 6 mois de prison avec sursis.
[Est Républicain du vendredi 19 mai 1922]
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..Dans la nuit de dimanche à lundi, M. Paul Banzey, demeurant à Pompey, regagnait son domicile par le tramway, après avoir passé la soirée à Nancy. A l'arrêt de Champigneulles, le voyageur, qui était placé sur le marchepied de la motrice, commettait l'imprudence de descendre avant que la voiture fût complètement arrêtée ; il roulait alors sur la voie, et les roues de la balladeuse lui passaient sur une jambe, qui était affreusement broyée.
..La victime de cet accident fut immédiatement conduite à l'hôpital civil de Nancy, où elle subissait l'amputation. Malgré cette opération, elle décédait quelques heures après.
[Est Républicain du mardi 13 juin 1922]
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